Le Courrier des Stratèges publie à midi et à minuit un bilan de l’évolution de la Guerre d’Ukraine. Avec une double perspective, croisée: la guerre sur le terrain; et le conflit stratégique global que les Etats-Unis essaient d’organiser contre la Russie – en prenant le risque très clair d’une escalade entre puissances nucléaires. Nous sommes dans une "crise des missiles de Cuba" au ralenti. L'instinct de survie et l'intelligence l'emporteront-ils sur le potentiel d'auto-destruction de l'humanité ?
Matin
07h00: Le bilan militaire de la journée d’hier selon l’Institute for the Study of War, qui s’appuie exclusivement sur les informations fournies par l’armée ukrainienne:
Les
forces russes se consolident et se préparent à de nouvelles opérations
le long de la périphérie occidentale et orientale de Kiev, notamment
dans la zone d’Irpin à l’ouest et dans la zone de Brovary à l’est ;
Les
forces ukrainiennes défient les lignes russes étendues qui s’étendent
de Soumy, que les forces russes n’ont pas encore prise, à la périphérie
orientale de Kiev ;
Les troupes russes tentent probablement
de contourner Nikolaïev et de traverser le Bug du Sud en amont de cette
ville pour permettre une avancée sur Odessa combinée à une opération
amphibie imminente contre cette ville ;
Les forces russes avancent pour renforcer leur emprise au nord de la Crimée, en particulier à Zaporojie.
Ce qui est frappant, c’est la convergence des analyses concernant les oéprations sur le terrain dès que le travail est fait sérieusement.
En revanche, on peut discuter des anticipations: les chercheurs d’ISW pensent que l’attaque de Kiev aura lieu dans les 96h. Et ils sont certains que l’opération sur Odessa, si elle a lieu sera amphibie. A suivre.
08h00: Le nouveau bilan des pertes kiéviennes, d’après le renseignement russe, serait de près de 14 mille soldats tués/blessés graves/disparus et près de 850 prisonniers.
08h30: la Chine redit son opposition aux sanctions.
09h00: La bataille de Kharkov s’intensifie. Les Ukrainiens semblent accorder une importance symbolique très forte à la ville.
“Au sud-est de Kharkov,
les kiéviens ont tenté une incursion pour attaquer les arrières d’une
base avancée Russe à Balakleya (qui dirige le front vers Izyum) avec des
blindés, en suivant la route P78. L’aviation Russe est intervenue pour
stopper l’attaque kiévienne, au niveau de Verbovka.
Les
forces Russes ont ensuite lancé une contre-attaque, ainsi qu’une attaque
sur Slobozhanskoye et Donets, où les kiéviens ont amassé des renforts.
– Il y eut cette nuit d’importantes frappes de roquettes multiples dans le secteur de Kharkov“
10h00: Finalement, l’analyse politique repose souvent sur des évidences. Qui avait remarqué que Victoria Nuland, personnage clé de la crise de Maïdan en 2014, avait été nommée par l’administration Biden, secrétaire d’Etat adjoint? La dame est célèbre pour son “F…Europe!” de 2014. Comme nous le racontions hier, c’est elle qui vient de confirmer l’existence de laboratoires dédiés à la guerre biologique. l’obsession de Madame Nuland est d’avoir l’air plus dure que Madeleine Albright, Condoleezza Rice et Hillary Clinton réunies. Cela crée une mauvaise réputation mais cela ne fait pas une politique.
11h00 – “Une occasion en or se présente aujourd’hui pour l’Iran de s’accrocher à ses exigences restantes, à savoir la levée de la désignation par les États-Unis du corps d’élite des gardiens de la révolution islamique (CGRI) comme organisation terroriste, la garantie ferme qu’un futur gouvernement américain ne reviendra pas (encore) sur l’accord nucléaire et la clôture définitive du dossier concernant les travaux nucléaires de Téhéran par l’Agence internationale de l’énergie atomique. La Russie soutient fermement les demandes de l’Iran”. (M.K. Bhadrakumar).
Selon le diplomate indien, Moscou va montrer que l’on peut répondre à la “militarisation du dollar” par la mise en cause de la “non-prolfération nucléaire”. En effet, Washington peut difficilement lever les sanctions pour les relations entre la Russie et l’Iran. Du coup, l’accord sur le nucléaire ne se fera pas puisque Moscou doit être signataire du nouvel accord, ayant été signataire de celui de 2015.
A moins, ajoutera-t-on, que la Chine entre dans le jeu au nom de l’ordre international et de l’impératif de non-prolifération.
12h00 – Lu sur le blog de Patrice Gibertie: “Les médias américains ont implacablement diffamé@dgaytandzhieva pour ses enquêtes acharnées sur les laboratoires biologiques financés par le Pentagone en Europe de l’Est. Il s’avère qu’elle avait raison. Cela signifie-t-il que la recherche sur le gain de fonction qui est illégale aux États-Unis est effectuée dans d’autres pays au point qu’ils deviennent des cibles militaires stratégiques ?Fidèle à son habitude l’AFP a déclarée fausse la nouvelle qui se révèle vraie.. https://factuel.afp.com/doc.afp.com.324D7H7″
Ce sujet va devenir vraiment embarrassant pour les Etats-Unis. Gibertie rappelle une déclaration de Poutine d’août 2021: “On nous dit qu’il existe des stations sanitaires et épidémiologiques pacifiques près de nos frontières, mais pour une raison quelconque, elles rappellent davantage Fort Detrick dans le Maryland, où les Américains ont travaillé dans le domaine de l’armée. biologie pendant des décennies”
Après-midi
13h00: Une vidéo du YouTubeur russe “War Gonzo” (Semyon Pegov). Elle montrerait un sniper du Bataillon Azov camouflé sur le toit d’un immeuble à Marioupol. Si l’identification est confirmée, cela ferait très bien comprendre la tactique des milices ukrainiennes: faire des villes des camps retranchés en espérant y attirer l’armée russe. L’armée russe, elle, encercle les villes sans y rentrer.
14h00: Il semble que 20 000 personnes aient pu quitter Soumy, finalement, conformément à la politique des corridors pour les civils.
15h00: Si l’on comprend bien, Poutine – que tout le monde ou presque traite de dictateur – a eu du mal à se faire obéir sur le fait qu’il ne voulait pas de conscrits mais uniquement des soldats de métiers en Ukraine. Il a fini par exiger des sanctions pénales si un conscrit de retrouvait à nouveau “au contact avec l’ennemi”.
16h00: Par contraste avec les approximations que l’on entend dans la plupart des médias, il vaut la peine de reproduire cette analyse du canal Telegram Actualités mondiales et françaises:
“Le conflit Ukrainien est déséquilibré, du point de vue des pertes, pour plusieurs raisons.
Surtout en raison de la différence d’armements utilisés:
Les
missiles de croisière ne sont utilisés que par une partie. A chaque
cible touchée, le ratio des pertes est totalement en faveur de la partie
Russe. A moins d’un problème technique au lancement, ce qui provoque
très exceptionnellement des pertes.
Si le missile touche des
dépôts de carburant, de lubrifiant ou des aéronefs regroupés au sol à
proximité d’une piste, les pertes en personnels du côté Ukrainien sont
assez faibles. Mais lorsque le missile touche un dépôt de munitions, une
caserne, un QG ou les unités de guerre psychologique, le ratio des
pertes bascule de manière démesurée en faveur de la Russie (celle-ci
n’ayant aucune perte).
La partie kiévienne utilise quelque missiles balistiques Toshka-U, mais ceux-ci sont généralement abattus par la DCA Russe.
Les
frappes de l’aviation Russe provoquent également beaucoup de pertes
chez les kiéviens, sans que ceux-ci ne puissent en provoquer en retour,
ou exceptionnellement, lorsqu’un avion Russe est abattu. Là encore, le
ratio des pertes est démesurément en faveur de la Russie.
Pour l’artillerie, c’est plus équilibré. Avec quelques points en faveur de la Russie :
Celle-ci bénéficie d’une bonne surveillance aérienne permettant d’identifier les cibles et de guider ses tirs.
De
plus, l’armement Russe est largement plus efficace que l’armement
kiévien. L’artillerie Russe utilise notamment des Tornado-S qui ont une
portée démesurée, dont certaines munitions les plus récentes sont
guidées. On parle de lanceurs de roquettes multiples d’une portée de 70 à
200 Km (d’après les rumeurs). La partie Ukrainienne ne peut rien y
opposer, à part des Smerch par exemple.
Cependant, la partie
Ukrainienne peut utiliser de l’artillerie plus classique, comme la
partie Russe, dans des engagements à moins longue distance. Elle restera
limitée en terme d’observation aérienne.
De plus, la partie
Russe étant celle qui attaque, elle est par définition plus mobile,
donc moins simple à cibler à l’artillerie. A contrario, les positions
retranchées Ukrainiennes peuvent être touchées à l’artillerie par des
tirs planifiés, même avec une observation légèrement obsolète (une
position repérée en journée restera au même emplacement la nuit).
Là
où les choses s’inversent, c’est dans le combat au sol. Le défenseur a
naturellement l’avantage de pouvoir préparer son terrain, de voir
tranquillement venir l’adversaire, qui doit lui, s’exposer pour
progresser. Le ratio des pertes devrait naturellement basculer nettement
en faveur des kiéviens, à moins que le travail des forces apportant un
soutien indirect ait été très efficace, dont celui jouant sur le facteur
psychologique (militairement parlant : encerclement, perte de
commandement, pas de ravitaillement, pas de courrier de la part des
proches, défaites successives, manque d’idéologisation et de fanatisme
etc). Auquel cas, la partie Russe peut maintenir un bon ratio de pertes.
A
cela, il faut ajouter les erreurs des uns et des autres. Par exemple,
les quelques colonnes de soutien et de logistique Russes décimées,
rééquilibrent légèrement les pertes en faveur de Kiev, minent le moral
Russe et apportent de l’enthousiasme aux kiéviens.
Egalement,
les situations d’encerclement, dont les troupes kiéviennes sont
régulièrement victimes, rendent les combats défensifs difficiles et
débouchent sur la prise de nombreux prisonniers kiéviens par le camp
Russo-LDNR.
Il n’est donc pas du tout étonnant que le ratio des pertes soit nettement en faveur de Moscou, et en nette défaveur de Kiev“.
17h00: La carte du front:
Soir
18h00: L’Ukraine n’exportera plus de blé – le gouvernement anticipe sur une baisse des récoltes en 2022 et gardera les céréales pour nourrir la population ukrainienne.
19h00: Point diplomatique
+ La diplomatie américaine multiplie les pressions sur les pays qu’elle accuse de rester neutre: Turquie, Inde en particulier; mais même la Chine!
+ Le monde semble découvrir avec 36h de retard l’entretien accordé par Zelensky à ABC, où il accepte de négocier la non-appartenance à l’OTAN et la neutralité de son pays. Aujourd’hui, Zelensky a demandé au chancelier Scholz d’organiser une réunion de négociation entre Poutine et lui.
+ Magdalena Anderson, Premier ministre suédois, exclut l’entrée de son pays dans l’OTAN, afin, dit-elle, de ne pas déstabiliser l’Europe du Nord.
+Tout en exprimant «sa grave préoccupation face à la situation en Ukraine», le Sénégal réaffirme son «adhésion aux principes du non-alignement et du règlement pacifique des différends»
+ Heureusement, nous avons Josep Borrell, haut représentant de l’UE pour les Affaires étrangères, pour nous dire : vous allez voir ce que vous allez voir; Poutine ne va pas s’en tirer à moindre frais comme cela. Et puis nous avons “Uchi – casque à pointe”, cette chère présidente de la Commission Européenne, pour annoncer sur un ton martial de nouvelles sanctions contre la Russie et la Biélorussie.
+ La crise ukrainienne et le comportement occidental amènent une réconciliation entre Israël et la Turquie. Après quinze ans de brouille, le Ministre des Affaires étrangères turc se rendra en Israël en avril.
20h00: les Etats-Unis et l’Union Européenne sont impardonnables:
Russian authorities are reportedly in talks with state-owned Chinese companies such as China National Petroleum Corp., China Petrochemical Corp., Aluminum Corp. of China, and China Minmetals Corp. regarding investment opportunities in Russian assets..https://t.co/rXlMN5LjmN
— M. K. Bhadrakumar (@BhadraPunchline) March 9, 2022
Au lieu de faire de la Russie le point d’ancrage de l’Europe en Asie et le moyen de contrebalancer la Chine communiste, ils accélèrent définitivement la constitution d’un bloc continental eurasiatique.
La carte ci-dessus, réalisée par Pierre-Emmanuel Thomann, montre deux choses:
+ l’affrontement de la théorie géopolitique classique entre l’alliance des puissances maritimes et le bloc continental eurasiatique.
+ Mais émergent d’autres périphéries, qui n’existaient pas dans la théorie de MacKinder: Afrique, Amérique latine en particulier.
a situation militaire dans le sud:
21h00:
La carte ci-dessus, réalisée par Military Advisor, montre le front de l’est et du sud.
Les Russes ont fixé la plus grande partie des troupes ukrainiennes dans ces régions.
Si j’en crois une source militaire française, contrairement à ce que nous avions lu dans le bulletin quotidien de l’ISW, l’opération amphibie pour prendre Odessa n’est pas à l’ordre du jour. On a plutôt affaire aux prodromes d’une offensive qui serait terrestre.
Pour l’instant, personne n’a pu décrypter les intentions ultipmes de Vladimir Poutine, en particulier la question de savoir s’il garderait une partie du sud, au-delà des républiques sécessionnistes.
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