22 juin 2021

Indemnisation des chômeurs : le Conseil d'Etat suspend la réforme du gouvernement

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Nouveau revers pour le gouvernement. Saisi en référé par la CFDT, la CFE-CGC, la CGT, FO et Solidaires auxquels s'est jointe la Fédération nationale des guides interprètes et conférenciers et l'Unsa, le Conseil d'Etat a suspendu ce mardi une partie de la réforme de l'assurance-chômage portée, cahin-caha, par l'exécutif depuis 2018.

La mesure visée est celle qui concentre les critiques les plus virulentes, à savoir la nouvelle formule de calcul du salaire journalier de référence (SJR), dont est déduite l'allocation mensuelle du demandeur d'emploi. Elle ne s'appliquera pas le 1er juillet, comme le voulait le gouvernement.

« Le gouvernement prend acte »

« Les incertitudes sur la situation économique ne permettent pas de mettre en place, à cette date, ces nouvelles règles censées favoriser la stabilité de l'emploi en rendant moins favorable l'indemnisation du chômage des salariés ayant alterné contrats courts et inactivité », a estimé la juge, Anne Egerszegi, sans remettre en cause le principe de la réforme elle-même. Ce sera l'objet du jugement au fond sur lequel le Conseil d'Etat va maintenant plancher.

Les syndicats n'ont pas boudé leur plaisir. « Gouvernement désavoué », a réagi la CGT, pour qui le « combat continue » pour l'annulation totale de la réforme. Réclamant également un abandon, FO a avancé que « réduire les droits des demandeurs d'emploi, a fortiori ceux, souvent celles, subissant les emplois précaires […] se limite à rechercher des économies sur les demandeurs d'emploi en s'exonérant de lutter contre les contrats courts. » Pour la CFDT, la suspension « sonne comme un désaveu pour une réforme mal calibrée ».

La réforme n'est pas remise en cause, uniquement sa temporalité, a-t-on fait savoir dans l'entourage de la ministre du Travail, Elisabeth Borne. De fait, le Conseil d'Etat a repoussé à ce stade les arguments des syndicats invoquant des risques d'inégalité et de discrimination, concentrant son argumentaire sur la conjoncture encore fragile. Rappelant avoir déjà reporté plusieurs fois l'application de la réforme, l'exécutif met avant les nombreux « signaux positifs » concernant l'activité dans des secteurs qui emploient beaucoup de contrats courts notamment, comme la restauration. Et de promettre de « revenir » vers le Conseil d'Etat avec des réponses à même de « rassurer » sur la reprise et, ainsi, « permettre une application rapide » de la réforme.

Enième épisode du feuilleton

Cet arrêt du Conseil d'Etat constitue le énième épisode d'un feuilleton qui oppose syndicats et patronat au gouvernement depuis 2017 . Entrée en partie en vigueur fin 2019, la réforme a été mise en sommeil avec la crise, pour ressortir en mars sous une forme un peu atténuée et corrigée. Le ministère du Travail a dû revoir une première fois sa copie à la suite d'une première annulation partielle du Conseil d'Etat, saisi par les syndicats, pour qui la nouvelle formule de calcul du SJR était discriminatoire . Puis une seconde fois après s'être aperçu, malgré les alertes de ces mêmes syndicats, que les chômeurs ayant connu des périodes de congé maladie ou maternité ou d'activité partielle étaient pénalisés .

La réforme entend remédier à une situation injuste qui fait que « celui qui travaille à mi-temps touche une allocation de près de la moitié de celui qui travaille un jour sur deux », a martelé la ministre du Travail, Elisabeth Borne. Sans convaincre les syndicats qui n'ont eu de cesse de dénoncer des inégalités de traitement majeures pour ceux qui alternent les contrats courts. Même s'il est resté discret, le patronat - Medef surtout - est vent debout contre l'instauration du bonus-malus sur les contrats courts.

« Nombreuses incertitudes »

Dans son étude d'impact d'avril basée sur les prévisions d'évolution de l'emploi d'alors, très moroses, l'Unédic estimait que 1,15 million de chômeurs subiraient une baisse de leur allocation journalière de 17 % en moyenne par rapport aux règles actuelles durant la première année de la réforme, baisse compensée par une durée d'indemnisation plus longue. Jeudi dernier, l'association paritaire qui gère le régime d'assurance-chômage a totalement revu sa copie, ​tablant sur un très fort rebond des embauches mais cela n'a pas suffi à convaincre le Conseil d'Etat. Une actualisation de l'étude d'impact n'est pas prévue à ce stade.

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