11 août 2017

Les sanctions contre la Russie annoncent la répression à venir sur les Américains


La semaine dernière, j’ai écrit un article et réalisé une interview en expliquant que, selon ma lecture du nouveau projet de loi sur les sanctions contre la Russie, qui vient d’être signé par le président Trump, il y a une mesure ouvrant la voie à une répression du gouvernement américain sur certains médias non traditionnels.

En particulier, l’article 221 de la Loi Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act punirait les « personnes qui s’engagent dans des transactions avec les secteurs du renseignement ou de la défense du gouvernement de la Fédération de Russie ».

Au début, on pourrait penser que j’ai une lecture qui prête trop au texte, cependant, en tant que vétéran de douze années d’analyse minutieuse des lois promulguées sur la colline du Capitole à Washington, je peux vous assurer que ces lois ne sont jamais écrites de manière simple et clairement explicites. Il y a toujours un texte sous-jacent, et dans ce cas, nous devons considérer les nombreux cas où le Directeur central, et d’autres hauts dirigeants de la communauté du renseignement américain, ont tenté d’installer l’idée que les chaînes étrangères de nouvelles d’actualités telles que Russia Today ou Sputnik News ne sont pas protégées par le Premier amendement sur la liberté de la presse aux États-Unis, mais sont plutôt des outils d’une organisation de renseignement étrangère.

Vous pouvez voir dans l’atmosphère actuelle, où l’hystérie anti-Russie s’est répandue comme la fièvre typhoïde, à quel point cette notion serait facilement acceptée par beaucoup. Les Rouges sont sous nos lits et les Russkofs sont emparés de nos ondes.

Je ne pense pas que la répression s’arrêtera aux organisations de presse financées par le gouvernement russe comme Russia Today et Spoutnik. Une fois que la frappe initiale aura eu lieu sur les fruits les plus faciles à cueillir, la vague suivante ciblera les organisations s’intéressant à la Russie, qui ne sont pas financées par les gouvernements, mais qui contestent la ligne officielle du gouvernement selon laquelle la Russie est notre ennemi numéro un et que son régime doit être renversé. Des sites alternatifs privés populaires comme The Duran et Russia Insider seront probablement les prochains sur la liste des poursuites.

Cela vous semble exagéré ? Réfléchissez ainsi (et je peux vous assurer que les néocons le font) : si le gouvernement russe et Russia Today s’opposent aux sanctions et que vous exploitez un site Web qui suit également une ligne opposée aux sanctions, ce site ne travaille-t-il pas pour le renseignement russe ? Ne cherche-t-il pas à influencer ses lecteurs dans le sens voulu par les Russes ? N’êtes-vous pas « engagé dans des transactions » même si elles passent par les ondes ?

Et après cette deuxième vague, vous pouvez être sûr qu’il y aura une pression pour se pencher sur d’autres médias alternatifs qui n’ont rien à voir avec la Russie, mais qui s’opposent à la politique étrangère interventionniste des États-Unis : ZeroHedge, Lew Rockwell, Ron Paul Institute, ConsortiumNews, etc.

Inimaginable, dites-vous ? N’oubliez pas : cette guerre contre nous a déjà commencé l’année dernière lorsque le Washington Post a publié un article à la Une accusant tous les sites que je viens de citer d’être des agents russes !

Qui serait le prochain ? Avez-vous lu ces sites de nouvelles alternatives ? Faites-vous circuler des articles qui s’opposent à la politique des sanctions américaines à l’égard de la Russie ? Alors vous effectuez des transactions. Vous serez assujetti à des sanctions telles que décrites dans le Countering America’s Adversaries Through Sanctions Act, qui est maintenant la loi du pays.

Vous pouvez penser que cela n’arrivera jamais, que le gouvernement n’analysera et ne ciblera jamais les organes de presse privés uniquement parce qu’ils s’écartent de la ligne officielle des néocons de Washington.

Peut-être pas encore. Mais certaines organisations « non gouvernementales » financées par le gouvernement des États-Unis font déjà exactement cela.

Le German Marshall Fund n’a plus rien à voir avec l’Allemagne d’aujourd’hui, comme c’était le cas à l’époque où il a été fondé après la Seconde Guerre mondiale en témoignage de reconnaissance pour le US Marshall Fund. Ces jours-ci, il est principalement financé par le gouvernement des États-Unis, les gouvernements alliés – en particulier dans les pays baltes russophobes – les fondations de néocons et le complexe militaro-industriel. Par son projet « Alliance pour la sécurité de la démocratie », qui évoque étrangement l’ère soviétique, il a lancé quelque chose qui s’appelle « Hamilton 68 : un nouvel outil pour pister la désinformation russe sur Twitter ».

Ce projet surveille six cent comptes Twitter, dont le German Marshall Fund prétend qu’ils sont « impliqués dans la promotion des objectifs russes d’influence et de désinformation ». Quels sont ces comptes surveillés ? Cela personne ne nous le dira. Comment choisit-on les comptes à surveiller ? Vous ne le saurez pas non plus. À quelle fin ? Quelle horreur, cela ne sera jamais dit.

Quelle ironie que quelque chose qui s’appelle le German Marshall Fund utilise des tactiques dignes de la Stasi pour faire taire les médias et les opinions alternatives aux États-Unis !

Alors, que fait le projet Hamilton 68 ? Selon ses propres termes, d’abord « montrer les tweets des stations de propagande officielle russe en anglais, et un court article discutant les thèmes de la journée. Ce sont les messages publics de la Russie [la propagande] ».

Mais ça va plus loin. Il suit et stocke des informations sur d’autres sources qui n’ont aucun lien avec la Russie, mais qui, de leur propre initiative, répètent et amplifient les thèmes russes de manière fiable. C’est ce que le German Marshall Fund appelle un « réseau » de distributeurs de désinformation de second rang.

Qu’est-ce que fait ce réseau de personnes, sans connexion avec la Russie, mais qui amplifie les « thèmes » russes ?

Explication du German Marshall Fund :

« Cela reflète les priorités de la propagande russe, mais cela ne signifie pas que tous les noms ou liens que vous voyez sur le tableau de bord sont pro-russes. Le réseau met parfois en avant des histoires que les Russes aiment ou des gens ayant des points de vue semblables aux Russes, mais pas de connexion formelle avec la Russie. »

Donc, selon l’alliance autoproclamée pour la démocratie, vous ne saurez peut-être même pas quand vous diffusez la propagande de l’État russe.

Voyez-vous ce qu’ils font ici ? Ils utilisent les fonds des États-Unis et d’autres gouvernements dans le but d’éliminer toute organisation de diffusion de nouvelles d’actualités ou tout individu qui s’écarte de la ligne officielle de politique étrangère des néocons sur la Russie, la Syrie, l’Ukraine, etc. Ils essaient d’éliminer toute information qui conteste la ligne des néocons. Pour la criminaliser.

En fait, ils admettent qu’ils cherchent à réduire au silence les points de vue alternatifs :

« Notre objectif dans la mise à disposition de ce tableau de bord est d’aider les gens ordinaires, les journalistes et autres analystes à identifier les thèmes de propagande russe et à détecter la désinformation active ou les campagnes d’attaque dès leur commencement. L’exposition de ces messages rendra les consommateurs d’information plus résilients et réduira l’efficacité des tentatives de la Russie d’influencer la pensée des Américains et dissuadera cette activité à l’avenir en la rendant moins efficace. »

La description du projet « Alliance for Securing Democracy », très soviétique, se termine par un avertissement adéquatement autoritaire, arraché aux pages de 1984 [George Orwell], de « Le Zéro et l’Infini » [Arthur Koestler], ou au guide How-to d’Erich Honecker :

« Nous ne vous disons pas quoi penser, mais nous croyons que vous devriez savoir quand quelqu’un essaie de vous manipuler. Ce que vous faites de cette information dépend de vous. »

Froid dans le dos, non ? Et l’essentiel est fait avec votre argent, par votre gouvernement, et en votre nom.

C’est pourquoi les néocons et leurs myriades de groupes de réflexion – financés par le gouvernement dans de nombreux cas – adoreraient interdire notre prochaine conférence Paix et Prospérité 2017, qui se tiendra juste devant leur porte d’entrée ! Ils ne peuvent pas supporter un débat ouvert sur la politique étrangère hyper-interventionniste de Washington. Ils ne veulent pas parler de toutes leurs guerres ratées – et ils ne veulent vraiment pas parler des guerres qu’ils ont planifiées et qu’ils promeuvent.

Nous ne sommes pas anti-Américains. Eux le sont. Ils détestent le Premier amendement [sur la liberté d’expression]. Ils détestent le débat. Ils nous haïssent.

Comment pouvons-nous nous défendre ? Un moyen très simple est de leur montrer une salle bondée complète lors de notre conférence ! Juste en vous montrant, vous frappez un néocon à la face.

Pouvez-vous imaginer combien ils étaient furieux quand la conférence Paix et Prospérité de l’année dernière a été diffusée sur CSPAN ?

Grâce à l’appui de notre très généreux Comité d’accueil, nous pouvons maintenir le prix du billet aussi bas que possible. Nous voulons vous voir tous ici ! Vous allez vivre une journée complète avec des conférenciers fantastiques et perspicaces, la possibilité de réseauter et de comploter avec des personnes partageant les mêmes idées, et un très bon déjeuner avec beaucoup de café et de thé pour démarrer ! Nous avons également réussi à obtenir un bon prix à l’hôtel pour vous permettre d’économiser de l’argent !

Et vous rendrez les néocons fous furieux ! Qu’est-ce que vous attendez ! Réservez votre billet dès aujourd’hui !

Par Daniel McAdams
Source

Traduit par jj, relu par Catherine pour le Saker Francophone

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