Croissance et consommation des ménages en berne, stagnation à un niveau élevé du taux de chômage et déficit budgétaire en roue libre : l'économie française conclut la première année pleine du mandat d’Emmanuel Macron par un atterrissage d’urgence.
Tout avait pourtant bien commencé. En mai 2017, lorsque la France élit le huitième président de la Ve République, le climat est au beau fixe. Après la crise économique mondiale exceptionnellement longue causée par celle des subprimes aux Etats-Unis en 2008, une croissance assez vigoureuse est enfin de retour. Le président fraîchement élu, soutenu par une large majorité à l’Assemblée nationale, peut inviter «lorsque tout parfois semble perdu ou morose, [à] penser printemps», et commence par imposer sa réforme la plus emblématique : la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) et sa transformation en impôt sur la fortune immobilière, dont le rendement fiscal chute immédiatement d’environ 3 milliards d’euros.
Viennent ensuite les ordonnances sur la réforme du Code du travail, parfois appelées loi travail 2, en référence à la loi travail adoptée sous la précédente mandature. Elles entrent en vigueur le 1er janvier 2018. Leurs dispositions les plus commentées sont le plafonnement des indemnités prud’homales, la modification de la représentation salariale en entreprise et l’introduction d’un «CDI de chantier» ou encore la prédominance de l’accord de branche sur la loi pour fixer les limites et caractéristiques des CDD.
N'étant pas entendus, les syndicats s’insurgent contre ce qu’ils interprètent comme un encouragement à la précarisation des contrats de travail. En face, on explique la philosophie qui inspire ce projet : la facilité à écourter un contrat de travail lèvera les freins à l'embauche.
Or la première année d’entrée en vigueur de ces ordonnances ne confirme pas ce postulat. Alors que le taux de chômage avait baissé de 10,1 à 9,1% au cours de l’année 2017, dernière du mandat de François Hollande, il demeure presque inchangé un an après l’entrée en vigueur des ordonnances travail de l’ère Macron.
Avec une croissance de l’économie plus modeste que prévu (+1,5%) le taux de chômage est toujours, fin 2018, de 9% contre une moyenne de 6,8% dans l’Union européenne, et même de 6,6% au Portugal. Sous l’influence de son ministre socialiste des Finances, Mario Centeno, aujourd’hui président de l’Eurogroupe, Lisbonne a fait, fin 2015, le choix d’une politique de relance de la consommation par un soutien aux bas salaires, tout en maîtrisant un déficit budgétaire ramené à 1% (hors coût du énième sauvetage d’une banque publique). Le contraire du chemin d'abord choisi par le gouvernement français.
Tout avait pourtant bien commencé. En mai 2017, lorsque la France élit le huitième président de la Ve République, le climat est au beau fixe. Après la crise économique mondiale exceptionnellement longue causée par celle des subprimes aux Etats-Unis en 2008, une croissance assez vigoureuse est enfin de retour. Le président fraîchement élu, soutenu par une large majorité à l’Assemblée nationale, peut inviter «lorsque tout parfois semble perdu ou morose, [à] penser printemps», et commence par imposer sa réforme la plus emblématique : la suppression de l’impôt sur la fortune (ISF) et sa transformation en impôt sur la fortune immobilière, dont le rendement fiscal chute immédiatement d’environ 3 milliards d’euros.
Viennent ensuite les ordonnances sur la réforme du Code du travail, parfois appelées loi travail 2, en référence à la loi travail adoptée sous la précédente mandature. Elles entrent en vigueur le 1er janvier 2018. Leurs dispositions les plus commentées sont le plafonnement des indemnités prud’homales, la modification de la représentation salariale en entreprise et l’introduction d’un «CDI de chantier» ou encore la prédominance de l’accord de branche sur la loi pour fixer les limites et caractéristiques des CDD.
N'étant pas entendus, les syndicats s’insurgent contre ce qu’ils interprètent comme un encouragement à la précarisation des contrats de travail. En face, on explique la philosophie qui inspire ce projet : la facilité à écourter un contrat de travail lèvera les freins à l'embauche.
Or la première année d’entrée en vigueur de ces ordonnances ne confirme pas ce postulat. Alors que le taux de chômage avait baissé de 10,1 à 9,1% au cours de l’année 2017, dernière du mandat de François Hollande, il demeure presque inchangé un an après l’entrée en vigueur des ordonnances travail de l’ère Macron.
Avec une croissance de l’économie plus modeste que prévu (+1,5%) le taux de chômage est toujours, fin 2018, de 9% contre une moyenne de 6,8% dans l’Union européenne, et même de 6,6% au Portugal. Sous l’influence de son ministre socialiste des Finances, Mario Centeno, aujourd’hui président de l’Eurogroupe, Lisbonne a fait, fin 2015, le choix d’une politique de relance de la consommation par un soutien aux bas salaires, tout en maîtrisant un déficit budgétaire ramené à 1% (hors coût du énième sauvetage d’une banque publique). Le contraire du chemin d'abord choisi par le gouvernement français.
En décembre 2017, l’Insee alerte sur la question des taxes et du pouvoir d’achat
A Paris, on affirme que les nouvelles dispositions fiscales ont entraîné une hausse du pouvoir d’achat, mais c’est une moyenne qui intègre, entre autres, la hausse du revenu disponible des anciens contributeurs de l’impôt sur la fortune. Et surtout, entre la hausse de la CSG compensée en cours d’année par la suppression des cotisations chômage et maladie, et celle des taxes sur le tabac et les produits énergétiques, le gouvernement semble avoir mal planifié son calendrier budgétaire.
C’est du moins le point de vue de l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) qui annonce, dès décembre 2017, une baisse de la consommation au premier semestre 2018 sous le poids des hausses des fiscalités indirectes. Fait rare, le gouvernement conteste publiquement les analyses de l’Insee. Pourtant, à la fin de l’année, le verdict est sans appel : la consommation des ménages n’a augmenté que de 0,8% en 2018, contre 1,2% l’année précédente et 1,6% en 2016. C’est évidemment une cause de croissance plus faible qu’attendue, même si la faute en est partiellement reportée sur le mouvement des Gilets jaunes.
Le poids de cette baisse de la consommation pèse très tôt en 2018 sur la croissance de l’activité. Fin août, le ministre de l’Economie et des Finances, Bruno Le Maire, doit revoir ses prévisions de recettes fiscales à la baisse et reconnaître que la France présentera en 2018 un déficit aux alentours de 2,6% du PIB, le même chiffre que l’année précédente.
Le cap est bon, on garde le cap
Néanmoins, le locataire de Bercy reste confiant et déclare lors d’un petit-déjeuner de l’Association des journalistes économiques et financiers : «Je vous confirme que nous ferons cinq points de dette publique en moins sur la durée du quinquennat». Cela signifierait qu'elle repasse aux environs de 94% du PIB en 2022. Un objectif à première vue peu ambitieux. Et pourtant, tout comme la promesse d’un taux de chômage réduit à 7,5% d’ici la même échéance, cet engagement semble aujourd’hui difficile à tenir. En effet, après une petite baisse en 2017 aux environs de 97%, la dette frise de nouveau les 100% du PIB, un seuil psychologique qui devrait être franchi dès le premier trimestre de l’année prochaine.
Or, la perspective d’un atterrissage brutal de l’économie au sein de l’OCDE se faisant de plus en plus menaçante, Le Fipeco, site animé par des experts des finances publiques issus de la Cour des comptes, de l’Insee ou d’autres institutions françaises, a étudié l’impact, sur la dette publique française, de deux scénarios de crise.
Dans le premier, baptisé «scénario 1993», en référence à la chute des PIB en Europe au cours de cette année, la dette serait stabilisée aux environs de 100% d’ici 2020. Dans le «scénario 2009», qui s’inspire de la crise financière récente, le déficit budgétaire atteindrait 3,7 % du PIB dès l’année prochaine, et la dette française atteindrait 115% du PIB un an avant la fin du quinquennat. Mais ce ne sont que des hypothèses et une crise économique en 2019 n'est, heureusement, pas absolument certaine.
Entre-temps, le nouveau gouvernement s’est intéressé à la SNCF, qu’il a jugé urgent de «réformer», en ouvrant l’entreprise plus largement à la concurrence, ce qui passait par une remise en cause du statut des employés et de l’entreprise elle-même.
Au cours du printemps 2018, le pays a renoué avec une grève longue des cheminots qui a désorganisé pendant plusieurs mois le quotidien des Français, mais le 27 juin, le président a fini par signer la loi en compagnie de sa ministre chargée des Transports, Elizabeth Borne. Immédiatement, l’agence de notation Fitch a abaissé de deux crans la notation de SNCF Mobilités, l’entité commerciale, et expliqué : «La dégradation de deux crans reflète la transformation de SNCF Mobilités en une société anonyme à capitaux publics dans le contexte d'ouverture progressive à la concurrence.» En résumé, SNCF mobilités va désormais payer plus cher pour se financer. Un premier effet de cette réforme précédant l’ensemble de ceux attendus.
Que faire des lauriers neufs de l’attractivité ?
L’attractivité de la France, au moins, se serait redressée, mais l'on peine à déterminer si c’est le regard des investisseurs étrangers qui a changé ou leur politique d’investissement, et depuis quand.
En novembre, le cabinet de conseil international EY (anciennement Ernst & Young) qui publie annuellement le Baromètre de l’attractivité de la France, a de bonnes nouvelles à annoncer : pour le nombre d’investissements directs étrangers, qu’il s’agisse de création ou de rachat de sites industriels, d’implantation de centres de recherche et développement ou de sièges sociaux, la France a quasiment rattrapé ses deux concurrents européens que sont l’Allemagne et le Royaume-Uni ; après une dégringolade entre 2007 et 2012.
Mais ce rattrapage date de 2014, bien avant l’élection d’Emmanuel Macron. Il a aussi deux faiblesses : les investissements étrangers en France génèrent moins d’emplois qu’ailleurs en Europe (en moyenne 25 emplois par projet contre 42 au Royaume-Uni et 53 en Allemagne), et ils viennent principalement des Etats-Unis, une zone économique en voie de durcissement commercial, alors que Berlin et Londres attirent, de plus en plus, les moteurs de la croissance mondiale que sont la Chine et l’Inde.
Enfin, selon un sondage plus récent, publié par Ipsos en novembre 2018, les dirigeants d’entreprises étrangères saluent une image de la France en forte amélioration depuis qu’Emmanuel Macron est président de la République. Toutefois, il ne s’agit que d’une enquête d'opinion et non d’une comptabilisation des investissements réels. Cette enquête révèle en outre qu’un tiers seulement des dirigeants d’entreprises étrangères installées en France ont connaissance de nouveaux projets d’investissements dans l'Hexagone.
Commerce extérieur et industrie, éternels mal-aimés
Le commerce extérieur, lui, affiche toujours un des pires soldes de l’Union européenne et demeure un des talons d'Achille de l’économie française. En 2017, la France a ainsi acheté pour 63,5 milliards d’euros de marchandises de plus qu’elle n’en a vendu. Pour le seul premier semestre 2018, le déficit s’élève déjà à 33,5 milliards d’euros. Le blocage par les Etats-Unis de la vente signée en 2016 de 98 Airbus, qui auraient dû être livrés cette année à l’Iran, est une mauvaise nouvelle de plus.
Surtout, la France perd un à un ses atouts dans la compétition pour les marchés mondiaux. Le commerce international des biens est, en effet, dominé par les ventes de matières premières, notamment énergétiques, et de biens d’équipements industriels lourds ou encore d’infrastructures et moyens de transports. Or, depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron à Bercy à l’été 2014, la France a, en un temps record, perdu le contrôle des deux principales branches d’Alstom, un géant industriel nourri, pendant des décennies, de généreuses commandes de l’Etat, et qui produisait des turbines de centrales et sous-marins nucléaires, ou de barrages électriques, ainsi que les rames du TGV.
Le pays a aussi vu partir en Italie le contrôle des ex-chantiers de l’Atlantique devenus STX France, sans parler de Technip, un des leaders mondiaux des équipements pour l’industrie pétrolière, passé sous contrôle américain. La désindustrialisation de la France est un handicap très lourd qui hypothèque l’avenir de l’économie nationale, avec les pertes d’emplois et de savoir-faire stratégiques qu’elle entraîne, mais elle n'apparaît pas comme un problème prioritaire pour le gouvernement.
Année fiscale 2019, en marche vers le désastre !
Pourtant, le point noir – plutôt inattendu de la part d’un gouvernement classé économiquement à droite et d’un président sorti de l’ENA inspecteur des finances – concerne la maîtrise de la dépense publique.
Pour l’année 2019, le gouvernement, acculé par le mouvement social des Gilets jaunes à des mesures dispendieuses et plombé par le coût exorbitant de celles qui ont été adoptées en faveur des entreprises (CICE, baisse de charges), présente un budget en déficit de 3,2%, contre 1% en moyenne au sein de la zone euro et de l’Union européenne. Et encore, ce solde budgétaire repose sur une prévision de croissance de 1,7% que même les plus crédules ont du mal à avaler.
En France, l'année 2018 s'est conclue par un net recul de la croissance, ramenée à 1,5%, contre 1,7% attendus. Or, tous les indicateurs montrent que l’économie européenne risque de connaître un ralentissement en 2019.
On l’observe déjà en Allemagne avec un recul de 0,2% au troisième trimestre 2018, qui ramène la projection de croissance de la première économie européenne à 1,6% en 2018, assortie d’une prévision officielle de 1,5% pour 2019.
Alors, pour ne pas faire mentir le gouvernement, le taux de croissance sera-t-il plus fort en France qu’en Allemagne en 2019 ? Ce n’est plus arrivé depuis 2005 ; Manu, dégage !
Jean-François Guélain
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