10 avril 2016

Sécheresse au Venezuela : Pénurie d'électricité !


A partir d'aujourd'hui et jusqu'au 6 juin, les fonctionnaires ne travailleront plus le vendredi pour faire des économies d'énergie en période de sécheresse. Une mesure critiquée par l'opposition, majoritaire au parlement.

Les Vénézuéliens sont restés chez eux ce vendredi. Le président, Nicolas Maduro, a décrété le vendredi comme jour de congé dans tout le pays pour l’administration publique jusqu’au 6 juin. «Nous aurons de longs week-ends», a-t-il déclaré dans une allocution diffusée sur la chaîne de télévision officielle mercredi. Une bonne nouvelle pour les Vénézuéliens ? Pas vraiment. Car le but de cette mesure est d’économiser de l’énergie face aux importantes sécheresses qui affectent directement les réserves hydrauliques, dont dépend le pays pour produire son électricité.

Le chef de l’Etat a reconnu que le pays affrontait «une situation extrême» avec la baisse du niveau d’eau des 18 barrages du pays. Dans cette optique, il a également exigé que les entreprises publiques du secteur industriel, qui consomment le plus, réduisent de 20% leur consommation énergétique, tout comme l’administration. Une décision qualifiée de «sottise» par le président du parlement vénézuélien contrôlé par l’opposition, Henry Ramos Allup. «Pour résoudre le chaos électrique, le génie de Miraflores [le palais présidentiel, ndlr] prolonge la sottise de la mise en place de jours non ouvrables. Pour le résoudre complètement, qu’il la prolonge pendant 365 jours», a-t-il ironisé.

Pour les autorités, le coupable de cette pénurie s’appelle El Niño, un phénomène climatique qui revient tous les cinq à sept ans et provoque d’importantes sécheresses dans le pays. Ces dernières semaines, le gouvernement a multiplié les mesures pour éviter la pénurie. En février, le rationnement électrique a été étendu de quatre à neuf heures pour les centres commerciaux et les hôtels, les obligeant à générer leur propre énergie pendant ce créneau. La semaine sainte, en mars, a également été décrétée férié. Une mesure qui avait permis, selon le vice-ministre de l’Energie électrique Freddy Brito, d’économiser 400 mégawatts, sans pour autant pallier la crise.

Révélateur de l’impuissance de l’Etat à gérer cette situation, le président va jusqu’à recommander aux femmes de ne plus utiliser leur sèche-cheveux, gourmand en énergie et inutile selon lui. «Une femme est plus belle quand elle se peigne avec les doigts… De manière naturelle», a-t-il plaisanté devant les députés du parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV). 

Dépendance aux barrages hydrauliques

Si le pays compte parmi les plus importantes réserves pétrolières au monde, il souffre continuellement de pénuries d’électricité. Lors du dernier épisode El Niño en 2010, le gouvernement avait déjà dû se résoudre à un rationnement de l’électricité et de l’eau. Une situation qui s’est répétée les années suivantes, jusqu’à aujourd’hui.

Ces crises s’expliquent par l’extrême dépendance du pays à l’énergie hydraulique. En période de sécheresse comme c’est le cas actuellement, les niveaux des barrages sont au plus bas. Ils ne suffisent plus à couvrir l’ensemble de la demande électrique, en forte hausse à cause de la chaleur. A Guri, le réservoir de l’Etat de Bolivar au sud-est du pays, l’eau est seulement trois centimètres au-dessus du «point extrême», fixé à 240 mètres au-dessus du niveau de la mer. Or, ce barrage, quatrième plus grand au monde, fournit plus de 60% du réseau électrique du pays.

Une jauge indique le niveau d’eau du réservoir Camatagua, à 160 km de Caracas, lors de la sécheresse de 2010, déjà causée par un précédent épisode d’El Niño. (Photo Reuters. Jorge Silva)

Mais si El Niño semble être le coupable idéal, l’origine de la crise est avant tout structurelle. «Il y a eu plus d’un ministre de l’électricité par an depuis que Hugo Chavez est au pouvoir, explique Eduardo Rios, doctorant au centre d’études et de recherches internationales et spécialiste du Venezuela. Sans oublier les problèmes de corruption». A ces problèmes viennent s’ajouter la vétusté des infrastructures énergétiques et le manque d’investissement en énergie thermique. 

La crise de trop ?

«Gouvernement incapable», «mesure irresponsable et inutile»: les opposants, désormais majoritaires au parlement depuis les élections législatives en décembre dernier, crient au scandale. «Juste parce que Maduro ne travaille pas du lundi au vendredi et du samedi au dimanche, cela ne signifie pas que les Vénézuéliens sont comme lui, accuse Maria Corina Machado, figure de l’opposition. Nous voulons continuer de travailler et vous, Maduro, que vous partiez.»

La population exprime également son mécontentement, notamment sur Twitter avec le hashtag # («les vendredis chômés»). Certains Vénézuéliens s’inquiètent d’une mesure qui ne fera selon eux, qu’aggraver la crise économique.

«Nous sommes dans la pire crise économique de notre histoire, et la solution, c’est de ne pas travailler??»

Avec une chute de 7% de son PIB en 2015, une inflation qui a bondi officiellement de 180% en 2015 (275% selon le Fonds monétaire international, qui prévoit même un bond de 700% en 2016) et une pénurie d’aliments et de médicaments, le pays pétrolier traverse une crise sans précédent. Le gouvernement, dans une situation extrêmement fragile, appelle au «sentiment national» afin que tout le pays soutienne l’initiative.
 
Estelle Pattée
Source 
 
Incroyable dans un pays producteur de pétrole !!! 

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