Comme l’indique Kai-Fu Lee dans son livre intitulé AI Superpowers, quatre facteurs principaux contribueraient à faire pencher la balance en faveur de la Chine.
1. Des données abondantes
Le plus grand avantage de la Chine réside possiblement dans l’importante quantité de données dont elle dispose. La plateforme WeChat de Tencent compte à elle seule plus de 889 millions d’utilisateurs actifs par jour. C’est plus que l’ensemble de la population européenne. Les achats effectués en ligne sont près de deux fois plus importants en Chine qu’aux États-Unis. Mais l’avantage de la Chine en matière de données ne se limite pas à la quantité.
Alors que la Chine assiste à une explosion du nombre de startups O2O (online-to-offline), leurs données créent une nouvelle couche de renseignement sans équivalent en Occident. Alors que les données de paiement et de transport des utilisateurs américains sont fragmentées sur différentes plateformes, les géants chinois de l’intelligence artificielle comme Tencent créent des écosystèmes en ligne unifiés qui concentrent l’ensemble des données de chaque utilisateur en un seul endroit. Cela leur permet de générer des cartes complexes répertoriant des centaines de millions de comportements d’utilisateurs.
Avec la montée en puissance inégalée du vélo en libre-service comme l’Ofo et le Mobike en Chine, les entreprises chinoises peuvent désormais exploiter des cartes profondément texturées sur les déplacements de chacun, leur permettant d’en savoir long sur leurs habitudes d’allées et venues, tant pour le travail que pour le supermarché. Avec l’explosion des capacités de la reconnaissance faciale en Chine, ces cartes comportent de plus en plus de visages, même lorsque l’utilisateur n’est pas en ligne. En faisant correspondre le comportement des utilisateurs en ligne à leur monde physique, les entreprises chinoises de technologie bénéficient de données qui leur offrent un avantage considérable sur leurs homologues de la Silicon Valley.
2. Des entrepreneurs affamés
Andrew Ng, fondateur et ancien directeur de Google Brain, a noté l’engouement acharné des entrepreneurs chinois : « Le travail est effectué beaucoup plus rapidement en Chine que dans la majeure partie de la Silicon Valley. Quand vous repérez une opportunité d’affaires en Chine, le temps dont vous disposez pour la saisir est très court ».
Avec l’explosion de l’expertise chinoise en intelligence artificielle, ces entrepreneurs se débarrassent enfin de leur ancienne réputation d’« imitateurs », et créent des entreprises sans équivalent en Occident. La Chine, qui abrite aujourd’hui trois des sept géants de l’intelligence artificielle (Baidu, Alibaba et Tencent), est également le théâtre d’un écosystème florissant de startups en intelligence artificielle.
Pas plus tard que cette année, la société chinoise SenseTime, spécialisée en vision artificielle, est devenue la startup la plus lucrative au monde dans le domaine de l’intelligence artificielle. Ayant développé des technologies capables d’identifier votre visage, d’estimer votre âge et même de découvrir vos habitudes d’achat, SenseTime est maintenant un leader mondial dans les technologies de reconnaissance faciale. La société a levé 620 millions de dollars dans le cadre de sa ronde de financement Série C+ annoncée en mai dernier, pour une valeur de plus de 4,5 milliards de dollars. Et SenseTime n’est pas la seule de sa catégorie. En avril dernier, la Chine comptait 168 licornes, évaluées collectivement à plus de 628 milliards de dollars.
3. Une grande expertise en intelligence artificielle
Il est important de noter que la Chine n’est qu’une nouvelle venue dans ce secteur. Quand l’apprentissage profond (deep learning) a connu sa grande percée en 2012, la Chine venait à peine de prendre part à la révolution de l’intelligence artificielle. Mais en quelques années à peine, la communauté chinoise de l’intelligence artificielle a rapidement rattrapé son retard. La majorité des chercheurs en intelligence artificielle les plus réputés au monde se trouvent toujours aux États-Unis (au profit d’entreprises comme Google), mais les géants chinois de la technologie sont rapidement en train de combler l’écart. Déjà dans le monde universitaire, les chercheurs chinois de l’intelligence artificielle sont côte à côte avec leurs contemporains américains. Au cours de la conférence 2017 de l’AAAI, un nombre égal d’articles acceptés provenaient de chercheurs américains et chinois.
Nous avons également constaté une collaboration accrue entre les plus grandes entreprises de technologie chinoises et les étudiants de talent émergents. Tencent, par exemple, parraine des bourses d’études pour des étudiants d’un laboratoire de l’Université des sciences et de la technologie de Hong Kong, leur donnant ainsi accès à une masse de données WeChat. De leurs côtés, Baidu, Didi et Tencent ont tous mis sur pied leurs propres laboratoires de recherche. La société chinoise Face++ est désormais le leader mondial de l’intelligence artificielle en reconnaissance de visages et d’images, devançant les meilleures équipes de Google, Microsoft et Facebook lors du concours de reconnaissance d’images COCO 2017. La société de logiciels de reconnaissance vocale iFlyTek n’a pas seulement supplanté DeepMind d’Alphabet, Facebook et Watson d’IBM dans le traitement du langage naturel, elle l’a fait dans sa « langue seconde », l’anglais. Cette entreprise, la plus importante au monde dans le traitement du langage, a développé une technologie de pointe qui devrait un jour permettre la traduction instantanée de la parole dans n’importe quelle langue.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.