02 janvier 2020

Le gouvernement va exploiter les “données de voyage” des Français


Inspiré du modèle utilisé par l'ex-URSS, le gouvernement a mis en place le Service national des données de voyage. Ce service supervisé par la police nationale sera chargé de collecter et exploiter les données des voyageurs au bénéfice des ministères de la Défense et de l'Intérieur.

Un arrêté, passé inaperçu et récemment publié dans le Journal officiel permet au gouvernement d'instaurer le Service national des données de voyage (SNDV), une nouvelle entité rattachée à la police nationale dont les missions seront exercées au bénéfice des ministères de la Défense et de l'Intérieur, avec le soutien — évidemment — du ministère des Transports. Tous les types de transports terrestres, maritimes et aériens sont concernés par ce dispositif de collecte et d'exploitation des “données de voyage” qui s'applique aussi bien aux passagers qu'aux personnels navigants.

Comme le remarquent nos confrères de Next INpact, il s'agit d'étendre le suivi des trajets des passagers déjà en vigueur dans l'aviation à travers le Passenger Name Record (PNR) à l'ensemble des moyens de transport, sachant que le SNDV servira à terme de bureau central pour la collecte des données, même s'il est dans un premier temps avant tout chargé d'études de faisabilité. Ce service sera d'ailleurs amené à proposer des “mesures législatives et réglementaires nécessaires à l'exploitation des données de voyage”. Il est également prévu qu'il s'occupe à terme de surveiller les dispositifs de collecte et de traitement des données de voyage, tout en organisant les fichiers et en s'assurant de leur interopérabilité entre les différentes entités devant y avoir accès (dont les entreprises de transport).

Un champ applicatif assez vague qui laisse craindre des dérives

Au regard d'un texte qui, dans sa présentation et sa terminologie, peut laisser craindre des atteintes aux libertés publiques, car assez vague dans la description de son champ applicatif, la direction de la police nationale indique que ces données seront essentiellement utilisées pour prévenir les actes relevant du terrorisme et de la criminalité. Néanmoins, en prévoyant techniquement que les données de transports puissent être exploitées dans “la poursuite d'infractions pénales”, leur utilisation pourrait — sur le papier — être beaucoup plus vaste.

Dans ce registre, il est à signaler que la Cnil n'a pas été consultée au sujet de la création du SNDV, dont la seule supervision semble être accordée à la police. Cela n'empêchera pas la Commission de l'informatique et des libertés d'être saisie en ce qui concerne le fonctionnement du SNDV et des futurs fichiers dont elle assurera la gestion, sachant que le mode de fonctionnement en partie opaque de cet organisme fera certainement s'élever de nombreuses craintes sur le respect des libertés individuelles. Car entre la mise en place d'un système cloisonné capable d'alerter les autorités lorsqu'une personne recherchée ou suspectée de terrorisme achète un billet d'avion, de train ou de bus sur Internet, et la mise en œuvre extrêmement intrusive de fichiers nationaux listant tous les usagers des transports, il y a une grande différence. 

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