26 mai 2020

Coronavirus : le sans-faute du chancelier autrichien Sebastian Kurtz


En prenant très tôt des mesures dures pour endiguer la pandémie, le chancelier autrichien Sebastian Kurz a réussi à limiter fortement le nombre de décès dans son pays. Une stratégie qui lui vaut le soutien infaillible de ses concitoyens, analyse le professeur d’histoire Kevin Bossuet.

Plus qu’un large soutien populaire, c’est une véritable consécration qui entoure la politique menée actuellement en Autriche par Sebastian Kurz. En effet, grâce à une énergie exceptionnelle et un sang-froid exemplaire, le chancelier autrichien a impressionné tous ses homologues européens dans sa lutte contre le Covid-19 jusqu’à devenir un modèle pour un bon nombre d’entre eux. De ce point de vue, les sondages ne font que mettre en avant cette gestion flamboyante dans la mesure où depuis le début de la crise sanitaire, la popularité de l’exécutif en Autriche oscille entre 70 % et 90%. Une récente enquête réalisée du 16 au 24 avril par Ipsos-Sopra Steria pour le Cevipof dans sept pays européens (France, Allemagne, Royaume-Uni, Italie, Autriche, Suède, Nouvelle-Zélande) vient d’ailleurs confirmer cette tendance : alors que seulement 24% des Français sont satisfaits de l’action d’Emmanuel Macron, les Autrichiens ne sont que 11% à ne pas être conquis par l’action menée par leur chancelier. Là où le président français a péché par une impréparation atterrante et une gestion particulièrement calamiteuse de la crise, le jeune prodige autrichien, en s’appuyant sur des conseillers et des collaborateurs extrêmement compétents, a su affronter la vague épidémique avec panache et discernement.

Un train de mesure très tôt, très strict

Il faut dire que très vite, Sebastian Kurz a su adopter des mesures à la hauteur de la situation. Dès le 10 mars, quelques jours seulement après l’identification des deux premiers cas autrichiens de contamination à Innsbruck dans la région du Tyrol, il a d’emblée fait interdire les événements de plus de 500 personnes en extérieur et ceux de plus de 100 personnes en intérieur tout en incitant les citoyens à limiter leurs interactions sociales. Les élections locales prévues le week-end suivant ont été reportées et des contrôles sanitaires ont été mis en place à la frontière italienne. Dès le 11 mars, ce sont les crèches, les écoles et les universités qui ont été fermées. Les vols et les déplacements en train en provenance des pays fortement touchés par le Covid-19 ont quant à eux été tout simplement annulés. Le 13 mars, deux communes du Tyrol fortement touchées par l’épidémie ont été mises en quarantaine. Le 14 mars, c’est un véritablement plan pour sauver l’économie qui a été présenté par le gouvernement autrichien. Le lendemain, un plan de confinement national très strict a été appliqué comprenant notamment la fermeture des cafés, des restaurants, des magasins non essentiels à la vie du pays et des aires de sport et de jeux. A partir de cette date, les Autrichiens ne pouvaient plus quitter leur domicile sauf pour les activités professionnelles indispensables, les achats de première nécessité, l’aide aux personnes en difficulté ou encore les activités physiques. Les rassemblements de plus de 5 personnes ont alors été interdits dans l’espace public. A partir du 24 mars, le gouvernement s’est fixé un objectif : celui de tester 15 000 personnes par jour. Enfin, le 30 mars, le port du masque a été rendu obligatoire dans les supermarchés.

Toutes ces mesures scrupuleusement respectées par un peuple autrichien particulièrement auto-discipliné ont très rapidement porté leurs fruits dans la mesure où au début du mois d’avril, l’Autriche ne comptait environ que 200 décès liés au Covid-19. Alors que la France était en plein confinement et était déstabilisée par un pouvoir politique vacillant, Sebastian Kurz a pu apprécier les fruits de sa remarquable gestion. « Nous avons réagi plus vite et plus drastiquement. On a pu éviter le pire » a-t-il alors déclaré avec le sens du devoir accompli. Il ajoute : « Jusqu’ici, nous avons mieux traversé la crise que d’autres pays. Notre but est désormais de sortir plus vite de la crise que les autres. » L’heure du déconfinement avait alors sonné !

L’économie est rapidement revenue sur les rails

Dès le 14 avril, les jardins publics, les magasins de bricolage et de jardinage ainsi que 15 000 petits commerces ont alors pu rouvrir. Quelques jours plus tard, le 1er mai, les Autrichiens ont pu de nouveau sortir et tous les autres magasins (notamment ceux de plus de 400m2) ainsi que les coiffeurs ont repris leur activité. Mi-mai, ce fut au tour des écoles, des cafés, des restaurants et des lieux de culte de rouvrir. Enfin, à la fin du mois de mai, ce sont les hôtels et les parcs de loisirs qui accueilleront de nouveau des clients. Quant au port du masque, il demeure évidemment obligatoire dans les transports publics et les magasins.

Incontestablement, Sebastian Kurz a limité la casse économique. Alors qu’au premier trimestre, le PIB de la zone euro a baissé de 3,8 %, le PIB de l’Autriche n’a diminué quant à lui que de 2 %. A titre de comparaison, celui de l’Espagne et de l’Italie a baissé de 5 % et celui de la France de 5,8 %. En alliant réactivité et efficacité, il a indéniablement remporté son pari sur l’épidémie puisque l’Autriche est assurément le pays en Europe qui a quitté le plus tôt la trajectoire épidémique subie par beaucoup d’autres Etats. C’est bien sa stature d’homme d’Etat qui, aussi bien au niveau national qu’européen, a été très largement renforcée, faisant dire au Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahou, que Sebastian Kurz est un chef d’Etat qui « agit » au sein d’une Europe qui « attend ».

Pragmatisme contre idéologie

En effet, en fermant d’emblée la plupart des frontières autrichiennes et en suspendant les liaisons aériennes avec des pays comme l’Italie, l’Espagne ou encore la France, le jeune chancelier a privilégié le pragmatisme aux errements idéologiques obsessionnels des intégristes du sans-frontiérisme décomplexé à la Emmanuel Macron. De plus, fidèle à lui- même, il a fait preuve d’une très grande combativité afin de fournir à ses concitoyens les masques dont ils avaient besoin. Comme le dit une source proche du gouvernement autrichien : « Tout a été fait pour gérer au mieux la pénurie de masques dont le port était indispensable afin de limiter les contaminations. On a fait à la fois le pari de la production nationale et celui de l’approvisionnement depuis l’étranger. Même pendant le confinement, nos usines qui produisent des masques, des gants ou encore du gel hydroalcoolique sont restées ouvertes. De plus, Sebastian Kurz a utilisé les bonnes relations qu’il entretient avec les pays asiatiques et notamment la Chine pour importer un maximum de masques sur le territoire autrichien. » François Logel, chef d’entreprise originaire de Sélestat en Alsace, qui vit et travaille aujourd’hui en Autriche, abonde dans le même sens : « Sebastian Kurz a merveilleusement bien géré la question des masques. Je vis à Graz dans la province de Styrie et personne n’a manqué de masques ici. A l’entrée des supermarchés, les clients avaient systématiquement à disposition et de manière gratuite des masques. Un employé pulvérisait avec du gel hydroalcoolique les mains des clients et les caddies étaient systématiquement désinfectés. »

En outre, l’Autriche s’est beaucoup appuyée sur le recours au dépistage massif. Des tests ont été effectués sur toutes les personnes présentant des symptômes ou ayant été en contact avec une personne contaminée. On pouvait même être testé depuis sa voiture, notamment dans des « drive-in ». Mieux encore, désormais à l’aéroport de Vienne, les voyageurs entrant en Autriche peuvent bénéficier d’un test de dépistage afin d’éviter une mise en quarantaine. Certes, le test coûte environ 200 euros, mais il permet de ne pas bloquer inutilement des personnes saines.

Un système de santé efficace

Résultat, les hôpitaux autrichiens n’ont absolument pas été débordés et ont même pu accueillir des patients français. Il faut dire que contrairement à d’autres pays, l’Autriche n’a jamais bradé la santé de son peuple sur l’autel des petites économies budgétaires mal ficelées. En effet, d’après l’OCDE, alors que la France, l’Italie et l’Espagne dépensent respectivement 4965 dollars, 3428 dollars et 3323 dollars par habitant pour la santé, l’Autriche en dépense 5395. Quant aux lits d’hôpitaux, il y en avait en Autriche, en 2017, 7.4 pour 1000 habitants. Ce chiffre est de 8 pour l’Allemagne, 6 pour la France, 3.2 pour l’Italie ou encore de 3 pour l’Espagne. Le système de santé autrichien est sans doute avec celui de l’Allemagne l’un des meilleurs systèmes européens.

Bref, vous l’aurez compris, Sebastian Kurz aura démontré au cours de la crise du Covid-19 à quel point il est aujourd’hui l’un des meilleurs dirigeants de l’Union Européenne. La coalition qu’il a formée avec les Verts autrichiens est pour l’instant une véritable réussite. Les explications rationnelles fournies tous les soirs à la télévision par le ministre vert de la santé, Rudolf Anshober, ont largement permis de rendre intelligibles auprès du peuple autrichien les décisions de Sebastian Kurz. En effet, ne nous y trompons pas, même si le chancelier gouverne avec les écologistes, c’est bel et bien lui qui mène la danse. D’ailleurs, même s’il y a dans son gouvernement des gens comme Alma Zadic ou Werner Kogler, il n’a jamais renié sa volonté de lutter activement contre l’immigration illégale, le multiculturalisme ou encore l’islam radical. En outre, son conservatisme sociétal n’a absolument pas été remis en question par cette alliance qui, il est vrai, peut surprendre en France. Alors que les Verts, largement minoritaires, proposent, Sebastian Kurz tranche et ne se laisse aucunement influencer par la culture politique gauchisante d’un bon nombre d’entre eux. D'ailleurs, d’après une source proche du gouvernement, cette alliance entre les conservateurs de l’ÖVP et les écologistes convient très bien à Sebastian Kurz qui peut alors appliquer ses convictions en matière d’économie, de sécurité et d’immigration tout en mettant au premier plan la question de la protection de la nature qui est, quoi qu’en disent certains, d’abord et avant tout une valeur conservatrice.

Un modèle pour la droite française ?

C’est bien pour cela que la droite française aurait beaucoup à apprendre de Sebastian Kurz qui est autant un homme de conviction qu’un tacticien hors pair. En effet, là où la droite française reprend les idées de la gauche en feignant de s’opposer faussement à elle, Sebastian Kurz a su préserver son socle idéologique très conservateur tout en réussissant l’exploit de gouverner avec une partie d’entre elle. Guillaume Arquer, Conseiller consulaire LR pour l’Autriche, la Slovaquie et la Slovénie est admiratif de ce que représente aujourd’hui en Europe le chancelier autrichien. Il le dit sans ambages : « Sebastian Kurz est incontestablement un modèle de probité et de sobriété. C’est d’ailleurs un habitué des voyages en classe économique. Depuis 2017, date à laquelle il est devenu chancelier, sa gestion a été exemplaire avec des résultats qui ont été au rendez- vous. Il a réussi à dépoussiérer les structures vieillissantes et à redonner un coup de jeune à l’ensemble du paysage politique autrichien. C’est exceptionnel ce qu’il a fait ! » Il ajoute : « Les relations entre Les Républicains et le parti de Sebastian Kurz, l’ÖVP, pourraient être plus profondes et dépasser le cadre stricto sensu du groupe PPE au Parlement Européen. Les deux partis auraient mutuellement à gagner à travailler davantage ensemble. Depuis ma modeste position de délégué LR pour l’Europe Centrale et d’élu des Français de l’étranger, je m’y emploie depuis trois ans. Je me réjouis d’ailleurs que le sénateur des Français établis hors de France, Ronan Le Gleut, nouveau secrétaire général adjoint LR chargé des relations avec les mouvements politiques étrangers, aille dans ce sens. C’est à LR de s’inspirer désormais du parti de Kurz qui compte 600 000 membres dont 100 000 jeunes et qui est doté d’une structure territoriale hyper décentralisée. Je rappelle que l’ÖVP est au gouvernement régional de sept des neuf Etats fédérés d’Autriche. Cela devrait faire réfléchir la droite française. »

En effet, la jeunesse et le modernisme de Sebastian Kurz, son positionnement très social-chrétien, son conservatisme vert ainsi que son pragmatisme et son humilité légendaire, auraient sans doute largement de quoi séduire un électorat français de droite qui doit aujourd’hui se contenter d’un Christian Jacob qui ne rassemble que les guenilles d’un parti à la ramasse. Tant que la droite française ne fera pas sa mue comme l’ÖVP a pu le faire en Autriche, elle continuera inlassablement à multiplier les défaites électorales et à décevoir un peuple de droite qui rêve d’avoir comme leader un « Kurz français ». Ne désespérons pas, il arrivera peut-être un jour… 

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