26 mai 2022

Quel est le mode d’action des molécules d’un traitement anti-Covid-19 précoce ?

Les traitements ambulatoires précoces agissent sur le Covid-19 et les bactéries de diverses manières. Certaines molécules agissent en bloquant l’entrée et/ou les effets délétères du virus dans la cellule, d’autres en prévenant d’une infection bactérienne qui peut suivre une attaque virale et provoquer une surinfection prompte à envahir l’organisme notamment lorsque le système immunitaire de l'hôte est affaibli par la vieillesse ou par des comorbidités.

Cet entretien est réalisé avec Jean-Marc Sabatier, directeur de recherche au CNRS et docteur en biologie cellulaire et microbiologie, affilié à l’institut de neurophysiopathologie à l’université d’Aix-Marseille.

Nous précisons que Jean-Marc Sabatier s'exprime ici en son nom.


Depuis le début de l’épidémie, des médecins soignent avec des molécules qui existent depuis longtemps sur le marché du médicament. Qu’il s’agisse d’hydroxychloroquine, d’ivermectine ou d’azithromycine, pour ne parler que des plus connues, ils ont été nombreux à traiter le SARS-CoV-2 avec ces médicaments connus pour lutter contre d’autres pathologies.
En France, le Pr Didier Raoult, le Pr Christian Perronne, mais également de nombreux généralistes ont utilisé ces traitements dans la phase précoce de la maladie. Ils ont publié des résultats dans lesquels on a pu constater une diminution de la charge virale et un risque moins grand de complications, d’hospitalisations et de décès.
Aux États-Unis, le Pr Peter McCullough, les docteurs Pierre Kory et Vladimir Zelenko ont été parmi les premiers à soigner avec ces traitements.
Malgré des résultats qui prouvaient une nette amélioration de l’état général des patients, ces médecins ont été moqués de toutes parts et ennuyés par les autorités sanitaires.
Pourtant, il existe bien une action de ces molécules. Pour chacune d’elles, pouvez-vous en décrire le mode d’action ? Comment ces médicaments ciblent les mécanismes impliqués dans la multiplication du virus dans les cellules ? 
Comment agit l’hydroxychloroquine ? 

Pour rappel, l’hydroxychloroquine (ou Plaquenil) est une molécule qui possède des propriétés anti-inflammatoires, immunosuppressives (traitements de maladies auto-immunes), photo-protectrice (contre les rayons UV), anti-parasitaires (antipaludéen), et antivirales.

Les divers types de virus utilisent des modes d’entrée différents dans les cellules. En ce qui concerne le virus SARS-CoV-2 (virus enveloppé à ARN monobrin), il existe trois étapes majeures lors d’une infection cellulaire : (1) la pénétration des particules virales dans la cellule, (2) la libération du génome du virus à l’intérieur de la cellule (dans le cytoplasme), ce qui permet la copie du génome viral et la production de nouveaux virus, et (3) la sortie de ces virus/particules virales hors de la cellule.

Le SARS-CoV-2 peut pénétrer dans la cellule par deux voies : la voie « non endosomale » (voie qui n’utilise pas d’endosomes) et la voie « endosomale » (voie qui utilise des endosomes). Un endosome est une petite vésicule sphérique entourée d’une membrane cellulaire ; cette vésicule se forme lors de la pénétration — ici du SARS-CoV-2 – dans la cellule (via un phénomène appelé endocytose).
Dans la voie « non endosomale », le virus se fixe sur son récepteur cellulaire (récepteur ECA2 = enzyme de conversion de l’angiotensine-2) via sa protéine Spike, celle-ci est alors clivée par une protéase appelée TMPRSS2, permettant la fusion directe des membranes virale et cellulaire et la libération du génome viral dans la cellule. L’hydroxychloroquine serait inactive sur cette voie.
Dans l’autre voie dite « endosomale », le virus SARS-CoV-2 se fixe sur son récepteur ECA2 à la surface de la cellule, puis la protéine Spike virale serait clivée par une autre protéase cellulaire (furine ou cathepsine) permettant l’entrée — par endocytose – du SARS-CoV-2 dans la cellule.
Après internalisation par endocytose, le virus se retrouve dans une vésicule (endosome) contenant des enzymes. Cette vésicule est acidifiée (via une pompe à proton) pour permettre une fusion des membranes et la libération de la capside virale dans le cytoplasme. 

L’hydroxychloroquine, qui est une base faible pouvant s’accumuler de façon passive dans les compartiments acides (endosomes/lysosomes) de la cellule, bloque cette étape de relargage viral dans le cytoplasme. Ainsi, l’hydroxychloroquine, de par son mode d’action, semble active sur la voie « endosomale » mais non sur la voie « non endosomale » de pénétration du SARS-CoV-2. De façon intéressante, il apparait que le SARS-CoV-2 et ses variants utilisent les deux voies pour une pénétration cellulaire, à l’exception du plus récent variant Omicron, qui ne semble utiliser que la voie « endosomale » de pénétration cellulaire sur laquelle l’hydroxychloroquine est active.
Néanmoins, il a aussi été montré (par le Prof. Jacques Fantini et son équipe) que l’hydroxychloroquine se fixe sur les radeaux lipidiques de la membrane plasmique (microdomaines membranaires, peu fluides et riches en cholestérol, phospholipides saturés, et sphingolipides) et empêche la protéine Spike de s’y fixer, par inhibition compétitive. On ne peut donc exclure un effet antiviral général de l’hydroxychloroquine quelle que soit la voie d’infection (fusion à la membrane plasmique ou endocytose).
Bien qu’active in vitro contre le SARS-CoV-2, il existe une controverse quant à une activité antivirale de l’hydroxychloroquine in vivo.

Qu’en est-il de l’ivermectine ?

L’ivermectine (ou Stromectol) est un médicament utilisé contre les parasites, notamment la parasitose de la gale. Elle possède également une activité vermifuge (contre les vers gastro-intestinaux), insecticide et acaricide. Chez les invertébrés, l’ivermectine agit sur les canaux ioniques chlorures (glutamate dépendants) des cellules nerveuses et musculaires inhibant la neurotransmission et provoquant la paralysie et la mort des animaux. Ces canaux sont spécifiques des invertébrés, et n’existent pas chez les mammifères.
Plus récemment, une puissante activité anti-SARS-CoV-2 a été décrite pour l’ivermectine.

Cette activité antivirale de l’ivermectine est controversée pour le SARS-CoV-2, bien qu’elle ait été démontrée in vitro (en éprouvette) et in vivo (chez l’animal) sur plusieurs autres virus à ARN, dont les virus « West Nile », de la grippe et de la dengue.

L’ivermectine agirait comme un inhibiteur de l’importine α/β1 responsable du transport dans le noyau cellulaire de molécule(s) virale(s) nécessaire(s) à la multiplication du virus SARS-CoV-2. Il est notable qu’il y aurait potentiellement plusieurs mécanismes d’action, dont un effet bénéfique (régulateur négatif) sur le système rénine-angiotensine (SRA). Le SRA est indispensable au fonctionnement de l’organisme humain ; il est présent au niveau de tous les organes et tissus, et pilote l’immunité innée et les microbiotes (intestinal, buccal, vaginal).
Or, il faut se rappeler que le SARS-CoV-2 interfère avec ce système hormonal complexe et ubiquitaire en s’attaquant à lui, le rendant dysfonctionnel, ce qui entraîne de possibles répercussions sur de très nombreux organes et tissus (le cerveau, le cœur, les poumons, la rate, le foie, le pancréas, le système vasculaire, le système auditif, les yeux, la peau, les intestins, les glandes surrénales, les organes reproducteurs, etc.).

Et de l’azithromycine ?

L’azithromycine (ou Zithromax) est un antibiotique de type macrolide, appartenant au sous-groupe des azalides. Il est principalement utilisé pour le traitement d’infections génitales spécifiques et d’infections sexuellement transmissibles. L’activité antibactérienne de l’azithromycine est due à sa fixation sur les ribosomes (ARN ribosomique 23S de la sous-unité 50S des ribosomes) des bactéries sensibles, ce qui inhibe la synthèse des protéines bactériennes.

Parallèlement, l’azithromycine a montré un effet antiviral in vitro (virus Zika, virus Influenza) et sur des modèles précliniques d’infections virales (virus respiratoire syncytial, rhinovirus, entérovirus). Le mode d’action serait un blocage de l’entrée du virus dans la cellule, et/ou une induction de l’immunité innée (réponse immunitaire immédiate contre les microbes) par des interférons (IFN) qui sont des molécules fabriquées par les cellules de notre organisme en réponse à une agression par un microbe afin de résister à celui-ci.

Si l’azithromycine est l’un des principaux antibiotiques contre les virus respiratoires, certains médecins ont également prescrit la doxycycline qu’ils ont souvent associée avec l’ivermectine. Quelle est la particularité de cet antibiotique ? En quoi est-il différent de l’azithromycine ?

La doxycycline est un antibiotique de la famille des tétracyclines (antibiotique bactériostatique de la classe des cyclines), et diffère donc des antibiotiques de type macrolides (tel que l’azithromycine). Comme l’azithromycine, elle inhibe la synthèse des protéines bactériennes. La doxycycline est intéressante dans la mesure où elle protège contre de multiples germes dont les manifestations peuvent être respiratoires, cutanées, génitales, oculaires ou autres. Il est notable que le Covid-19 peut se manifester par des atteintes à ces organes ou tissus (tels que les poumons et les voies respiratoires en général, la peau, les organes reproducteurs, les yeux, etc.). La doxycycline est efficace sur les parodontites infectieuses (dysbiose buccale) qui sont largement représentées dans les formes plus graves du Covid-19 et du Covid long. En parallèle, la doxycycline a des propriétés anti-inflammatoires (elle diminue l’expression de cytokines pro-inflammatoires), et présente un large spectre anti-microbien, avec des activités in vitro sur les bactéries, mais aussi les parasites (dont le Plasmodium, parasite de la malaria) et les virus (dont le SARS-CoV-2).

Dans le cadre d’un Covid gastrique, il a été question de céphalosporine de troisième génération.

La céphalosporine de 3ᵉ génération (Céfotaxime) est un antibiotique de type beta-lactamine (proches des pénicillines) possédant une action bactéricide. Elle tue les bactéries en les empêchant de synthétiser leurs parois protectrices. Un inconvénient majeur de cet antibiotique est l’apparition de possibles effets neurologiques indésirables. Le mode d’action des céphalosporines est donc différent et complémentaire de l’azithromycine et de la doxycycline dans l’arsenal anti-Covid-19.

L’efficacité de ces molécules est-elle la même sur tous les variants ?

Je ne pense pas que l’efficacité de ces molécules soit équivalente sur les multiples variants et sous-variants du SARS-CoV-2. À titre d’exemple, le variant Omicron semble pénétrer dans la cellule par la voie « endosomale », contrairement à d’autres variants du SARS-CoV-2 qui utilisent à la fois les voies « endosomale » et « non endosomale ». De plus, le variant Omicron est préférentiellement localisé dans les voies aériennes supérieures (qui sont peu accessibles au système immunitaire), contrairement aux précédents variants et à la souche « Wuhan » originelle du SARS-CoV-2. Ceci souligne des spécificités pouvant exister au sein d’une même famille de virus, ce qui suggère fortement qu’ils n’auront pas tous la même sensibilité aux diverses molécules bioactives ou médicaments utilisés.

Y-a-t-il des situations où il est préférable de privilégier une molécule plutôt qu’une autre ?

Personnellement, je recommanderais la supplémentation en vitamine D (ou dedrogyl/calcidiol en cas de Covid-19 symptomatique car bioactif plus rapidement), en présence des composés appropriés (zinc, magnésium, vitamine C liposomale, selenium, glutathion ou N-acetyl-cystéine, et vitamine K2).
Pourquoi la vitamine D ? Parce qu’elle agit -entre autres- en amont du SRA en inhibant la production de rénine. Ainsi, la vitamine D contrecarre le dysfonctionnement du SRA et la suractivation « délétère » de son récepteur AT1R à l’origine des maladies Covid-19.

Tous les médecins qui défendaient les traitements ambulatoires précoces avançaient que cela pouvait éviter les formes graves de la maladie. Pensez-vous qu’ils puissent également contribuer à éviter les syndromes associés au SARS-CoV-2 qui se prolongent bien après l’infection et que l’on nomme désormais le Covid long ou le syndrome post-Covid ?

En effet, je pense qu’un traitement prophylactique (préventif) et/ou ambulatoire précoce (par exemple, une supplémentation à la vitamine D ou dedrogyl/calcidiol, ou autre) devrait permettre d’éviter une évolution potentielle vers les formes graves du Covid-19 et également du Covid long pour la grande majorité des personnes infectées. Il aurait, à l’évidence, été préférable de procéder à des traitements ambulatoires précoces (plusieurs associations de molécules sont possibles) en cas d’infection plutôt que de préconiser de rester à son domicile avec, pour seul traitement, une prise de doliprane (qui de plus n’est pas recommandé dans le Covid-19 -contrairement à l’aspirine- car le paracétamol contenu dans le doliprane provoque un déficit en glutathion qui un antioxydant important pour lutter contre le stress oxydatif d’une suractivation du SRA induite par le virus).

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