21 février 2017

Réflexion sur l’éclatement des USA


On connaît William S. Lind sur ce site, malgré l’extrême discrétion de celui qu’on doit considérer comme le théoricien principal de ce qu’on nomme la Guerre de 4ème Génération (G4G, ou 4thGW [4th Generation Warfare]). Lind a l’habitude de traiter des questions autour de la G4G, c’est-à-dire en général de la sorte de conflits postmodernes que d’autres nomment “guerre asymétrique” ou encore “guerre stealth”, “guerre hybride”, etc., où la communication, la culture, le sociétal, la narrative, le simulacre, jouent un rôle tout aussi fondamental que la puissance militaire par exemple; tandis que l’enjeu de la G4G évolue entre structuration et déstructuration, entre principes structurants verticaux et États légitimes d’une part, “valeurs” déstructurantes horizontales et États faillis d’autre part, à l’aide d’organisations transnationales et de groupes du crime organisée sans frontières, de déstabilisations et de migration... Alors qu’il s’attache en général assez peu à des foyers crisiques précis pour rester dans la stricte théorie, Lind a changé complètement d’attitude avec la crise américaniste, devenue pour lui un cas fondamental, et également un terrain absolument fertile pour la G4G.

(Sans aucun doute, les USA sont le cas-limite et exceptionnel de la G4G parce qu’ainsi sont impliqués la “nation exceptionnaliste” et le Système à la fois. Cette référence du Système est évidemment absente de l’analyse de Lind parce qu’il a choisi de procéder ainsi mais, en appréciant cette analyse, on ne peut oublier qu’elle dépend nécessairement du sort du Système et influe nécessairement sur le sort du Système. La finalité de la dynamique crisique actuelle des USA, nettement catastrophique, met en cause le Système lui-même, nécessairement. Ainsi la G4G atteint-elle son socle ultime, peut-être comme seule forme “guerrière”, – et une “forme-informe” paradoxalement, – capable d’atteindre décisivement le Système ; la logique ultime étant satisfaite dans ce fait que la G4G est une “forme-informe” de guerre directement enfantée par le Système parce que nécessairement et uniquement, et aveuglément déstructurante. La dynamique d’autodestruction est ainsi au rendez-vous.)

Lind estime effectivement que les USA sont menacées d’une G4G, qui serait simplement l’interprétation catégorielle d’une “guerre civile” (Civil War 2.0). L’événement a été préparé selon lui par une “G4G de basse intensité” sous la forme de l’activité de gangs divers, notamment dans les domaines du banditisme et du crime organisés, avec la drogue comme principal domaine et ses multiples ramifications politiques (avec l’implication de services d’État comme la CIA) ; à ce niveau, les troubles étaient acceptables pour la structure de la direction US. Désormais, nous sommes passés à une phase de G4G de haute intensité, avec des phases de tension de communication, une guerre de délégitimation, un harcèlement juridique constant, une pression sociétale à mesure, tout cela incessant et se succédant à tour de rôle dans le chefs de paroxysmes crisiques. Cette phase nouvelle maintient une tension psychologique considérable et impose la perception d’une impossibilité elle-même structurelle d’une vie commune entre les groupes qui s’opposent. Pour Lind et en cela rencontrant une évaluation de plus en plus partagée, les USA sont aujourd’hui divisés en deux groupes irréconciliables, dont la vie sociale commune est devenue impossible.

« Le point principal est que nous avons maintenant un pays avec deux cultures incompatibles. L’une est la culture traditionnelle, occidentale et chrétienne. L’autre est la contre-culture des années 1960, qui était et qui reste pour l’essentiel une culture de la gratification immédiate. Le marxisme culturel de l’école de Francfort créa cette contre-culture et continue à lui fournir sa justification idéologique. Tel qu’il est actuellement structuré, notre système politique est incapable d’engendrer une situation où ces deux cultures hostiles peuvent vivre ensemble. Cela signifie que nous sommes conduits vers une G4G de large envergure sur notre propre sol et probablement un effondrement de l’état central. Ce n’est pas une issue que n’importe quel conservateur, et n’importe quelle personne dotée d’une certaine sagesse, puisse désirer. Il suffit de suivre la situation de pays comme la Syrie pour comprendre pourquoi. Par bonheur, notre système politique dispose d’un composant latent qui, s’il est activé, permet à deux cultures de vivre ensemble dans un état américain commun. Ce component latent est le fédéralisme... »

Ce que propose alors Lind est la “fédéralisation” des États-Unis sous une forme extrême qui ressemblerait d’une part à un retour à la situation initiale des USA, sous la forme d’une sorte de “guerre de sécession” pacifique, avec des États structurés dans un état de quai-indépendance pour l’essentiel de leurs prérogatives. De plus, Lind reconnaît que ces deux cultures se trouvent également actives à l’intérieur de certains États, entre d’une part les campagnes et d’autre part les grandes métropoles. Il propose alors la création de “villes-libres” faisant sécession du reste de l’État où elles se trouvent. On observera que ce schéma rencontre des mouvements d’ores et déjà à l’œuvre comme le mouvement de sécession en Californie et la floraison de grandes métropoles (New York, Washington, Chicago, Los Angeles, etc.) se déclarant “villes-sanctuaires” parce qu’elles refusent la réglementation fédérale en train d’être élaborée sur l’immigration. La Californie elle-même explore la possibilité de faire profiter de tous les attributs de la citoyenneté aux immigrants illégaux qui ne pourraient pas accéder à la citoyenneté américaine selon les lois fédérales. L’ensemble de ces propositions forme un tout extrêmement complexe et sophistiqué, correspondant certainement à la sophistication du désordre de la postmodernité mais dont il est difficile de voir comment on pourrait réaliser le processus d’apaisement préventif nécessaire à sa réalisation pacifique.

Ces propositions de Lind sont accueillies avec un certain scepticisme par certains commentaires. L’un d’eux fait remarquer que Lind observe lui-même que « la Gauche [le marxisme culturel] n’accepte les résultats d’une décision démocratique que lorsqu’elle gagne », alors que sa proposition suppose une acceptation par toutes les parties d’une démarche démocratique qui est un compromis où il n’y a ni vainqueur ni vaincu... Effectivement, Lind propose une solution qui implique que deux parties antagonistes qui ne peuvent s’entendre, doivent pourtant s’entendre sur le point de la régulation de leur mésentente. Il faut convenir qu’il y a là un point contradictoire difficile à écarter, à la fois dans son extrême complexité, à la fois fans l’apaisement complet des passions qu’il suppose.

L’aspect le plus remarquable de la situation aux USA n’est pas tant un désir de séparation, de “divorce à l’amiable” si l’on veut, mais une tension de haine réciproque impliquant que chacun se trouve dans la situation ou dans l’obligation de refuser à l’autre le droit à l’existence dans la mesure où chacun estime que les USA doivent être conformes à ce qu’il est lui-même et rien d’autre. A cet égard, le maximalisme de ce que Lind nomme “marxisme-culturel” et que nous nommons plutôt “progressisme-sociétal”, qui a fait régner depuis plusieurs décennies le “politically correct”, a largement alimenté par contrecoup antagoniste une montée à l’extrême de la culture traditionnelle, ce qui s’est manifesté par la victoire de Trump.

Finalement, la formule de Lind est plutôt modérée par rapport à ce que recèle la perspective aux USA, qui est effectivement plutôt celle d’une G4G de haute intensité. On mesure alors l’évolution extrêmement importante des esprits dans ce que la discussion sur des formules de séparation, d’éclatement, de sécession, est aujourd’hui devenue aux USA une activité intellectuelle courante, une sorte de “conversation” qui peut être aussi bien mesurée et ouverte, que furieuse et intolérante. Ce qui semble être la modération rationnelle de Lind constitue un projet qui, il y a deux ans, serait apparu comme une attaque sacrilège contre un tabou qui semblait inaliénable, qui était l’aspect indiscutable et inaltérable de l’union. Ainsi, en moins de 24 mois, le tabou que constituait l’idée de toute forme de séparation ou de sécession est devenu un sujet de réflexion commun, avec ses options modérées et ses options maximalistes.

Ce qui apparaît de plus en plus, alors que les USA prétendent rester en l’état d’une puissance cohérente et soudée dans une situation pourtant caractérisée par le désordre et la confusion les plus complets, c’est la rapidité de la dissolution, au-delà de la déstructuration, du socle fondamental de l’unité qui avait été imposé par le fer, par le feu et pr le sang avec la Guerre de Sécession. Le désordre et la confusion s’étendent en surface, autour des institutions des États-Unis traditionnels, alors que le socle sur lequel tout cela est posé est en processus rapide de dissolution. Ce qu’on voit avec l’exemple du texte de Lind, c’est avec quelle vitesse et avec quelle puissance les psychologies absorbent ce changement en cours pour ouvrir l’esprit à la normalité de réflexions qui semblaient quasiment impossibles il y a encore deux ans.

L’éclatement des USA n’est plus une option, c’est devenu une question directement opérationnelle, et réclamant une réponse rapide : comment, dans quel sens orienter l’inévitable ? Le texte de William S. Lind est paru le 19 février sur le site TraditionalRight.com... 

dedefensa.org

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How to Prevent 4GW in America

Low-level Fourth Generation war has been underway in the U.S. for some time, largely in the form of gang activities. That is likely to continue, as will occasional terrorist incidents. This low-level warfare is a problem, but it does not threaten the state.

However, the Left’s reaction to the election of Donald Trump as president points to a far more dangerous kind of 4GW on our own soil. Trump’s election signified, among other things, a direct rejection of the Left’s ideology of cultural Marxism, which condemns Whites, men, family-oriented women, conservative blacks, straights, etc. as inherently evil. Not surprisingly, those people finally rebelled against political correctness and elected someone who represents them.

That is how our system is supposed to work. But the Left only accepts the results of democracy when they win. A rejection of cultural Marxism is, to them, illegitimate. Hence we continue to see not just the hard Left but the whole Establishment howl with hatred, loathing, and contempt directed toward President Trump and those who elected him. Establishment organs such as the New York Times drip venom from every page. The Times last week went so far as to devote and entire op ed to attacking the way the president ties his necktie!

This reaction will not intimidate the people who voted for President Trump. On the contrary, it increases their motivation. Their victory in November showed them they can win. They do not have to lie passive as the Left heaps manure on them. Having won once, they intend to win again and again and again.

The upshot is that we now have a country with two incompatible cultures. One is our traditional, Western, Christian culture. The other is the counter-culture of the 1960s, which was and remains largely a culture of instant gratification. The cultural Marxism of the Frankfurt School created that counter-culture and still provides its ideological justification. As currently structured, our political system is not able to create a situation where these two hostile cultures can live together. That means we are headed toward large-scale 4GW on our own soil and probably a failure of the American state.

This is not an outcome any conservative, or anyone with a shred of prudence, can desire. We only need look at places like Syria to see why.

Fortunately, our political system has a latent component which, if activated, could enable our two cultures to live together in one American state. That latent component is federalism.

The authors and ratifiers of our Constitution never imagined that life would be the same in all states. In their time, life in Massachusetts or New York was very different from life in Virginia or South Carolina. Had they been told the government they were creating would use all its power to force life to become the same in every state, they would have been appalled. We would have remained a confederation.

That earlier federalism can be revived. The federal government can allow states once again to be different. In some states, such as Massachusetts or California, the counter-culture and cultural Marxism will be the norm. In other states like Ohio or Alabama the old culture will prevail. Individual Americans can move to a state that reflects their preferred culture. But all states will still be part of one country, united for foreign affairs, defense, and commerce.

The red/blue map of the last election, when shown by county, raises a further possible federalism. Donald Trump carried more than 90% of all counties. The cultural Marxists and their beneficiaries are concentrated in the big cities.

We might therefore want to introduce something very old: free cities. Hard Leftist cities–Portland, Oregon for example–in culturally traditional states might be allowed to secede from their state and become a free city. They would belong to no state. They would not be represented in the U.S. Senate, but could elect members of the House. Given their high population density, this would tend to create red Senates and blue Houses. In a country where federal government efforts to impose one or the other culture are likely to lead toward break-up, the inability to get extreme measures through both houses of Congress might be a good thing.

Both approaches to federalism would require Constitutional amendments. But if traditionalists and cultural Marxists can agree that large-scale Fourth Generation war on American soil is a bad thing, they should be able to cooperate on passing such amendments. However much we disagree on political, cultural, and moral questions, we do share a common interest in avoiding war in our common home.

William S. Lind

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