30 avril 2018

L'horreur est humaine : frappes saoudiennes sur un mariage au Yémen


© Ruptly
Une photo d'une horreur indicible prise après des frappes saoudiennes sur un mariage au Yémen dimanche dernier montre un petit garçon se cramponnant au cadavre de son père. Mais il y a fort à parier que cet enfant ne sera jamais présenté comme le « visage de la guerre » dans les médias mainstream.


Sur des photos et des séquences vidéos de l'après-bombardement, qui a eu lieu dans un village isolé de la province de Hajjah, dans le nord-ouest du Yémen, le jeune garçon, probablement âgé de 7 ou 8 ans, se cramponne au corps d'un homme, agrippant sa chemise et répétant « non, non, non » tandis que des secouristes tentent de l'éloigner. Des personnes sur le terrain ont déclaré à Ruptly que l'enfant affirmait avec insistance que son père était simplement endormi et qu'il ne tarderait pas à se réveiller pour le ramener dans leur village, non loin du village bombardé.

Il est probablement resté là pendant des heures, à en juger par certaines photos prises durant la nuit, ainsi qu'au matin. Un caméraman de Ruptly a déclaré que le corps de l'homme avait été évacué en dernier, et que l'enfant était resté à ses côtés jusqu'au bout.

AVERTISSEMENT : IMAGES CHOQUANTES 
Voici une petite prédiction. Ce garçon ne figurera jamais en prime time dans les médias mainstream, même si sa frêle silhouette et sa pathétique témérité enfantine sont à fendre le cœur. Aucune présentatrice bien payée et impeccablement maquillée ne dira sur un ton larmoyant que ces images sont insupportables. Aucun correspondant ne confrontera le ministre des Affaires étrangères saoudien, en lui montrant les photos et en lui disant droit dans les yeux : « Ceci est un crime de guerre, Monsieur. » Au Conseil de sécurité des Nations Unies, la tragédie de ce petit garçon ne servira pas à dénoncer un régime criminel qui massacre des civils en toute impunité.

Pour retenir l'attention de l'Occident, les enfants victimes de bombardements doivent venir d'un autre pays. D'un pays où les bombes qui tuent des civils ne sont pas fournies par les USA ou par l'Angleterre. Où les signes flagrants de malnutrition ne constituent pas une accusation silencieuse contre l'Arabie saoudite, qui bloque l'approvisionnement en nourriture, en médicaments et en carburant pour les gens qui s'opposent à l'invasion. Les « bonnes » victimes se trouvent en Syrie, pas au Yémen.

Les médias mainstream semblent avoir adopté une approche très sélective, pour ce qui est des enfants victimes de la violence terroriste. À leurs yeux, nombre d'entre eux ne méritent tout simplement pas la compassion ou la moindre couverture médiatique. Une zone d'ombre recouvre la Bande de Gaza, où des enfants ont été blessés et tués la semaine dernière par des soldats israéliens gardant la barrière de séparation. Une zone d'ombre recouvre également l'Est de l'Ukraine en rébellion, où des dizaines d'enfants furent tués par des tirs d'obus en 2014, lorsque les autorités installées à la suite du coup d'État à Kiev déployèrent l'armée pour faire plier les rebelles. Idem pour tout autre endroit du monde où la violence est commise par le « bon camp ».

La cinquantaine de personnes tuées au mariage yéménite viendront s'ajouter aux statistiques de guerre, et figureront dans le dernier rapport de l'ONU ou d'Amnesty International. Il est peu probable qu'elles affectent la capacité de l'Arabie saoudite d'acquérir des armes occidentales, de recevoir des renseignements de la part des Occidentaux concernant les bombardements, ou d'être ravitaillée en carburant.

On peut se demander ce que deviendra ce petit garçon plus tard. 

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