09 octobre 2015

Karim Ouchikh : « la prééminence culturelle et historique du christianisme doit être affirmée sans état d’âme »



R&N : Une partie de la classe politique française ne définit plus l’identité française qu’à travers des “valeurs de la République”, sans jamais définir celles-ci. Y-a-t ‘il vraiment des “valeurs de la République”, et si oui quelles sont-elles ?


Karim Ouchikh : Depuis près de 40 ans, sans jamais se soucier de l’assentiment du peuple, nos élites ont choisi de prendre le large en cédant au mirage de la mondialisation, devenue tout d’un coup la nouvelle frontière de la France. Pour rendre l’avenir de notre pays compatible avec un tel dessein, la classe politique française a œuvré en deux temps avec la complicité active des médias et des relais d’opinion.

Il s’est agi d’abord de détruire la singularité française en effaçant les repères chronologiques de notre histoire, en ringardisant les figures illustres de notre passé, en effaçant l’estime porté à nos anciens, tout en culpabilisant nos compatriotes avec tout ce qui a trait à notre héritage mémoriel, notamment en disqualifiant certains épisodes de notre histoire jugés, bien à tort, éminemment clivants (croisades, guerres de religion, monarchie absolue, traite négrière, décolonisation…). Cette vaste entreprise de déculturation, activement menée dans nos écoles comme au sein des médias, a ainsi rendu possible, dans un second temps, cet extraordinaire tour de passe-passe sémantique qui a consisté à identifier nouvellement notre pays dans le champs lexical, en faisant appel à des ‘‘valeurs de la République’’ que nul n’est capable de définir précisément, évitant ainsi soigneusement de parler tout simplement de la ‘‘France’’.

Ces introuvables ‘’valeurs de la République’’ (laïcité, égalité, fraternité, libertés…), déclinées ad nauseam au trébuchet des ‘’droits de l’Homme et du Citoyen’’, sont si abstraites, si théoriques, si insipides, qu’elles trouveraient sans peine à s’acclimater dans n’importe quel autre régime démocratique de la planète. De la sorte, on refuse de regarder l’identité charnelle de notre pays, c’est à dire de la voir en acceptant sa dimension culturelle, la spécificité de son héritage chrétien, la beauté de son art de vie…, bref de considérer la France au prisme des traits ordinaires qui la rendent si désirable aux yeux du monde depuis des lustres. Comme beaucoup, je m’insurge contre cette vaste escroquerie intellectuelle qui stérilise et affadit notre identité pour la rendre en réalité davantage accessible à ces populations nouvelles qui arrivent en masse sur notre sol, lesquelles auront d’autant moins d’efforts à accomplir pour s’assimiler dans le creuset national que celui-ci se sera précisément évaporé dans l’intervalle.

R&N : Quel modèle de civilisation la France peut-elle encore proposer ?

Karim Ouchikh : La France doit surtout rester fidèle à elle-même, attentive à son être authentique que nous chérissons tous. Plutôt que d’être perpétuellement en quête d’un modèle extérieur insaisissable, américain ou allemand, qui sont radicalement étrangers à son histoire, plutôt que de céder aux sirènes européistes qui imposent une intégration politique des nations de notre continent dans un ensemble européen autoritaire et atlantiste, la France doit défendre sa singularité historique, dans le cadre institutionnel d’un Etat indépendant appelé à recouvrer au plus vite ses attributs de souveraineté pour bâtir, avec d’autres, une Europe confédérale respectueuse des peuples, à rebours de cette Europe supranationale castratrice qui nous est imposée depuis plus de trente ans.

Ce modèle singulier repose, au plan intérieur, sur l’affirmation sereine d’un héritage indivis qui se compose d’un socle anthropologique chrétien prédominant, d’une culture gréco-latine toujours vivante, d’une histoire exceptionnelle à nulle autre pareille et d’une langue merveilleuse qui rayonne bien au-delà de nos frontières. Hors de notre pré-carré, la France se range aujourd’hui encore parmi ces puissances spirituelles qui, à l’instar de la Russie, porte une âme charnelle à portée universelle, ce qui les démarquent, toutes deux, des puissances matérialistes, davantage tournées vers la recherche d’un impérialisme économique, comme peuvent l’être l’Allemagne ou les Etats-Unis : dans ce cadre géopolitique, il nous appartient ainsi de forger une alliance stratégique avec la Russie, dans l’intérêt bien compris de la France comme de l’Europe. Au sein du concert des nations, la France doit enfin renouer avec sa vocation historique de puissance d’équilibre, capable aussi bien de s’opposer à toutes les hégémonies planétaires, atlantiste ou islamiste, que de créer des espaces de coopération inédits, comme pourrait l’être demain une Union latine que j’appelle de mes vœux depuis fort longtemps.

R&N : Quelle place donner à l’islam en France ? Est-il possible de garder un modèle culturel et une identité française homogène si nous laissons l’islam s’y implanter ?

Karim Ouchikh : Notre modèle de civilisation est doublement menacé : d’abord par une idéologie matérialiste hors-sol d’origine anglo-saxonne qui s’infiltre dans notre société et qui la mine de l’intérieur en décrétant partout la fin des enracinements locaux et l’avènement du consumérisme généralisé ; ensuite, par l’expansion de communautarismes ethnico-religieux qui se réduisent en réalité à l’enracinement d’un islam conquérant et sûr de lui-même qui, indépendamment de son aspect confessionnel, charrie tout un univers culturel ainsi qu’un ensemble de pratiques de vie qui s’opposent de manière frontale au modèle de civilisation européen.

Si nous voulons préserver l’intégrité de notre modèle de civilisation multiséculaire, il nous faut donc être pareillement intransigeant face à ces deux périls. En réarmant moralement et spirituellement la France, à l’école, dans le débat des idées ou dans l’agora politique, nous redonnerons à notre peuple des repères identitaires qui lui permettront de surmonter ce relativisme généralisé qui l’accable tant : les expériences russe ou hongroise nous en montrent d’ailleurs excellemment le chemin. Pour accomplir ce redressement moral et spirituel, nous devrons aussi donner au principe de laïcité une autre dimension, et en faire un instrument politique de combat, en refusant notamment de mettre toutes les religions sur un même plan : autrement dit, l’égalité juridique formelle des cultes sur notre sol ne doit en rien impliquer l’égalité des religions devant le mémoire ; à mes yeux, la prééminence culturelle et historique du christianisme en France doit être affirmée sans état d’âme.

Compte tenu de l’immensité et la gravité des défis posés par l’islam en France, nous ne pouvons plus faire l’économie d’une grande explication nationale avec cette religion, pour rendre sa présence enfin compatible avec nos standards de vie, moins d’ailleurs d’un point de vue théologique qu’au regard des valeurs et des pratiques quotidiennes que cette confession véhiculent. Je serai amené à m’exprimer bientôt sur cette question anxiogène, si fondamentale pour l’avenir de notre pays.

R&N : Musulman converti au christianisme à l’heure où tant de conversions se produisent dans le sens inverse, patriote d’origine immigrée alors qu’il est désormais de bon ton chez les Français de souche eux-mêmes de dénigrer son pays, quel rapport entretenez-vous avec l’identité et la foi historiques de la France ? Quelle place doivent-elles tenir dans une réforme courageuse en vue du redressement de notre pays ?

Karim Ouchikh : Embrasser la foi catholique romaine à l’âge adulte, - non sans avoir à connaître de sérieux contrecoups familiaux -, est une expérience intime qui prédispose, plus que d’autres peut-être, à mesurer l’infinie grandeur de la composante chrétienne qui féconde l’héritage culturel de la France. En plaçant la dignité absolue de l’homme au cœur de son message évangélique, le christianisme a donné corps à nombre de nos libertés, de nos valeurs et de nos institutions actuelles : sécularisation de l’Etat, laïcité, respect intangible de la personne, considération pour autrui, émancipation de la femme, souci de la souffrance animale… Dans mon action politique quotidienne, je ne cesse d’agir pour convaincre nos concitoyens de la beauté et de l’exemplarité d’une religion qui a façonné nos paysages, fécondé nos trésors culturels et nourrit notre inconscient collectif.

Dans le sillage de figures spirituelles qui comptent beaucoup pour moi, de Péguy à Charles de Foucauld, de Maritain à Psichari, je crois passionnément à la redécouverte imminente par notre pays de ses racines chrétiennes, comme en témoigne actuellement la vitalité de nombre de communautés paroissiales ou le dynamisme de certains diocèses. Les combats magnifiques pour la défense pour la dignité humaine ou pour la préservation du modèle familial traditionnel, - qui ont pareillement prospéré dans la rue ces dernières années -, sont autant d’expériences concrètes qui nourrissent en moi cette espérance profonde. Fille aînée de l’Eglise, la France doit donner plus que jamais au monde des gages de sa fidélité aux promesses de son baptême.

« Il est des lieux où souffle l’esprit » disait Barrès. Peu nombreux sont les pays où souffle encore cet esprit qui fait la part belle à la terre et aux morts : la France en fait partie, pour toujours. Comme au XIXe siècle, avec le formidable renouveau missionnaire, nous devons aider notre pays à retrouver le chemin de son redressement spirituel. Sans être un parti confessionnel, au sens propre du terme, le SIEL entend être à l’avant-garde de ce combat charnel pour le redressement spirituel et moral de la France.

R&N : Vous étiez “conseiller de Marine Le Pen à la Culture et à la Francophonie”, est-ce un secteur sur lequel vous continuez à travailler au sein du SIEL ?

Karim Ouchikh : En janvier 2015, Marine Le Pen a fait le choix de ne plus s’entourer de conseillers politiques, tous secteurs confondus. Mon attribution de conseiller politique chargé alors de la Culture et de la Francophonie s’est donc éteinte avec ce virage politique.

Mais je continue d’œuvrer à la réflexion au sein de ma famille politique, celle de la droite des convictions et des valeurs : en matière culturelle comme dans bien d’autres domaines, le SIEL se fixe en effet pour objectif d’apporter sa contribution significative au débat des idées, en étant toujours fidèle à sa ligne politique : être un parti patriote de droite, souverainiste au plan institutionnel, conservateur au plan sociétal et libéral au plan économique.

R&N : Ces deux éléments, jusqu’à alors essentiels, de notre rapport à la culture que sont d’un coté l’étude de l’histoire, de l’autre celle du grec et du latin, sont remis en cause par le gouvernement actuel. Assistons-nous à une destruction volontaire de nos racines et de notre mémoire ?

Sans être adepte de la théorie du complot, il ne faut pas être grand clerc pour se convaincre de la volonté politique obstinée du gouvernement socialiste, - suivant d’ailleurs en cela les renoncements successifs des précédents gouvernements de la fausse droite -, de briser tous les instruments de transmission des savoirs traditionnels. Qu’il s’agisse des langues anciennes, des humanités ou de l’histoire, dans les médias publics comme au sein de l’Education nationale, la déculturation généralisée est en marche avec, pour ses promoteurs, l’ambition diabolique de manipuler radicalement les esprits afin de créer un ‘’Homme nouveau’’ qui serait taillable idéologiquement et corvéable politiquement à merci. Nous devons combattre de toutes nos forces cette entreprise de destruction massive de notre héritage culturel. Avec le SIEL, je m’y emploie chaque jour avec détermination.

R&N : Le SIEL, dont vous êtes le président, a manifesté ’contre la déferlante migratoire’ ce jeudi 24 septembre. Quel bilan tirer de cette manifestation et quelles suites allez-vous y donner ? Pensez-vous qu’une manifestation fasse bouger le gouvernement, lui qui a superbement ignoré les Manif Pour Tous ?

Karim Ouchikh : Les chiffres authentiques sont là : entre 1.000 à 1.500 participants à cette première manifestation qui s’est déroulée sous la pluie, en milieu de semaine, sans être relayée de surcroît par les médias nationaux ! La réussite certaine de cette opération a été saluée par les manifestants présents mais aussi sur les réseaux sociaux et par les courageux médias patriotes qui assurent la réinformation salutaire des Français.

Avec mes amis du SIEL, je suis désormais convaincu que l’action politique ne doit plus se limiter à la seule expression ordinaire des partis, dans les assemblées d’élus ou bien à l’occasion des scrutins. L’indignation de nos compatriotes à l’égard du gouvernement de François Hollande est telle qu’il nous faut imaginer d’autres formes d’actions pour espérer endiguer la déferlante migratoire : les pétitions, les tribunes mais aussi et surtout les manifestations pacifiques deviennent ainsi autant de leviers d’action inédits pour canaliser, sur le terrain, la colère des Français et donner à celle-ci des débouchés politiques tangibles, lesquels doivent viser en définitive à modifier rapidement les rapports de force politiques, à Paris, Berlin ou Bruxelles.

Si les Manif pour Tous n’ont pas empêché malheureusement le vote de la funeste loi Taubira, elles auront en tous les cas doté des millions de Français qui avaient plutôt le cœur à droite d’une conscience politique et d’une combativité inattendues depuis les manifestations sur l’école libre. Et mon petit doigt me dit même que cette formidable mobilisation de ceux de nos compatriotes qui n’avaient pas alors spécialement l’habitude de descendre dans la rue, a grandement freiné les ardeurs législatives d’une majorité de gauche qui projetait, dans la foulée du mariage homosexuel, de graver dans le marbre de la loi d’autres réformes idéologiques attentatoires au respect de la vie, de la dignité et du modèle traditionnel de la famille (GPA, PMA, gender….).

C’est bien pourquoi le SIEL est déterminé à fédérer désormais toutes les forces politiques disposées à agir contre le chaos migratoire et à rééditer cette première manifestation parisienne, en l’étendant également en province. En usant toujours des ressources qui caractérisent l’action politique de ce parti et qui sont en quelque sorte sa marque de fabrique : la sincérité, la proximité, la combativité et la créativité…

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