03 mars 2017

Avant de vous soigner, la sécu veut savoir si c’est rentable ou si vous êtes déjà condamné…


Certains parmi vous le savent, je suis avec attention le travail de Panagiotis Grigoriou, historien, ethnologue et aussi guide touristique à Athènes pour faire bouillir la marmite. Si vous allez en Grèce et que vous pouvez le faire travailler, ne vous en privez pas ! Je pense que vous pourrez joindre utilement l’inutile au désagréable car Panagiotis chronique en français la crise grecque.

Ses articles sont toujours passionnants et surtout, il ne raconte pas d’âneries !

Bref, son dernier billet est édifiant sur la situation en Grèce et là aussi on reparle de plus en plus fortement d’une sortie de l’euro.

Alors je reproduis son dernier article. Je vous indique aussi le site de son « agence » de voyage ici. Vous pouvez également le soutenir avec le bouton « dons » sur son site greekcrisis.fr ici – il ne m’a rien demandé évidemment !

Vous allez découvrir, dans son dernier article, que la Sécu grecque, avant de vous soigner, veut savoir si c’est rentable ou si vous êtes déjà condamné…

Je ne suis pas un partisan de l’acharnement thérapeutique. Mais parfois, quelques mois de vie permettent d’accomplir certaines choses personnelles. Certes cela a un coût. Mais certaines choses ne s’achètent pas avec une carte bancaire.

Ce qui nous rend humain, c’est justement notre capacité à dépasser l’argent.

Charles SANNAT
 
Macronymies orwelliennes



 

Chaque fois que l’histoire se répète, le prix augmente. La… répétition grecque dure déjà depuis sept ans, et presque partout ailleurs un processus analogue est en cours. Nos politiques sont manifestement un train emballé sur une trajectoire désastreuse que nul ne semble pouvoir dévier. Pluie donc sur Athènes aux détails près d’une actualité ô combien parlante : avant que toute prescription appropriée ne soit validée, la Sécurité sociale grecque exige des cancérologues leur estimation écrite quant au temps qui resterait à vivre à leurs patients. L’ordre des médecins s’en insurge… et forcement, le prix augmente.


Bords de mer. Athènes, février 2017

Pluie entrecoupée de longues éclaircies, l’espoir renaît, celui du Printemps certes. Les cafés des bords de mer au sud de l’agglomération athénienne sont fréquentés. La normalité… et pourtant. On remarque que sur ces terrasses de cafés, comme sur les bancs publics, les gens… qui voient de plus en plus de travers, ventripotents ou pas, n’ont généralement qu’un mot à la bouche : la drachme.

C’est vrai que l’euro-croyance est érodée comme jamais par les temps qui courent. Les sondages indiquent que pour une majorité de l’opinion, ladite monnaie unique n’est plus concevable et encore moins conservable. Les colloques et autres réunions publiques au sujet du retour de la drachme sont fréquents, au point de rendre fort inquiets les “grands” éditorialistes europhiles. Signe des temps, devant le succès que rencontre auprès des jeunes une exposition qui se tient à Athènes en ce moment sur le thème des années 1980 en Grèce (produits grecs, modes, sociabilité), l’universitaire Yórgos Steiris remarque alors, visiblement gêné :

“En visitant l’exposition, j’y ai rencontré certains de mes étudiants. En discutant avec eux, je me suis aperçu qu’à leurs yeux, les années 1980, cette Grèce de la drachme prend-elle alors une dimension mythique. Ils ont l’impression que la Grèce des années 1980 était une période disons analogue à ce que vécut Athènes sous Périclès. (…) Nos jeunes ne devraient pas être emportés par ces formules, ni par leurs mythologies faciles. Tous ces drachmophiles et leurs fidèles doivent enfin expliquer clairement aux gens ce que la drachme alors signifie. L’Union européenne et l’euro peuvent présenter de nombreux problèmes, sauf qu’il s’agit d’un changement de paradigme pour la Grèce. La drachme c’est une monnaie, l’euro c’est un État” (“Huffington Post” édition en grec, le 2 février 2017). Tout est (presque) dit sous forme de cette courte dernière phrase, et… c’est alors ainsi que chaque fois que l’histoire se répète, le prix augmente (et en euros).


Euro… fondant. Athènes, 2016


Cafés et bancs publics des bords de mer. Athènes, février 2017


La longue saison des oranges abordables. Athènes, février 2017

En cette longue saison des oranges enfin abordables (de 0€20 à 1€ le kilo), l’euro rentrerait dans son dernière heure historique. Dans une semaine (15/02), Kóstas Lapavítsas, économiste et ancien député SYRIZA (ayant quitté cette formation de faussaires politiques en août 2015), présentera dans une grande salle à Athènes le programmé du passage à la monnaie nationale, élaboré avec le concours de ses collaborateurs.

“Ce changement, rendu nécessaire pour que le pays puisse tout simplement être sauvé, ne sera plus initié par les partis politiques. Leur rôle a été comme on sait… attesté et je dirais même, dépassé. C’est seulement le peuple lui-même, par un mouvement déjà en lame de fond depuis les entrailles de la société grecque qui finira par imposer ce programme”, précise alors Kóstas Lapavítsas dans une interview récente largement reprise et commentée (“Quotidien des Rédacteurs” 04/02).

La… répétition grecque dure déjà depuis sept ans. Nous comptons nos morts (dont deux parmi mes cousins), nous comptons également tous ceux qui manquent à l’appel car ils ont quitté le pays (5 % de la population tout de même). C’est ainsi. Nonobstant, nous observons aussi les forces occupantes bancocrates et germanophrènes, elles sont en train de préparer la phase suivante, celle éventuellement du (pseudo) passage à la monnaie nationale (ou par une double-circulation monétaire)… sous le règne d’un Euroland recentré, l’idée refait également surface… avec l’humidité historique actuelle.


Centre médical solidaire. Athènes, Ellinikón, 2016


Centre médical solidaire. Athènes, Ellinikón, 2016


L’avant-goût… français du mémorandum. Paris, 2016

En tout cas, il y a une affaire peut-être en lien avec ce qui vient d’être énoncé et qui fait grand bruit en ce moment en Grèce. C’est le scandale de l’escale relativement brève que l’avion du Premier ministre Alexis Tsipras a effectué à Paris (fin janvier 2017). L’événement avait été d’abord tenu secret, cependant, le député Nouvelle Démocratie Adonis Georgiádis (issu du parti LAOS d’extrême-droite) a posé la question publiquement. Le “gouvernement” a fini par s’expliquer sur le sujet. “La Grèce recourt à la banque Rothschild pour son retour sur les marchés. Lors d’une escale à Paris le dernier week-end de janvier, le Premier ministre, Alexis Tsipras, s’est entretenu avec des représentants de la banque, selon son service de presse”, rapporte de son côté la presse spécialisée.

Simultanément, nous avons pu apprendre que lors de cette escale parisienne, Alexis Tsipras a également rencontré ceux de la firme L’Oréal, la presse… mainstream croit autant rapporter que “L’Oréal prépare un investissement important en Grèce. Le communiqué publié par le gouvernement grec, samedi soir, donne l’espoir d’une bouffée d’oxygène. Dans une Grèce rongée par sept années de crise économique et un chômage touchant 24 % de la population active, cette perspective de création d’emplois est une bonne nouvelle”.

Nous finissons par comprendre. Alexis Tsipras de la crypto-gauche, agissant… pour le bien de son pays, s’est déplacé secrètement à Paris pour y rencontrer ceux de la banque Rothschild (authentique… mère porteuse politique d’Emmanuel Macron comme on sait), puis, ceux du trop vieux parfum politique de la firme L’Oréal… (On se souviendra par exemple de l’affaire de la Cagoule, celle d’Eugène Deloncle et de son ami Eugène Schueller, fondateur de la société L’Oréal, tout comme ces Français qui n’ont ni le nez historiquement bouché, ni la mémoire courte).

Alexis Tsipras chez L’Oréal et chez les Rothschild. Presse grecque, le 7 février


Ambulance… vétuste de l’île de Kasos. Presse grecque du 7 février


Chauffage… dans un hôpital en Grèce. Presse grecque du 2 février 2017

Soyons consolés, la presse nous apprend en même temps que le véhicule-ambulance… visiblement vétuste de l’île de Kasos sera enfin remplacé. Petite victoire dirions-nous dans le déluge de la… répétition grecque. Les Grecs en sont épuisés, et pourtant, ils ont tellement manifesté dans les rues depuis 2010, et à présent, les marchands préparent comme toujours la saison forcément touristique, sauf que le… chaos (final ?) serait à portée de main. On entend résonner de partout ces craquements stridents de l’histoire immédiate.

Ce qui semble extraordinaire (mais qui ne l’est pas) tient également de l’empressement manifeste du “gouvernement” SYRIZA/ANEL quant à l’adoption violente en Grèce d’un nombre de mesures relevant de l’ordre totalitaire techno-féodal, cela sans commune mesure avec le passé de l’avant-mémorandum. Chaque fois que l’histoire se répète et s’accélère, le prix augmente. Parmi ces mesures figure la volonté affichée de faire disparaître la circulation de l’argent liquide.

Comme je l’avais souligné lors de l’interview récente accordée au site Insolentiae, en réalité, la Grèce est volontairement sortie du cadre économique supposé normal des économies occidentales, car “on” y expérimente autre chose… Tout d’abord, la guerre est faite à l’usage de l’argent liquide, d’abord pour le contrôle de la société, ensuite parce qu’en Grèce la circulation monétaire est perturbée, “il n’y a plus tellement d’argent pour faire circuler” comme on entend dire ici ou là.


Mur expressif. Athènes, 2016


Les commerçants préparent la saison. Athènes, février 2017


Retraités et manifestants. Athènes, 2013

Ces… Macronymies d’un futur orwellien ne sont guère lointaines, dans l’éventualité désastreuse bien évidemment où nous les laisserions s’accomplir comme elles l’entendent, sans que nous réagissions. Sur le site du Forum Économique Mondial, Ida Auken, femme politique au Danemark et… cousine (autant politique) clonée d’Emmanuel Macron (comme de “notre” Tsipras “Newborn”) signe un article qui ne laisse aucun doute quant aux intentions réelles de la caste dominante :

“Bienvenue dans l’année 2030. Bienvenue dans ma ville – ou devrais-je dire, ‘notre ville’. Je ne possède rien. Je ne possède pas de voiture. Je ne possède pas de maison. Je ne possède pas d’appareils ou de vêtements. Ce qui peut vous sembler étrange est cependant parfaitement logique pour nous dans cette ville. Tout ce que vous considérez comme un produit, devient désormais un service. Nous avons accès aux transports, à l’hébergement, à la nourriture et à toutes ces choses dont nous avons besoin dans notre vie quotidienne (…)”

“Et d’abord, la communication numérique est gratuite pour tout le monde. Puis, à partir du moment où l’énergie propre est devenue accessible à tous, les choses ont commencé à bouger rapidement. Le prix des transports a chuté de manière spectaculaire. Il n’a pas plus de sens pour nous de posséder une voiture, parce que nous pouvons appeler un véhicule sans conducteur ou une voiture volante pour nos longs trajets à tout instant. (…) Dans notre ville, nous ne payons pas de loyer, parce que quelqu’un d’autre utilise notre espace libre chaque fois que nous n’en avons pas besoin. Mon salon est utilisé pour des réunions d’affaires aux moments où je suis absente”.

“Une fois de temps à autre, je vais préférer cuisiner pour moi-même. C’est facile – le matériel de cuisine nécessaire est livré à ma porte en quelques minutes. (…) Lorsque les produits sont transformés en services, personne n’a d’intérêt pour que les choses aient une durée de vie courte. Tout est conçu pour la durabilité, la réparabilité et la recyclabilité. (…) Et c’est la mort du shopping.”

“Non aux collabos des banques”. Athènes, 2016


Le temps d’un café. Athènes, janvier 2017

Temps de pluie. Athènes, février 2017

“Shopping ? Je ne me souviens alors plus vraiment ce que ce terme signifie. (…) Car à partir du moment où les robots accomplissent une bonne partie de notre travail, nous avons soudainement le temps de bien manger, bien dormir, tout comme de retrouver d’autres personnes. Le concept de l’heure de pointe n’a plus de sens, puisque le travail que nous faisons se réalise alors à tout moment. (…) Certes, de temps en temps je me sens ennuyée du fait de ne pas avoir vraiment de vie privée. Je ne peux rien faire sans être enregistrée. Je sais que quelque part, tout ce que je fais, tout ce que je pense et tout ce dont je rêve, est enregistré en totalité. J’espère simplement que personne n’ira utiliser ces enregistrements (ces données) contre moi”, (Ida Auken, “Welcome to 2030. I own nothing, have no privacy, and life has never been better”, World Economic Forum’s Annual Meeting 2017).

Ida Auken appartient en réalité à cette caste des VRP du projet orwellien en gestation. Une fois le dessein accompli, tous ces politiciens auront achevé leur mission de mercenaire et alors ils disparaîtront tout simplement. C’est en ce sens seulement que ces gens, à l’instar d’Emmanuel Macron, d’Alexis Tsipras, de Kyriákos Mitsotakis (droite grecque), “agissent” encore. Ils incarnent les ultimes pilleurs des tombes des démocraties occidentales, “parlements” compris.

Dans le même (nouvel) ordre d’idées, on retrouve le prétendu revenu universel d’existence (forcément en monnaie virtuelle entièrement contrôlée par l’hyperclasse), la disparition de l’argent liquide, la dépossession imposée (en cours déjà en Grèce) à la classe moyenne de tous ses biens immobiliers et autres. En Grèce, on annonce pour 2018 une loi fiscale très… innovante. Toute personne physique signalera obligatoirement dans une liste, l’ensemble de biens dont elle possède, immobiliers, mobiles, argent liquide, pièces d’or, bijoux, œuvres d’art, un peu… à la manière des listes exigées des Juifs par les Allemands dans les années 1940. La suite est connue.


Devant le “Parlement” grec. Athènes, 2016

D’après les dispositions en gestation de cette future loi mémorandaire grecque, toute possession d’un bien sera frappée d’un impôt spécialement mis en place pour cette raison. Pourtant, dans presque tous les cas, au moment où ces biens ont été acquis ou hérités, des taxes (TVA) et parfois même certains types d’impôts avaient été perçus. Dans le même ordre d’idées, et de plus en plus officiellement, l’octroi de la maigre aide sociale en Grèce au bénéfice des démunis (et bientôt le versement des retraites) seront conditionnés suivant certains critères analogues. Pour ne pas mourir de faim, il ne faut posséder plus rien, ni biens immobiliers, ni biens mobiles.

Ida Auken ne dira rien du processus décisionnel, celui précisément qui régira “son” utopie pseudo-écologique. Le ridicule ne tue pas dirait-on. Elle s’avoue simplement inquiète… car elle ne saura rien faire sans être enregistrée. Ses actes, ce dont elle rêve, tout sera transcrit, noté et… elle espère simplement que personne n’ira utiliser ces enregistrements (ces données) contre elle. Bonne blague. Données d’ailleurs utilisées par qui ? Existera-t-il le moindre contrôle démocratique ? La réponse (même implicite) que son texte apporte est très clairement négative. Dystopie orwelienne, aux antipodes de ce que certains esprits lumineux essayent (même de manière incomplète pour l’instant) d’imaginer de démocratique après l’effondrement (en cours) du système actuel. Mon ami Jean-François Aupetigendre par exemple, dans son ouvrage Le porte-monnaie. Une société sans argent ?.


La récolte des olives. Peintre Theóphilos Hadjimichaíl, années 1930

Chaque fois que l’histoire se répète, le prix augmente. Nos politiques sont manifestement un train emballé sur une trajectoire désastreuse que nul ne semble pouvoir dévier. Mon ami Stélios n’en peut plus : “J’ai participé à toutes les luttes depuis 2010, j’ai tant espéré de ma mobilisation politique et du vote SYRIZA. Maintenant je sais. Notre monde d’avant 2010 n’est plus, et il ne sera plus jamais. Je dois exister, me maintenir en vie… trouver un sens, sinon, c’est la maladie ou le suicide. Depuis six mois je retrouve l’église de mon enfance et je prie. La prière me donne de la force, elle a un sens. L’Église, son surnaturel a bel et bien existé avant les ballottements du monde actuel. C’est alors du solide. Je me sens apaisé et déjà plus fort. Et c’est bien mieux que de lire des analyses, des philosophies, y compris parmi les meilleures. Car ces dernières ne nous sortent pas des interrogations et des problèmes tandis que la prière si…”

Ou encore comme l’écrivait à sa manière l’archéologue et anthropologue Joseph Tainter, “l’effondrement, s’il doit se produire à nouveau, se produira cette fois à l’échelle du monde. (…) La civilisation mondiale se désintégrera en bloc”. (“The Collapse of Complex Societies”). Et après ?

Processus déjà en cours… à la manière de la Sécurité sociale grecque et des cancérologues qu’elle sollicite à sa guise. Estimation écrite quant au temps qui resterait à vivre à leurs patients.

Au même moment, en Grèce toujours (et ce n’est pas par hasard), les “gouvernants” européistes poussent partout au remplacement forcé de l’ancien olivier grec (rien qu’en Crète il y a plus d’une centaine d’oliviers vieux de plusieurs siècles), par un olivier hybride importé et imposé. Seuls les producteurs… de l’arbre nouveau seront dorénavant subventionnés, lors de l’accès aux pressoirs par exemple. Nous nous préparons donc en plus… à la “Guérilla de l’olive” contre ces nouveaux hybrides, en réalité contre l’hybris (Giórgos Lekkakis, “La guérilla de l’olive”, janvier 2017).

Macronymies d’un futur forcement orwellien ? Le choix ne doit plus nous échapper… L’avenir, toujours énigmatique, comme dans un plateau !

 
Dans un plateau. Chat de Greek Crisis, février 2017

* Photo de couverture : manifestants devant le ministère de la Santé. Athènes, 2013 
 

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