27 octobre 2021

La France est dans le sillage d’amis imaginaires et de partenaires peu fiables

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Ces dernières années, la France a rapidement perdu sa souveraineté. Pas à pas, le pays cède à la pression de son principal allié dans le monde occidental : les États-Unis d’Amérique. Le premier signe alarmant de la perte de souveraineté de la France a été la rupture du contrat de vente de deux porte-hélicoptères Mistral à la Russie. En dehors de réelles pertes financières et d’image, cette décision erronée du gouvernement français a montré aux Américains que la France peut être contrainte à des parts défavorables, qu’elle peut être contrainte d’agir à son détriment.

Le refus, sous la pression des États-Unis, de vendre les Mistral à la Russie pour le côté américain était, en somme, qu’une sorte de « reconnaissance en force ». Un précédent a été, ainsi, créé. La rupture du contrat de construction d’une série de sous-marins diesel modernes par la France par l’Australie a frappé comme un coup de tonnerre. Personne ne s’y attendait sous la Ve République.

Paris était censé développer les performances des sous-marins pour l’Australie. Ils répondaient parfaitement aux exigences de Canberra. Les négociations sur ce contrat ont commencé en 2014. L’Australie a mis en avant des exigences pour qu’un tel sous-marin ait une longue portée, et sa centrale électrique était du type classique non nucléaire. Canberra a choisi Paris dans le cadre du contrat. Les navires devaient être construits en Australie même à partir de matériaux locaux et avec la participation de travailleurs du pays.

Lors de la préparation du contrat, un groupe interministériel a été créé en France pour coordonner tous les détails de l’accord avec les Australiens. Les navires répondaient à tous les besoins de la doctrine militaire de l’Australie, exigences techniques et autres. En particulier, le contrat stipulait que des sous-marins feraient leur apparition en Australie d’ici 2030, c’est-à-dire au moment du démantèlement de ses sous-marins existants.

Il est important que les sous-marins français créés sur la base du programme Barracuda, qui sont utilisés pour construire des sous-marins nucléaires de classe Suffren et des sous-marins diesel-électriques de classe Attack, soient beaucoup moins chers que les hypothétiques sous-marins américains, et leurs pièces de rechange soient moins chères sur le marché. Ils sont, ainsi, plus faciles à entretenir et le personnel est plus facile à former.

Les arguments en faveur des sous-marins nucléaires, qui auraient une plus grande portée de navigation autonome, ne fonctionnent pas. Aujourd’hui, les sous-marins diesel à moteurs indépendants de l’air peuvent concurrencer les navires à propulsion nucléaire .

La prochaine génération de sous-marins diesel-électriques, par exemple, les plus récents sous-marins diesel japonais dotés de batteries lithium-ion Soryu, réduira encore plus l’écart avec les sous-marins nucléaires en termes de durée de navigation autonome. À l’avenir, il reviendra moins cher d’avoir en service des sous-marins sans l’emploi du nucléaire, à savoir des sous-marins diesel sur de nouveaux types de batteries.

Le rejet de l’accord avec la France va à l’encontre des intérêts de l’Australie. D’une part, la Chine (devenue l’objet d’une nouvelle alliance militaro-politique) est le plus grand partenaire commercial de l’Australie pour l’exportation et l’importation de marchandises. Malgré la pandémie, les exportations australiennes vers la Chine ont établi de nouveaux records au premier semestre 2021. Les deux pays n’avaient aucune revendication territoriale ou autre l’un envers l’autre. Le rejet des moteurs non nucléaires au profit des sous-marins nucléaires est contraire à la politique à long terme de l’Australie et de la Nouvelle-Zélande de créer une zone dénucléarisée dans la région, allant jusqu’à l’interdiction d’entrée dans les ports de ces pays par des militaires et les navires civils dotés d’installations nucléaires.

Si les Australiens étaient impatients de disposer d’une flotte de sous-marins nucléaires, alors la France, possédant la technologie de création de centrales nucléaires à l’uranium faiblement enrichi (bien en deçà de 20%), installée par exemple sur le porte-avions français Charles de Gaulle, aurait pu offrir un projet beaucoup plus sûr que celui des États-Unis.

De plus, compte tenu de la charge de travail actuelle des chantiers navals américains, les sous-marins promis pourraient arriver en Australie au plus tôt en 2040. C’est-à-dire que le pays risque de se retrouver sans une flotte de sous-marins pendant dix ans. Il est, également, évident que l’Australie n’aura pas le droit de disposer, par elle même, de ses sous-marins nucléaires qui deviendront un élément des forces navales américaines. Ainsi, la seule raison du rejet de l’accord  est la pression sans précédent des États-Unis, couplée au Royaume-Uni qui n’a pas manqué l’occasion de donner un coup de pied à l’Europe après le Brexit.

L’opinion publique et la classe politique en Australie commencent progressivement à comprendre l’ampleur et les conséquences de ce qui s’est passé. Des changements dans la position de Canberra ne sont, donc, pas exclus.

Dans le cas du refus de vendre les Mistral à la Russie, tout comme dans l’échec du contrat australien, il n’y a qu’une seule explication qui vient d’une forte pression du côté américain. La France, par conséquent, a renoncé à sa souveraineté. En effet, les autorités françaises auraient pu trouver une solution de compromis.

L’affaire Alstom est également liée à la perte du contrôle national de la France au profit des États-Unis. Alstom est la plus grande entreprise française, l’un des leaders mondiaux (avec Bombardier) dans l’ingénierie électrique. L’entreprise détient, également, des intérêts dans la fabrication de matériel ferroviaire et de matériel roulant. Il y a plusieurs années, l’entreprise traversait une période difficile en raison du manque de commandes dans le domaine du transport ferroviaire, et le gouvernement a décidé de trouver un investisseur privé.

American General Electric a proposé de racheter une partie de l’entreprise, en prenant l’énergie, mais celui des transports. La France a accepté cette proposition. Les Américains contrôlaient la production de turbines, y compris pour les centrales nucléaires faiblement enrichies précitées. Actuellement, seules la France et la Chine possèdent de telles technologies, alors que le degré d’enrichissement du combustible requis pour l’usine française est de plusieurs fois inférieur à la version chinoise. On peut supposer, dans ces conditions, que les États-Unis ont commencé à préparer le terrain pour rompre le contrat de construction de sous-marins français avec l’Australie.

Aujourd’hui, cependant, General Electric a accumulé des problèmes financiers et envisage de vendre une partie de l’entreprise. La France a, donc, une chance de racheter la participation d’Alstom et de reprendre le contrôle de développements prometteurs.

La puissante pression des États-Unis sur le complexe militaro-industriel français est un grand désastre pour la France. L’intérêt des Américains est que l’Allemagne, et non la France, joue le rôle de chef d’orchestre dans le processus d’intégration de l’industrie militaire de l’UE. La possibilité que la France perde le contrôle des industries de l’aviation et de la construction navale est particulièrement dangereuse.

Le général de Gaulle a, notamment, évoqué longuement la question de l’OTAN. Il a mis en avant l’inadéquation de l’organisation de la défense occidentale avec le nouveau contexte stratégique mondial et avec les ambitions de la France, désormais puissance nucléaire à part entière. Aussi, pour le général de Gaulle, la France qui devenait une puissance atomique indépendante, entendait de reprendre la souveraineté de ses forces militaires, comme elle l’avait fait dans le passé (allusion au retrait des forces navales de Méditerranée de l’organisation militaire intégrée en 1959, de celles de la Manche et de l’Atlantique en 1963), signalant qu’elle elle entendait en poursuivre l’exécution dans l’avenir. Comme les archives de l’INA l’indique, « de fait, dès mars 1966, de Gaulle annonce le retrait des forces françaises de l’organisation militaire intégrée de l’Alliance atlantique et demande l’évacuation des bases de l’OTAN situées sur son territoire ».

Hélas, aujourd’hui, même avec un arsenal nucléaire, la France a perdu sa souveraineté, dans le sillage d’amis imaginaires et de partenaires peu fiables.

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