09 septembre 2017

Scandale du nouveau Levothyrox : l'association AFMT va porter plainte contre X

 L'AFMT réclame le retour à l'ancienne formule du Levothyrox et la fin du monopole du laboratoire Merck. © CHRISTOPHE ARCHAMBAULT / AFP
 
L'association française des malades de la thyroïde a organisé une manifestation devant l'Assemblée nationale ce 8 septembre 2017 pour protester contre la nouvelle formule du Levothyrox, au centre d'une vive polémique. Elle annonce qu'elle portera plainte contre X dès la semaine prochaine.

Vendredi 8 septembre 2017, 11h : une petite centaine de personnes est réunie devant l'Assemblée nationale, à Paris. Ils sont tous membres de l'association française des malades de la thyroïde (AFMT) et entendent protester contre la nouvelle formule du médicament pour l'hypothyroïdie Levothyrox, accusée de provoquer d'importants effets secondaires. Dans les rangs, la colère gronde, le désespoir est omniprésent. "Depuis trois mois, ma femme souffre d'insomnies, de dépression, elle ne bouge plus", témoigne un patient auprès de Sciences et Avenir. "Je me rends sans cesse à l'hôpital pour des douleurs musculaires atroces, j'en ai marre de coûter aussi cher à la sécurité sociale", s'énerve une autre. "Vous vous rendez compte, les médecins nous conseillent de nous procurer le médicament à l'étranger, en Allemagne par exemple !", s'exclame-t-elle. Une "solution" a très court terme puisque tous les autres pays européens devraient passer à cette nouvelle formule début 2018...

"Débloquer en urgence les stocks d'Allemagne et de Belgique"

L'AFMT sera reçue en fin d'après-midi par la ministre de la Santé Agnès Buzyn. "On va lui demander de débloquer un urgence les stocks de l'ancienne formule qui existent en Allemagne et en Belgique", nous explique Chantal L'Hoir, fondatrice de l'AFMT. "Nous savons que le laboratoire Merck (qui fabrique le Levothyrox, ndlr) garde des stocks en cas d'accident nucléaire, il nous l'a déjà assurés par le passé", ajoute-t-elle. L'AFMT affirme que si la ministre le demande, les stocks étrangers peuvent être disponibles dans l'Hexagone dans les 48 heures.

Contrairement à l'association Vivre sans thyroïde (que la ministre a reçu le 6 septembre 2017), l'AFMT rejette les explications données par le laboratoire Merck et l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), à savoir que les effets indésirables ressentis par certains patients sont transitoires car dus aux questions de dosage, et vont s'estomper quand le bon équilibre sera atteint pour chaque patient. "Mais comment la ministre peut demander aux malades de patienter pour que les effets s'estompent ? Si elle ne revient pas sur ses propos, nous l'encourageons à démissionner", s'énerve Nell Gaudry, porte parole de l'AFMT. L'association souhaite le retour à l'ancienne formule, mais n'exige pas l'abandon de la nouvelle qui peut être prise par les patients qui ne ressentent pas d'effets secondaires. "Pour l'instant, nous n'avons pas le choix, nous sommes pris en otage, c'est un génocide médicamenteux", lâche Nell Gaudry.

Faire cesser le monopole de Merck

L'association, soutenue par l'avocate et ancienne magistrate Marie-Odile Bertella-Geffroy et par la députée européenne écologiste Michèle Rivasi, annonce qu'elle portera plainte contre X la semaine prochaine, auprès du parquet du pôle de santé publique, "ce qui permettra de demander des comptes au laboratoire et aux autorités sanitaires", assure l'avocate. "La non assistance à personne en danger est grave, poursuit-elle, nous avons affaire à une crise sanitaire". Quelques jours auparavant, une quinquagénaire a déclaré elle aussi avoir déposé plainte, mais cette fois contre le laboratoire Merck pour "mise en danger de la vie d'autrui".

Autre enjeu pour l'AFMT : faire cesser le monopole de Merck sur ce médicament. Le générique a été arrêté, car il "provoquait beaucoup d'effets secondaires", précise Chantal L'Hoir. "En 2013, il y a eu rupture de stock de Levothyrox, le monopole pose aussi ce type de problèmes", affirme une patiente. "L'urgence est d'ouvrir le marché français à d'autres médicaments concurrents", résume Michèle Rivasi.

Ne surtout pas arrêter son traitement sans avis médical

"Ces médicaments sont très sensibles et l'on ne peut pas, sans information ni procédure longue et scientifique, en changer la formulation", déplore l'avocate. "Cette nouvelle formule a été testée pour des études de bioéquivalence qui ne permettent pas d'évaluer les effets secondaires ni sa bonne acceptation sur le long terme", précise Michèle Rivasi, qui juge que les 3 millions de Français qui prennent du Levothyrox "sont des cobayes". Dans cette nouvelle formule, c'est le changement d'excipients (notamment le lactose qui a été remplacé par le mannitol) qui est pointé du doigt par les patients. Mais est-ce bien la raison de leurs maux ? "L'ANSM m'a confirmée faire une enquête pour savoir ce que contient précisément le Levothyrox", précise Michèle Rivasi. Quel serait le coupable alors ? "Des nanoparticules", s'inquiètent les patients présents à cette manifestation.

En attendant de le savoir, autorités sanitaires et associations recommandent (et c'est là leur seul point de convergence !) de ne surtout pas arrêter son traitement sans avis médical. "Une patiente a fait une accident vasculaire cérébral suite à cet arrêt", avertit l'AFMT. Comme la comédienne Anny Duperey, nombreux sont ceux qui se sont tournés vers la L-tyroxine, des gouttes de substitution qui sont - en temps normal - réservés aux enfants et aux adultes ayant de gros troubles de la déglutition. "Un soulagement immédiat pour la comédienne, qui affirme que ses symptômes (crampes au réveil, faiblesse musculaire, épuisement, réveils nocturnes, ndlr) ont disparu depuis", précise Nell Gaudry. Le Collège de la médecine générale (représentant les généralistes) s'oppose à cette solution, avançant des risques de rupture de stock. Mais la ministre de la Santé a assuré à la presse le 6 septembre que les stocks de L-tyroxine seraient suffisants, le temps que les effets secondaires s'estompent. Une solution provisoire, le temps que l'orage passe ?

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