Enfin… C’est un ouragan du point de vue d’une gauche qui frise l’apoplexie : avec la France Insoumise qui parle, en toute modération, d’« agression contre le Code du travail » et d’une généralisation de la précarité, un PCF (oui, ça existe encore !) qui évoque un « grand recul social » et « l’absolutisme libéral » de Macron, et un Parti Socialiste (ou ce qu’il en reste) qui pleurniche sur « un déséquilibre dans la relation entre les employeurs et les salariés » (à l’avantage de l’employeur, bien évidemment), on comprend que ces ordonnances déclenchent déjà de puissants prurits sur la couenne sensible des collectivistes et thuriféraires du tout-à-l’Etat dans lequel barbote le pays depuis plusieurs décennies.
Du reste, les spécimens collectivistes qui siègent à droite ont aussi des réactions épidermiques assez caractéristiques ; notons cependant que là où la gauche n’en peut déjà plus de voir certaines règles assouplies, le Front National semble s’inquiéter du trop grand pouvoir que vont récolter les syndicats avec la primauté des accords d’entreprise sur les accords de branche.
Bref : chacun joue ici une partition qui ne surprendra personne. Et puis bon, c’est la rentrée, après tout ! Que serait-elle si elle n’avait pas en elle, comme à peu près toutes les rentrées précédentes, tous les germes de frétillantes confrontations sociales dont le pays a le secret ?
En réalité, sur le plan pratique, on constate qu’en fait de tempête de néolibéralisme turbo-capitaliste ultra-en faveur des patrons, on trouve surtout quelques ajustements objectivement nécessaires dans une sorte de ménagement chouchèvresque typique de la tendance globale : de petits pas, un peu timorés, dans une direction qu’on sait bonne (le rééquilibrage du Code du travail entre salariés et entrepreneurs) mais avec ce rythme si mesuré qui amène la France à faire ce que tous ses grands partenaires ont fait avant elle… il y a 20 à 40 ans.
On pourra ainsi apprécier à sa juste valeur l’assouplissement de certaines règles concernant la procédure générale de licenciement qui est, en France, l’une des plus complexes du monde occidental et qui donne, tous les jours, son lot de procès aux Prud’hommes et impose à chaque entrepreneur de réfléchir aussi longtemps que possible avant toute nouvelle embauche, qui se traduit souvent pour lui par un mariage forcé dont toute tentative de divorce lui coûtera très cher.
Dans les prochains jours, le monde des jacassants reviendra en détails (et lourdement) sur le plafonnement des indemnités prud’homales : il lui sera facile de s’appesantir sur tous les cas qu’il ne manquera pas de dénicher montrant à quel point ce plafonnement est à la fois inique, outrageusement favorable aux (méchants) patrons et un véritable recul social sans précédent.
Pourtant, si ce dernier enlève une partie de l’insécurité financière que toute nouvelle embauche entraînait jusqu’à présent, ce n’est à mes yeux pas le point le plus important ; en réalité, on devra apprécier à leur juste valeur d’autres articles, ceux qui réintroduisent le principe de bonne foi de l’employeur et lui permettent d’établir un licenciement correctement motivé sans créer un véritable champ de mine juridique pour l’entreprise.
En somme, sans être la révolution qu’on aurait pu attendre et dont le pays a véritablement besoin, on devra se contenter d’un toilettage bienvenu d’une partie du Code du travail, nettoyage qui réintroduit un peu de bon sens dans le contrat de travail. Il était temps.
Cependant, le plus dur n’est pas ce qui vient d’être fait, mais bien ce qui sera mis en place effectivement.
Et là, quelques soucis risquent de se faire jour…
D’une part, il va falloir savoir gérer les syndicats dont une partie s’est montrée ouvertement hostile à ces ordonnances et qui ne se priveront pas de le rappeler bruyamment dans les semaines à venir.
D’autre part, il va aussi falloir calmer le jeu des collectivistes (ceux de gauche avec les Zinsoumis, et ceux de droite avec les Frontistes) qui vont se sentir pousser des ailes en appelant vociférant à la rue ; pour eux, c’est évident, le Grand Souar semble à portée et moyennant quelques merguez-parties, une ou deux manifestations et leurs inévitables échauffourées, tout ceci devrait se terminer, comme souvent dans ce pays, par des chansons et un retrait de tout ce qui les gratouille un peu dans le texte.
Du reste, les plans sont déjà prêts (ils l’étaient bien avant que les textes complets soient connus ce qui donne une idée précise de la bonne foi de certains en la matière).
Mais bon : vu la violence des réactions de l’opposition s’opposant avec force opposition, pour le même prix, le gouvernement aurait pu y aller bien plus franchement et introduire beaucoup plus de souplesses dans ce qui reste, au départ, un contrat définissant une relation commerciale entre individus a priori doués de raison et qui a été, jusqu’à présent, consciencieusement vitrifié par des années de négociations syndicales à sens unique, d’abandons en rase campagne et de perte de repères flagrante.
En pratique, on aura les cris, les grincements de dents, les agressions olfactives de saucisses grillées sur les boulevards parisiens, les échauffourées et les débordements pour un aimable paquet d’ajustements que l’air du temps, une économie en déroute et 20 ans de retard sur l’Allemagne ont rendu indispensables.
Or, maintenant, pour le gouvernement Philippe et pour son patron derrière, il va falloir tenir bon. Comme l’ont amplement prouvé tant de leurs prédécesseurs, passer le texte de loi n’est pas, loin s’en faut, la partie la plus délicate. Le président l’a-t-il compris ? Peut-être si l’on tient compte du récent appel d’offre pour l’achat d’un gros paquet joufflu de grenades par la Gendarmerie et la Police nationales.
Malheureusement, ce n’est pas ce qu’on a observé depuis que le petit gars est arrivé au pouvoir. Ainsi, le retrait totalement piteux du projet de diminution des APL a donné un aperçu pathétique de la détermination et du courage réels que cette fine équipe semble capable de rassembler.
Prenons ce qui vient. Souhaitons le meilleur. Préparons-nous au pire.
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