Dans les périodes difficiles l’État français a l’habitude d’emprunter beaucoup d’argent. C’est ce qu’il a fait dans des proportions très importantes puisque l’encours de la dette va bientôt atteindre 2.648 Md€ soit 120% du PIB. Historiquement, la conséquence très directe de ce type de séquence est en général « l’euthanasie du rentier ». Pour essayer de se prémunir contre cette éventualité, essayons de voir comment un épargnant peut se protéger.
L’état aura du mal à rembourser en « monnaie de singe »
La monnaie est dévoyée. Elle remplit normalement la fonction de réserve de valeur qui permet de prendre en compte le temps qui se reflète dans le niveau des taux d’intérêts. Avec des taux proches de zéro voire négatifs, cette fonction n’est plus remplie. Cela a permis à de nombreux états en Occident de prendre des mesures budgétaires de 8.000Md$ pour limiter les dégâts de la pandémie. La dette est devenue le reflet de ce monde étrange où l’on crée de l’argent qui n’est la contrepartie d’aucune valeur réelle.
En fait, ce n’est pas la dette qui finance la crise mais la monnaie. Un État contrairement à un particulier n’a pas à rembourser sa dette, il doit juste être capable d’en payer les intérêts…
Le coût de cette politique sera l’instabilité financière et encore plus d’inégalités. Dans le passé, l’inflation permettait de résoudre le problème. L’État remboursait ses dettes aux porteurs de sa dette en « monnaie de singe » comme disait la sagesse populaire. Cette fois ci, cela sera plus compliqué car les banques centrales n’arrivent pas pour le moment à faire remonter l’inflation.
Éviter les obligations de la zone Euro
La théorie moderne du portefeuille de Harry Markowitz ne fonctionne plus. Cette théorie financière enseignée pendant des décennies dans les universités a été développée en 1952 par Harry Markowitz. Elle se traduisait le plus souvent par une allocation de portefeuille 60% en actions et 40% en obligations. Aujourd’hui, la partie obligataire ne peut plus compenser une perte de la partie actions. Acheter des obligations allemandes à 104% pour avoir le plaisir d’être remboursé à 100 ne présente donc pas beaucoup d’intérêt.
Il ne faut pas détenir d’obligations de la zone Euro sauf peut- être des obligations danoises car la couronne présentait la spécificité d’être liée au Deutschemark. En revanche, acheter des obligations chinoises à 10 ans semble plus intéressant et risque de remplacer progressivement dans de nombreux portefeuilles le 10 ans américain…
Beaucoup se prêtent aux facilités du discours antilibéral et souhaitent un retour à encore plus d’État. On est dans la pensée bavarde.
Ceux qui ne l’ont pas fait sont surtout situés en Asie.
Ne pas surpondérer le dollar
Trois zones monétaires vont se répartir la planète : l’Amérique, l’Asie et l’Europe
L’Amérique n’assurera plus la gestion mondiale de la « Pax Americana ». Cela se traduira par une réallocation de ses zones d’influence dans le monde entier. Ce à quoi on assiste en ce moment entre les États Unis et la Chine, c’est avant tout une guerre monétaire
Les américains semblent avoir décidé que le dollar devait baisser, ce qui n’incite pas l’investisseur à surpondérer son portefeuille dans la monnaie américaine
Privilégier les devises asiatiques
L’Asie va devenir la zone d’investissement par excellence. Finalement le grand bénéficiaire du Covid ce sera l’Asie. Les banques centrales des pays de la zone n’ont pas injecté des liquidités aussi massivement qu’en occident. Si les consommateurs et les états sont arrivés à leur limite d’endettement en Europe, ce n’est pas le cas en Asie. Pékin qui comptait sur sa capacité à fournir au reste du monde les instruments de la lutte contre le coronavirus pour se fabriquer une image de bon géant n’y est pas parvenue.
Cela devrait se traduire avec le temps par une réévaluation des monnaies asiatiques
Hong Kong en intervenant très tôt a évité la crise du coronavirus malgré sa densité et la proximité de la Chine continentale. Après la remise au pas par Xi Jinping de nombreux jeunes craignant la perte de leurs libertés ont envie d’émigrer. Si les Hongkongais qui s’exilent sont trop nombreux, au moment où la Chine souhaite clairement que les excédents de ses partenaires commerciaux soient gérés à partir de Hong Kong, il sera plus compliqué de maintenir la place de centre financier de l’ex-colonie britannique.
L’exposition d’un portefeuille à l’Asie devrait se faire avec des actions de sociétés de consommation et non de sociétés de production
Le Japon est le pays le plus résilient. Si l’on exclut les banques de l’indice le marché a performé aussi bien que les indices américains. L’explication se trouve dans le fait que les sociétés japonaises génèrent beaucoup de cash-flow.
L’indice qui reflète le mieux l’évolution de ces valeurs est le Tokyo Stock Exchange Mothers Index
La dépendance de l’Europe par rapport à l’Allemagne s’accroit
La Cour Constitutionnelle de Karlsruhe s’est exprimée en Allemagne. Elle a rendu le 5 mai dernier un arrêt estimant que la BCE avait outrepassé son mandat en adoptant un programme d’achat de titres publics sur les marchés. Elle reproche à la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) d’avoir validé l’injection massive de liquidités de Mario Draghi sur les marchés car elle est susceptible de saboter l’épargne des retraités allemands. Quand la France ou l’Italie rêvent d’une mutualisation des dettes cette décision tombe mal.
On ne joue pas avec la constitution et la souveraineté nationale. Pas de décision possible sans qu’elle soit conforme à la loi fondamentale que le peuple s’est donnée. Ceux qui ne sont pas d’accord défendent une politique sans peuple, sans frontières et sans patrie.
L’Allemagne est loin d’être un pays totalement vertueux comme le montre la déconfiture de son système bancaire, le feuilleton du « dieselgate », l’ouverture aux migrants en 2015 et le scandale de Wirecard cette semaine
Les épargnants seront les victimes de l’endettement «illimité » de la France
En France le surendettement perpétuel enchaîne les générations futures car « le modèle français » est beaucoup plus cher et pas forcément plus performant que ceux de nos voisins européens. La verticalité du pouvoir de Macron aggrave le mal français, car il agit en monomaniaque de l’Etat universel. Avec lui, la France a renoué un peu plus avec l’économie administrée. Bercy est à la manœuvre. Confier la gestion d’un pays à une poignée de gens confinés à Bercy, Matignon et l’Elysée n’est pas une bonne idée. La dernière idée à la mode semble être de repeindre le pays en vert alors que l’on n’a même pas éliminé la crasse bureaucratique. Il n’y aura pas de transition énergétique et écologique sur un champ de ruines. Cela n’empêche pas Thomas Piketty d’assumer que la création monétaire serve à « financer la relance verte et sociale et non à doper les cours de bourse »
Orpheline de géants du numérique, l’Europe compte une dizaine de sociétés de la santé de la technologie et du luxe surnommés « Granolas » (GlaxoSmithKline, Roche, ASML, Nestlé, Novartis, Novo Nordisk, L’Oréal, LVMH, AstraZeneca, SAP, Sanofi). L’évolution de ces actions a été comparable à celle des Gafam (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) depuis le début de l’année…
Jean-Jacques Netter
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