27 mars 2020

Devenir creux


"L’obstacle majeur qui empêche tout être humain de progresser sur le chemin est simple : lorsque l’on ne comprend pas ce que l’on sent, ce que l’on voit, ce que l’on entend, on l’interprète mentalement selon une pensée qui est comparative et qui généralise."

- Luis Anza
 
Nous vivons dans un monde d’énergies, mais nous oublions que ces énergies sont neutres. On appelle «négatif» , ce qui est en dysharmonie par rapport à une situation donnée, mais l’énergie en soi n’est pas négative. Le négatif n’existe que par rapport à l’être humain; le négatif par rapport au cosmos, cela n’existe pas.
Lorsque l’énergie qui vient de l’univers entre dans l’atmosphère terrestre et humaine, elle se divise en deux forces que nous appelons, nous, le bien et le mal. Mais l’énergie du bien et du mal viennent d’une même et unique force qui s’est divisée en deux formes. Du point de vue de l’équilibre psychique et émotionnel du corps humain, on peut dire qu’il y a des choses qui sont positives et d’autres qui sont négatives mais l’énergie est une.

C’est en fait la mauvaise gestion des énergies dans notre vie quotidienne qui nous asservit. Et cette mauvaise gestion résulte d’une cause essentielle: l’être humain est trop pressé, trop tendu vers un but : réussir ! Et pour réussir, il est guidé par une seule force, toujours la même, une force convexe.
Cette convexité obéit à une loi nécessaire à la nature et qui appartient au domaine de l’ampleur de la vie. Elle a permis à l’être humain de se développer, de conquérir la matière, les espaces, de découvrir le feu, l’architecture, de créer des cités, des avions, tout ce que nous avons. Cette force convexe est une force d’expansion.

Mais du coup, l’être humain mange d’une façon convexe, prie d’une façon convexe, étudie d’une façon convexe. Autrement dit, il vit d’une façon convexe, c’est-­à-­dire d’une façon toujours pénétrante, masculine, et jamais «captante», jamais féminine.
Les religions sont convexes, elles suivent ce principe d’expansion, elles posent des interdits, des dogmes, des récompenses, des châtiments... il faut convertir, il faut convaincre l’autre.

Dans le monde convexe, je suis tout le temps en train de me justifier. Je me justifie vis-à-­vis de moi-­même, vis-­à-vis de l’autre, vis-­à-vis du «qu’en dira-t-on». Comme mes actes obéissent à un désir de succès, je ne peux pas être considéré comme un raté, car dans le monde convexe dans lequel je vis, les ratés sont éliminés. Je suis constamment à l’affût de nouveautés, de sensationnalisme, c’est ce qui attire l’avidité dans laquelle la convexité se répand. Lorsque je suis irrité, susceptible, jaloux, je deviens convexe.

Le mental fonctionne bien sûr de façon convexe. Il faut toujours qu’il comprenne, qu’il pénètre tout ce qu’il touche avec la lumière de la raison, de la logique, de la loi de cause à effet. Une pensée convexe, c’est toujours: «j’espère, j’attends, je veux.»

Le monde de la convexité, dans lequel vous avez des certitudes, des nécessités de succès, de reconnaissance, d’amour-propre, vous amène ainsi vite à la souffrance. Et notre vie devient le mur des lamentations.

Nous ne sommes pas des capteurs, nous sommes uniquement des émetteurs, des émetteurs de nos opinions, de nos caprices, de notre paranoïa obsessionnelle. Et tout cela donne des excuses à un personnage, à un moi qui s’approprie ma vie et la dirige.
L’être humain a été idiotisé, obnubilé par la convexité nécessaire à l’ampleur de l’existence humaine. Ou plutôt il s’est auto-hypnotisé avec cette convexité. Mais le problème c’est que cet être humain, il ne reste pas, il meurt.. Son action, son expression s’est réalisée durant son existence, mais il arrive à la mort en n’ayant jamais utilisé ses capacités concaves.

Vous n’avez qu’un seul leitmotiv: réussir !
Vous voulez réussir sur le plan social, professionnel, personnel, amoureux, économique... mais réussir pour quoi faire, étant donné que vous allez mourir ! Simplement parce que vous voulez recevoir la récompense de vos efforts dans ce plan temporel local.
C’est une vue à court terme, car vous allez partir l’âme vide.

L’aventure de l’être humain est un voyage infini. La vie est avant, pendant, après cette existence. Dans ce voyage, ici, l’être humain a la possibilité, tout en réussissant à manger des haricots verts, à avoir un toit sur la tête et des vêtements pour ne pas avoir froid, de se rappeler qu’un jour il va mourir, et que là où il part, il n’existe ni pluie, ni parapluie ni froid ni chaud; c’est le monde de la cavité. 
Si, à l’heure de la mort, l’âme n’a pas pu accumuler une puissance suffisante en elle-­même, une mémoire expérimentale suffisamment cristallisée, si elle ne peut dépasser une certaine hauteur où la force d’attraction règne, eh bien elle retourne à la poussière; ou alors elle flotte pendant un temps indéterminé à la recherche d’un corps où se loger pour recommencer une nouvelle existence.

Vivre uniquement dans la convexité, c’est mettre toutes ses billes dans le même sac. Chercher à réussir sa vie, c’est bien, mais un jour vous laisserez tout ça, et lorsque vous arriverez de l’autre côté, vous vous rendrez compte que vous êtes rachitique, vide et sans valeur. Vous n’aurez qu’à attendre de vous réincarner une nouvelle fois dans un esprit aussi imbécile que celui que vous venez de quitter et qui répétera les mêmes problématiques.
Jusqu’au jour où vous allez vous demander: «Qui suis-je? Est-­ce que je suis moi ou est-­ce que je suis la mémoire de quelque chose qui a déjà vécu?»

Alors restez collés au corps et allez, hommes et femmes, dans le féminin. 
Devenez des capteurs. 
Les chamans se sont rendus compte que l’être humain contenait deux parties. L’une convexe, masculine, mentale, qui le pousse à tout comprendre. L’autre, concave, cachée, très sensible, qui est capable de capter les choses sans chercher à les comprendre.

La concavité, secret du chamanisme, est un espace vierge dans lequel le mental ne pénètre pas. Parce que le mental dévore, il veut tout savoir, c’est sa nature. Il dévore tout ce qu’il touche parce qu’il est avide.
Cet espace vierge, c’est l’espace de l’âme. La créature, la personnalité n’a rien à y faire parce qu’elle est vaniteuse et bavarde. A mesure qu’elle parle, elle vide l’âme de la mémoire. Et l’âme est l’unique véhicule que vous aurez plus tard.
Aussi, laissez-là se nourrir des impressions que votre créature lui envoie, et ne vous mêlez pas de ses affaires.

Extraits du livre « La voie du sentir» enseignement de Luis Ansa , retranscris par Robert Eymeri.

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