18 avril 2019

Économie de guerre : la Russie bâtit une forteresse financière à l’abri des sanctions


En 2015, la Russie avait un ratio dette/PIB de 14% – France 98%, US 74% – et suffisamment de réserves pour couvrir la totalité de sa dette en cash.

Les réserves internationales brutes de la Russie, y compris l’or, continuent de grimper et ont atteint $487,1 milliards le 22 mars, ce qui est suffisant pour couvrir la dette extérieure de la Russie en espèces, dollar pour dollar.

 Dette extérieure russe. En bleu la dette, en rouge les réserves

En février, lors de son discours sur l’état de la nation, le président Vladimir Poutine s’est vanté du fait que pour la première fois, la Russie dispose d’assez d’argent dans ses réserves pour couvrir la totalité de sa dette extérieure en espèces.

À la fin du dernier trimestre de 2018, la dette extérieure de la Russie s’élevait à 453,7 milliards de dollars. La dette a diminué régulièrement au cours des douze derniers mois, le gouvernement tirant parti des avantages exceptionnels de la hausse des prix du pétrole et de la réduction des dépenses pour rembourser plus rapidement la dette.

La Russie avait déjà l’un des niveaux de dette les plus bas de tous les grands pays du monde. Alors que le ratio dette/PIB de la plupart des pays occidentaux dépasse de loin les 60% recommandés par les règles de Maastricht (et certains, comme l’Italie, dépasse largement les 100%), le ratio dette/PIB de la Russie oscille autour de 15% depuis des années. 

Aparté du Saker Francophone - Devinette : Bruxelles tolère un dépassement important du ratio de dette par rapport au PIB mais pas celui du déficit budgétaire, sous peine de sanctions, pourquoi ? Parce que l'un des dépassements favorise les banquiers et l'autre le peuple.


Au début de 2016, la dette extérieure de la Russie s’élevait à 520 milliards de dollars, culminant à 537 milliards de dollars au troisième trimestre de 2017, mais elle a commencé à s’estomper rapidement au début de 2018.

La réduction de la dette fait partie de la stratégie du Kremlin visant à éviter les sanctions financières, car elle s’attend à en subir encore plus cette année.

Les sanctions prévues par la DASKAA – loi sur la défense de la sécurité américaine contre le Kremlin – qui pourrait viser les obligations souveraines de la Russie devraient être examinées par le Congrès américain en avril.

La Banque centrale de Russie (CBR) a également pris des mesures préventives, notamment en réduisant ses avoirs en bons du Trésor américain et, depuis 2007, la Russie augmente activement la part de l’or dans ses réserves.


Une « forteresse financière » a été bâtie, ce qui rend très difficile la pression sur le Kremlin, mais cela a un coût. Avec l’accent mis sur la stabilité plutôt que sur la prospérité, les investissements ont été inférieurs à la normale et l’économie sous-performante. En dépit de l’augmentation des réserves de trésorerie de la Russie, les revenus réels en Russie ont encore une fois légèrement diminué en 2018, pour la cinquième année consécutive. [Ce sont les signes de la mise en place d’une économie de guerre, car guerre il y a, NdT].

Maintenant que l’économie est en grande partie protégée des dangers de nouvelles sanctions, le Kremlin s’attaque au mécontentement croissant de la population en lançant un vaste plan d’investissement dans le domaine social et les infrastructures, censé « transformer » le pays et améliorer les conditions de vie, comme souligné par les Décrets de Mai et les investissements de 25.700 milliards de roubles (390 milliards de dollars) prévus pour les 12 projets nationaux.

Le jury ne sait pas si cela sera suffisant pour que la croissance du PIB atteigne plus de 3% en 2021, ce qui est l’objectif à court terme.

Ben Aris

Traduit par jj, relu par Cat pour le Saker Francophone

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