11 novembre 2019

Taisez vous…méfiez vous…


On peut croire tout ce qu’on nous raconte, après tout c’est confortable, ça évite de faire fonctionner les méninges et aussi de se faire traiter de tous les noms d’oiseau par ceux qui nous bourrent le mou à longueur de temps. Ces derniers, d’ailleurs, ressortissent principalement à deux grandes catégories, les Bien-Pensants, l’élite de l’intelligence internationale, vous savez, en d’autres termes les gens très bien, et puis, seconde catégorie, beaucoup plus crade et fort mal considérée dans les sphères convenables, j’ai nommé les Complotistes. Dans les deux cas, vous avez affaire à des détenteurs de la vérité révélée, réfractaires à quelque contradiction que ce soit sur le terrain de leurs certitudes absolues.
Le Bien-Pensant, c’est celui qui nous dit en substance que toute personne venue du tiers-monde pour se goinfrer à la mamelle de l’Europe nourricière constitue pour celle-ci une opportunité fabuleuse, une chance exceptionnelle à ne laisser passer sous aucun prétexte.
Le Complotiste, lui, observant une situation dont il perçoit clairement l’effrayante absurdité, s’interdit d’en rechercher les causes dans la bêtise crasse de ses contemporains et les errements de toute nature qui en découlent; non, pour satisfaire sa confiance absolue dans l’intelligence humaine il imagine une alliance des Puissants -les vrais bien entendu, ceux que l’on ne voit pas- visant à organiser le chaos à des fins de domination du monde.
Dans les deux cas il faut, évidemment, trouver des preuves de nature à étayer le propos, ce qui conduit les intéressés à recourir allègrement à la baliverne, à la calembredaine, voire, dans les cas extrêmes, à la carabistouille. D’où les développement savants qui vous assurent que l’immigration aurait plutôt diminué en France depuis les années cinquante et que notre pays compte environ cinq millions de musulmans, chiffre rigoureusement invariable au fil des décennies. D’où, également, les thèses, fondées, par exemple, sur les prospérités croissantes de l’ours polaire ainsi que de l’orang-outan d’Indonésie, et concluant au caractère éminemment contestable de la fonte des glaces, voire même, carrément, du réchauffement de la Planète. Dans les deux cas, vous trouvez une ribambelle de preuves, toutes plus pertinentes les unes que les autres et qu’il serait fort mal venu de remettre en cause si peu que ce soit. La tranquillité d’esprit exige, comme je vous le disais, de croire béatement, comme au temps des Curés tout puissants, sans chercher à faire preuve du moindre esprit critique. Et, pour aller jusqu’au bout du raisonnement, si vous voulez vraiment avoir la paix, je vous conseille d’adhérer plutôt aux théories bien-pensantes, les complotistes se révélant d’un rapport qualité-prix beaucoup moins avantageux.

Cela dit, dans l’hypothèse où, pour des raisons qui vous regardent, vous choisiriez malgré tout de penser par vous même, attendez vous à de sérieux mécomptes. La discrétion, pour vous, sera de rigueur. Imaginez donc un instant que vous fassiez part, dans un salon mondain, du fruit de votre analyse économico-politique des États-Unis et profériez à la ronde un truc du genre « Barack Obama c’était un gros con, Trump, lui, au moins il fait bien son boulot de président ». Certes, ce n’est pas faux, sauf que sur un coup pareil vous vous fermez toutes les portes et qu’il vous faudra par la suite transporter votre vie sociale Chez Marcel, le bar-tabac qui fait l’angle des rues Lénine et Henri Krazucki; à moins que vous n’ayez la chance insigne de vous faire admettre DERRIERE NAPOLEON, si jamais Thérèse vous prenait à la bonne. Dans ce dernier cas, il vous serait loisible, alors, d’exprimer des points de vue iconoclastes du genre de celui que vient de porter à notre connaissance, l’ami Yves Rognes, descendu de sa montagne entre deux bourrasques afin de se renouer pour quelques jours avec la modernité urbaine. Voilà ce qu’il dit, Yves Rognes, après avoir sifflé son cinquième Ricard.

-« C’est quand même couillon, pour ces pauvres Espagnols! Les voilà qui s’en retournent aux urnes pour la deuxième fois en six mois et avec même pas la certitude que ce coup là ça marchera! Alors vous savez, nous autres on a un pote, Rodrigo y s’appelle, comme le Cid (mais non, Jeannot, pas de Normandie!), eh bien ce garçon regrette Franco! Incroyable, pas vrai? D’après lui, on a raconté ce qu’on a voulu, bien sûr, mais au temps du Caudillo ça se passait bien, l’ordre au lieu du bordel, la tranquillité au lieu de l’inquiétude, bref la belle époque. D’accord ils étaient assez pauvres, vu que les chouettes démocraties lui coupaient un peu les vivres au sale facho, mais l’un dans l’autre ils s’y faisaient plutôt bien, les Espanches, ils vivaient pépères, quoi, sans souci ni emmerdes. Alors qu’aujourd’hui on trouve la chienlit partout, les Basques qui menacent de foutre des bombes, les Catalans qui veulent faire sécession, les gauchiards qui répandent la merde à l’envi et le camarade Sanchez qui a finalement renoncé à s’asseoir, pour éviter de se retrouver le cul par terre! La démocratie, quoi, autant dire la foire d’empoigne! A la vôtre! »

-« C’est comme ma copine Doriana, intervient Marlène, la femme du peintre, vous savez, celle qui m’avait si aimablement pissé dessus au second chapitre du bouquin précité. Doriana, poursuit-elle, c’est une Roumaine, sympa et tout, mais figurez vous, nostalgique de Ceausescu! Elle raconte que, dans le fond, à choisir entre le Conducator et les saloperies actuelles d’anciens communistes qui ont pris le pouvoir grâce à la démocratie, elle préfère encore le premier! En ce temps là, ils avaient un peu de pognon mais rien à acheter, maintenant, il y a de tout sauf qu’ils n’ont plus un rond pour se le procurer! La frustration en plus, quoi! La corruption bouffe tout et l’incapacité des dirigeants fait le reste. Au moins, avant, ils se marraient bien, ils faisaient de belles parades sur la grand-place, des trucs comme-ça, quoi, ça les occupait agréablement, surtout qu’à ce genre d’occase les Autorités distribuaient de la bouffe, c’était la fête…aujourd’hui ils se cognent la soupe à la grimace avec expatriation à la clé pour les plus courageux, ceux qui essaient de s’en sortir! »

-« Intéressant, tout cela, intervient Blaise Sanzel, parce qu’à l’occasion du trentième anniversaire de la chute du Mur de Berlin, grande opportunité pour les media de nous casser les baloches jusqu’à plus soif avec le catéchisme démocratico-bien-pensant, on a entendu quelques voix dissonantes de vieux Chleus de l’Est, genre au fond c’était pas si mal que ça, avec les cocos, on vivait bien, pépères, sans luxe mais sans chômage! On a du mal à le croire mais c’est un fait, la démocratie et la liberté, au fond, ne correspondent pas tant que cela à nos aspirations profondes. Les braves-gens se trouvent parfois plus heureux sous les régimes autoritaires, ils savent à quoi s’en tenir et font avec! Vous ne pouvez pas savoir la proportion des Allemands et des Italiens de ma génération – maintenant ils sont quasiment tous cannés- qui eussent ardemment souhaité le retour d’Hitler ou de Mussolini! Ils aimaient bien, je vous jure, il y avait du style et du décorum, avec de chouettes spectacles et puis, surtout, de la tranquillité publique… Bon d’accord, je ne vous parle pas des Juifs, ni des pédés, ni des communistes, bien sûr, mais les autres ils s’y retrouvaient, je vous assure, mieux qu’en démocratie bordelifère, je reconnais volontiers que c’est consternant, certes, cependant je vous dis la réalité toute crue! Il veut quoi, au fond, le populo? Ben oui, l’ordre et la certitude des choses, le fait de savoir comment se comporter pour avoir la paix… Vous me direz que ça s’est mal terminé, dans les deux cas mais justement, c’est ça qu’ils nous reprochaient, les anciens dont je vous parle, que nous ayons mis fin à leur belle ordonnance fasciste… Remarquez, je leur expliquais toujours qu’ils n’avaient pas à nous en vouloir, à nous autres Franchouilles, on aurait été tous seuls sur le coup, le Führer et le Duce seraient encore là fidèles aux postes…enfin façon de parler, hein, vous voyez ce que je veux dire… »

-« Eh oui, conclut amèrement Marcel Grauburle, déjà passablement détérioré par une imprégnation alcoolique qu’à l’évidence il supporte de moins en moins bien, nous finalement, on aurait dû garder Pétain! Avec lui, je vous jure, on ferait pas, sur les Boulevards, des grands défilés de salopards qui soutiennent les Frères Musulmans et autres islamistes de mes deux, tiens, je vous en fous mon billet! D’ailleurs la question ne se poserait pas, vu que des Musulmans, avec le Maréchal, y en aurait sans doute en Bougnoulie, en revanche, ici que tchi! A la rigueur un ou deux par ci- par là sur les chantiers, mais ce serait le bout du monde, garanti sur facture! Je ne veux pas dire qu’on a déconné, d’accord…mais tout de même ça pose question, non? »

-« Non, Marcel, je lui réponds aussi sec! Non, surtout pas! Et puis tu sais, ferme ta gueule, tu veux que je finisse en taule, ou quoi? A balancer sur mon blog des horreurs pareilles! M’enfin! »

J’aime autant vous dire que je n’ai pas demandé mon reste! Salut la compagnie et hop, sur le vélo direction ma piaule! Non mais des fois, ils s’imaginent quoi, les mecs? Nous sommes en démocratie, que diable, on ne peut pas tenir ce genre de propos, c’est pénalement réprimé, ça! Non seulement faut pas le dire mais même pas le penser, flûte! La République plaisante avec des quantités de choses, souvent épouvantables, mais pas avec la nostalgie des Heures les Plus Sombres, il y en a des tas qui ont morflé douze balles dans le buffet pour moins que ça… Taisez vous… méfiez vous…

A la semaine prochaine en rasant les murs et amitiés à tous.

Et merde pour qui ne me lira pas.

NOURATIN

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