10 décembre 2014

Le Parlement américain vote la guerre

Le Parlement américain a voté la semaine dernière en faveur d’une résolution antirusse tant truffée de propagande guerrière qu’elle rivalise avec la rhétorique de la Guerre froide. Ironiquement, cette résolution condamne principalement la Russie pour avoir commis les mêmes actes que ceux perpétrés par les États-Unis depuis des années déjà en Syrie et en Ukraine.

L’une des raisons citées pour justifier la condamnation de la Russie est l’imposition par le pays de sanctions économiques contre l’Ukraine. Mais combien de vagues de sanctions le gouvernement des États-Unis a-t-il imposé à la Russie rien que l’année dernière ? Je suppose que les sanctions ne sont une mauvaise chose que lorsqu’elles sont mises en place par des pays que Washington n’apprécie que très peu.

La résolution condamne la Russie pour avoir vendu des armes au gouvernement d’Assad en Syrie. Mais les États-Unis ont eux-mêmes fourni des armes aux rebelles syriens des années durant, armes dont une grande partie a fini entre les mains de groupes terroristes comme Al-Qaeda et l’EIIL, contre lesquels les États-Unis se battent aujourd’hui.

La résolution condamne ce qu’elle justifie être une invasion d’Ukraine par la Russie (dont elle n’apporte aucune preuve) et la violation par la Russie de la souveraineté de l’Ukraine. Mais ce sont les États-Unis qui, en organisant un coup contre le gouvernement démocratiquement élu de Yanukovich en février dernier, ont les premiers violé la souveraineté du pays. Et pour ce qui est de la présence militaire en Ukraine, ce sont les États-Unis qui ont ouvertement envoyé des forces spéciales et autres conseillers militaires pour assister le nouveau gouvernement. Combien de fois les généraux américains et la CIA ont-ils visité Kiev pour y offrir leurs conseils et bien plus encore ?

La résolution condamne la Russie pour avoir « tenté d’obtenir des informations relatives au gouvernement américain de manière illicite ». Mais Snowden nous a déjà appris que la NSA espionne tout le reste du monde, dont les alliés des États-Unis. Comment les États-Unis peuvent-ils revendiquer l’autorité morale de condamner des actions similaires chez les autres ?

La résolution s’en prend aux médias russes contrôlés par le gouvernement, et les accuse de « distordre l’opinion publique ». La loi demande en même temps à ce que les milliers d’organisations médiatiques financées par les États-Unis se concentrent sur cette région du monde. Elle cherche également à obtenir des « réponses appropriées » à l’influence des médias russes dans le reste du monde. Voilà qui ne veut rien dire de plus qu’une pression imminente par les diplomates américains en vue de fermer certaines chaînes de télévision comme RT.

La résolution condamne ce qu’elle considère être l’approvisionnement d’armes à l’Ukraine orientale russophone, qui cherche à se rapprocher de la Russie, tout en demandant à ce que le gouvernement des États-Unis fournisse des armes au camp adverse.

Comme je l’ai dit plus haut, il s’agit là de l’une des pires lois que je n’ai jamais vues. Et croyez-moi, j’ai pu en voir un certain nombre. Il ne s’agit de rien de plus que d’une propagande guerrière, qui a toutes les chances de nous mener vers des conséquences inattendues.

Seuls dix membres du Parlement – cinq membres de chaque parti – se sont opposés à cette résolution. Je suppose qu’une majorité de ceux qui ont voté en sa faveur n’ont même pas pris le temps de la lire. Ceux qui l’ont lue ont peut-être pensé que le Sénat ne l’approuverait jamais, et ont décidé de voter favorablement afin de faire plaisir aux faucons de leur district – et continuer de s’attirer les bonnes grâces du gros faucon qui gère la politique étrangère à Washington – sans s’inquiéter des conséquences.

Quelle que soit leur excuse, mieux vaut garder l’œil sur ces membres du Parlement qui cherchent à nous porter plus proches encore d’une guerre avec la Russie. Nous devrions remercier les dix membres qui ont su résister à la propagande de guerre. Les faucons de Washington pensent que les élections du mois dernier leur ont offert le droit de déclencher plus de guerres encore. Nous devons aujourd’hui plus que jamais nous opposer à eux.

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