Rabobank : « Il y a quelques mois, n’importe laquelle de ces nouvelles aurait fait la une des journaux et aurait secoué les marchés. La placidité de ceux-ci en dit long sur le succès avec lequel les banques centrales se sont dissociées de la réalité. »
Les marchés boursiers – et le marché des devises des pays émergents (EM FX) – tentent toujours de se rallier à une injection de liquidité épique de la Banque centrale, et au plan sous-jacent, selon lequel, si nous la maintenons jusqu’à la reprise de l’économie, l’injection se justifiera finalement a posteriori. Il y a également eu un coup de pouce du fait que nous rouvrons effectivement l’activité dans de nombreux secteurs.
Ce que nous voyons maintenant, c’est le soulagement lorsqu’on enlève le plâtre autour d’un os cassé. Ah ! Les démangeaisons et la constriction ont disparu ! Fantastique ! Mis à part les encouragements d’un membre du FOMC – le Comité fédéral d’open market – et de quelqu’un qui réclamait publiquement un rendement de 10% sur les obligations à 10 ans aux États-Unis relativement récemment, le problème est que nous n’avons pas remis l’os en question en place avant de mettre le plâtre. Oui, la jambe n’est maintenant plus dans le plâtre, mais pouvez-vous réellement marcher avec comme avant – ou allez-vous tomber à plat ventre ? Et de la même manière que lorsque le plâtre est enlevé, les gants de boxe le sont aussi.
Le centre de Hong Kong est aujourd’hui rempli de policiers – et de manifestants – alors qu’une loi est adoptée pour criminaliser l’insulte à l’hymne national chinois ou l’incendie du drapeau chinois. Il s’agit d’une mise en train avant la loi sur la sécurité nationale qui sera bientôt mise en place par Pékin et qui a été révélée hier : premièrement, interdire aux juges étrangers de siéger dans les affaires liées à la sécurité nationale et, deuxièmement, interdire non seulement les «actes» contre la sécurité nationale, mais aussi les «activités» qui peuvent «sérieusement miner» cette sécurité. C’est un pinceau très large avec lequel peindre dans ce contexte, affirment les critiques.
Pendant ce temps, à Washington DC, nous avons entendu le président américain Trump promettre «une action intéressante» contre la Chine / Hong Kong d’ici la fin de la semaine. Plus important encore, le porte-parole de la Maison Blanche a souligné que Trump envisageait des sanctions contre un éventail de fonctionnaires, d’entreprises et d’institutions financières chinoises : le département du Trésor pourrait imposer des contrôles sur les transactions en USD et / ou geler les avoirs des personnes ciblées. La Maison Blanche ne verrait pas non plus comment Hong Kong pourrait continuer à fonctionner comme un centre financier mondial si la Chine adoptait les lois sur la sécurité nationale, se manifestant ainsi comme une menace. Il examine également un projet de loi sur les sanctions visant les violations présumées des droits de l’homme par la Chine contre la minorité ouïgour ; et le Département d’État vient de publier une déclaration faisant état des droits tibétains. Il s’agit d’une pression américaine tous azimuts.
Les optimistes soulignent que les États-Unis pourraient bluffer : vraiment ? Ou que la Chine peut simplement faire le même genre d’affaires financières ailleurs. Les pessimistes pourraient se demander pourquoi d’autres juridictions ne seront pas soumises aux mêmes sanctions américaines. Même l’Europe. Le même haut diplomate qui, le jour du Memorial Day, a parlé de la fin de la domination américaine en Asie, a haussé les épaules et a noté la réticence de l’UE à prendre parti pour lui ; en effet, l’UE a déclaré hier qu’elle n’envisageait pas ses propres sanctions contre la Chine parce qu’elles ne sont « pas utiles ». Les États-Unis obligeront presque certainement l’Europe à se conformer de toute façon, comme ils l’ont fait, pour l’essentiel, avec les sanctions contre l’Iran.
Mais il y a plus. Le conseiller économique de la Maison-Blanche, Larry Kudlow, a déclaré ouvertement que Trump était tellement «remonté» contre la Chine qu’il pourrait abandonner la phase 1 de l’accord commercial, et que les États-Unis étaient prêts à payer les frais de relocalisation pour les entreprises souhaitant retourner aux États-Unis en quittant la Chine. Nous l’avons déjà entendu, mais cette fois, c’était noir sur blanc sur l’écran rouge, blanc et bleu de Fox News... où l’hôte, Lou Dobbs, a récemment éviscéré le faucon en charge du commerce chinois à la Maison Blanche, Peter Navarro, l’accusant d’être trop mou face à Pékin et demandant qu’il fasse beaucoup plus.
Pendant ce temps, les gants de la Chine sont également retirés – et pas seulement contre les États-Unis.
Le People’s Daily chinois a menacé économiquement le Royaume-Uni s’il décidait d’évincer Huawei de la 5G, ce qui semble inévitable après que les derniers faux pas de Boris Johnson ont enhardi les députés de son parti, qui se sentent plus autonomes. Ce qui rend les négociations commerciales américano-britanniques d’autant plus faciles, on pourrait l’imaginer, au grand dam de l’UE.
Le Global Times, également chinois, a implicitement menacé le Canada, au sujet de la décision critique que doit prendre aujourd’hui le tribunal, de poursuivre ou non la procédure d’extradition de «l’otage» Meng Wanzhou, directrice financière de Huawei et fille de son fondateur. Le Premier ministre, Trudeau, a-t-il la capacité de peser sur les juges ? Malgré les tensions, cela devrait rapprocher le Canada des États-Unis – et faire baisser le dollar canadien ?
Cette semaine, le même journal d’État chinois a déjà déclaré que si l’Australie se range du côté des États-Unis contre la Chine, en géopolitique, les relations économiques entre l’Australie et la Chine seront fortement endommagées. L’Australie ne diversifiera-t-elle pas ses exportations, par exemple vers l’Inde, et ne se rapprochera-t-elle pas encore plus des États-Unis en réponse logique – alors que le dollar australien baisse ?
Le face à face à la frontière indo-chinoise se poursuit, le monde s’y intéressant davantage. Un universitaire indien interrogé sur Al Jazeera à ce sujet hier a déclaré que cela était vu à New Delhi comme un avertissement clair de Pékin de ne pas céder la place aux États-Unis. Ce qui va probablement provoquer la réponse opposée.
Le Vietnam vient de publier des images d’un navire chinois poursuivant, éperonnant et coulant l’un de ses navires de pêche dans la mer de Chine méridionale contestée – par la Chine – cela s’est produit hier. Ce qui rapprochera à nouveau le Vietnam des États-Unis.
Xinhua rapporte que Xi Jinping a ordonné hier à l’APL – Armée populaire de libération – d’«intensifier» la formation et la préparation à la guerre, et d’être prêt pour les pires scénarios. Certes, il a dit la même chose au début de 2019 – mais dans le contexte actuel, il convient de le noter.
Le Financial Times a indiqué que la Chine devrait promouvoir l’utilisation du charbon national en resserrant les règles d’importation, à commencer par les expéditions en provenance d’Australie. Après que les importations de la deuxième économie mondiale ont bondi au cours des quatre premiers mois de l’année, les opérateurs de marchés ont déclaré qu’il était probable que Pékin imposerait des restrictions qui rendraient plus difficile, ou plus coûteux, les services publics côtiers pour apporter du charbon à usage thermique depuis l’étranger.
Il y a quelques années, voire même quelques mois, n’importe laquelle de ces histoires aurait fait la une des journaux et aurait potentiellement secoué le marché. Le fait que nous pouvons voir tous ses événements se produire au cours de la même semaine – à côté des gros titres américains sur le découplage avec la Chine et les sanctions – et que les marchés ne bougent toujours pas en dit long sur le succès avec lequel les banques centrales se sont dissociées de la réalité.
Cependant, nous commençons maintenant à voir le taux de change USD / CNH augmenter. Au moment de la rédaction du présent rapport, il se situait à 7,1720 alors qu’il était aussi bas que 6,8672 le 20 janvier à la suite de « l’accord commercial de la phase un ». Si nous dépassons 7,20, les choses deviennent intéressantes, car nous sommes dans des territoires inexplorées. Sauf qu’ils ne sont pas vraiment inconnus – les graphiques montrent que nous pouvons facilement retourner au niveau 8+ où la monnaie chinoise a été ancrée pendant des années : tout dépend de la politique. Et sur ce front, nous ne sommes pas non plus dans des territoires inexplorées. Nous pouvons tous espérer que ce qui précède n’est que du «bruit». Pourtant, nous avons une bonne expérience pour savoir où ce genre de tendances peut mener si elle n’est pas bien gérée : plus que réparer les os brisés, les marchés essaient de célébrer la «fin de».
Michael Every
Traduit par jj, relu par Marcel pour le Saker Francophone
Les marchés boursiers – et le marché des devises des pays émergents (EM FX) – tentent toujours de se rallier à une injection de liquidité épique de la Banque centrale, et au plan sous-jacent, selon lequel, si nous la maintenons jusqu’à la reprise de l’économie, l’injection se justifiera finalement a posteriori. Il y a également eu un coup de pouce du fait que nous rouvrons effectivement l’activité dans de nombreux secteurs.
Ce que nous voyons maintenant, c’est le soulagement lorsqu’on enlève le plâtre autour d’un os cassé. Ah ! Les démangeaisons et la constriction ont disparu ! Fantastique ! Mis à part les encouragements d’un membre du FOMC – le Comité fédéral d’open market – et de quelqu’un qui réclamait publiquement un rendement de 10% sur les obligations à 10 ans aux États-Unis relativement récemment, le problème est que nous n’avons pas remis l’os en question en place avant de mettre le plâtre. Oui, la jambe n’est maintenant plus dans le plâtre, mais pouvez-vous réellement marcher avec comme avant – ou allez-vous tomber à plat ventre ? Et de la même manière que lorsque le plâtre est enlevé, les gants de boxe le sont aussi.
Le centre de Hong Kong est aujourd’hui rempli de policiers – et de manifestants – alors qu’une loi est adoptée pour criminaliser l’insulte à l’hymne national chinois ou l’incendie du drapeau chinois. Il s’agit d’une mise en train avant la loi sur la sécurité nationale qui sera bientôt mise en place par Pékin et qui a été révélée hier : premièrement, interdire aux juges étrangers de siéger dans les affaires liées à la sécurité nationale et, deuxièmement, interdire non seulement les «actes» contre la sécurité nationale, mais aussi les «activités» qui peuvent «sérieusement miner» cette sécurité. C’est un pinceau très large avec lequel peindre dans ce contexte, affirment les critiques.
Pendant ce temps, à Washington DC, nous avons entendu le président américain Trump promettre «une action intéressante» contre la Chine / Hong Kong d’ici la fin de la semaine. Plus important encore, le porte-parole de la Maison Blanche a souligné que Trump envisageait des sanctions contre un éventail de fonctionnaires, d’entreprises et d’institutions financières chinoises : le département du Trésor pourrait imposer des contrôles sur les transactions en USD et / ou geler les avoirs des personnes ciblées. La Maison Blanche ne verrait pas non plus comment Hong Kong pourrait continuer à fonctionner comme un centre financier mondial si la Chine adoptait les lois sur la sécurité nationale, se manifestant ainsi comme une menace. Il examine également un projet de loi sur les sanctions visant les violations présumées des droits de l’homme par la Chine contre la minorité ouïgour ; et le Département d’État vient de publier une déclaration faisant état des droits tibétains. Il s’agit d’une pression américaine tous azimuts.
Les optimistes soulignent que les États-Unis pourraient bluffer : vraiment ? Ou que la Chine peut simplement faire le même genre d’affaires financières ailleurs. Les pessimistes pourraient se demander pourquoi d’autres juridictions ne seront pas soumises aux mêmes sanctions américaines. Même l’Europe. Le même haut diplomate qui, le jour du Memorial Day, a parlé de la fin de la domination américaine en Asie, a haussé les épaules et a noté la réticence de l’UE à prendre parti pour lui ; en effet, l’UE a déclaré hier qu’elle n’envisageait pas ses propres sanctions contre la Chine parce qu’elles ne sont « pas utiles ». Les États-Unis obligeront presque certainement l’Europe à se conformer de toute façon, comme ils l’ont fait, pour l’essentiel, avec les sanctions contre l’Iran.
Mais il y a plus. Le conseiller économique de la Maison-Blanche, Larry Kudlow, a déclaré ouvertement que Trump était tellement «remonté» contre la Chine qu’il pourrait abandonner la phase 1 de l’accord commercial, et que les États-Unis étaient prêts à payer les frais de relocalisation pour les entreprises souhaitant retourner aux États-Unis en quittant la Chine. Nous l’avons déjà entendu, mais cette fois, c’était noir sur blanc sur l’écran rouge, blanc et bleu de Fox News... où l’hôte, Lou Dobbs, a récemment éviscéré le faucon en charge du commerce chinois à la Maison Blanche, Peter Navarro, l’accusant d’être trop mou face à Pékin et demandant qu’il fasse beaucoup plus.
Pendant ce temps, les gants de la Chine sont également retirés – et pas seulement contre les États-Unis.
Le People’s Daily chinois a menacé économiquement le Royaume-Uni s’il décidait d’évincer Huawei de la 5G, ce qui semble inévitable après que les derniers faux pas de Boris Johnson ont enhardi les députés de son parti, qui se sentent plus autonomes. Ce qui rend les négociations commerciales américano-britanniques d’autant plus faciles, on pourrait l’imaginer, au grand dam de l’UE.
Le Global Times, également chinois, a implicitement menacé le Canada, au sujet de la décision critique que doit prendre aujourd’hui le tribunal, de poursuivre ou non la procédure d’extradition de «l’otage» Meng Wanzhou, directrice financière de Huawei et fille de son fondateur. Le Premier ministre, Trudeau, a-t-il la capacité de peser sur les juges ? Malgré les tensions, cela devrait rapprocher le Canada des États-Unis – et faire baisser le dollar canadien ?
Cette semaine, le même journal d’État chinois a déjà déclaré que si l’Australie se range du côté des États-Unis contre la Chine, en géopolitique, les relations économiques entre l’Australie et la Chine seront fortement endommagées. L’Australie ne diversifiera-t-elle pas ses exportations, par exemple vers l’Inde, et ne se rapprochera-t-elle pas encore plus des États-Unis en réponse logique – alors que le dollar australien baisse ?
Le face à face à la frontière indo-chinoise se poursuit, le monde s’y intéressant davantage. Un universitaire indien interrogé sur Al Jazeera à ce sujet hier a déclaré que cela était vu à New Delhi comme un avertissement clair de Pékin de ne pas céder la place aux États-Unis. Ce qui va probablement provoquer la réponse opposée.
Le Vietnam vient de publier des images d’un navire chinois poursuivant, éperonnant et coulant l’un de ses navires de pêche dans la mer de Chine méridionale contestée – par la Chine – cela s’est produit hier. Ce qui rapprochera à nouveau le Vietnam des États-Unis.
Xinhua rapporte que Xi Jinping a ordonné hier à l’APL – Armée populaire de libération – d’«intensifier» la formation et la préparation à la guerre, et d’être prêt pour les pires scénarios. Certes, il a dit la même chose au début de 2019 – mais dans le contexte actuel, il convient de le noter.
Le Financial Times a indiqué que la Chine devrait promouvoir l’utilisation du charbon national en resserrant les règles d’importation, à commencer par les expéditions en provenance d’Australie. Après que les importations de la deuxième économie mondiale ont bondi au cours des quatre premiers mois de l’année, les opérateurs de marchés ont déclaré qu’il était probable que Pékin imposerait des restrictions qui rendraient plus difficile, ou plus coûteux, les services publics côtiers pour apporter du charbon à usage thermique depuis l’étranger.
Il y a quelques années, voire même quelques mois, n’importe laquelle de ces histoires aurait fait la une des journaux et aurait potentiellement secoué le marché. Le fait que nous pouvons voir tous ses événements se produire au cours de la même semaine – à côté des gros titres américains sur le découplage avec la Chine et les sanctions – et que les marchés ne bougent toujours pas en dit long sur le succès avec lequel les banques centrales se sont dissociées de la réalité.
Cependant, nous commençons maintenant à voir le taux de change USD / CNH augmenter. Au moment de la rédaction du présent rapport, il se situait à 7,1720 alors qu’il était aussi bas que 6,8672 le 20 janvier à la suite de « l’accord commercial de la phase un ». Si nous dépassons 7,20, les choses deviennent intéressantes, car nous sommes dans des territoires inexplorées. Sauf qu’ils ne sont pas vraiment inconnus – les graphiques montrent que nous pouvons facilement retourner au niveau 8+ où la monnaie chinoise a été ancrée pendant des années : tout dépend de la politique. Et sur ce front, nous ne sommes pas non plus dans des territoires inexplorées. Nous pouvons tous espérer que ce qui précède n’est que du «bruit». Pourtant, nous avons une bonne expérience pour savoir où ce genre de tendances peut mener si elle n’est pas bien gérée : plus que réparer les os brisés, les marchés essaient de célébrer la «fin de».
Michael Every
Traduit par jj, relu par Marcel pour le Saker Francophone
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