09 octobre 2019

Lubrizol : taux "relativement élevés" de dioxines dans les pluies


Atmo Normandie présente ce mardi 8 octobre ses derniers résultats d'analyse de l'air, réalisés sur le passage du nuage de fumée de l'usine Lubrizol à Rouen le 26 septembre dernier. Des résultats plutôt rassurants concernant les polluants "classiques", comme le dioxyde d'azote, les particules, le monoxyde de carbone, le dioxyde de souffre ou le sulfure d'hydrogène.

Des taux de dioxines dans l'air presque quatre fois plus élevés que la normale à Préaux

Les analyses menées sur le benzène n'ont également pas fait état d'un taux élevé dans l'air. En revanche, les analyses menées sur les dioxines et furanes sont moins nettes. Les analyses d'Atmo font état d'un taux "relativement élevé" sur le capteur installé à Préaux : Les analyses portent sur les pluies prélevées sous le panache sur la période du jeudi 26 septembre au vendredi 27 septembre. La valeur relevée est de 12,66 picogrammes par mètres carrés, pour une valeur repère régionale médiane de 3,40 : "Ces résultats veulent dire qu'il faut faire des examens complémentaires, mais ils ne permettent pas d'être rassurants, détaille Jean-Grançois Gehanno, professeur au CHU de Rouen, qui a analysé les résultats. Il y a un certain nombre de composés cancérogènes qui ont brûlé, si ça se stocke et que les populations continuent à être exposées, il y a un potentiel risque à long terme."

D'autres analyses, dans les sols, sont attendues

"Stocker" signifiant "rester dans les terres". D'autres analyses doivent être menées et définir le taux de dioxine "dans les sols, les végétaux et la chaîne alimentaire", détaille le professeur. Des analyses qui ne sont pas menées par Atmo.

"Notre échantillon ne permet pas de répondre à la question du danger à long-terme, confirme Véronique Delmas, la directrice d'Atmo Normandie. Il va permettre aux spécialistes de répondre à cette question, mais il va falloir analyser bien plus d'échantillons."

En attendant, aucune consigne particulière n'est donnée aux habitants.


 
Contamination à la dioxine

De nombreux pays surveillent la présence des dioxines dans les denrées alimentaires. C'est ainsi qu'on a détecté rapidement des contaminations et pu souvent éviter des conséquences à grande échelle.

Dans de nombreux cas, la contamination à la dioxine passe par l’alimentation des animaux: il y a eu par exemple des cas d’augmentation des teneurs en dioxine dans le lait ou la nourriture de l’animal dont on a trouvé l’origine dans l’argile, la graisse ou des pellets de pulpes d’agrumes utilisés dans la production d’aliments pour animaux.

Certains cas ont été plus graves et ont eu des conséquences plus importantes dans de nombreux pays.

Fin 2008, l’Irlande a rappelé des tonnes et des tonnes de viande de porc et de produits dérivés, lorsqu’on a détecté des quantités de dioxines jusqu’à 200 fois plus élevées que la limite de sécurité dans des échantillons de porc. Cette découverte a entraîné l’un des plus gros rappel d’aliments en relation avec une contamination chimique. Les évaluations du risque faites en Irlande n’ont pas mis en évidence de problème pour la santé publique. L’origine de cette contamination a été retrouvée dans l’alimentation contaminée des animaux.

En 1999, on a trouvé des concentrations élevées en dioxines dans des volailles et des œufs en Belgique. Par la suite, des produits alimentaires à base d'animaux et contaminés par des dioxines (volailles, œufs, porcs) ont été détectés dans plusieurs pays. L'origine en était des aliments pour animaux contaminés par de l'huile industrielle usagée contenant des PCB et éliminée illégalement.

De grandes quantités de dioxines ont été libérées lors d'un grave accident dans une usine chimique à Seveso (Italie), en 1976. Un nuage toxique, comportant de la tétrachlorodibenzo-2, 3, 7, 8 p-dioxine, ou TCDD, a été libéré dans l'atmosphère et a fini par contaminer une zone de quinze kilomètres carrés avec une population de 37 000 habitants.

Des études approfondies sur la population touchée se poursuivent pour déterminer les effets à long terme de cet accident sur la santé de l'homme.

On a également étudié de manière approfondie les effets sanitaires de la TCDD liés à sa présence en tant que contaminant de certains lots «d'agent orange», herbicide utilisé comme défoliant au cours de la guerre du Viet Nam. Les investigations se poursuivent sur le lien avec certains types de cancers et le diabète.

Bien que tous les pays puissent être touchés, la plupart des cas ont été notifiés dans des pays industrialisés qui ont un meilleur contrôle des contaminations alimentaires, une plus grande connaissance des dangers et de meilleurs dispositifs réglementaires pour détecter les problèmes de dioxines.

Quelques cas d'intoxication humaine délibérée ont également été signalés. Le plus notable est, en 2004, celui de Viktor Iouchtchenko, président de l'Ukraine défiguré par une chloracné.

Effets des dioxines sur la santé de l'homme

Une exposition brève de l'homme à de fortes concentrations en dioxines peut entraîner des lésions dermiques, comme la chloracné (ou acné chlorique), la formation de taches sombres sur la peau et une altération de la fonction hépatique. L'exposition de longue durée s'associe à une dégradation du système immunitaire, du développement du système nerveux, du système endocrinien et des fonctions génésiques.

Chez l'animal, l'exposition chronique aux dioxines a entraîné plusieurs types de cancers. Le Centre international de Recherche sur le Cancer (CIRC), agence de l'OMS, a évalué la TCDD en 1997 et 2012. Sur la base des données épidémiologiques chez l'homme et des informations sur l'animal, le CIRC l'a classée dans les «cancérogènes pour l'homme». En revanche, elle n'altère pas le patrimoine génétique et, en deçà d'un certain niveau d'exposition, le risque cancérogène serait négligeable.

Compte tenu de l'omniprésence des dioxines, tous les êtres humains ont des antécédents d'exposition et une certaine concentration de ces produits dans l'organisme, entraînant ce que l'on appelle une charge corporelle. Actuellement, l'exposition de fond normale ne devrait pas, en moyenne, avoir d'influence sur la santé. Toutefois, en raison de la toxicité potentiellement élevée de cette classe de produits, il faut faire s'efforcer d'abaisser le niveau actuel de l'exposition de fond.

Groupes humains plus sensibles

Le fœtus en développement est le plus sensible à l'exposition à la dioxine. Le nouveau-né, dont les systèmes organiques se développent rapidement, pourrait également être plus vulnérable à certains effets. Certaines personnes ou groupes de personnes peuvent être exposés à de plus fortes concentrations en dioxines à cause de leur régime alimentaire (par exemple, ceux qui consomment beaucoup de poisson dans certaines régions du monde) ou de leur profession (les personnes travaillant dans le papier et la pâte à papier, dans les sites d'incinération ou de traitement des déchets dangereux).

Prévention et lutte contre l'exposition à la dioxine

La meilleure méthode de prévention et de lutte consiste à incinérer correctement les matières contaminées, ce qui peut aussi détruire les huiles usagées contenant des PCB. L'incinération doit se faire à haute température, plus de 850°C. Pour détruire de grandes quantités de matières contaminées, il faut même atteindre des températures plus élevées, au moins 1000°C.

C'est en prenant des mesures à la source que l'on réussit le mieux à éviter ou à diminuer les expositions, c'est-à-dire en contrôlant rigoureusement les processus industriels pour réduire autant que possible la formation de dioxines.

Cela est du ressort des autorités nationales mais, reconnaissant l'importance de cette approche, la Commission du Codex Alimentarius a adopté en 2001 un code d'usages en matière de mesures prises à la source pour réduire la contamination des denrées alimentaires par les substances chimiques (CAC/RCP 49-2001) et, en 2006, un code d'usages pour la prévention et la réduction de la contamination des aliments par les dioxines et les PCB de type dioxine (CAC/RCP 62-2006).

Plus de 90% de l'exposition de l'homme aux dioxines provient de l'alimentation, principalement de la viande, des produits laitiers, des poissons et des crustacés. Il est par conséquent essentiel de protéger l'approvisionnement en denrées alimentaires. L'une des méthodes consiste à prendre des mesures à la source pour réduire les émissions de dioxine. Il faut aussi éviter les contaminations secondaires des denrées dans toute la chaîne alimentaire. Les contrôles et les pratiques de qualité pendant la production, la transformation et la distribution sont essentiels pour produire des denrées sûres.

Des systèmes de surveillance des contaminations des aliments doivent être mis en place pour veiller au respect des niveaux tolérés. Il revient d’une part aux producteurs d’aliments pour animaux et à usage humain de s’assurer de la qualité des matières premières et de la sécurité des processus de production et, d’autre part, aux gouvernements nationaux de surveiller la sécurité sanitaire de l’approvisionnement alimentaire et de prendre des mesures pour protéger la santé publique. 

Que doit faire le consommateur pour réduire son risque d'exposition?

Il pourrait réduire l'exposition aux dioxines en dégraissant la viande et en consommant des produits laitiers allégés en matières grasses. Un régime équilibré (comprenant des quantités suffisantes de fruits, de légumes et de céréales) permettra aussi d'éviter une exposition excessive à une source en particulier. Il s'agit d'une stratégie sur le long terme pour réduire la charge corporelle et elle est probablement plus intéressante pour les jeunes filles et les jeunes femmes afin de diminuer, à un stade ultérieur, l'exposition des enfants pendant la grossesse et l'allaitement. La possibilité qu'ont les consommateurs de réduire leur exposition reste cependant assez limitée.

Que faut-il faire pour détecter et doser les dioxines dans l'environnement et les aliments?

L'analyse chimique quantitative des dioxines fait appel à des techniques complexes que seul un nombre limité de laboratoires dans le monde, pour la plupart dans les pays industrialisés, peuvent mettre en œuvre. Les coûts sont très élevés et varient selon les échantillons. Ils vont de 1700 dollars pour l'analyse d'un échantillon biologique unique à plusieurs milliers de dollars américains pour l'évaluation complète des émissions d'un incinérateur à déchets.

On met de plus en plus au point des techniques de dépistage biologique (reposant sur des cellules ou des anticorps). Leur utilisation pour les denrées alimentaires n'a pas encore été suffisamment validée. Elles permettront néanmoins de faire davantage d'analyses à moindre coût. Les résultats positifs devront être confirmés par des analyses chimiques plus complexes
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Source : https://www.who.int/fr/news-room/fact-sheets/detail/dioxins-and-their-effects-on-human-health

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