Cette semaine, le locataire de l’Élysée a encore pris la parole. Encore.
Jugeant absolument indispensable de nous gratifier de sa pénible logorrhée, Emmanuel Macron nous a donc infligé il y a quelques jours un nouveau discours dont on ne retiendra heureusement pas grand-chose à l’exception peut-être de sa nouvelle position sur le référendum.
Probablement pour faire concurrence aux députés insoumichons actuellement passionnés par les punaises de lit (le reste de l’actualité législative et des sujets d’importance primordiale étant apparemment épuisé), le chef de l’État a ainsi estimé nécessaire de touiller un peu la constitution dont il prétendait fêter le 65ᵉ anniversaire lors de son discours, afin de rendre “plus simple” la mise en œuvre du référendum d’initiative partagée qu’il juge “aujourd’hui excessivement contrainte”, et pour l’ouvrir à “des domaines importants pour la nation qui [y] échappent”.
Et pendant que se chuchotent des rumeurs les plus folles sur la mise en place ferme et définitive d’un numéro vert contre les nuisibles de literie, voire du lancement d’un Grenelle sur la question, cette question du référendum revient donc hanter presque toutes les rédactions des médias de grand chemin : que voilà une proposition intéressante-ou-presque !
En effet, cet appel à accroître le rôle des référendums et les possibilités d’y recourir permet effectivement, selon les petits éditorialistes de la presse de révérence, d’augmenter la démocratie dans notre pays, de la faire passer du “pas mal du tout” à “super chouette” en quelque sorte (et ça tombe bien tant elle paraît avoir quelque peu subi les outrages du temps ces dernières années).
Mais d’un autre côté, il est difficile d’oublier les précédentes positions du même Macron sur les référendums et leur usage.
On se rappelle en effet que, lors de la campagne de 2022, Marine Le Pen avait clairement mentionné dans son programme sa volonté d’utiliser le référendum aussi souvent que possible, ce qui n’avait alors pas manqué de déclencher des petits prurits dans la presse de grand chemin, la même qui semble maintenant s’accommoder assez bien de la proposition présidentielle.
Du reste, à l’époque, le même Macron évoquait sans trop se mouiller la possibilité de faire du référendum au cas par cas, sachant qu’il n’en avait d’autant moins l’intention réelle qu’il pensait encore pouvoir s’en sortir avec une majorité parlementaire sinon large, au moins suffisante pour ne pas mitrailler l’Assemblée au 49.3.
Las : la majorité parlementaire très relative et, assez probablement, les sondages d’opinion assez peu favorables à son sujet (les vrais, ceux de l’Intérieur, pas ceux de la propagande officielle) – voire catastrophiques – auront peut-être eu raison de la tiédeur du chef de l’État à ce sujet et qui espère sans doute, avec ce procédé, occuper les esprits et redorer un peu son blason défraîchi.
La situation est à présent particulièrement croquignolette : on s’en souvient, tous les fiers castors avaient âprement combattu en 2022 pour faire barrage à Marine Le Pen et au chaos voire à l’autoritarisme qu’elle ne manquerait pas d’amener. Persuadés qu’ils étaient que son référendum était une idée aussi pourrie que populiste, les voilà maintenant confrontés à un chef de l’État, pour lequel ils ont goulûment voté, qui nous amène chaque jour un peu plus dans le chaos et l’autoritarisme, et nous ressort les idées populistes de Le Pen. Enfin bon, comme c’est Macron, ce seront de bons référendums, pas populistes.
Ceci n’est même pas une caricature : il suffit de voir les pirouettes rhétoriques
des analystes / experts / philosophes de plateau télé ou radio pour
mesurer le trouble qui s’empare de leur esprit au point de manquer
d’arguments clairs. Pour eux, pas de doute : demander ainsi,
directement, son avis au peuple est la porte ouverte à toutes les
fenêtres populistes par lesquelles rentreraient les idées les plus
nauséabondes qui viendraient (on s’en doute) nourrir ♩ tralali ♪ le
ventre de la bête féconde ♫ tralala ♬ … On commence ainsi avec des
petits référendums d’initiative populiste populaire, et pouf,
rapidement, le peuple vote pour des choses abominables comme un retour
de la peine de mort, la fermeture des frontières et l’expulsion des
illégaux, une justice plus ferme ou – pire encore – un État mieux géré,
bref toutes ces choses très éloignées du programme de société que la
classe Sachante & Jacassante avait laborieusement planifié.
Si on commence à laisser faire au peuple ce qu’il veut, et, pire encore, si on le lui demande poliment avant, où va-t-on ?
Bien sûr, en réalité, beaucoup comprennent (même si c’est parfois confusément) qu’utilisé par cet olibrius, le référendum ne serait qu’un gadget : il ne s’agirait en réalité que d’occuper la galerie, faire croire à un élan démocratique et à mettre en scène un objectif politique qui serait, on peut le garantir, obligeamment validé par le peuple. L’art de la manipulation de l’opinion publique par l’actuel locataire de l’Élysée n’est plus à démontrer et sera d’autant plus aisée qu’il n’y a plus aucun média d’opposition réelle dans le pays.
Et pendant que cette poudre institutionnelle sera lancée aux yeux du peuple, les problèmes d’insécurité, de plus en plus consternants, d’immigration incontrôlée aux effets de bord croissants, ou du coût de l’énergie intriqué à une inflation galopante ne seront absolument pas abordés (ou alors, par les mêmes clowneries que d’habitude).
Le fait, du reste, que les sondages se multiplient et montrent un écart croissant entre les gesticulations inutiles du gouvernement et les souhaits réels des Français permet de garantir que des référendums sur ces questions-là ne seront jamais lancés. Macron l’a d’ailleurs bien rappelé : le référendum, c’est pour des domaines importants (les punaises de lit par exemple), et l’insécurité, l’inflation galopante, le coût de l’énergie ou l’immigration incontrôlée n’en font pas partie.
Heureusement, sinon ce serait fasciste, pardi !
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