25 décembre 2020

L’hypersonique US et les “erreurs basiques”


Le programme HAWC (Hypersonic Air-Breathing Weapon Concept), premier programme de missile hypersonique de l’USAF qui a constaté il y a deux ans son retard considérable sur la Russie pour des systèmes de cette importance, a été qualifié en mai dernier par le président Trump de « programme super-chouette » et de « missile le plus rapide du monde ». C’était, comme d’habitude avec Trump-le-tweeter, beaucoup, beaucoup dire pour un missile dont une série d’“erreurs humaines basiques” a repoussé à 2021 le premier essai in live, et dont la vitesse de Mach 5 le classe dans la catégorie des ‘plus lents’ parmi les diverses catégories de missiles hypersoniques développées par la Russie, ou déjà en service (pour trois d’entre eux) dans les forces armées de ce pays.

Un texte court d’Ivan Doubrovine, de Spoutnik.News, parle donc d’« erreurs stupides » pour ce qui semble la deuxième tentative d’essai raté, effectuée la semaine dernière. L’expression “erreur stupide” désigne des “erreurs basiques” commises dans la préparation des tests, dans leur manipulation et leur programmation.  

« Le vol d’un missile de croisière hypersonique américain n’a pas eu lieu en raison d’erreurs qu’une source proche de la situation a qualifiées de “stupides”, écrit Air Force Magazine. [...]
» Contrairement au calendrier des essais, ce prototype du programme HAWC ne volera pas cette année, annonce Air Force Magazine (AFM), qui parle de l’échec d’un test la semaine dernière.
» “Il ne s’agit pas d'un problème de conception”, a déclaré une source proche du programme à AFM ; il s’agit “d’une erreur stupide [basique]”.
» D’après le site, l’USAF et la DARPA ont fait décoller un avion de télémétrie et ont préparé une zone d’essai, mais le missile n’a apparemment pas été largué de son B-52.
» La nature exacte du problème n'a pas été divulguée, mais la source laisse entendre qu'il y avait des “erreurs basiques” liées au déroulement mécanique du test.
» Un porte-parole de la DARPA a déclaré que le programme HAWC était classifié secret et que l’agence ne pouvait par conséquent fournir aucune information sur le sujet.
» “Je vous assure que vous en auriez entendu parler s'il y avait quelque chose à célébrer”, a précisé la source à AFM. »

Nous avons consulté le texte du 24 décembre, sur le site de l’Air Force Association (AFA), qui publie Air Force Magazine, et en avons recueilli ces précisions supplémentaires, qui permettent d’avoir une idée plus précise de l’incident, de divers autres incidents du programme, et donc de l’état général du développement des missiles supersoniques de l’USAF, associée à l’US Navy dans certains programmes. La DARPA qui est l’agence de recherche et d’expérimentation des programmes avancés des trois armes, a la charge de cette phase de développement des hypersoniques.

« La DARPA avait annoncé en septembre qu’elle avait terminé les essais de transport captif des deux types de véhicules HAWC et qu'elle en ferait voler au moins un d’ici la fin de l'année. Lockheed Martin et Raytheon Technologies ont tous deux développé des démonstrateurs HAWC, et des sources ont indiqué que le véhicule de Lockheed était celui qui était testé. La tentative ratée de la semaine dernière ne pourra pas être recommencée d'ici la fin de ce mois de décembre de l’année 2020. [...]
» L’USAF devrait tester l'ARRW (Air-Launched Rapid Response Weapon) AGM-183 d’ici la fin du mois, mais il s'agit d'un programme de missiles hypersoniques à vol plané de l'USAF uniquement, qui se déroule séparément du HAWC, a déclaré Will Roper, responsable des acquisitions de l'Air Force lors d'un forum virtuel du Doolittle Leadership Center de l'Air Force Association le 14 décembre. [...]
» Un porte-parole de la DARPA a déclaré que le programme HAWC est classé secret et que l'agence ne peut pas fournir d'informations sur les tests effectués à ce sujet. Une source de l’USAF impliquée dans le programme HAWC nous a déclarés : “Je vous assure que vous en auriez entendu parler s'il y avait quelque chose à fêter”.
» Selon certaines sources, les rapports de presse indiquant qu'un HAWC avait été largué par inadvertance et perdu lors d'un vol de transport captif en mai dernier étaient erronés, mais le missile a apparemment été endommagé lors de ce test, ce qui a retardé de plusieurs mois le programme d’essai de transport captif du missile.
» Les responsables de Raytheon ont déclaré au Salon du Bourget 2019 que leur HAWC pourrait voler d'ici la fin de l'année dernière, mais ces prédictions se sont avérées trop optimistes. »  

Ce qui est dit, avec la précision qu’« il ne s’agit pas d'un problème de conception [mais] d’une erreur stupide [basique], est fait pour nous rassurer (le concept est sain), mais ne nous rassure pas du tout parce qu’elle dénote une mauvaise qualification des personnels chargés de ces expérimentation. Les précisions assez vagues sur l’échec du mois de mai d’un autre test (non pas un largage par erreur comme annoncé par la presse, mais le prototype est “endommagé”, – sans précision sur le ‘comment ?’ et le ‘pourquoi ?’) ne sont pas plus rassurantes car il semble s’agir également d’une “erreur basique” dans les manipulations précédant l’essai qui n’a finalement pas eu lieu. C’est-à-dire qu’il s’agit d’une qualité en net déclin des personnels spécialisés dans cette sorte de tâche, comme d’ailleurs dans tous les domaines des forces armées ; et que ce déclin général touche ces personnels qui doivent être hautement qualifiés, même chez ceux qui sont affectés aux manipulations et aux préparations des tests les plus sensibles, est particulièrement alarmant.

A notre sens, il faut bien séparer les faiblesses technologiques des USA, largement opérationnalisées par le retard pris sur les Russes, qui est réellement catastrophiques : tandis que les USA développent, assez difficilement comme on le voit, leurs premiers programmes hypersoniques, les Russes en ont déjà un nombre substantiel en service et sont désormais en train de développer des systèmes de défense antimissiles hypersoniques. On mesure le décalage, qui est du domaine stratégique fondamental.

Ce n’est pas cet aspect que mettent en évidence les différents incidents et circonstances détaillées, mais un aspect nouveau et très préoccupant. Il s’agit, comme on l’a suggéré plus haut, de la qualité du personnel servant à l’entretien, au développement et au service des systèmes de haute technologie. Jusqu’ici, il s’agissait d’un point fort des forces armées US, même si les systèmes technologiques font face depuis plusieurs années, sinon plusieurs décennies, à des difficultés de fonctionnement nombreuses et grandissantes. Désormais, le point fort du personnel de maintenance technologique et de logistique est engagé dans un processus que nous dirions “de peau de chagrin”. Il y a au moins trois points à considérer, selon notre appréciation.

• La baisse du niveau intellectuel et technique des étudiants dans ces domaines, même de matières technologiques immédiatement opérationnelles, en raison des remous considérables qui agitent les milieux de l’éducation, confrontés à des interférences catastrophiques d’idéologies radicales. (Voir plus loin, le troisième point.) Ces interférences parfois terroristes empiètent et affaiblissent terriblement l’enseignement technique.

• La baisse très rapides des valeurs morales et patriotiques, due au climat crisique intense qui secoue, divise et désagrège les USA. Un énorme scandale de fraude à des examens qui vient d’être révélé à West Point est emblématique de cette “baisse très rapide”, voire de cet effondrement des valeurs traditionnelles qui reflète parfaitement l’effondrement des USA auquel nous assistons. Cet état des lieux dans ce domaine suit le courant catastrophique général.

• Enfin et surtout, il y a, sous la pression du wokenisme, l’effet catastrophique de l’introduction massive de quotas de diversité et de genre dans les forces, impliquant qu’on engage et qu’on sélectionne le personnel d’abord selon des critères communautaristes (de couleur) et de genre absolument prioritaires. Les derniers rapports à cet égard indiquent que la communauté de sécurité nationale est touchée de plein fouet par cette pression idéologique qui n’accorde qu’une place très secondaire aux compétences techniques et d’autorité qui sont le fondement de l’efficacité et de l’éthique militaires. Il s’agit d’une infection qui désintègre littéralement par l’intérieur l’appareil militaire de l’appareil. Nous aurons donc des missiles hypersoniques ‘genrisés’ et ‘racisés’, à défaut d’être efficaces, de voler et d’atteindre leurs cibles. La catastrophe et l’effritement internes sont en marche, et la marche est irrésistible.

Requiem In Pace, ou peut-être, mieux dit malgré notre latin si approximatif, Requiem In Hystera (‘hystera’ plutôt symbolique, quoiqu’avec des rencontres assez originales qui satisferont les féministes, puisque ce mot latin signifie d’abord « la matrice, les entrailles ou l'utérus »).

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