17 avril 2015

Ne plus "vivre ensemble" : la municipalité déverse de la boue sur le campement de Roms de Busignies


 
Ce jeudi matin, la municipalité d’Haubourdin a fait déverser de la boue devant le campement rom du chemin de Busignies. Deux camions pleins se sont succédé, un troisième a été stoppé. Le conseil général, de son côté, a porté plainte contre la nouvelle installation des familles.

Un groupe d’associatifs et de professeurs se tient devant les bâches bleues du campement où vivent cinq familles roms, chemin de Busignies. Ils ne savent pas quoi faire. « Et si on s’allongeait par terre ? », tente une femme.

Ils sont une petite vingtaine à contempler, impuissants, les camions dépêchés par la municipalité qui déversent de la boue devant les maisonnettes. Deux camions se succèdent, sous l’œil également de la police municipale d’Haubourdin. Ils parviennent à en arrêter un troisième. La terre, quasi liquide, a coulé le long du camp, à droite de l’entrée. « C’est de la terre humide qui vient des terrains agricoles », précise Bernard Delaby. « C’est une décharge illégale ! », s’exclame un associatif.

Les Roms étaient sous le coup d’une expulsion, mesure prise par le tribunal de grande instance de Lille : ils devaient quitter les lieux le 9 avril dernier délai. Nuance, précise Anne Dhalluin, du collectif Roms loossois, « ils devaient quitter les parcelles B71 et B72, appartenant à la Métropole européenne de Lille (MEL) ». Ce qu’ils ont fait... pour aller s’installer sur la parcelle juste à côté (lire en pages Région), appartenant au conseil général. Tout cela pour « gagner du temps », afin que les enfants terminent leur année scolaire.

Mais le Département ne l’entend pas de cette oreille. « On a eu connaissance ce matin que les Roms se déplaçaient entre les deux parcelles », indique-t-on au cabinet de Jean-René Lecerf, nouveau président du Département. Qui a vite déposé une plainte, afin d’engager une procédure de flagrance. Cela sert à « mettre en œuvre des moyens plus coercitifs », pour accélérer l’évacuation, « comme des saisies, des perquisitions, des gardes à vue, des auditions ».

Le maire Bernard Delaby (divers-droite) n’attend pas. Comme il l’avait évoqué devant les associations, il a fait déverser de la boue. Au risque de choquer des Haubourdinois : « C’est complètement scandaleux, inacceptable ! Ils se sont fait justice eux-mêmes ! », s’indigne un riverain, Antoine Bardet. L’édile dit agir au nom des riverains : « « Est-ce que vous êtes là le soir, la nuit, quand ils brûlent des câbles, quand ils utilisent des tronçonneuses ? Les enfants ne peuvent pas dormir ! » Les bénévoles comptent venir avec des pelles ce week-end.

«On se moque de moi, de mon autorité!»

Bernard Delaby, maire divers droite d’Haubourdin, a fait un geste symbolique, en faisant déverser de la boue devant le campement rom du chemin de Busignies. Interview.

– Pourquoi déverser de la boue devant le campement ?

« Ce n’est pas de la boue, mais de la terre humide qui vient de terrains agricoles. On se moque de moi, de mon autorité en tant que maire. On s’installe sur des terrains de façon illicite. J’en ai ras-le-bol ! »

– Oui mais pourquoi utiliser une telle méthode ?

« Je n’ai pas d’autre méthode ! Et la ville accueille déjà trois familles dans des logements privés. Nous avons une trentaine de personnes issues des populations migrantes. J’en ai dix en face de chez moi, dans un appartement, et ça ne pose pas de problème. Je suis respectueux de la loi, je n’ai pas d’autre solution. Ils sont arrivés en mai 2014, vous vous rendez compte ? Ça fait bientôt un an qu’ils doivent partir. »

– Vous dites que vous agissez en phase avec les riverains, mais dans les écoles où les Roms sont scolarisés, ça se passe bien...

« Oui, parce qu’il y a des enseignants qui font tout pour que cela se passe bien. Est-ce que vous êtes là, la nuit, quand ils brûlent des câbles, quand ils font fonctionner leurs tronçonneuses ? Les enfants ne peuvent pas dormir ! Ces bénévoles qui les aident, qu’ils les prennent dans leurs jardins ! »

– Les Roms ne sont toujours pas partis, malgré votre action. Que comptez-vous faire maintenant ?

« S’ils ne partent pas demain, je trouverai d’autres solutions, je veux les voir partir ! Je ne peux pas les accueillir à Haubourdin. »
[...]

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