04 avril 2015

La DGSI connaissait les frères Kouachi, mais ne les surveillait pas !


La DGSI connaissait les frères Kouachi, mais ne les surveillait pas. Le Monde révèle les manquements de Direction générale de la sécurité intérieure, dus notamment à une mauvaise collaboration des services. Il montre aussi comment le gouvernement a tenté de couvrir ces erreurs et ces approximations.
Les manquements, ils sont connus des agents, comme le montre cet échange téléphonique dont le quotidien a eu connaissance entre un agent de renseignements territorial (ancien RG) et l'ancien syndicaliste policier Jo Masanet. Nous sommes le 8 janvier, le lendemain même des attentats. À propos des Kouachi, l'agent lâche : "Bon, par contre... faut savoir que, heu... on avait déjà sur les individus... on les avait suivis, on les avait sur notre base de données." Avant de reconnaître : "On avait constaté que la DGSI était dépassée par les événements (...), on a un gros souci, là-dessus..."

"Manipulation"

Saïd était en effet dans le collimateur de la direction du renseignement de la préfecture de police de Paris (DRPP) depuis février 2014, comme Le Point le révélait récemment. Problème : en juin 2014, la DRPP cesse les écoutes et les filatures de l'aîné des Kouachi parti à Reims, hors de sa juridiction.

Le 10 janvier, le ministère de l'Intérieur confie à une dizaine de journalistes sa version du dispositif mis en place pour surveiller les Kouachi. Selon la Place Beauvau, Chérif Kouachi a été surveillé jusqu'à la fin de l'année 2013, puis son frère jusqu'à l'été 2014, sans que rien ne puisse laisser penser qu'ils préparaient une action quelconque. Quant aux écoutes administratives, elles ont été interrompues à la demande de la Commission nationale de contrôle des interceptions de sécurité (CNCIS).

Mais, deux jours plus tard, la CNCIS dément catégoriquement : "À aucun moment, [la commission] n'a manifesté d'opposition. (...) Les informations contraires sont, par conséquent, au mieux une inexactitude, au pire une manipulation." Un démenti qui, écrit le Monde, suscite peu d'écho.

Pourtant décédés, les parents mis sur écoutes

Le Monde liste d'autres approximations des services. Pendant la traque, le 7 janvier, la note de renseignement sur Saïd Kouachi n'est pas à jour. Datant d'avant 2012, elle ne mentionne ni son mariage, ni sa paternité, ni surtout les fiches qui le présentent comme un islamiste radical international dont les voyages à l'étranger pourraient "compromettre la sécurité nationale". Ce n'est que deux jours plus tard que les informations seront actualisées. Sur le mandat de recherche de Saïd, les trois adresses sont inexactes. Corrigeant rapidement son erreur, le renseignement donne trois autres adresses sur le nouveau mandat. Elles sont elles aussi erronées.

Quant à son frère Chérif, il n'a été que sommairement surveillé pendant les trois ans qui suivent sa condamnation dans l'affaire de la filière djihadiste de Buttes-Chaumont, explique Le Monde. Juste après les attentats, la DGSI met sur écoutes une ligne censée être celle des parents des deux terroristes en Algérie. Sauf que ceux-ci sont décédés depuis plus de vingt ans.

Le contrôle plus qu'approximatif des deux terroristes rappelle étrangement les erreurs commises par la DCRI en 2010 lorsqu'il s'agissait de surveiller Mohamed Merah à Toulouse et à Montauban. Manuel Valls, alors ministre de l'Intérieur, avait remplacé la DCRI par la DGSI afin de mieux organiser les services de renseignements et éviter les mêmes erreurs. C'est raté ! Selon Le Monde, l'obsession de la DGSI pour les jeunes tentés par le djihad l'a détourné de la surveillance des "vétérans", ceux qui étaient déjà passés à l'acte. Il ne s'agit pas, précise le quotidien, de dire que les attentats auraient pu être évités, mais de s'interroger sur les lacunes des services de renseignements au moment où le Parlement s'apprête à accroître considérablement leurs prérogatives.

Source

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.