02 février 2017

Un embryon chimère homme-cochon créé par des scientifiques


Alors que des patients doivent attendre des années pour obtenir une greffe d'organe, des chercheurs s'activent pour trouver des alternatives. Certains tentent de mettre au point des protocoles qui permettraient de créer des organes humains dans des animaux, afin qu'ils soient utilisables pour des transplantations.

Une première mondiale vient d'être réalisée dans ce domaine : dans la revue Cell, des chercheurs du Salk Institute à La Jolla décrivent comment ils ont obtenu une chimère d'embryon contenant à la fois des cellules humaines et des cellules de porc.

Le cochon est un animal particulièrement intéressant pour cette recherche car ses organes sont de taille proche de celle des organes humains. De plus, la croissance de cet animal est bien plus rapide que celle des humains puisqu'il est possible, à partir d'une cellule fécondée, d'obtenir un cochon de 100 kg en seulement neuf mois. Plus rapide qu'une liste d'attente pour une greffe : en France, d'après l'agence de biomédecine, la durée moyenne d'attente pour une greffe de rein est supérieure à deux ans.

Des cellules souches pluripotentes induites humaines (en vert) ont contribué au développement du cœur d’un embryon de cochon de quatre semaines. © Salk Institute
De telles chimères pourraient servir à créer des greffes ou tester de médicaments

Pour ces travaux, les chercheurs ont testé différents types de cellules souches. Des dizaines de cellules ont été injectées dans des embryons de cochon, qui ont ensuite été implantés dans des truies, où ils se sont développés trois à quatre semaines (soit le quart de la durée de la gestation normale pour un cochon). Certaines cellules souches se sont incorporées dans l'animal en croissance.

D'après le Washington Post, lorsque les embryons ont été retirés et analysés, les chercheurs ont trouvé qu'environ une cellule sur 100.000 était humaine. Ces cellules humaines étaient réparties en différents endroits dans la chimère : beaucoup se trouvaient dans les tissus qui allaient donner le cœur (près de 10 % du tissu), certaines étaient au niveau des reins et du foie (1 % ou moins). Quelques-unes se sont développées en précurseurs de neurones, ce qui soulève beaucoup de questions éthiques : risque-t-on de créer un animal avec une conscience humaine ? La part représentée par les cellules humaines était donc faible et le protocole de recherche devait empêcher que l'embryon hybride arrive à maturité.

Cette chimère homme-cochon marque une avancée majeure pour créer des embryons animaux contenant des organes humains. Cette semaine, une autre équipe de chercheurs a montré dans Nature qu'il était possible d'obtenir un pancréas de souris dans un embryon de rat.

Les chercheurs espèrent qu'ainsi un jour il sera possible de faire pousser des tissus humains dans des animaux de ferme. Les embryons chimères peuvent aussi servir de modèles pour des recherches fondamentales sur le développement embryonnaire. Ils pourraient également permettre de tester des médicaments sans prendre de risque pour la santé humaine.

Cellules souches : la création de chimères homme-animal autorisée en Angleterre

Article de Jean Etienne, paru le 24/05/2007

Bien qu'assortie de sévères contraintes, l'autorisation par le gouvernement britannique, prise le 17 mai dernier d'autoriser la création in vitro d'embryons de chimères humain-animal suscite de vives réactions.

Le but de cette culture est de répondre à la demande des groupes de recherche impliqués dans l'étude des cellules souches. En pratique, ces embryons ne doivent pas être conservés en vie bien longtemps, et les scientifiques s'accommodent très bien de la limite de 14 jours qui leur a été imposée. Ce délai se justifie par la position adoptée par de nombreux chercheurs, qui estiment qu'avant l'âge de 14 jours, l'embryon n'est pas encore un être humain à l'état d'ébauche et que toutes les manipulations de cette petite boule de cellules sont sans conséquences. En corollaire, il est bien entendu exclu de les implanter dans un utérus.

Les chimères ainsi produites, sur lesquelles des expériences ont déjà été effectuées notamment en Chine et aux États-Unis, sont obtenues par l'implantation du noyau d'une cellule humaine à l'intérieur d'un ovocyte animal. Ces essais s'inscrivent dans le cadre de la recherche sur la mise au point de méthodes de production de cellules souches à des fins thérapeutiques, notamment.

Mais la décision du gouvernement surprend, car elle semble court-circuiter une initiative de la HFEA (Human Fertilization and Embryology Authority) qui constitue, de l'avis de tous les spécialistes, un parfait modèle de contrôle et de régulation de ce secteur, et qui avait annoncé son intention de procéder à une vaste consultation populaire en automne prochain avant de se prononcer sur le sujet. Sa directrice générale, Angela McNab, déclare que « ce serait une erreur de porter un jugement immédiat sur ce problème compliqué et controversé avant d'avoir suffisamment d'éléments ».

En France, le professeur Axel Kahn, généticien à l'Inserm réagit en ces termes : « La décision anglaise était attendue depuis longtemps, précédée par la recommandation du Comité de bioéthique de Nuffield. Même si la loi anglaise interdisait la recherche sur l'embryon dans d'autres buts que celui d'améliorer la fertilité, elle était, depuis quelques années, tolérée dans certains laboratoires ayant d'autres visées. Dans les autres pays européens, on n'envisage pas encore le clonage, thérapeutique ou reproductif. Mais, si les recherches effectuées chez les animaux ou, ailleurs, chez l'Homme sont couronnées de succès, les législateurs seront face à une tension éthique entre l'idée qu'ils se font de l'embryon et les progrès thérapeutiques promis. Il sera important d'avoir un vrai débat démocratique et de ne pas nier les difficultés de tous ordres auxquels on sera confronté. »

Le Vatican, quant à lui, s'est fait entendre par la voix de Mgr Elio Sgreccia, président de l'Académie pontificale pour la Vie. Affirmant que cette décision va à l'encontre du droit et de la justice, il rappelle que la création d'un hybride homme-animal « représente une frontière violée dans le domaine de la nature, la plus grave, ce qui entraîne une condamnation morale totale ». Il émet aussi la crainte que l'on puisse, ultérieurement, créer des monstruosités à travers ces fécondations.

La greffe d’organe révolutionnée par les cellules souches ? Chaque année plus de 5.000 personnes bénéficient d’une greffe d’organe en France. Ces patients sont soumis à un lourd traitement pour empêcher le rejet suite à leur opération. Découvrez en vidéo et grâce à Discovery Science une technique basée sur les cellules souches qui pourrait permettre de contrer ce problème.

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