14 février 2022

Pécresse et le principe de Peter

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Il n'y a pas un commentateur pour sauver la réputation du meeting de Valérie Pécresse. Pourtant, personne ne prend le temps d'analyser ce qu'a révélé un discours apparemment décousu mais qui en dit en fait beaucoup sur la crise de nos élites politiques. Valérie Pécresse a beau dire sans cesse "ma France", elle est en fait représentative du désarroi de toute une partie de la classe politique qui ne sait plus ce qu'elle défend.

Le commentaire, que nous reproduisons ci-dessus de François de Voyer, l’un des fondateurs de la chaîne YouTube Livre Noir est cruel mais réaliste. Il nous dit que Valérie Pécresse est concernée depuis longtemps par le principe de Peter.  Elle a atteint son niveau d’incompétence.

Je l’ai connue bon et combattif ministre de Nicolas Sarkozy, dans les gouvernements de François Fillon. Elle appliquait avec zèle et souvent inspiration une feuille de route hebdomadaire écrite à l’Elysée et mise en musique à Matignon. Je l’ai observée, en 2010, faire une désastreuse campagne pour la présidence de région en Ile-de-France. Toutes les erreurs qu’elle commet aujourd’hui, candidate à la présidentielle, on les voyait déjà dans la campagne de 2010, pour les élections régionales. Difficulté à assumer la ligne de droite de la présidence Sarkozy, incapacité à maîtriser les grands caciques du parti; et puis, son proche entourage lui faisait déjà donner des cours de théâtre….

En regardant le meeting de ce dimanche 13 février, j’ai d’abord pensé, comme l’excellent René Chiche:  

C’est vrai que cela rend malade, surtout quand on a été son collaborateur pendant un an, comme c’est mon cas (j’eus l’honneur de l’aider à mettre en oeuvre la loi d’autonomie des universités en 2009-2010), de la voir soudain devenue une sorte de Florence Foster-Jenkins du discours politique. 

Ensuite, je l’ai vue, à l’automne 2009, se lancer contre l’avis de son directeur de cabinet – qui pensait que c’était de la dispersion au moment de la mise en oeuvre d’une réforme majeure – dans la campagne des régionales. J’ai vu une femme politique qui savait être très dure, capable de faire des coups pendables dignes des politiciens les plus roués tout en nous jouant le grand air de la femme qui avait deux fois plus d’obstacles à franchir qu’un homme. Au risque d’un cliché, on rappellera avec Héraclite, que “le caractère d’un être humain est son destin”.  

Les déboires de l'hyperindividualisme en politique

C’est tellement symbolique de l’époque: un journaliste demandant au candidat s’il est content de son discours ! Et la réponse est celle d’une candidate qui affectionne l’utilisation du “je”, qui n’a pas cessé de parler de “ma France” dans son discours; et qui clame “je suis sincère” quand justement beaucoup de Français qui ne la connaissent pas la jugent inauthentique. 

Cependant faut-il se fixer sur Valérie Pécresse? N’est-elle pas le symbole d’un mal plus profond chez nos dirigeants politiques?  Par sa façon d’être “à côté de ses pompes” ne révèle-t-elle pas ce qu’un Macron et tant d’autres personnalités arrivent le plus souvent à camoufler: le manque d’incarnation d’une classe politique qui a été déracinée par l’Europe et la mondialisation. 

Un décor aseptisé à la Macron

Regardez dès le début, cette candidate lointaine, seule sur un immense podium aseptisé. On remarque d’abord les trois couleurs du drapeau français arrangées de telle manière qu’on diraient un immense W – curieux pour une candidate qui combat le wokisme.

Et puis on regarde ce pupitre transparent: mais alors pourquoi avoir un pupitre? Il aurait mieux valu dans ce cas que la candidate fût sans pupitre se déplaçant comme l’orateur d’une conférenceTED. Tout d’un coup, on regarde les drapeaux européen et français ensemble et l’on se dit: je suis à l’Elysée, dans le même type de décor aseptisé que les salons refaits sous l’inspiration de Brigitte Macron. D’ailleurs Valérie Pécresse a commencé son discours par “mes chers compatriotes” – comme si elle était déjà présidente. Au lieu de s’adresser à ses amis, à ses compagnons, à sa famille politique. Elle dit en passant qu’elle sera “une présidente gaulliste à l’Elysée” au lieu d’évoquer devant les militants LR la longue épopée d’une force politique qui remonte aux années 1950. 

Des politiques incapables de raconter une histoire, de s’insérer dans l’Histoire de France

Cela mène au deuxième point frappant: nous avons face à nous une personnalité politique incapable de raconter une (belle) histoire.  Elle est arrivée, elle a commencé son discours. On n’a pas très bien compris de quoi elle parlait ni où elle voulait en venir. Et ce n’est pas seulement la voix mal posée, le ton emphatique ni les intonations à contretemps. Elle est comme çà, Valérie Pécresse. Elle est comme Emmanuel Macron: elle arrive là et parle sans s’arrêter, parle d’elle et de tout ce qui lui passe par la tête sans se préoccuper de l’auditoire.  Lui pose mieux sa voix – encore que….rappelons-nous les fins de meeting hystériques de la campagne de 2017

Curieuse, cette façon qu’a Pécresse de commencer à raconter son histoire personnelle à la fin. Elle aurait dû commencer par cela (elle l’avait fait à la Mutualité le 4 décembre 2021). Mais on comprend que ne sentant pas son auditoire (ce dimanche 13 février une salle enthousiaste qui vivait de sa propre vie), elle se rabatte sur elle-même, pour se rassurer.  Ce faisant, elle révèle qu’elle est en fait incapable de raconter une histoire. Elle ne sait pas, à la différence de Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon, Eric Zemmour et, même, Fabien Roussel, faire prendre conscience à ses auditeurs de leur histoire. Elle ne sait pas s’insérer dans l’Histoire de France. Pas plus que Macron ou que Jadot ou qu’Anne Hidalgo. 

Des politiques qui ne connaissent pas la France ni les Français

En fait, d’un bout à l’autre, la candidate a beau nous parler de “sa” France, on s’aperçoit qu’elle ne la connaît pas. Elle prétend “étreindre la France” mais elle fait plutôt penser au Macron du “grand débat” qui monologuait devant des auditoires choisis. Quand elle parle de la jeunesse, elle s’adresse à celle des classes moyennes supérieures. Quand elle parle de culture, d’économie, elle s’adresse à l’électorat LR ou macronien, ne sachant pas élargir sa base. 

Et puis, il y a cette phrase, la seule qui m’aurait mis en colère, si je n’étais pas résigné au naufrage définitif des Républicains: “Nous sommes le vrai convoi des libertés“. Ah non, Madame la Ministre, vous n’allez pas gâcher une fois de plus l’occasion qu’Emmanuel Macron vous offre sur un plateau en ayant fait matraquer, le 12 février,  par des unités de polices suréquipées des Français pacifiques ! 

Je cesse de m’indigner. Les Républicains ont ce qu’ils méritent. A force de mépriser le peuple (Chirac et le cordon sanitaire autour du Front National) ou de penser que ce dernier est tout juste bon à ce qu’on instrumentalise ses peurs (l’entourage de Sarkozy après 2007); à force de ne pas vouloir être une opposition (Laurent Wauquiez pendant la crise des Gilets Jaunes); à force de ne pas avoir d’instinct de survie (torpillage par Nicolas Sarkozy et Alain Juppé de François Fillon en 2017; organisation piteuse du Congrès en 2021),  on récolte ce qu’on mérite.

Marine Le Pen et, encore plus, Eric Zemmour, savent raconter une histoire, créer un lien fort avec un auditoire, parler au peuple de ses soucis. Au second tout de la présidentielle 2022, une vraie droite sera représentée face à Emmanuel Macron. Ce ne sera pas par Valérie Pécresse, qui a laissé passer sa chance. Mais pouvait-elle faire autrement, elle qui est le produit d’une classe politique de plus en plus désincarnée, loin des Français?  

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