25 février 2017

La France au pied du volcan


C’est moins la rencontre “historique” Macron-Bayrou que des signes antiSystème qui ne trompent pas qui me poussent à prendre la plume pour vous parler des présidentielles en France. Dans cette étrange époque de la communication où la réalité n’existe plus et où il faut constamment mener sa propre enquête pour découvrir ses propres vérités-de-situation, chacun doit consulter ses propres références pour juger de l’importance objective d’un événement par rapport au simulacre dont l’habille la communication-Système, et surtout juger de l’importance de son évolution dynamique considérée le plus objectivement possible. Pour ce cas français, mes références se trouvent dans l’intérêt que lui portent certaines sources antiSystème que je connais, dont je mesure l’importance, la valeur l’orientation, l’influence, etc.

Je reviens donc à mon introduction : plus, beaucoup plus que “la rencontre “historique” Macron-Bayrou ” dont on imagine le peu d’inspiration qu’elle a suscitée pour ma réflexion et mon commentaire, c’est la parution sans cesse en augmentation d’articles de commentaire et de réflexion “de suivi” de la campagne dans la presse-antiSystème de qualité et d’influence qui m’arrête. (De plus en plus “comme d’habitude”, la presseSystème ne m’importe pas.) Pour le plus court, la journée d’hier, je me réfère précisément pour illustrer ce jugement à deux article, un sur Breitbart.News, dont on sait l’importance aux USA, et un autre d’Alexander Mercouris (*) sur son site TheDuran.com ; ce qui est remarquable dans ces deux textes, c’est combien ils vont dans le détail des situations, combien ils ont une bonne connaissance de ces situations. Dans notre époque moderniste post-1945, jamais depuis l’épisode de Gaulle la France n’a tenu une place aussi importante dans la réflexion du monde anglo-saxon dominant qui l’ignore d’habitude royalement, la tenant pour partie négligeable. (La France n’importe aux yeux des autres, dans notre époque moderniste toujours, que lorsqu’elle est dans son rôle naturel de contestatrice de l’ordre moderniste établi et de son Politically Correct.)

Je n’ai aucune intention de m’attacher au contenu de ces articles, donc de spéculer sur la situation et ses perspectives où l’on imagine évidemment que Le Pen tient une grande place, mais plutôt à la signification historique, sinon métahistorique et plutôt métahistoriques, qu’implique cet intérêt. Les sites antiSystème de bonne tenue (là aussi, surtout anglo-saxons) ne s’intéressaient guère depuis quelques années, depuis qu’existe la phénomène antiSystème, à la France dans le triste état où elle se trouve ; nul ne leur en fera le reproche puisqu’ils actent ainsi l’effacement complet tant politique que d’influence, au moins durant les deux derniers quinquennats, de ce pays dans les affaires internationales et dans l’affrontement Système-antiSystème.

La présidentielle France-2017 change tout cela, et c’est pour moi un signe majeur : même si l’importance de cette élection était admise en théorie, je considère que l’apparition de ces articles qui développent non plus une information parcellaire mais un suivi de la dynamique de l’événement, contribuent fortement à lui donner une dimension opérationnelle de premier plan, et cela non pas du point de vue national mais du point de vue international. La présidentielle française se déplace ainsi, hors de toute spéculation sur ses résultats, au premier plan et au premier rang dans la dynamique de la situation internationale, donc dans la dynamique de la Crise Générale. (Cette notion de “dynamique” de la situation, et non pas la simple position politique classique dans cette situation, est d’une importance capitale ; elle fait toute la différence qui justifie mon propos ici.) C’est la première fois dans notre séquence métahistorique, depuis la position française sur (contre) la guerre en Irak de 2003 et le référendum repoussant la Constitution européenne de mai 2005, que la France reprend de manière si tranchante et incontestable une place d’une telle importance dans la situation mondiale, dans ce que cette situation a de plus dynamique aujourd’hui.

On comprend bien que, pour autant, la France n’est nullement rétablie dans ce rôle de premier plan sur la durée, – cela est une perspective complètement ouverte, où les paramètres sont par définition dynamiques eux aussi, et donc changeants... Ce que j’en juge est qu’elle est, après son effacement catastrophique, replacée dans la structure et la dynamique spécifique des grands événements de cette époque, en offrant elle-même un grand événement, reconnu comme tel par toutes les parties dans le bloc-BAO, et notamment les antiSystème ; cela est notamment confirmé pour moi, par les références que j’ai citées.

On serait incliné à penser que c’est la position de Le Pen, les possibilités envisageables autour d’elle, etc., qui font cette importance de la présidentielle. Sans écarter une seconde cela parce que c’est l’évidence même je dirais, moi, que l’importance de cette présidentielle va pourtant au-delà, bien au-delà. L’élection elle-même et en tant que telle, la plus complète incertitude qui prévaut (ce qu’on sait du caractère si complètement aléatoire des sondages y est pour beaucoup), le climat sourdement “révolutionnaire”, la puissance des enjeux réels (souveraineté, légitimité, identté), qui pèse de tout son poids malgré le silence assourdissant qui les baignent, constituent l’essentiel de la puissance de cet événement. On pourrait aller jusqu’à dire que, quel que soit le résultat, la présidentielle France-2017 constitue un grand événement de la période, et ce grand événement ne pourra aucunement rester sans suite quel que soit le résultat parce qu’on sait, ou plutôt l’on sent bien que ce résultat restera dans des bornes qui laissent ouvertes les possibilités de prolongements peu ordinaires. Cela revient à dire ceci, pour rester dans la circonstance la plus souvent évoquée : si Le Pen, premier tour franchi, était battue au second à la façon que les sondages dont on connaît la pauvreté et la tendance au simulacre l’envisagent, ma conviction est que la situation française ne retomberait pas dans le cadre catastrophique habituel depuis dix ans ; quelque chose de fondamental aura changé parce qu’un événement métahistorique ne peut s’arrêter à lui-même et s’éteindre sans autre conséquence, sans laisser de trace.

L’importance de l’événement n’est pas liée au seul résultat, au seul point de la personne élue, – et Dieu sait qu’on a déjà spéculé sur ce que pourrait être cette personne, ce que représenterait son élection, les manœuvres qu’elle dissimulerait ou qu’elle provoquerait, etc. Pour mon compte, cette spéculation est accessoire tant elle reste aléatoire, et elle ne donne rien d’essentiel de la clef de cette considération qu’on doit avoir de l’événement... Je crois qu’il y a une importance et une grandeur métahistorique spécifique dans l’événement et que, par conséquent, cela signifie que bien d’autres possibilités que la seule élection et que la personnalité de la personne élue peuvent surgir, apparaître par surprise, introduire un ou des éléments tout à fait inattendus et qui étaient imprévisible par nous, susciter enfin des réactions et d’autres événements également extraordinaires.

... En d’autres temps, on aurait dit que la France a “rendez-vous avec l’histoire” ; puisque rendez-vous il y a je dirais, moi, que c’est avec la métahistoire, même si l’état extraordinairement bas de l’esprit français ne porterait pas à y croire. (Mais vous savez, l’“esprit français”, aujourd’hui, exprimée par des élites qui sont plus élites-Système que nulle part, l’“esprit français“ n’a guère de place dans cette partie où dominent des impulsions collectives auxquelles il est étranger et aveugle...) La gravité de la situation française ne doit pas être considérée pour la France seule et ses vociférations consternées sur elle-même, loin et tant s’en faut. Sa véritable importance est que cette gravité de la situation française, que les indécrottables Français ne voient déterminée que par elle-même et pour elle-même, est en vérité directement, impérativement sinon exclusivement liée à la Grande Crise Générale de l’effondrement du Système. De ce point de vue-là, la France tient son rang et son rôle : révélatrice de la catastrophe qui la frappe et nous frappe tous.

Le paradoxe de cette situation est assez plaisant, puisqu’il est, selon les hypothèses les plus dramatiques qui font l’événement sensationnel à priori, que le Système se bat contre une possibilité qu’il juge de “repli de la France sur elle-même” (Le Pen), et qu’à cause notamment de cette bataille comme outil de la dynamique à l’œuvre, la présidentielle française s’inscrit effectivement comme un événement qui replace la France dans la dynamique la plus grondante, la plus active des relations internationales dans ce temps de crise. C’est l’hypothèse du “repli sur soi”, et surtout si cette hypothèse est rencontrée, qui fait que la France prend (reprend) une place très importante dans les affaires du monde ; ainsi va l’hypothèse à son terme sous la forme de ce paradoxe signalé plus haut, extrêmement remarquable, – la possibilité du “repli sur soi” comme manière de sortir de l’enfermement dans sa mécanique de masturbation intellectuelle interne franco-française, pour épouser ou revenir dans la situation du monde et dans son époque qui est celle, non pas du triomphe du Système mais de la Grande Crise d’effondrement du Système...
 
Note

(*) Mercouris, commentateur de grand qualité et d’influence, d’origine grecque mais parfaitement intégrée dans les milieux politiques et de la finance à Londres, et ainsi cultivant un grand nombre de contacts, s’est fait très rapidement avec son site TheDuran.com une place très importante sur l’axe de communication antiSystème entre le monde anglo-saxon et la Russie. Il a notamment parmi ses commentateurs son ami Peter Lavelle de RT, avec son émission extrêmement populaire CrossTalk (le numéro de ce 22 février, Revolt in the West, aborde justement le mouvement général de contestions antiSystème dans le bloc-BAO, avec une place importante faite aux présidentielles françaises bien entendu). C’est le deuxième article détaillé en quinze jours que Mercouris consacre à la présidentielle française, d’une manière très informée et en allant à l’essentiel de l’événement. Une cible particulière de Mercouris, c’est Macron, notamment dans la mesure de l’absurdité de la proclamation de ce candidat comme “candidat anti-Système”, selon la logique de la plus complète inversion puisqu’il est le parfait contraire de cette affirmation, comme nul ne peut en ignorer.

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