La crise générée par les mesures sanitaires a fait une nouvelle victime : la natalité. Après la dégradation des conditions de vie liée aux mesures sanitaire et l'effondrement économique, c’est au tour de la démographie. Selon l’Insee, le nombre de naissances a chuté de 13% en 2020, et la tendance pourrait perdurer. Le démographe Gilles Pison analyse pour Sputnik les causes de cette diminution.
«Il faut remonter à 1975, la fin du baby-boom, pour observer un phénomène d’une telle ampleur.»
Selon des chiffres révélés par l’Insee, le nombre de naissances enregistrées en France en janvier 2021 a diminué de 13% par rapport à janvier 2020. Une chute «sans commune mesure avec les baisses qui ont pu être observées dans le passé», selon l’institut de statistiques.
Des données qui viennent contredire l’hypothèse d’un baby-boom suite au premier confinement.
«Ils se fondaient sur une augmentation des ventes de tests de grossesse. Elle reflétait en fait une hausse des grossesses non désirées, liée à des difficultés d’accès à la contraception. Ce que l’on constate neuf mois après, c’est que les naissances baissent», détaille pour Sputnik le démographe Gilles Pison.
Alors comment expliquer ce phénomène? Pour M.Pison, également professeur au Museum d'Histoire naturelle et chercheur associé à l'Institut national d'études démographiques (Ined), ce tarissement est indéniablement «lié à la pandémie de Covid-19 et à la crise économique qui accompagne cette crise sanitaire». Une crise qui est «aussi sociale». Un climat anxiogène donc, qui influe sur la volonté d’avoir un enfant.
Cela étant dit, la tendance de fond était déjà à la baisse. En effet, l’indicateur conjoncturel de fécondité (ICF) diminue depuis six ans, pour s’établir à 1,84 enfant par femme en 2020, contre deux entre 2006 et 2014.
Un contexte peu propice à la natalité
«En décembre 2020, le nombre de naissances était déjà en baisse d’au moins 7% par rapport à décembre 2019. Et en novembre 2020, la diminution était de 4% par rapport à novembre 2019», détaille le démographe.
Si cela devait perdurer, faut-il craindre l’éventualité d’un «baby-crash» en France? Pour le chercheur associé à l’Ined, il est difficile de se prononcer. En cause, le manque de visibilité sur une sortie de crise. Néanmoins, il estime qu’en s’appuyant sur les observations du passé, notamment après la Seconde Guerre mondiale, «on peut faire l’hypothèse d’une récupération des naissances, soit totale, soit partielle».
«Une crise est souvent suivie d’une baisse des naissances un ou deux ans après. La montée du chômage, l’incertitude quant à l’avenir, conduisent en effet une partie des couples qui souhaitent avoir un enfant à reporter leur projet à plus tard, mais pas à l’abandonner», expose Gilles Pison.
Un comportement qui n’est d’ailleurs pas une spécificité française. Ainsi, selon un rapport d’experts cités par Franceinfo, en octobre dernier par exemple, 37% des Italiens qui prévoyaient de concevoir un enfant en 2020 ont déclaré avoir reporté ce projet, quand 21% d’entre eux ont tout simplement abandonné l’idée.
Le démographe considère que les pays les plus touchés sont ceux industrialisés. Or, pour les pays comme la France, qui ont des politiques familiales et sociales importantes, «la baisse est en partie amortie et moindre que les pays qui n’ont pas de telles politiques ou pas aussi développées».
«La population augmente en France d’année en année. L’augmentation sera moins importante en 2021 du fait d’une diminution sensible des naissances. Elle était déjà moins importante en 2020 du fait d’une augmentation sensible des décès. Les naissances ayant légèrement baissé: 2% en moins par rapport à 2019», indique le démographe.
En revanche, l’inquiétude pourrait être de mise «s’il y a une nouvelle tendance, là pluriannuelle, avec une fécondité nettement moindre chez les femmes», avance Gilles Pison. À l’image de certains écologistes qui pour «sauver la planète» décident de ne pas faire d’enfant?
«Pour l’instant, on est toujours dans une situation assez constante depuis la fin du baby-boom, où les femmes en France ont deux enfants en moyenne chacune. Cela n’a pas changé depuis 40 ans. Le grand changement, c’est que les femmes ont leurs enfants beaucoup plus tard que les femmes de la génération de leur mère. Il y a un retard des maternités», conclut le chercheur associé à l’Ined.
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