21 mars 2019

L'Union européenne au bord de la rupture


Au fil de leurs conquêtes électorales, les partis populistes ont irradié l’ensemble du champ politique avec leurs idées eurosceptiques. Au point que le scrutin de mai risque d’ouvrir l’ère de la désunion européenne, commente l’économiste suédois Fredrik Erixon.

Il règne à Bruxelles une curieuse atmosphère d’avant-révolution. Si les élections européennes sont d’ordinaire un événement à l’issue prévisible, cette fois les europhiles (dont votre serviteur) craignent qu’il n’en aille différemment. Au fil des années, nous nous sommes habitués à ce que, de la Suède à l’Italie, les populistes fassent de bons résultats dans les scrutins nationaux. Sauf que, cette fois, les élections européennes 2019 pourraient donner lieu à un véritable raz-de-marée en faveur du Rassemblement national de Marine Le Pen, de la Ligue de Matteo Salvini et d’autres partis populistes nationalistes – or, une telle percée pourrait changer la face (politique) de l’Union européenne [UE].

Il fut un temps où l’on ne se souciait guère de savoir si les européennes étaient remportées par la gauche ou par la droite : le résultat était de toute façon le même. Le Parlement a toujours été, bien plus que la Commission, le gardien de la flamme fédéraliste. En pratique, la seule raison d’être des élections était de confirmer la domination de l’idéologie maîtresse à Bruxelles : celle d’une “union sans cesse plus étroite”. C’est vrai, les européennes servaient de scène à une horde d’agités et d’hérétiques et donnaient lieu de temps à autre à un numéro de cirque politique. Mais, quelle que soit la question, la réponse du Parlement a toujours été la même : “davantage d’Europe”.

Emmanuel Macon, l’insurgé

Il y a deux ans à peine, cette vision des choses était encore dominante. Emmanuel Macron venait de battre Marine Le Pen à la présidentielle en France et promettait d’apporter une bouffée d’air frais en politique. L’Ouest avait atteint son “pic de populisme”. Après le référendum sur le Brexit et l’élection de Donald Trump – deux cuisantes défaites pour l’orthodoxie progressiste –, Macron est passé pour celui qui brisait l’échine de l’envahisseur populiste. Les centristes pouvaient ressortir du bois sans danger. La politique allait reprendre son train-train.

Or, il n’y avait pas une once de normalité dans la victoire de Macron. Macron est un insurgé qui a laminé le centre gauche et le centre droit. En l’espace d’un an après sa victoire, le Parti de la liberté (FPÖ) est revenu au gouvernement en Autriche et Viktor Orbán – la bête noire de Bruxelles – a été réélu en Hongrie, en améliorant encore son score. Milos Zeman, soupçonné par beaucoup d’être une marionnette du Kremlin, signait pour un nouveau mandat à la tête de la République tchèque – après avoir caressé l’idée d’organiser un référendum sur la sortie du pays de l’Union européenne. Sa victoire intervenait quelques mois seulement après que les Tchèques avaient élu le milliardaire et populiste autoproclamé Andrej Babis chef du gouvernement. En Italie, le Mouvement 5 étoiles et la Ligue.

Fredrik Erixon

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