Ils devraient notamment s'engager à renforcer l'encadrement des antibiotiques, à mieux diffuser la connaissance sur ce phénomène, et à encourager les traitements alternatifs, selon un texte devant être soumis aux responsables. Actuellement, l'OMS estime que 700 000 morts sont liées à la résistance aux anti-microbiens.
Mais une récente étude britannique a estimé que le développement croissant de ces super-bactéries résistantes pourrait tuer 10 millions de personnes d'ici à 2050. Franceinfo a tenté d'y voir plus clair, en interrogeant Philippe Glaser, directeur de l'unité d'écologie et d'évolution de la résistance aux antibiotiques à l'Institut Pasteur.
Franceinfo : Qu'est-ce qu'une super-bactérie exactement ?
Philippe Glaser : C'est une bactérie qui est extrêmement virulente et qui a développé une résistance aux antibiotiques que l'on utilise normalement pour la tuer. Ce dernier processus est naturel chez les bactéries. Le problème, c'est que ces capacités de résistance peuvent être accentuées au sein d'une population de bactéries à cause de l'usage excessif d'antibiotiques.
Prenons l'exemple d'une population d'un milliard de bactéries, présente dans l'organisme. Parmi elles, une a muté et est ainsi devenue insensible à l'antibiotique en question. Si on utilise cet antibiotique, toutes les autres bactéries vont mourir, sauf celle-ci. Elle aura donc plus de place pour se multiplier et occuper cette niche.
Concrètement, en utilisant un antibiotique dans le cas d'une infection urinaire, on va tuer toutes les bactéries sensibles. Mais on va aussi permettre à la super-bactérie mutée de se développer. L'infection pourrait être du coup, dans certains cas, encore plus grave.
Est-ce pour cela que les pouvoirs publics ont lancé le célèbre slogan "les antibiotiques, c'est pas automatique" ?
En partie, oui. L'usage d'antibiotiques sans raison valable comporte le risque de créer des réservoirs de gènes résistants. Les bactéries ont la particularité de pouvoir échanger de l'ADN, un peu comme une forme de sexualité. Une bactérie A résistante à un antibiotique peut donc transmettre cette capacité à une bactérie B qui y était initialement sensible. Et ces passages de gènes peuvent se faire entre les bactéries de différentes espèces.
Les antibiotiques ne sont pas des traitements ciblés et ne tuent pas qu'un type précis de bactérie. En prenant, sans en avoir besoin, un antibiotique contre le pneumocoque, par exemple, on va tuer le reste de la flore de la gorge. Parmi ces bactéries inoffensives, seules celles qui sont résistantes à l'antibiotique vont survivre.
Cela va donc créer un réservoir de ce gène de résistance. Et le jour où le patient sera réellement atteint par le pneumocoque, ces bactéries auront à leur disposition un réservoir de gènes résistants qui pourront leur être transférés. Elles deviendront alors des super-bactéries.
Le problème de l'usage excessif d'antibiotiques est connu des professionnels depuis longtemps. Pourtant, il ne fait que s'aggraver. Pourquoi ?
Il faut comprendre que le problème est mondial, parce qu'il y a une circulation des souches, à travers les patients. On retrouve dans certains pays, comme en Asie du Sud-Est, des concentrations importantes de bactéries résistantes. Lorsqu'on voyage dans ces pays et qu'on retourne en France, on ramène des bactéries avec nous, logées dans notre tube digestif.
La prise de conscience que l'usage excessif d'antibiotiques peut être contre-productif a déjà eu lieu dans de nombreux pays. Mais ce n'est pas le cas partout. Dans certains Etats, il n'y a aucun contrôle de l'usage des antibiotiques. Ils peuvent être achetés sans ordonnance et parfois, ce sont des contrefaçons avec des doses trop faibles et donc peu efficaces. Tout cela va favoriser la sélection de souches résistantes, et va avoir un impact au niveau mondial. C'est justement pour ces raisons que les dirigeants de l'ONU se réunissent.
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