10 janvier 2020

L’Iran lance ses missiles contre deux bases américaines en Irak

La nuit dernière, l’Iran a tiré 22 missiles Qiam sur deux bases américaines situées en Irak. Entre 1:45 et 2:15 heure locale (~22:00 UTC), dix-sept missiles ont frappé la base aérienne d’Ain al Assad à l’ouest de Ramadi. Cinq missiles ont été lancés sur l’aéroport d’Erbil, dans la région kurde du nord de l’Irak. Il n’y a eu aucune victime.

L’ambassade de Suisse à Téhéran, qui représente les États-Unis, a été avertie au moins une heure avant l’attaque. Vers 0h00 UTC, l’Administration fédérale de l’aviation américaine a publié un avis aux aviateurs (NOTAM) interdisant les vols civils américains au-dessus de l’Irak, de l’Iran, du golfe Persique et du golfe d’Oman.

Cette attaque était la réponse « ouverte » et « proportionnelle » à l’assassinat par les États Unis du général de division Qassem Soleimani que le Guide suprême de l’Iran, Ali Khamenei, avait promise. Ce ne sera certainement pas la seule réponse, mais elle représente le coup d’envoi d’une campagne longue et beaucoup plus discrète pour chasser les États-Unis du Moyen-Orient.

Le président américain Donald Trump, qui avait menacé de détruire 52 cibles en Iran, y compris des sites culturels, si l’Iran prenait une quelconque revanche, semble avoir compris que cette attaque était intentionnellement limitée pour éviter une guerre plus importante : Donald J. Trump @realDonaldTrump - 2:45 UTC - Jan 8, 2020 Tout va bien ! Des missiles ont été lancés depuis l'Iran sur deux bases militaires situées en Irak. L'évaluation des pertes et des dommages est en cours. Jusqu'ici, tout va bien ! Nous avons l'armée la plus puissante et la mieux équipée au monde, et de loin ! Je ferai une déclaration demain matin.

Les missiles Qiam lancés par l’Iran sont une variante des Scuds soviétiques. Ils fonctionnent avec un carburant liquide et sont dotés d’une ogive de 700 kg. Ils ont une portée d’environ 800 kilomètres. L’Iran dispose aussi de missiles à propergol solide, plus performants et plus précis, qu’il aurait pu utiliser.

La base aérienne d’Ain al Assad qui a été touchée est l’endroit d’où ont été lancés les drones qui ont tué Soleimani et le leader irakien Abu Mahdi al-Muhandis. L’aéroport d’Erbil est le centre logistique des forces américaines en Syrie.

Des vidéos montrent le lancement et l’impact des missiles.

Aucune défense aérienne ou antimissile américaine contre les projectiles entrants n’a été observée.

Le message de l’Iran est donc le suivant : « Nous pouvons attaquer toutes vos bases et vous ne pouvez rien faire pour empêcher cela. »

Le dirigeant iranien a déclaré que l’attaque était une « gifle » pour les États-Unis et que cette réaction militaire au crime américain ne sera pas la seule : L'Ayatollah Khamenei s'est adressé à la nation en direct à la télévision lors d'une réunion avec un grand groupe de personnes originaires de Qom, en commémoration du 42e anniversaire du soulèvement du 9 janvier 1978 à Qom contre le régime Pahlavi. L'allocution en direct a également eu lieu quelques heures après que le Corps des gardiens de la révolution islamique (IRGC) ait pris pour cible la base aérienne américaine d'Ain al-Assad dans la province d'Anbar, dans l'ouest de l'Irak, dans une vague d'attaques aux premières heures de mercredi, pour riposter à l'assassinat par les États-Unis du commandant de la force de l'IRGC Quds, le lieutenant général Qasem Soleimani. ... "Ce qui est important en plus des représailles, c'est de comprendre que les opérations militaires ne suffisent pas. Il est important de mettre fin à la présence corruptrice des États-Unis dans la région", a souligné le chef d’état-major. "Les Américains insistent pour apporter la corruption et la destruction dans notre cher Iran. Les propositions de s'asseoir à une table de négociations ne sont que préface à une intervention, et ceci doit prendre fin. Les pays de la région n'acceptent pas la présence américaine et ses ingérences permanentes", a-t-il ajouté. "L'inimitié des États-Unis envers l'Iran n'est pas temporaire, elle est intrinsèque. C'est une 'erreur grossière' de penser que si nous prenions un peu de recul et que nous les comprenions, les États-Unis mettraient fin à leur inimitié", a-t-il souligné.

Quelques heures après que l’Iran a lancé les missiles, un avion de ligne ukrainien s’est écrasé trois minutes après avoir décollé de l’aéroport de Téhéran. Les 176 personnes à bord sont mortes. Les passagers étaient pour la plupart originaires d’Iran, du Canada et d’Ukraine. L’avion était un Boeing 737-800 NG de trois ans exploité par l’Ukrainian International Airlines, le transporteur national du pays. Une vidéo montre l’avion de ligne en feu qui s’écrase après une trajectoire en descente. Des photos du site de l’accident montrent des impacts de type shrapnel sur le fuselage. Les preuves sont compatibles avec une rupture non confinée du disque de turbine, mais d’autres causes potentielles ne peuvent être exclues. L’incident sera examiné comme tous les autres crashs d’avions de ligne.

La vengeance militaire iranienne a été moins intense que ce à quoi je m’attendais. Mais c’est aussi un signe clair que l’Iran est capable et désireux d’attaquer ouvertement les bases américaines dans une zone plus vaste. L’attaque au missile a eu lieu malgré les menaces de Donald Trump envers l’Iran. Celles-ci n’étaient que du bluff.

Les réactions futures dépendront de la réaction des États-Unis à la demande du Parlement irakien que toutes les forces étrangères quittent l’Irak. Si les États-Unis quittent l’Irak pacifiquement, tout ira bien. S’ils insistent pour que les soldats américains restent en Irak, ils mourront.
Mise à jour – 17:00 UTC

Des informations supplémentaires ont été fournies pour corriger ou compléter certaines des affirmations ci-dessus.

Les 17 missiles lancés contre la base aérienne d’Ain al Assad étaient du type Qiam-2 qui est une version actualisée du Qiam original avec une ogive guidée et une bien meilleure précision. Les missiles lancés vers l’aéroport d’Erbil étaient des missiles Fateh 313 à propergol solide qui ont une portée de 500 kilomètres et des dispositifs anti-interception supplémentaires.

Les photos des dégâts de la base aérienne d’Ain al-Assad montrent que les tirs étaient bien ciblés et extrêmement précis.


Source : ArmsControlWonkAgrandir


Source : ArmsControlWonkAgrandir

Trump a confirmé qu’il n’y avait pas de victimes américaines. La situation est donc en train de s’améliorer puisque les États-Unis vont rester calmes. Trump a qualifié les dégâts sur la base de « minimes » alors même que plusieurs hangars d’avion/drone ont manifestement été touchés et complètement détruits avec tout ce qu’ils contenaient. L’Iran devait avoir de très bons renseignements sur le site. M. Trump a également fait l’éloge d’un système d’alerte précoce qui, selon lui, a permis d’éviter des pertes de vies humaines. L’ambassade de Suisse à Téhéran va bien rire de ce commentaire.

Des photos de meilleure qualité, prises en plein jour, de l’avion ukrainien écrasé montrent qu’au moins une partie des « trous d’impact de shrapnel » ne sont pas du tout des trous mais des débris ou de la saleté reposant sur les débris de l’avion. D’autres photos ne montrent pas non plus d’indices que l’événement serait d’origine externe.

Les enregistreurs de données de vol de l’avion ont été retrouvés. L’Iran va télécharger les données à partir de ces enregistreurs ou, s’il n’a pas cette capacité, il demandera à un autre pays (France ?, Allemagne ?) de le faire. Un rapport préliminaire sur l’accident sera publié dans un mois.

Moon of Alabama
Traduit par Wayan, relu par Hervé pour le Saker Francophone

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