Le premier est de ne pas confondre le maintien au pouvoir avec le maintien de l’ordre.
Le second est la présence systématique dans tout système de contre-pouvoirs. Il ne s’agit pas ici de dire que tel ou tel est violent, ou que tel ou tel est malhonnête.
Il s’agit de rendre impossible la malhonnêteté ou la violence arbitraire y compris et surtout de la part des Etats vers les citoyens.
Il n’y a là aucune tentation anarchique, mais que du bon sens. Du bons sens qui a d’ailleurs animés nos législateurs pendant des siècles et des décennies. De la répartition des pouvoirs à notre Constitution, partout il s’agit d’équilibrer les choses et d’introduire des contrôles et des garde-fous…
Or les fous ne sont plus gardés et les plus ahurissantes mesures peuvent être proposées ce qui en dit long sur la dérive morale.
En souhaitant interdire de filmer les policiers purement et simplement, le sénateur concerné ne propose pas de protéger les policiers d’outrances ou d’excès. Car dans ce cas il suffit de demander à ce qu’aucune image de policiers rendues publiques ne puissent permettre de les identifier ce que l’on fait par exemple pour les enfants en floutant les visages. La prise de vue est légale. Autorisée. Mais on ne peut pas exploiter comme bon nous semble et cela peut-être une bonne chose ou une chose audible.
Mais ce qui ne peut pas être entendu c’est l’interdiction de filmer la police de manière générale.
Car, et chaque policier le sait, il n’y a pas mieux que la vidéo comme éléments de preuve pour établir des faits de la façon la plus objective possible.
Une police qui ne veut plus être filmée devient une milice chargée des sales besognes d’un pouvoir que l’on maintient par la force.
Et ainsi, nous passons de la lacrymocratie, à la lacrymocrature en attendant la dictature.
Que personne ne s’y trompe.
Interdire de filmer la police c’est l’aveu officiel des abus et des violences policières que l’on ne saurait voir et que l’on veut cacher.
La démocratie ne se négocie pas.
On est pas un peu libre ou un peu prisonnier.
On l’est ou ne l’est pas.
La liberté ne se négocie pas.
Charles SANNAT
Interdiction de filmer les policiers? «On ferait mieux de changer de ministre», selon Langlois
Le sénateur LR Jean-Pierre Grand a déposé un amendement, retoqué depuis, visant à modifier la loi de 1881 sur la liberté de la presse. Une manœuvre qui a notamment pour but d’interdire la diffusion de photos ou vidéos de policiers. Alexandre Langlois, policier et secrétaire général de VIGI est contre. Il nous explique pourquoi.
«Cet amendement proposé par Jean-Pierre Grand est indigne d’une République démocratique, il va à l’encontre des standards mondiaux et européens de la liberté de la presse et de la liberté d’information. Il ne passera jamais mais alarmant et honteux pour la France.»
Le syndicat de journalistes SNJ-CGT a twitté toute son indignation. Le 3 décembre dernier, le sénateur LR (Les Républicains) Jean-Pierre Grand déposait un amendement en commission des lois dans le cadre de la proposition de loi de «lutte contre la haine» sur Internet. Et son contenu sent le souffre.
Dans une volonté, selon lui, de «protéger les policiers», le parlementaire veut sanctionner de 15.000 euros d’amende la diffusion de photos ou de vidéos des forces de l’ordre.
«Lorsqu’elle est réalisée sans l’accord de l’intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, de l’image des fonctionnaires de la police nationale, de militaires ou d’agents des douanes est punie de 15 000 euros d’amende», explique le texte.
Les manifestations hebdomadaires des Gilets jaunes depuis plus d’un an ainsi que l’actuel mouvement social contre la réforme des retraites sont loin d’être étrangers à la volonté de Jean-Pierre Grand comme le souligne son amendement:
«A l’occasion de mouvements sociaux comme celui des gilets jaunes, les forces de l’ordre ont été régulièrement filmées par des manifestants dans le cadre de leur opération de maintien de l’ordre. Ainsi de nombreuses images de policiers ont été diffusées sur les réseaux sociaux, les rendant facilement identifiables et donc potentiellement des cibles avec leur famille (conjoint et enfants).»
De nombreux journalistes professionnels ou citoyens ont crié à la censure. Le cabinet d’avocat Arié Alimi est allé jusqu’à parler de «fin de l’Etat de droit».
Au sein même de la police, le texte a ses détracteurs comme le policier lanceur d’alerte et secrétaire général de VIGI Alexandre Langlois:
«Je pense que c’est bien que l’on soit filmé dans 90% des cas. Cela permet d’éclairer certaines situations et de modérer certains comportements. Nous ne sommes pas policiers et juges à la fois mais bien au service du peuple et il est normal que l’on soit contrôlé. Nous sommes au 21ème siècle et il me semble tout à faire cohérent que l’on soit filmé.»
Le policier craint, qu’en pleine polémique sur les violences policières, un tel amendement jette de l’huile sur le feu:
«Cette loi va raviver les tensions entre pour et contre. Elle va soulever des questions sur les raisons de cette volonté de ne pas être filmé. Cela va donner du grain à moudre à ceux qui disent que la police à des choses à cacher. On va contribuer à continuer de creuser le fossé entre la population et sa police. Ce n’est vraiment pas le moment de balancer un tel texte, qui, en plus, est inutile.»
S’ils sont protégés par le code pénal au regard du respect de leur vie privée, aujourd’hui, rien n’empêche de filmer ou de photographier les policiers comme le rappelle une circulaire diffusée en décembre 2008 par le ministère de l’Intérieur:
«Les policiers ne peuvent donc pas s’opposer à l’enregistrement de leur image lorsqu’ils effectuent une mission. Il est exclu d’interpeller pour cette raison la personne effectuant l’enregistrement, de lui retirer son matériel ou de détruire l’enregistrement ou son support. Ils ne peuvent par ailleurs s’opposer à l’éventuelle diffusion de cet enregistrement que dans certaines circonstances particulières.»
Comme le souligne CheckNews de Libération, «seuls certains agents des forces de l’ordre (les services d’interventions, comme le GIGN ou la BRI, de lutte antiterroriste ou de contre-espionnage) échappent à cette règle, et pour lesquels il est interdit de « publier leur image si celle-ci permet leur identification »».
«Il y a déjà des unités qui méritent d’être protégées et elles le sont, ce qui est tout à fait compréhensible. Concernant le policier lambda c’est différent. Il a choisi d’être au service du peuple sur la voie publique. C’est à l’administration de faire le tri dans le rang des policiers et que ceux qui ont des comportements inadmissibles et contraire au code pénal soient virés plutôt que de les encourager à rester dans la police. Tout permettrait d’avoir une police propre. Encore une fois, c’est à nos dirigeants de la police national jusqu’au ministre Christophe Castaner de faire le nécessaire pour que les fautes soient sanctionnées lourdement au lieu d’être encouragées à se perpétuer», analyse Alexandre Langlois.
Jean-Pierre Grand a peu de chance d’obtenir satisfaction. Comme le note France info, citant la sénatrice EELV Esther Benbassa, son amendement a été retoqué le 11 décembre car la proposition de loi concerne «les plateformes et non les individus». Il a jusqu’au 17 décembre, date à laquelle elle sera discutée, pour revoir sa copie. En attendant, Alexandre Langlois pense avoir la solution:
«Plutôt que de faire cette loi, ce qui serait bien, c’est de changer de ministre.»
Source Agence de presse Sputnik.com ici
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