Nous sommes là comme des spectateurs car rien d’autre n’est possible dans un monde où les événements évoluent d’eux-mêmes, comme se développent furieusement les grandes catastrophes naturelles. Au moins, nous ne prétendons pas ignorer cet ébranlement du monde, au contraire de ceux de nos contemporains qui continuent à chanter les louanges du triomphe du sapiens postmoderne.
• Vendredi, les ministres des trois “grands” européens (Allemagne, France, UK) et Mogherini de l’UE ont réaffirmé leur volonté d’appliquer, conjointement avec les Russes et les Chinois, le traité JCPOA avec l’Iran. Le même jour, Trump et Pompeo annonçaient l’entrée en vigueur des sanctions contre l’Iran. Quels que soient les aménagements tactiques et les commentaires apaisants que nous réserve la presseSystème, le fait est qu’il s’agit d’une situation de confrontation directe des USA avec l’UE. La chose empirera si et lorsque, comme l’envisage Tom Luongo, les Européens décideront éventuellement (prudence) d’utiliser le système russe SFPS à la place du SWIFT emprisonné par les USA (« Lorsque vous entendrez l’annonce par une banque allemande placée sous la menace de sanctions américaines pour l’achat de de pétrole ou de gaz russes qu’elle va utilisez le SFPS comme système de transfert, vous saurez qu’il s’agit du signal d’avertissement général pour les marchés... »).
D’où ceci, que nous confie WSWS.org : « L'antagonisme croissant entre l'Europe et les États-Unis et la transformation des relations internationales entre États en une maison de fous pour tous contre tous préparent le terrain […] pour une conflagration mondiale qui dépasserait en ampleur même les guerres mondiales du siècle dernier. »
• « Maison de fous » ? L’UE, qui se dresse face aux sanctions US, est menacée elle-même d’implosion, ou “explosion intérieure”, avec l’affaire italienne qui va franchir un pas supplémentaire d’ici quelques jours, en un temps où décidément l’Italie n’est pas la Grèce. Séisme intérieur en devenir, qui montre que nul n’est sûr de ses arrières dans ces affrontements « de tous contre tous » : dans un cas, vous observez que l’Europe pourrait et devrait réagir d’une façon concertée et collective, dans une véritable union ; dans l’autre, vous mesurez combien cette union est fragile et mérite avec bien des raisons d’être secouée jusqu’à se briser.
• « Maisons de fous » certes, et encore plus pour les USA eux-mêmes, absolument en-dedans d’eux-mêmes, mettant en cause leur fondement historique et dévoilant leur ontologie-simulacre... Demain, leurs citoyens votent selon la loi des élections midterms. Le résultat importe-t-il vraiment ? Dans les deux cas (victoire de l’un ou l’autre parti), il semble impossible de prévoir autre chose que l’aggravation de la tension dans ce qui est déjà une “guerre civile froide”, ou « la politique américaine[…] devenue guerre civile par d’autres moyens [que la violence classique] », comme l’écrit James B. Jatras :
« Ceux qui en appellent à plus de civilité et à un retour au discours policé peuvent s’épargner cette peine. Il est beaucoup, beaucoup trop tard. [...] Même si Patrick Buchanan a raison d’observer que le degré de violence intérieure n’atteint pas celui qu’il a connu en 1968, la profondeur de la division existentielle est bien plus grande. »
C’est ce qu’Ilana Mercer nomme The Desunited States of America, en développant un discours radical, encore plus pour une paléo-conservatrice, en allant jusqu’à la faiblesse originelle de cet assemblage qui n’a plus rien d’une nation parce qu’il ne l’a jamais été, – décidément 2020 et ce qui précède ressemble bien à 1860 et ce qui précéda, en plus décisif : « Les USA ne sont pas unis, pas plus que l’Amérique n’est une nation de quelque point de vue qu’on l’observe. Elle ne l’a pas été depuis bien longtemps. [...] L’Amérique est une économie, pas une nation. [...] Une coexistence délicate, et nullement une unité forcée, est le seul espoir pour un retour au calme dans ce pays. Une désunion respectueuse est la seule voie acceptable qui s’ouvre à nous. »
• Là-dedans, observons-nous pour faire un aparté trumpiste, le président Trump est bien le modèle que pressentait Michael Moore et que nous avons toujours privilégié, un « cocktail Molotov humain[...] que les gens lancent sur notre système politique ». En se référant pour l’esprit de la chose au film V for Vendetta, Tom Luongo trouve une autre image, mais complètement similaire, ce qui montre la durabilité et la résilience de la perception de la situation : « Les gens veulent que l'ordre politique actuel soit démantelé. Et ils ont choisi Trump pour faire exactement cela. Lancez un train rempli de dynamite vers le Capitole et faites-le exploser. »
• Les Russes sont-ils “les seuls adultes” dans la « maisons de fous » ? Ils observent, incrédules et stupéfaits, à la fois ces incroyables désordres internes à finalité déstructurante de chacun de leurs “partenaires”, et à la fois ces provocations, menaces, anathèmes que les mêmes, acteurs épuisés d’une civilisation exsangue, ne cessent de leur lancer. Le Saker-US, lui, ne cesse pas de ne pas en revenir, face à un tel désordre, un tel déni, une telle schizophrénie fardée en simulacre : « Un diplomate russe de haut rang confirme que la Russie se prépare à la guerre – Quelqu’un y prête-t-il attention ? ». On connaît certes les divers épisodes, y compris les plus récents et les plus pressants, de la stupéfaction sans fin et de l’incrédulité sans bornes des Russes devant nos agitations ; dans l’article cité, le Saker-US décompte les articles qu’il a publiés depuis 2014 pour dire et redire la même chose dans la « maison de fous » : “Halte au fou !”, – mais c’est comme s’il criait dans le désert...
• Car le lieu peut-être le plus extraordinaire par son exotisme de la « maisons de fous », c’est l’OTAN en ribaude jusqu’à après-demain, en Norvège, bien loin du désert où l’on crie “Halte au fou !”, pour les “grandes manœuvres” Trident Juncture. Le rapport qu’on peut en faire, au milieu de ce qui est quasi-officiellement qualifié de “chaos” dans les opérations de communication, avec assentiment de la presseSystème, concerne le froid glacial de l’affaire d’une part, peut-être comme un signe paradoxal du Ciel et du “réchauffement climatique” ; et, d’autre part et selon une source du meilleur aloi possible, l’atmosphère lugubre qui entoure un milieu, – celui des officiels, des membres zélés et des généraux de l’OTAN, – où « la guerre prochaine avec la Russie est perçue comme inévitable, comme une certitude ».
... Tiens, pour cette fois depuis bien longtemps dans un tour de l’horizon crisique, pas un seul mot de la Syrie... Même la crise syrienne ne tient plus le rythme du tourbillon crisique.
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