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23 novembre 2024

Comme au temps des SS-20

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Un développement inattendue de l‘affaire des ATACMS et ‘Storm Shadow’ tirés d’Ukraine vers la Russie d’avant-2014, avec autorisation sinon encouragement de UK et des USA. C’était une des “lignes rouges” finales de Poutine. La “riposte” russe a été inattendue : l’utilisation contre un objectif ukrainien d’un nouveau missile hypersonique russe, le ‘Orechnik’, successeur ultra-avancé des SS-20 de 1977. Le message des Russes étaient consistait à dire clairement aux Européens : “C’est ce que nous utiliserons contre vous si vous continuez”.


Poutine lui-même et les capacités russes en matière d’armement n’ont pas fini de nous surprendre. Le président russe a réussi à contenir l’un des derniers spasmes de mourant de Joe Biden (« C'est ma fête de la troisième guerre mondiale et je pleurerai si on ne la fait pas ») en évitant cette fois encore cette “fête-WWIII” et en ne perdant pas la face pour trop de mollesse face à la folie américaniste. Il n’a pas vraiment “riposté” directement (il aurait fallu envisager une frappe sur un pays de l’OTAN) mais l’a fait de façon asymétrique en sortant un diable inattendu de sa boîte à malice. Il s’agit d’une nouvelle arme, de la même catégorie que les SS-20 qui déclenchèrent en 1977 la crise des euromissiles. Bien entendu, on parle de missiles sans comparaison en capacité avec le SS-20 et dans des conditions crisiques complètement différentes de celles que nous eûmes en 1977-1983 ; en bref, il s’agit du missiles balistique à portée intermédiaire (IRBM dans l’ancienne appellation) ‘Orechnik’, à capacité hypersonique, présenté directement par Poutine...

« L'armée russe a lancé un missile balistique de portée intermédiaire de pointe contre une cible ukrainienne, a déclaré jeudi le président Vladimir Poutine lors d'un discours public.

» Dans le cadre de ce que le président a appelé un « test de combat », le missile hypersonique, surnommé “Orechnik” (“Noisette”), a frappé avec succès une installation militaro-industrielle dans la ville ukrainienne de Dnepropetrovsk (connue sous le nom de Dnipro en Ukraine), a ajouté Poutine.

» Cette frappe était une réponse aux attaques ukrainiennes contre des installations militaires situées sur le territoire russe internationalement reconnu, a déclaré le président. Les forces de Kiev ont lancé les frappes mardi et jeudi, en utilisant des systèmes ATACMS et HIMARS de fabrication américaine ainsi que des missiles Storm Shadow de fabrication britannique, a-t-il déclaré. »

Là est toute la différence : tous les missiles occidentaux énumérés ont un rayon d’action entre 200-300 kilomètres et 500 kilomètres. ‘Orechnik’ est d’une catégorie (IRBM/‘intermediate range ‘) dont la portée est réglementèrent prévue entre 1000 et 5000 kilomètres, après le missile balistique SRBM (‘short range’), d’une portée de 500 à 1000 kilomètres. Ces catégories appartiennent au rangement officiel déterminé durant la Guerre Froide pour les négociations d’accords de limitation, voire de suppression des armements. Les “catégories” improvisées pour la guerre d’Ukraine (‘long range’ pour une portée de 200 à 500 kilomètres) sont complètement déconnectées des mesures officielles des bureaucraties qui ont gardé les références de la Guerre Froide ; elles correspondent plutôt aux nécessité de la communication et sont strictement référencées aux situations tactiques en cours sur le terrain.

Les catégories désignées BM (‘Ballistic Missiles’) avec les différences de portée (les plus “longues” étant les ICBM à portées stratégiques et intercontinentales), sont, – ou plutôt, étaient des catégories à part, évoluant hors des situations tactiques de terrain. Les Russes ont brisé cela avec le missiles IRBM ‘Orechnik’, correspondant aux SS-20 de 1977, eux-mêmes remplaçant les SS-4 et SS-5 du début des années 1960, pour constituer une force balistiques intervenant sur l’ensemble des théâtres d’opération intermédiaires. Dans ce cas du tir d’un ‘Orechnik’, les Russes ont préféré écarter les habituelles références pour faire intervenir un missile à “portée moyenne” (sans doute 5000 km et plus) et faire ainsi la démonstration de la puissance et de l’invulnérabilité de missiles qui sont faits pour intervenir en Europe Occidentale... Ainsi  le tir de l’‘Oreshnik’, nouveau missile jusqu’alors inconnu, à capacité hypersonique et puissance à mesure, signifie-t-il pour les Occidentaux : “Voilà ce que nous pouvons vous faire sans que vous ne puissiez rien faire pour nous arrêter si vous nous poussez à riposter pour de bon avec vos ATACMS et autres SCALP”.

Révélation d’‘Orechnik’

Il y a eu mercredi matin  un événement étrange à Moscou, au ministère des affaires étrangères, à la conférence de presse de Maria Zakharova. Au milieu de sa conférence, chose très inhabituelle un coup de téléphone l’interrompit. Elle décrocha. Selon ‘BreitbartNews’, qui précise qu’il devait s’agir d’un proche de son bureau puisque son diminutif ‘Masha’ fut utilisé, il lui fut demandé de ne faire aucun commentaire sur ce qu’on désignait (surtout les journaux occidentaux) alors comme le tir d’un “ICBM”.

On comprend cette intervention, si elle eut réellement eu lieu, du fait de ce que Poutine affirma le lendemain matin concernant le tir de l’‘Oreshnik’. Il était important de laisser la primauté complète de l’explication du tir au président russe. Sans trop nous attarder sur la façon dont ‘BreitbartNews’ a obtenu ces précisions, il semblerait donc que la direction russe ait, au dernier moment, décidé d’appuyer le plus possible sur ce tir pour en faire la riposte aux tirs ATACMS et autres ‘Storm Shadow’ sans nécessité de prendre de risques d’une montée brutale de l’escalade.

Donc, voici Poutine jeudi matin :

« Je le répète : nous effectuons des essais du missile ‘Orechnik’ dans des conditions de combat en réponse aux activités agressives des pays de l’OTAN contre la Russie. La question du déploiement ultérieur de missiles à courte et moyenne portée sera réglée en fonction des actions des États-Unis et de leurs États satellites.

» Les cibles à détruire dans le cadre des essais ultérieurs de notre nouveau système de missiles seront déterminées en fonction de leur menace pour la sécurité de la Fédération de Russie. Nous nous considérons en droit d’utiliser nos armes contre les cibles militaires des pays qui déploient leurs propres armes contre nos cibles.

» En cas d’escalade des activités agressives, nous répondrons de manière décisive et réciproque. Aux élites dirigeantes des pays qui prévoient d’envoyer leurs propres troupes contre la Russie, je leur conseille vivement de reconsidérer sérieusement leur décision. Il va sans dire que, si nécessaire, et en guise de mesure de rétorsion, nous choisirons d’utiliser des armes comme l’‘Orechnik’ contre des cibles en Ukraine, et nous demanderons à la population civile, ainsi qu’aux citoyens des pays amis, de quitter à l’avance les zones dangereuses. Nous le ferons pour des raisons humanitaires. Nous le ferons publiquement, ouvertement, sans risquer de contre-mesures de la part de l’adversaire, qui recevra également ces informations.

» Pourquoi pouvons-nous faire cela ? Parce qu’à ce jour, il n’existe aucune contre-mesure contre cette arme. Le missile frappe des cibles à une vitesse de Mach 10… »

Retour d’un fantôme

La citation est reprise d’un texte de Larry Johnson. On la retrouve dans un segment d’Alexander Mercouris. Tous deux, et selon un sentiment général chez les analystes indépendants et dignes de confiance, nous font savoir indirectement que les Russes et Poutine ont réussi une belle opération de communication (voulue ou pas, – mais renforcée à mesure) auprès des Occidentaux qui ne cessent de se perdre en ricanements persifleurs lorsqu’on leur parle de la puissance russe. Quoi qu’il en soit, cette fois  tout le monde prend très au sérieux l’opération de “riposte” des Russes, sans même beaucoup relever que la “riposte” n’en a pas vraiment été une ; la Russie n’a pas envisagé vraiment de répondre par une attaque hors du champ de la guerre en Ukraine, comme il en était question du point de vue théorique des hypothèses et de la narrative qui n’en finira jamais de la “ligne rouge”.

Pourquoi cette opération au niveau de la communication nous apparaît sans hésiter comme une réussite ? Il est difficile de répondre précisément, éventuellement sans faire appel à une capacité intuitive. Il faut dire qu’il y a beaucoup d’actes opérationnels à haute valeur de communication dans l’action des Russes : un nouveau missile très puissant, une résurgence d’une catégorie de missiles liquidée par le traité INF de décembre 1987, et réactivée, sinon renée par la décision US de 2019 de se retirer du traité. Les Russes ont donc démontré à leur tour qu’il sortait du traité liquidé par Washington, et qu’il en sortaient par la grande porte d’un hyper-super-SS-20 à capacités hypersoniques, tenant toute l’Europe sous son joug, – ce que le traité INF aurait dû empêcher.

Tout se passe comme si les Russes, qui ont défendu jusqu’au bout le pseudo-ordre établi par la période Gorbatchev-Reagan, d’une façon que les délicats analystes américanistes percevaient comme un aveu d’impuissance et de panique, – comme si les Russes, donc, liquidaient brusquement et en claquant la porte les derniers restes de la période, – et de quelle façon ! En sortant un monstre aux incroyables capacités, et utilisé dans ce cas contre le plus grand centre manufacturier d’armement (installé du temps des Soviets), alors que ce missile est en phase de développement, comme une sorte d’essai en conditions réelles d’“environnement opérationnel” se soldant par un formidable coup au but.

Brusquement, un pas de plus est fait pour contrecarrer fortement ceux qui continuent à  pousser la chansonnette autour du simulacre d’une Russie impuissante. C’est de ce point de vue que l’opération de communication, – faite pour rétablir la vérité, d’où sa puissance et son efficacité, – a été réalisée de main de maître. A cette lumière, l’incident rapporté par ‘BreitbartNews’, qui semble difficile à accepter, ressemblerait à une décision prise en derrière minute (et communiquée à Zakharova), sous le coup d’une intuition que l’impact positif (pour les Russes) de l’affaire méritait d’être renforcé par une intervention du président Poutine, solennelles mais incroyablement précise d’un point de vue technique et opérationnel.

L’on dirait alors qu’il y aurait comme une sorte de retour à l’atmosphère de ces années 1980 où des événements politiques proches par leur vitesse et leur intensité de ceux que nous vivons actuellement avaient lieu, et qu’ainsi l’on mesurait mieux la réalité du danger des guerres nucléaires. Cela pourrait être le lot d’un Trump qui va au galop, de nous apporter cette conviction nouvelle, découverte dans les derniers événements, qu’il ne faut pas prendre les Russes à la légère et qu’il est temps de liquider le virus neocon de la guerre totale et sans fin, de la politiqueSystème comme on s’en doute.

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