11 février 2018

La France est-elle encore réellement un État ?


Valérie Bugault nous propose une série de deux articles en écho à l’interview de Xavier Moreau publiée récemment sur le site des Non Alignés. Dans ce premier article, elle reprend les mots de l’interviewé qui parle d’État socialiste pour qualifier la France. Dans un second article à venir, elle commentera l’analyse que Xavier Moreau fait du Bitcoin et développera la sienne.

Cela permet aussi de montrer que sur des sujets aussi complexes, on peut avoir des analyses différentes. En 5000 mots, Valérie Bugault prend le temps d’aller au fond des choses alors qu’en quelques minutes, au pied levé comme le fait Xavier Moreau, et en articulant en plus le sujet avec la situation en Russie, on reste dans le commentaire de surface.

Avant de vérifier la réalité de l’aspect politique de cette assertion, il faut s’assurer, au préalable, que la France est encore effectivement un « État ».

1 – La France est-elle un État ?

Un État se définit essentiellement par une autonomie de gestion politique sur un territoire déterminé. Par gestion il faut entendre la capacité à prendre des décisions fondamentales en toute autonomie. Cette autonomie, qui suppose une autonomie en matière législative et juridictionnelle, doit s’appliquer aux domaines économique et social mais aussi au domaine de la défense, à la fois du territoire de l’État et de ses ressortissants.

1.a Qu’en est-il de l’autonomie décisionnelle de la France en matière économique et sociale ?

En ce domaine, on ne peut que constater que la France a, très largement et à plus d’un titre, perdu, en tant qu’entité politique, toute capacité décisionnelle effective. Son intégration dans la construction européenne (eurozone, Traité de Lisbonne, et les traités annexes tel Schengen) à vocation fédéraliste lui a fait perdre, de façon fonctionnelle et organique, l’essentiel de son autonomie en matière de politique économique et sociale ainsi qu’en matière monétaire.

Concernant ces questions, il faut toutefois préciser le contexte : ce sont bien effectivement les instances dirigeantes de la France qui, à un moment donné et en toute « souveraineté politique » ont fait délibérément le choix de la perte de leur souveraineté pour l’avenir. Il faut d’ailleurs insister sur le fait que ce choix a été largement fait, initialement, à l’insu du peuple français, et finalement contre son consentement – souvenez-vous à cet égard du NON des Français au référendum concernant la prétendue « Constitution européenne » aussitôt contourné par les « représentants politiques du peuple » qui ont validé le Traité de Lisbonne.

Il faut encore préciser que le transfert de la gestion monétaire à la BCE n’a pas fondamentalement changé la problématique monétaire car la Banque de France a toujours, comme toute les banques centrales peu ou prou, avec des variations d’intensité en fonction de la qualité des chefs politiques avec lesquels elle cohabitait, été contrôlée par la caste financière dominante.

1.b Qu’en est-il de l’autonomie politique de la France en matière législative et juridictionnelle ?

À titre préliminaire, précisons que les fonctions législative et juridictionnelle ont été ici délibérément associées, car elles sont politiquement liées.

En effet, la fonction étatique consistant à assurer la « justice » consiste à faire appliquer les lois en vigueur. Cette fonction est donc intégralement dépendante des lois en question : si les lois qu’il s’agit de faire appliquer sont d’origine étatique, la fonction juridictionnelle sera également, de façon fonctionnelle, d’ordre étatique. En revanche, si les lois qu’il s’agit de faire appliquer sont d’origine non étatique ou supranationales (supra-étatique), dans ce cas, la fonction consistant à faire appliquer lesdites lois ne sera plus, fondamentalement, de nature étatique. Dans ce dernier cas de figure, si la gestion technique de la fonction juridictionnelle (« la justice ») peut conserver, au moins partiellement, une nature étatique, sa finalité échappe en revanche de façon définitive à l’État en question, puisque les lois qu’il s’agit de faire respecter ne sont pas à strictement parler des lois décidées par l’État.

Or, avec la construction européenne, la France se trouve, précisément, dans cette dernière hypothèse. Les lois relayées sur le territoire français sont, dans leur très grande majorité, des exigences relevant de la mise en application des traités européens au moyen tant du droit dérivé que des grandes directives de politiques économiques (les fameuses GOPE), annuellement déterminées par les ministres des finances et de l’économie (réunis dans Ecofin) des différents pays de l’Union.

La compétence étatique, stricto sensu, étant ainsi en grande partie éliminée de la fonction législative, la fonction juridictionnelle, liée à la première, échappe également, par voie de conséquence, à l’État. Les traités européens organisent d’ailleurs précisément un système juridictionnel qui chapeaute les juridictions étatiques afin de garantir la bonne mise en œuvre par les États des traités européens.

Il faut noter que le système consistant à rendre les lois et leurs applications indépendantes des entités politiques étatiques n’est pas propre à la construction européenne. On le retrouve au sein de l’Organisation mondiale du commerce. Une fois ratifiés par les États (le plus souvent dans la plus grande opacité vis-à-vis des populations), les traités commerciaux multilatéraux qui sont négociés par des « autorités compétentes » (lesquelles ne sont jamais des personnalités désignées par mandat populaire ad hoc, insistons là dessus), s’imposent à toutes les entreprises des États parties prenantes de l’accord. Par voie de conséquence, ces Traités se trouvent régenter la vie économique des populations situées sur le territoire des États parties du dit Traité. Ce mécanisme de traités multilatéraux s’accompagne de façon systématique d’un mécanisme dit « de règlement des différends » qui se traduit concrètement par une justice arbitrale, payée par les parties au litige, et qui n’a rien à voir avec une quelconque justice étatique.

La structure de la construction européenne se trouve suivre exactement la même voie que celle initiée postérieurement, au niveau mondial, par l’OMC.

Pour en revenir à la construction européenne, une arme puissante, à côté du droit dérivé, au service de la Commission (organe exécutif de cette construction supranationale) pour imposer et garantir l’application par les États des exigences supranationales incluses dans les traités européens est une arme de nature juridico-financière appelée « Aide d’État ». Les États qui favoriseraient leurs entreprises publiques nationales aux dépens d’entreprises plus ou moins formellement rattachées à d’autres États membres se voient infliger des amendes suffisamment dissuasives pour que ces États récalcitrants renoncent à leur préférence nationale en matière économique.

En matière législative, il faut garder à l’esprit que le modèle civilisationnel promu par la Construction européenne est le modèle anglo-saxon, de nature fondamentalement commerciale. Ainsi, contrairement aux anciennes préconisations du droit continental (qui était, jusqu’à récemment, le modèle de droit français), le commerce constitue l’alpha et l’oméga du « droit » désormais applicable dans tous les États membres de l’Union Européenne. Ici encore, il faut préciser afin d’éviter tout contresens : par « commerce » il faut entendre « défense des intérêts des multinationales et de leurs propriétaires ».

En conclusion, le modèle de droit anciennement applicable aux pays européens continentaux, directement issu du droit romain, a aujourd’hui quasiment disparu au profit du droit anglo-saxon promu tant par les institutions européennes que par les institutions internationales (OMC). En perdant le contrôle de son modèle de « droit » la France a également perdu le contrôle de sa « justice ».

Aussi, en matière législative et juridictionnelle, il ne saurait plus être question, en France, de « souveraineté nationale ». L’organisation sociale sous forme étatique tend à laisser la place à une organisation sociale de type commercial gérée par et pour les intérêts privés des multinationales, au premier titre desquelles se trouvent les conglomérats financiers et bancaires.

1.c Qu’en est-il de l’autonomie politique de la France en matière de défense de son territoire et de ses ressortissants ?

1c.1 L’autonomie politique dans la gestion des armées est un autre aspect de la souveraineté étatique. Or, en ce domaine également, la souveraineté est fortement mise en question. En matière militaire, les autorités politiques françaises ont délibérément fait le choix (opéré par l’ancien Président Nicolas Sarkozy et jamais démenti par ses successeurs) de resserrer les liens organiques vis-à-vis de l’OTAN, laquelle institution est fonctionnellement sous commandement étasunien.

1.c.2 Il faut par ailleurs garder à l’esprit que la défense du territoire suppose l’existence d’un territoire justement défini. Or en l’occurrence, le territoire français tend, dans une très large mesure, à se brouiller. Les frontières extérieures se brouillent en raison du fait que les traités européens stipulent la disparition des frontières étatiques en matière de circulation des capitaux et des personnes. En interne, l’organisation territoriale de l’État se brouille en raison du postulat « fédératif » de la même construction européenne : de déconcentration en décentralisation, l’objectif de la construction européenne contraint l’État à organiser sa propre disparition en tant qu’entité politique, au profit de la constitution de vastes régions dépendantes, pour leur défense, de la maison mère « unionesque ».

1.c.3 Concernant la sécurité des ressortissants français, alors que celle-ci devrait être garantie par les services de renseignement étatiques, la presse a relayé le fait que lesdits services (au moins certains d’entre eux) ont délégué des fonctions essentielles d’analyses à leurs homologues américains. Là encore, la tendance est à la disparition de la souveraineté étatique.

Ajoutons que si la lutte contre le terrorisme reste formellement de la compétence des autorités étatiques, en pratique, cette lutte passe par une coordination renforcée desdites autorités avec celles des autres États de l’Union.

Par ailleurs, les attentats du 11 septembre 2001 aux États-Unis ont eu un impact sur un nombre considérable de pays alliés, dont la France (et tous les pays de l’Union européenne), qui se sont vus espionnés à leur tour et éventuellement sommés de resserrer l’intégration de leurs propres services de renseignements avec leurs homologues américains.

Il résulte de ces constats que l’autonomie décisionnelle des autorités étatiques françaises est aujourd’hui, en matière de défense du territoire (lequel territoire devient de plus en plus difficile à identifier), autant qu’en matière de défense de ses ressortissants, dans une large mesure, tronquée ; de telle sorte que l’on peut, dans ces domaines également, se poser la question de l’existence d’une réelle souveraineté nationale.

1.d Conclusion : la France n’est, stricto sensu, plus un « État »

Pour toutes les raisons analysées plus haut, et pour beaucoup d’autres allant dans le même sens, la France ne peut plus, fonctionnellement et organiquement, être qualifiée d’« État » en tant qu’entité politique à part entière : les fonctions, dites régaliennes, ont désormais déserté le rattachement étatique français. Une observation attentive des faits et des institutions révèle, de façon tout à fait objective, que la France n’est plus un État.

L’apparence étatique n’est en réalité qu’une coquille vide dépourvue de réalité politique et institutionnelle. Cette apparence ne sert qu’à tromper l’électorat qui croit encore voter pour des hommes en charge des affaires publiques.

Insistons sur le fait que nous ne prenons pas, à l’occasion de cet article, partie sur la question de la légitimité de la disparition de la France en tant qu’entité politique ; cette question, essentielle, relève d’un autre débat, un débat de nature politique qui excède largement le cadre d’un modeste article d’information. Le présent article a pour seul objet de faire une analyse fonctionnelle, organique et technique, de l’« État » français.
 
2 – La France est-elle socialiste ?

Nous avons démontré, dans la première partie du présent article, que la France ne peut, en aucun cas être qualifiée d’État. La France peut-elle néanmoins être qualifiée de « socialiste » ?

Il faut ici garder à l’esprit deux problèmes de nature différente. Le premier problème résulte du fait que, n’étant plus une entité politique autonome, qualifier la politique suivie par la France de « socialiste » ou « libérale » ou encore « ultra-libérale » n’est fondamentalement pas pertinent.

Le second problème relève de la question idéologique. Les termes « socialiste » ; « libéral » ou encore « ultra-libéral » sont très fortement connotés de façon idéologique. Or, afin de bien percevoir les tenants et aboutissants de la situation politique actuelle, il importe de faire la juste part des choses entre 1° les « faits » bruts et incontestables qui relèvent d’une observation neutre, 2° la terminologie employée et 3° la charge idéologique éventuellement portée par les termes utilisés.

Afin de dépassionner le débat nous proposons une approche dés-idéologisée du terme « socialiste ». Ainsi conçu, le terme « socialiste » ferait référence à l’existence d’une politique essentiellement, voire exclusivement, tournée vers la défense des membres les plus faibles de la collectivité en question.

Par membres les plus faibles, il faut entendre d’une part les personnes qui sont devenues économiquement faibles suite à un choc, que ce dernier soit de nature personnel (accident, maladie, choc psychologique ou affectif) ou de nature collective, lié par exemple à une politique étatique de délocalisation ou d’orientation ou réorientation globale des activités de l’État dans une direction différente de celle pour laquelle ses ressortissants étaient préparés par formation ou formatage. Par « membres les plus faibles » il faut aussi entendre ceux qui, par naissance, sont dépourvus des capacité motrices ou cérébrales leur permettant de s’insérer de façon harmonieuse ou facile dans la vie collective.

Ainsi compris, une politique socialiste s’entendrait d’une entité politique qui prendrait des positions tendant à protéger les membres de la collectivité ayant des difficultés, conjoncturelles ou structurelles, à s’insérer dans un ordre social établi.

Ce postulat établi, deux évidences doivent être soulignées. La première est que, comme indiqué plus haut, le qualificatif « socialiste » ne peut s’appliquer qu’à une « entité politique autonome » ce que la France n’est pas. La deuxième évidence est que le terme « socialiste » ne peut en aucun cas être appliqué en présence d’une entité politique qui elle-même, par ses propres décisions ou par le relais qu’elle ferait de décisions prises ailleurs, organiserait de façon systématique et permanente l’apparition de difficultés conjoncturelles empêchant ses ressortissants de s’insérer harmonieusement dans une « vie collective ». A fortiori, et de façon logique, une entité politique qui s’acharnerait à faire disparaître la possibilité de « vie collective » qui suppose une certaine cohésion sociale sur son territoire est, de facto, une entité politique qui ne saurait être qualifiée de « socialiste ».

2.a La France est-elle, en matière fiscale et sociale, le relais d’une politique de défense du plus faible ?

La réponse est OUI si l’on regarde, de façon très superficielle, l’existence de schémas redistributifs, à savoir l’existence d’allocation chômage, de retraites par répartition et de participation collective aux soins. Toutefois, ces constats sont des héritages mis en place le 15 mars 1944 par le CNR, ils relèvent donc de l’histoire de France et non de décisions actuelles des dirigeants politiques. Rappelons d’ailleurs que les instances politiques ont clairement, en 2007, pris officiellement position contre les acquis sociaux de cette époque. Prise de position que les gouvernements successifs se sont tous affairé à mettre consciencieusement, souvent sous le prétexte des obligations européennes, en œuvre.

L’organisation de la fiscalité actuelle, à y regarder de très loin, pourrait également laisser l’impression que le système français est redistributif, et donc « socialiste » en raison, essentiellement, de l’existence d’un impôt sur la fortune, d’une progressivité de l’impôt sur les revenus, et de la TVA qui ne taxe que la création de richesse par le biais (le relais) de la consommation. Toutefois seule une analyse extrêmement superficielle peut laisser croire que la France a une politique fiscale en faveur de ses membres les plus fragiles. Et il faut au surplus y mettre une bonne dose de mauvaise foi.

2.a.1 Premièrement, cette analyse fait une totale abstraction du fait, essentiel, principal, selon lequel les grandes fortunes (et les multinationales) échappent aujourd’hui, quasi intégralement, à la fiscalité nationale en allant mettre leurs avoirs à l’abri dans les paradis fiscaux artificiels, qui sont des entités territoriales entièrement gérées par des institutions financières.

Il faut ici préciser que les personnes moyennement fortunées ou les petites et moyennes entreprises qui tentent leur chance du côté des paradis fiscaux, sont les premières rattrapées par le fisc de leur pays d’origine ; économiquement plus fragiles, elles n’ont pas l’assise financière leur permettant de s’entourer des bons conseils. L’accès aux paradis artificiels financiers est, de facto, réservé aux plus fortunés

2.a.2 Deuxièmement, les impôts dits sur la fortune que la France perçoit sont des impôts qui sont assis sur de la matière non délocalisable, c’est-à-dire, exclusivement à partir de 2018, les biens immobiliers bâtis puisque les valeurs mobilières, les œuvres d’art et les forêts échappent à ce type d’impôt.

Or, seuls les contribuables très moyennement fortunés ont leurs avoirs placés en immobiliers bâtis, les autres ayant les moyens de diversifier leurs patrimoines de façon à échapper à l’assiette de cette imposition. Ces biens immobiliers font par ailleurs l’objet de double taxation car ils ont été acquis avec des revenus déjà taxés au titre de l’impôt sur le revenu. Ces biens, y compris les malheureux abris de jardin, font en outre l’objet de multiples impositions locales.

Il faut encore ajouter que les seuils d’imposition sur la fortune immobilière ne doivent pas faire illusion car le spectaculaire et récent enrichissement des classes financières a engendré une très conséquente inflation des prix de l’immobilier dans la plupart des grandes villes, générant au passage une surexposition des modestes propriétaires à l’impôt immobilier français. Il est au surplus fortement question aujourd’hui de taxer la détention de biens immobiliers au titre de l’économie d’impôts que feraient leurs propriétaires par rapport à des non-propriétaires qui doivent louer leur local d’habitation.

Il faut aussi se rappeler que l’impôt immobilier, devenu « enfer fiscal » pour les Français est en revanche un « paradis fiscal » pour certains ressortissants étrangers, comme les Qataris, qui bénéficient par la grâce de l’ancien président Sarkozy d’une exonération totale. Ainsi, même en matière de taxation immobilière, la préférence nationale n’est pas, en France, à l’ordre du jour. Il faut au contraire constater que la France pratique la préférence étrangère, y compris en matière de taxation des biens immobiliers.

En bref, la surimposition de la propriété foncière bâtie n’est en aucune façon un signe évident de protection des plus faibles. Au contraire, ce type d’impôt, sur des biens non liquides, irait plutôt dans le sens de la paupérisation des classes moyennes pendant que les États et surtout les entités supranationales telles que l’OCDE et l’OMC organisent l’impunité des très riches par le biais de la liberté mondiale de circulation des capitaux.

2.a.3 Troisièmement, s’agissant de l’imposition des sociétés françaises, si l’on cumule le nombre considérable de taxes et d’impôts (y compris leurs exigences déclaratives) avec d’une part le taux élevé de l’impôt sur les sociétés et d’autre part l’inénarrable complexité et fluctuation annuelle, voire pluriannuelle, du système, on ne peut absolument pas en déduire que le système fiscal bénéficie aux petites et moyennes entreprises.

2.a.4 Quatrièmement, l’efficacité en termes de justice sociale de la taxe sur la création de richesse qu’est la TVA, est extrêmement pondérée pour ne pas dire limitée, par le fait que cet impôt se cumule avec tous les autres qui sont beaucoup plus discutables du point de vue de la justice sociale.

2.a.5 Cinquièmement, tout progressif qu’il soit, l’impôt sur le revenu (assiette étroite, taux relativement élevé), ne frappe que moins de la moitié des ressortissants de l’État français ; ce dernier se cumule par ailleurs avec la CSG et la CRDS (assiette large, taux relativement – bien que de moins en moins – bas). Alors que la CSG et le CRDS étaient initialement conçues pour remplacer l’impôt sur le revenu, devenu socialement injuste, la réalité est que ces trois taxations se cumulent.

2.a.6 En conclusion, le seul constat que l’on puisse faire est que les ressortissants français (personne physique ou personne morale de petite ou moyenne taille) font, d’une façon générale, l’objet d’un matraquage fiscal. D’une façon générale, le nombre délirant d’impôts et taxes en tout genre, qui s’appliquent, à un titre ou à un autre, aux Français n’est pas un gage de cohésion sociale mais au contraire le signe d’une volonté de paupérisation de la classe moyenne qui engendrera, à son tour, des carences dans la cohésion sociale, y compris la cohésion intergénérationnelle. Dit autrement : le matraquage fiscal systématique des Français – à l’occasion allié au principe de « préférence étrangère » – non seulement ne bénéficie en aucun cas aux plus fragiles mais a surtout pour effet une nette paupérisation des classes moyennes. Nous assistons d’ailleurs très concrètement ces dernières décennies à une importante recrudescence de « Sans Domicile Fixe » et des personnes en difficulté alimentaire, toutes pourvues de la nationalité française. Dans le même temps, les personnes âgées sont de moins en moins bien prises en charge par la collectivité. Il ne faut donc pas s’étonner du fait que nous assistions actuellement à une baisse de la natalité française.

En revanche, il est parfaitement justifié de déduire de l’observation du système économique global que les multinationales, qui par leur intense lobbying, devenu légal par la grâce de l’Union Européenne, autant que par leur puissance économique relayée au niveau politique, tirent la couverture à elles au point de constater que nous vivons non pas sous la domination du « fait politique » mais bien sous la domination du « fait économique ». En d’autres termes, l’intérêt particulier des multinationales a subrepticement remplacé l’intérêt commun dans la détermination de la politique fiscale qui s’applique sur le territoire français.

2.b La France relaie-t-elle la disparition du concept de cohésion sociale sur son territoire ?

2.b.1) Du point de vue de l’organisation sociale

En matière de salubrité publique, il faut, d’abord et avant tout, constater la tolérance étatique de longue date vis-à-vis du trafic de drogue, au nom de l’existence d’une économie locale à laquelle il ne faudrait pas porter atteinte sous peine de déstabiliser la vie économique des portions de territoires concernées. Grâce à la persévérance de cette ligne politique suivie par l’État, nous sommes, bon an mal an, passé d’une « économie locale » de la drogue, à une véritable « économie nationale » au point qu’il devient nécessaire d’inclure le trafic de drogue dans le PIB ; cette inclusion aura pour autre « avantage » de s’accorder au reste de l’Union européenne, ou plutôt, devrions-nous dire, au reste des pays occidentaux.

En matière de traitement des jeunes générations, il faut considérer la disparition de tout un tas d’allocations pour étudiant, pour le logement, du resserrement des conditions d’accueil des étudiants à l’université (toutes sections confondues et via la récente réforme « Parcoursup »), de la hausse constante des frais d’inscription aux universités, du coût sans cesse croissant des études supérieures, depuis en particulier que tout un tas d’écoles privées ont vu le jour. Dans le même temps et en parallèle, on assiste à l’organisation, au niveau étatique, de places « gratuitement » réservées aux migrants dans les cursus éducatifs publics, même les plus sélectifs.

Dans le même ordre d’idées, le numerus clausus imposé aux médecins rend quasiment impossible l’accès des études de médecines aux étudiants français (le niveau de sélectivité du concours dépassant celui des grandes écoles d’ingénieurs), y compris parmi les bons élèves se sentant une véritable « vocation » à soigner les autres. Or le numérus clausus médical cohabite allègrement et depuis déjà un certain temps avec une augmentation exponentielle des besoins en matière d’offre globale de soins. L’une des conséquences de cette intéressante politique de « gestion des ressources humaines françaises » par l’État français, est que le territoire devient de plus en plus souvent un désert médical, contraignant les cliniques et hôpitaux à embaucher du personnel formé à l’étranger, ce qui permet au passage de diminuer les salaires et conditions d’embauche, sans pour autant faire disparaître la réelle pénurie d’offres de soins. Notons au passage que ces embauches de personnels hospitaliers étrangers ne permettent pas toujours une vérification réellement sérieuse des compétences alléguées par les postulants.

Ainsi donc, pendant que l’État français s’ingénie à fabriquer des générations de désespérés – qui finiront tôt ou tard par se réfugier dans la drogue ou dans l’alcool, participant ainsi à l’accroissement du PIB ( !) – en rendant impossible la réalisation des études de leurs choix aux étudiants, ce même État impose au reste de la population française (toutes catégories d’âge confondues étant entendus que certaines typologies de nécessiteux ou de malades souffrent plus que d’autres : les personnes âgés, les drogués devant être sevrés…) des restrictions aussi constantes qu’importantes en matière d’offre de soins. Les restrictions budgétaires constantes pratiquées dans les hôpitaux ont par ailleurs pour effet soit la fermeture de services hospitaliers soit d’imposer à ces services des conditions de fonctionnement incompatibles avec une qualité de soins minimale.

En matière de soins, il faut également constater la réduction annuelle, et désormais permanente et continuelle, des remboursements de médicaments par la Sécurité sociale française et la montée en puissance des mutuelles payantes pour les ressortissants français. Parallèlement, s’est mise en place une organisation étatique massive en faveur d’une aide sociale aux étrangers, immigrés (illégaux ou clandestins inclus) ou individus de passage (pour une durée indéterminée, notamment liée à la durée des soins nécessités) sur le territoire, au moyen de la prise en charge « gratuite » des soins médicaux pour tous (la fameuse Couverture maladie universelle).

En matière de coût de la vie, il faut constater une inflation, aussi constante que cachée par les chiffres officiels, en particulier depuis le passage à l’euro, qui a pour effet direct de réduire les capacités financières des ménages. Inflation notamment générée (en France et plus largement en occident) par l’immense accès aux liquidités laissé par les banques centrales aux institutions financières, par le moyen du « quantitative easing » couplé à la dérégulation des marchés financiers. Cette hausse des liquidités à usage sélectif a permis un enrichissement considérable de certaines catégories sociales (en particulier des traders et dirigeants de multinationales) et le développement de la spéculation financière dans des conditions tout à fait extravagantes. L’immense enrichissement de certaines classes sociales, non exclusivement françaises, a également eu pour conséquence de générer un regain de spéculation sur tous les marchés, notamment de l’immobilier (en particulier des grandes villes) mais aussi des actions, et une phénoménale hausse des prix de certains actifs essentiels (appartements, maisons) au point d’exclure les classes moyennes desdits actifs.

Ces constats révèlent que les autorités politiques françaises participent au mouvement de désagrégation de la vie collective et de la cohésion sociale sur le territoire national.

La France anticipe d’ailleurs sur les exigences/contraintes de l’Union européenne en termes de disparition de la préférence nationale pour organiser, à grande échelle, la désespérance des jeunes générations par des conditions de vie et d’études de plus en plus difficiles, par l’absence de perspectives professionnelles satisfaisantes ou même simplement acceptables sur le territoire, mais aussi par le développement, devenu exponentiel, du trafic de drogue (qui concerne maintenant les enfants de l’école primaire), par la paupérisation des classes moyennes françaises et l’abandon des plus faibles…

2.b.2 Du point de vue des entreprises et de leurs employés

S’agissant des conditions de vie économiques des entreprises et de leurs salariés, le constat n’est pas plus encourageant que dans le domaine général de l’organisation sociale.

D’un côté, les petites et moyennes entreprises françaises (dont le siège social est implanté sur le territoire français) font l’objet :
D’une persécution paperassière et financière qui a pour conséquence qu’elles doivent sans arrêt se justifier auprès des différents services de l’État et,
D’une étude extrêmement attentive par les services fiscaux (organisation de contrôles aussi méthodiques que régulièrement organisés), pendant que, de leur côté, les multinationales négocient avec les autorités des conditions fiscales et sociales extrêmement compétitives. Car en effet, les multinationales, étrangères ou non, sont désormais en état de faire du « chantage fiscal » à l’implantation afin de forcer les États à « négocier ». L’État n’est, aujourd’hui, plus à même d’imposer ses principes de vie aux multinationales.

Dans le même sens, préférence étrangère oblige (il s’agit, techniquement, de la liberté d’établissement imposée par les Traités européens), la disparition du concept d’entreprise publique paternaliste sur le territoire ne bénéficie certainement pas, en termes de qualité de vie, aux ressortissants français qui deviennent des « ressources consommables » pour des entreprises étrangères qui ne ressentent en contrepartie aucune responsabilité particulière vis-à-vis des populations qu’elle vont « exploiter ». Nous retrouvons ici l’asymétrie volontairement organisée, par et pour les « puissances capitalistiques » entre « pouvoir » et « responsabilité ».

Du point de vue des salariés, l’organisation au niveau communautaire de la libre circulation des travailleurs (notamment relayé par le concept, désormais fameux, de « travailleurs détachés ») génère simultanément du chômage chez les « travailleurs français » et un appauvrissement de la vie familiale, affective et culturelle des « travailleurs détachés », qui sont contraints de passer de longs mois loin de leurs familles et de leurs proches, faisant d’eux des nomades sans attaches affectives. Une des conséquences de cette intéressante politique « des ressources humaines » est une déresponsabilisation des travailleurs – devenus nomades – vis-à-vis d’un environnement avec lequel ils n’ont plus aucune attache affective. Ici encore, le bonheur des « puissances capitalistiques » a pour contrepartie l’organisation systématique du malheur des individus isolés et des groupes dont la survie dépend entièrement et sans limite du bon vouloir des premiers.

Il faut noter que l’organisation, à très grande échelle, du nomadisme professionnel (causé par les libertés de circulation des capitaux, des entreprises et des personnes) est calquée sur le nomadisme financier des plus grands capitalistes de la planète, lesquels se sont affranchis de toute attache étatique en organisant les paradis artificiels qui servent de refuges à leur accaparement capitalistique. Ainsi, le nomadisme financier désiré par les « puissants » se transforme en nomadisme imposé pour les individus isolés. Ce vaste mouvement de nomadisme mondial a d’ailleurs été consciencieusement accompagné par certaines multinationales. Nous pensons, par exemple, au concept novateur de « meubles jetables » lancé par l’entreprise suédoise IKEA ; ce nouveau concept du mobilier jetable est l’indispensable compagnon du nomadisme imposé à tous.

En guise de cohésion sociale, nous avons, en réalité, affaire à l’imposition massive d’un nomadisme forcé. Ce nomadisme est imposé à la grande masse des gens par des individus qui ont conquis leur place dominante à l’aide de ce que l’on appelait encore il y a peu en France (c’est-à-dire avant que le lobbying ne devienne légal et que le droit commercial d’origine anglo-saxonne ne remplace le droit continental) la « concussion », la corruption d’agents publics et, plus généralement, à l’aide de l’organisation, à grande échelle, d’un principe d’asymétrie entre « pouvoir » et « responsabilité » ainsi qu’entre « information reçue » et « information diffusée ».

Sans prétendre (loin s’en faut) à l’exhaustivité, ce panorama est toutefois suffisant pour observer que les autorités politiques françaises organisent (parfois) ou relaient (le plus souvent) aussi discrètement qu’efficacement (car les discours politiques publics ne parlent jamais des faits qui fâchent mais s’analysent en des pétitions d’intentions dans lesquelles l’accent est mis sur les petits avantages corrélatifs et subsidiaires, gonflés à dessein) la disparition de toute cohésion sociale au profit de la satisfaction matérielle des intérêts privés des multinationales et de leurs propriétaires. La France n’est certes pas le seul pays à partager ce sort peu enviable qui concerne d’une façon générale, bien qu’à des degrés divers, l’intégralité des pays du monde.

Nous sommes ici à l’opposé exact, c’est-à-dire très précisément à 180°, de ce que serait une politique « socialiste » telle que décrite plus haut. La cohésion du groupe a cédé la place à l’avidité juridiquement établie, voire à l’accaparement, du vivant pour le profit des plus gros propriétaires de capitaux.

3 – En conclusion

L’assertion répétée de Xavier Moreau, selon laquelle la France serait un « État socialiste » s’analyse en un « lieu commun » qui s’explique par la conception idéologique, devenue traditionnelle, que l’on fait généralement du terme « socialiste ». D’une part la France n’est plus un État, et d’autre part, la politique qui s’impose sur le territoire français n’est pas « socialiste ».

Dans l’objectif de hâter sa prochaine disparition volontaire, les autorités politiques en charge de la France relaient avec zèle, voire même anticipent, l’agenda mondialiste consistant à appauvrir matériellement, physiquement et moralement la plus grande masse des gens peuplant la planète au profit de quelques usurpateurs, véritables escrocs économiques qui ont, aujourd’hui, pris l’ascendant sur les pouvoirs politiques des États. La politique généreusement appliquée sur le territoire français est « globaliste » ; elle fait, à ce titre, fort peu cas des petites gens et des petites et moyennes entreprises pour, au contraire, laisser la part du lion aux multinationales et à leurs propriétaires anonymes.

En conclusion, « la France qui n’a aucune politique – et encore moins de politique ‘socialiste’ dans le sens ‘social’ du terme – est en revanche l’un des principaux fers de lance de l’agenda globaliste, lequel prospère sur le développement de la misère humaine. ».

Le relais des intérêts commerciaux globalistes est mis en œuvre, en France, au moyen de la dissimulation à ses ressortissants des véritables enjeux politiques par le biais de beaux discours faits par des marionnettes politiques, véritables agents du système économique dominant ; discours, le plus souvent vides de sens mais parfois à double entrées (par exemple par « libérer les énergies » il faut comprendre « libérer les énergies des multinationales »), abondamment relayés par des médias dont les propriétaires appartiennent à la caste économique dominante.

Valérie Bugault
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