10 août 2020

Pékin contrôle Hollywood


Dans le cadre de la campagne électorale US, – mais aussi en dehors d’elle, pour la situation générale, – la Chine est un acteur nouveau et important aux USA. On sait que la Chine est devenue la bête noire de Trump et du Pentagone (commerce, Covid19, renforcement milita ire, etc.). On mesure cette nouvelle réalité, notamment pour ces élections, dans un communiqué du Directeur du NCSC (National Counterterrorism and Security Council) William Evanina a rendu public vendredi 7 août. Le NCSC y présente une synthèse des principaux dangers d’ingérence et dans quelles directions les rivaux des USA veulent tenter d’orienter les votes, – car, bien entendu et désormais, cette ‘menace’ est partout présente sur la route absolument démocratique de l’innocente & vertueuse Amérique-américaniste.

Trois pays sont principalement concernés et désignés sans le moindre doute ni la moindre preuve comme présentant une telle ‘menace’ d’ingérence manifeste, potentielle sinon déjà faite, dans l’élection présidentielle USA2020 : outre la Russie et l’Iran, il y a la Chine, dragon terrible et ‘menace’ détaillée d’abord, – en premier, dans tous les cas par ordre alphabétique.

« Nous estimons que la Chine préfère que le président Trump, – que Pékin considère comme imprévisible, – ne soit pas réélu. La Chine a étendu ses efforts d’influence avant novembre 2020 pour façonner l'environnement politique aux États-Unis, faire pression sur les personnalités politiques qu’elle considère comme opposées aux intérêts de la Chine, et détourner et contrer les critiques à son égard. Bien que la Chine ait continué à peser les risques et les avantages d'une action agressive, sa rhétorique publique au cours des derniers mois est devenue de plus en plus critique à l’égard de la réponse de l’administration actuelle au COVID-19, de la fermeture du consulat chinois de Houston et des actions entreprises sur d’autres questions. Par exemple, elle a sévèrement critiqué les déclarations et les actions de l’administration concernant Hong Kong, TikTok, le statut juridique de la mer de Chine méridionale et les efforts de la Chine pour dominer le marché 5G. Pékin reconnaît que tous ces efforts pourraient affecter la course à la présidence. »

Cet ensemble d’avertissements offensifs et absolument basés sur ce qu’on pourrait nommer de la ‘spéculation narrativiste’ est désormais un classique avec les USA, et dans les pays du bloc-BAO. Il s’agit de mettre au compte d’adversaires déjà catalogués dans un simulacre de narrative, de montages et de faux-procès aux verdicts déjà posés, soit les faiblesses de ces pays opérateurs-BAO, soit leurs erreurs, soit leurs processus pseudo-démocratiques dont les résultats ne sont pas conformes à la feuille de route du Système. Dans ce cas des USA202, on fait encore plus fort, pour complaire à une vérité-de-situation d’un pays horriblement divisé dans une ‘guerre civile de la communication’, avec tout de même quelques émeutes, menaces et illégalités : quel que soit l’élu, s’il y a bien élection, le mécontentement ou la contestation qui accompagnera son élection, aussi bien que les soupçons divers de fraudes, sont par avance mis au mécompte des adversaires catalogués.

On fait bien entendu plus fort qu’en 2016, où il n’y avait quasiment qu’un seul pays (Russiagate) vraiment désigné comme coupable de complaisance pour le résultat de l’élection, évidemment catastrophique ; cette fois, trois pays sont en lice, et comme ils sont bien répartis (Chine et Iran voulant la défaite de Trump, Russie voulant sa victoire), toutes les options sont verrouillées. Mais ce n’est pas tant cette dimension qui nous intéresse, et nous fait nous attacher au cas chinois, qu’un autre aspect de la situation qui montre bien la puissance de la Chine, en même temps que son antagonisme avec les USA, déjà exacerbé par les querelles commerciales, le Covid19 et les accusations de Trump, enfin le risque de conflit direct entre les deux puissances qui est aujourd’hui une hypothèse largement reconnue.

En même temps que se développe cette agitation, et à la lumière d’un avertissement de Trump lancé à Hollywood et à l’industrie du cinéma pour ce qui concerne l’influence de la Chine sur le cinéma US, on s’instruit d’une situation hollywoodienne particulièrement remarquable. Une enquête de PEN America, une association fondée il y a un siècle pour « l’avancement de la littérature et de la liberté d’expression », est publiée sous forme de rapport détaillant l’attitude de soumission et d’autocensure de l’industrie du cinéma US vis-à-vis de la Chine.

Il y a trois ans et demi, au moment de l’inauguration de Trump, nous avions déjà noté cette convergence Chine-Hollywood, qui se greffait d’ailleurs sur une convergence entre la Chine et la Californie par rapport aux liens difficiles de cet État de l’Union avec le Washington de Trump, et par rapport à sa tendance sécessionniste. Nous analysions alors cet “axe Chine-Hollywood” sur un plan économique, par rapport à des investissements chinois importants dans le cinéma, mais aussi à la lumière d’une sorte d’“alliance objective” contre Trump. Notre méthodologie était celle de la formule extrêmement mobile, extrêmement changeante, du “Système versus antiSystème”. Nous commentions cette situation de cette façon notamment :

« C’est donc avec cette méthodologie à l’esprit qu’on doit aborder cette idée d’un “axe Chine-Hollywood” qui semblerait assez folle, par l’espèce d’antinomie irréfragable qu’elle inspire à l’esprit ; entre la Chine toujours-communiste, perçue comme l’alliée de la Russie et formant ainsi un axe antiaméricaniste, d’une culture semblant complètement étrangère à celle des USA, par conséquent la Chine irrémédiable ennemie des USA et de l’américanisme d’une part ; et d’autre part cette “usine à rêves” productrice de l’hollywoodisme, perçu comme le principal bras armé culturel de masse de l’américanisme, irrémédiablement lié à la culture et à l’hypercapitalisme américaniste. Même si tout cela n’est pas faux en un sens, tout cela est complètement dépassé d’un autre point de vue, complètement bouleversé par la vitesse des événements et, surtout, comme nous le conseillons, observé selon notre méthodologie qui ne prend en compte que l’affrontement Système-vs-antiSystème, avec ia variabilité et la fluidité extrêmes des acteurs évoluant d’un camp à l’autre.
» Nous allons examiner la position actuelle entre ces deux acteurs, pour le temps présent telle qu’elle s’est constituée à une vitesse prodigieuse avec l’élection et l’installation du président Trump. Les deux acteurs considérés, Hollywood et la Chine, ont eux-mêmes été très profondément touchés, et très radicalement, et très rapidement enfin, par l’entrée en piste de Trump. »

Aujourd’hui, la situation a évolué dans le sens d’une mainmise de la Chine beaucoup plus accentuée, et plus que jamais avec cette convergence d’hostilité à Trump partagée par la Chine et Hollywood. En effet, PEN America aborde d’une façon détaillée l’aspect politique de l’opérationnalité de propagande de cette entente, malgré tout placée sur le terrain du profit auquel l’industrie hollywoodienne ne saurait pas résister. La mainmise de la Chine est aussi bien justifiée par ses investissements à Hollywood que par sa situation de premier marché du monde pour l’exploitation des productions cinématographiques. De ce point de vue, Hollywood réagit comme elle l’a déjà fait, en écartant tous les arguments idéologiques.

(Un précédent à cet égard : dans les années 1930, après l’accession de Hitler au pouvoir et le début de la politique antisémite des nazis, Hollywood avait, pour ne pas se couper du marché allemand, montré la plus grande attention à écarter tout film critique du nazisme, – et cela malgré le fait que la quasi-totalité des dirigeants du cinéma, les ‘moguls’ de Hollywood fussent eux-mêmes des juifs. Ce n’est qu’à partir de 1939-1940, quand la politique US devint franchement antiallemande et l’accession au marché allemand de plus en plus difficile, qu’Hollywood partit en guerre contre Hitler.)

Ce qui est remarquable dans le spectacle que nous offre l’enquête de PEN-America, c’est d’observer avec quelle minutie Hollywood s’autocensure pour ne pas déplaire à la Chine, plus précisément au Département de la Propagande du PCC (Parti Communiste Chinois) qui contrôle tous les films projetés sur les écrans chinois. Même l’épisode vis-à-vis de l’Allemagne n’était pas allé assez loin, la situation allemande étant simplement ignorée ; dans le cas chinois, la Chine n’est pas ignorée, elle est plutôt montrée systématiquement d’un point de vue positif, et précisément dans les détails des scénarios.

Cette évolution, assez inédite dans l’attitude idéologique d’Hollywood qui a toujours été présenté comme un outil d’expansion de l’américanisme (on parle d’“hollywoodisme”), pourrait signifier un tournant important et un déplacement considérable des forces d’influence. Les diverses directions américanistes, sauf celles qui sont la cible du progressisme-sociétal comme l’est Trump, ne semblent absolument pas préoccupées par cet aspect des choses. Au contraire, justement, elles sont préoccupées par la gestion et l’opérationnalité des haines internes aux USA. A cet égard la Chine politiquement communiste, ultra-étatiste et très-très-moyennement démocratique, et dans tous les cas opposée à toute déstructuration de sa tradition par les canaux de la communication, est du fait des aléas de la politique extérieure de l’étrange président une alliée puissante de la haine antitrumpiste aux USA ; laquelle rameute aussi bien Hollywood que les GAFA et le parti démocrate avec son Biden-hagard, tout cela d'une pure essence progressiste-sociétale qui aurait bien du mal à se reconnaître dans les “valeurs” et les principes du PCC.

Même si l’on réunit tout ce fourbi sous le chapeau de la globalisation qui est de plus en plus percé depuis Covid19, il n’en reste pas moins qu’il existe une formidable antinomie entre la Chine-PCC et le progressisme-sociétal du parti démocrate qui ne cesse pourtant de faire des clins d’œil à l’intention de Pékin, entre les invectives de Trump. Les Chinois le savent bien, eux qui censurent les films hollywoodiens avec la ferveur tatillonne et médiocres de tous les censeurs du monde. (Même si c’est pour une grande cause, la censure est un acte d’une extrême médiocrité, et portant le plus souvent sur des aspects très médiocres.)

Dans cette situation bancale, les Chinois possèdent tous les atouts, avec l’argent et le marché. Hollywood, qui fut le porte-drapeau de l’intoxication à l’‘américanisation’, ce virus global qui régna pendant un siècle sur nos santés défaites, fait partie d’un système aux abois, – le système de l’américanisme, – et la way of life de l’américanisme, comme l’American Dream ne sont plus des objets de marketing très efficaces.

Au reste l’‘américanisation’ du monde, expression déjà vieille d’un siècle puisque le sujet anima tous les grands polémistes européens à partir de la fin de la Grande Guerre, n’est plus qu’une étiquette de convenance et un virus qui a trouvé son Raoult. Il nous reste ceci : une contre-civilisation dont nous sommes tous comptables, qui est arrivée à son extrême catastrophique avec le néo-libéralisme et la globalisation à la dérive, et dont les USA constituent l’indicateur le plus flamboyant de son effondrement. De ce point de vue l’‘hollywoodisme’, s’il existe encore, est une chose du passé qui ne produit plus rien. Alors, Hollywood va là où il y a du fric et s’autocensure avec une sorte de vertige quasiment érotique, pour plaire à son maître d’outre-Pacifique.

Elie Reynolds, du site TheFederalist.com, analyse le rapport de PEN America dans un texte du 6 août 2020. Nous vous en présentons une version française ci-dessous.
dedefensa.org


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L’autocensure prochinoise de Hollywood

Des producteurs, des scénaristes et des financiers d’Hollywood ont expliqué à PEN America jusqu’où va l’industrie du cinéma pour satisfaire le Parti Communiste Chinois (PCC). PEN America en rend compte dans un rapport révélateur rendu public mercredi (5 août).

“La plupart des gens ici ne se mettent pas la Chine à dos parce qu’il y a l’idée sous-jacente de se dire ‘Si je fais ça, je ne trouverais plus de travail’”, déclare un producteur à PEN America.

“Vous consultez des experts et des consultants en médias chinois, vous réfléchissez à la question de savoir si quelque chose dans votre travail risque d’être perçu comme une critique”, ajoute un autre producteur. “Vous craignez de franchir une ligne rouge par inadvertance.”

Le public chinois est un marché extrêmement lucratif pour les cinéastes américains, la Chine étant en passe de dépasser les Etats-Unis et de devenir le premier marché de l’exploitation cinématographique au monde. Le Hollywood Reporter a noté que les films américains ont réalisé plus de 2,5 $milliards de chiffre en Chine l’année dernière.

Mais la vente de billets de cinéma en Chine a un prix, car le gouvernement chinois a un contrôle total sur les films qui parviennent à leur public. Le Département Central de la Propagande du PCC contrôle la surveillance des médias.

“Le gouvernement chinois impose un système strict d’examen avant d’autoriser l’exploitation d’un film, et se réserve le droit d’interdire l’exploitation de tout film jugé non conforme dans les salles de cinéma du pays, et même sur le streaming en ligne,”, note PEN America dans son rapport.

Il contrôle également la date de sortie d’un film, la durée de sa diffusion et les salles qui le diffusent. Pékin utilise un système de quotas pour réglementer le nombre de films non chinois qui entrent en Chine. Ces réglementations et d’autres dispositions incitent également les studios d'Hollywood à faire des films en coproductions avec des producteurs chinois. C’est financièrement lucratif mais place la production encore plus étroitement sous la supervision du gouvernement communiste.

En outre, la Chine a adopté en 2016 la loi sur la promotion de l'industrie cinématographique, qui interdit les films qui, entre autres, portent atteinte à “la dignité, l’honneur ou les intérêts nationaux”, minent la “stabilité sociale” ou déprécient les “traditions culturelles ethniques exceptionnelles”. C'est le genre de langage que le PCC utilise pour inculper et emprisonner ses citoyens pour discours politique subversif.

PEN America cite d'innombrables exemples de studios d'Hollywood qui ont coupé des scènes susceptibles de déplaire au PCC.

Dans ‘Mission Impossible III’, les censeurs chinois ont fait pression avec succès pour qu’on coupe une scène où l'on pouvait voir une “corde à linge accrochée à la fenêtre d’un appartement de Shanghai, chargé de sous-vêtements en lambeaux”. En 2015, ‘Mission Impossible – Rogue Nation’ a reçu un financement de la China Movie Channel, qui est détenue par le gouvernement chinois.

Dans le film de la série James Bond ‘Casino Royale’, Judy Dench a dû changer une remarque sur “la Guerre froide nous manque”, pour la remplacer par une formulation plus neutre et plus générale, “le bon vieux temps nous manque”. Toutes les scènes normalisant ou encourageant les attirances envers le même sexe sont également systématiquement censurées.

Quentin Tarantino a fait la une des journaux en 2019 pour avoir refusé de modifier le contenu d’un de ses films pour complaire au PCC.

Il ne s'agit pas seulement de la censure des sorties chinoises de films hollywoodiens. La pression de la Chine entraîne aussi souvent la censure des sorties aux USA et dans le monde entier, – celles qui finissent devant les spectateurs américains et les autres publics internationaux.

Sony a coupé une scène d’“extraterrestres faisant tomber la Grande Muraille” dans son film ‘Pixels’ de 2015 par crainte de contrarier les censeurs chinois. Des fuites des courriels échangés entre eux par les dirigeants de Sony ont révélé qu'ils avaient changé la version globale, et pas seulement celle publiée en Chine, pour essayer de dissimuler leur politique de soumission à la censure chinoise. “Si nous changeons seulement la version chinoise, nous nous mettons en position de donner à la presse l’occasion de nous interroger sur la chose, parce que les blogueurs, qui comparent systématiquement les versions, auront diffusé le constat que nous avons changé la scène pour satisfaire aux conditions du marché chinois”, était-il écrit sur l’un d’eux.

D'autres courriels ont fait part de leurs inquiétudes concernant le film ‘Captain Phillips’, qui montre l'armée américaine en train de sauver un homme des pirates somaliens. “La Chine ne ferait jamais la même chose et ne voudrait en aucun cas promouvoir cette idée”, écrit Rory Bruer, président de la distribution mondiale de Sony, en 2013.

Dans ‘RoboCop’, en 2014, Sony a également apporté des changements pour minimiser les liens du gouvernement chinois avec une société américaine dans le film.

Sony a également changé numériquement les soldats chinois en soldats nord-coréens dans le remake de ‘Red Dawn’ en 2012, un film sur des lycéens américains qui se battent contre une armée d'invasion. Le film original de 1984 se déroulait pendant la Guerre froide avec des soldats soviétiques; le remake mettait en scène l’armée chinoise jusqu'à ce que Sony la remplace par celle de la Corée du Nord. Le studio a également abandonné une histoire expliquant que l’armée chinoise envahissait les États-Unis pour avoir failli au paiement de leur dette nationale.

Les Studios Marvel ont même blanchi un personnage de ‘Dr. Strange’ en 2016 pour éviter de reconnaître l’existence du Tibet. Le personnage, joué par Tilda Swinton, est passé du tibétain au celtique. “Si vous émettez l’idée que le Tibet existe en tant qu’entité géographique et éventuellement nationale... vous risquez que le gouvernement chinois vous dise ‘Nous n’allons pas montrer votre film’”, a reconnu l’auteur du film, C. Robert Cargill.

Dans la bande annonce de la suite de ‘Top Gun’, dont la sortie est prévue pour 2021, Paramount a discrètement retiré le drapeau taïwanais du blouson de cuir de pilote porté par le personnage de Tom Cruise.

Un autre film de Paramount, ‘World War Z’, a été modifié pour éviter de mettre la Chine en colère en 2013. Une conversation dans laquelle plusieurs personnages spéculent sur l’origine chinoise d'un virus provoquant l'apocalypse des zombies (un point de l’intrigue tiré du livre sur lequel le film était basé) a été modifiée pour essayer d’obtenir la sortie du film en Chine, laquelle n’a finalement jamais eu lieu. L’auteur du livre a ensuite déclaré, après le début de la pandémie de Covid-19 en Chine, qu’il avait spécifiquement choisi la Chine comme origine de l'épidémie virale fictive “parce qu'il ne suffit pas d'avoir une population importante et un réseau de transport rapide, pour que le virus puisse se propager comme un feu de forêt. Il faut aussi un gouvernement qui soit prêt à réprimer la vérité”.

Lorsque l'actrice Crystal Liu du remake en direct de ‘Mulan’ de Disney a exprimé son soutien à la police chinoise qui emprisonne les manifestants pro-démocratie à Hong Kong, Disney ne l’a jamais réprimandée ni même parlé publiquement de la question.

Parmi les autres sujets qui sont généralement désapprouvés par le PCC figurent les manifestations de la place Tiananmen et de Hong Kong, les questions de la souveraineté territoriale du PCC dans la mer de Chine du Sud et ailleurs, et même les voyages dans le temps. Les histoires sur le surnaturel peuvent également déclencher des inquiétudes et des vetos. Comme le montrent les restrictions sur les voyages dans le temps et les histoires de fantômes, ce ne sont pas seulement les scènes de plusieurs secondes que le PCC désapprouve ; il peut s’agir de genres entiers.

Ce n’est pas seulement la réduction du contenu qui indispose le PCC. Les studios américains ajoutent activement du contenu qui favorise la propagande de l’État chinois, en échange d'un traitement favorable de la part du gouvernement chinois.

“Voici trois exemples parmi tant d'autres” note PEN American : “les films ‘2012’, film-catastrophe de 2009 de Columbia Pictures réalisé par Roland Emmerich, le film de 2013 de Warner Brothers ‘Gravity’ du réalisateur Alfonso Cuarón, et ‘Arrival’, le film d'invasion extraterrestre de 2016 de Paramount, prédisent tous une fin heureuse aux forces chinoises qui viennent à leur secours”. Il est également “communément admis", est-il précisé, “que les futurs méchants du cinéma ne seront pas chinois”.

Dans ‘Iron Man 3’, Marvel a même ajouté une scène spécialement destinée au public chinois pour plaire au PCC, qui montre des médecins chinois essayant “frénétiquement” de sauver la vie du héros. Des “régulateurs” chinois ont également été amenés sur le plateau pour leurs conseils sur le film, ont déclaré des sources de la production au New York Times. Le Times a qualifié cette autocensure de “comportement standard”.

Le film de Paramount sorti en 2014, ‘Transformers : Age of Extinction’, produit conjointement avec les médias d'État chinois, a fait l’objet d’une propagande si évidente qu’une critique de Variety l’a qualifié de “film splendidement patriotique, si vous êtes Chinois”.

Et dans le film de Bruce Willis de 2012 ‘Looper’, après qu’une agence chinoise ait accepté de financer près de la moitié du budget du film, les scènes de Paris ont été déplacées à Shanghai, et une ligne a été ajoutée au script d’un personnage : “ Je viens du futur. Tu devrais aller en Chine”..

Dans le film de requins de Gravity Pictures, ‘The Meg’, Hawaï a été transféré en Chine et les scientifiques qui étaient Japonais dans le livre original sont soudainement devenus chinois.

Et le film d’animation de Dreamworks ‘Abominable’ montre une carte qui prend à son compte les revendications chinoises sur la Mer de Chine du Sud, malgré la jurisprudence internationale qui s’oppose aux revendications territoriales du gouvernement chinois.

“L’essentiel d’un récit dans un film n’est pas ce qui change, mais ce qui est soumis à autorisation ou pas”, explique Michael Berry, directeur du Centre d'études chinoises de l'UCLA.

PEN America a également fait remarquer que la censure s’est souvent imposée d’elle-même, avant même que les autorités chinoises n’aient eu l'occasion d'intervenir. “Si vous proposez un projet qui est activement critique... [vous risquez] que vous et votre entreprise soient mis sur une liste noire impérative ; ainsi, le résultat est bien qu’ils interfèrent même indirectement sur vos projets actuels et futurs”, explique un producteur d'Hollywood à PEN America. “Cette idée est constamment dans la tête”.

Entretemps, l’administration Trump a adopté une position de plus en plus dure à l'égard de la Chine, et a reproché à Hollywood de “se plier” aux ordres du gouvernement communiste du pays.

“C'est vrai”, a déclaré un scénariste d’Hollywood. “Cela affecte non seulement ce que le public chinois voit, mais aussi ce que les Américains regardent.”
 
Elie Floyd

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