30 janvier 2017

Trump a promis au Royaume-Uni de conclure un accord commercial pour favoriser le Brexit


Le lien entre les dirigeants américain et britannique n'est pas uniquement commercial mais aussi très personnel, et tous deux ont envie de montrer que la relation reste forte, estime le spécialiste de la politique américaine Jean-Eric Branaa.

Jean-Eric Branaa est historien spécialisé dans la politique, la société et le droit américains. Il est maître de conférences à l’université de Paris II Assas. Il est également l’auteur de Hillary, une présidente des Etats-Unis (Editions Eyrolles), de Qui veut la peau du Parti républicain? L'incroyable Donald Trump (Editions Passy). Son nouvel ouvrage Make America Great Again : l'Amérique de Donald Trump (Edition Privat) sortira en février prochain.

RT France : Le fait que la première dirigeante étrangère à rencontrer Donald Trump soit Theresa May témoigne-t-il d'une relation spéciale ?

Jean-Eric Branaa (J. B.) : Je pense effectivement que c'est une relation spéciale. Donald Trump a commencé sa conférence de presse en disant que sa mère était écossaise et que, pour lui, il était très important de recevoir Theresa May. Il est clair que le lien n'est pas uniquement commercial, mais aussi très personnel. May se met dans les pas de Margareth Thatcher alors que Donald Trump se met dans les pas de Ronald Raegan et tous deux ont envie de montrer que la relation entre les deux pays reste forte.

D'ailleurs Theresa May a tout de suite répondu que le président américain était invité par la reine pour une visite d'Etat. On était dans de bonnes relations, ce qui est important pour les deux : important pour Theresa May parce que, en anticipant l'après-Brexit, elle crée ce lien avec l'Amérique qui est une relation traditionnelle pour les Anglais. Et le peuple anglais l'attendait. Mais c'est également très important pour Donald Trump, car, de ce fait, il a obtenu une reconnaissance internationale, alors qu'il s'est vu rejeté par le monde entier depuis qu'il est entré en campagne. Il vient de briser cette barrière : les Anglais lui tendent la main, et il l'a prise, cette main.

RT France : Cela signifie-t-il que Donald Trump veut construire une sorte d'axe politique Etats-Unis / Royaume-Uni en se passant de l'Union européenne ?

J. B. : Effectivement, je crois que l'Union européenne vient au second plan pour Donald Trump. Mais il y aura un lien avec l'Union européenne aussi, évidemment. D'ailleurs, dès aujourd'hui, il s'entretiendra avec Angela Merkel et François Hollande. Les journaux américains parlent surtout de la chancelière allemande, tout le monde ayant identifié qu'Angela Merkel et les Allemands étaient le moteur de l'Europe. Pour Donald Trump il s'agit d'aller recapturer les marchés un par un, les flux commerciaux avec l'Union européenne représentant 100 milliards de dollars. Il aura donc besoin de créer aussi une relation avec l'UE, mais cela se fera dans un deuxième temps. Et dans un premier temps il fallait une reconnaissance internationale, et il fallait créer cette relation avec le Royaume-Uni hors Union européenne. Car les britanniques sont occupés par le Brexit et Donald Trump a bien insisté sur le fait qu'il était llui-même au Royaume-Uni quand le vote a eu lieu et que, pour lui, c'était très important.

RT France : Donald Trump a promis au Royaume-Uni de conclure un accord commercial pour favoriser le Brexit, alors que les dirigeants de l'UE disent qu'il est encore trop tôt pour mettre en œuvre de tels accords. Pensez-vous qu'on verra du progrès dans cette affaire après la visite de Theresa May ?

J. B. : Avant de se marier il faut divorcer. Il faut que les Anglais quittent l'Europe et ce de façon officielle. A ce moment-là on pourra passer à une autre relation. Theresa May l'a fait savoir puisqu'elle a dit qu'il y aurait de nombreuses autres rencontres, commerciales ou pas, pour renforcer cette relation.

RT France : Theresa May a déclaré que les temps où le Royaume-Uni et les Etats-Unis pouvaient intevenir dans des pays souverains et «refaire le monde à leur façon étaient terminés». Est-ce le cas ?

J. B. : Je crois que Theresa May voulait surtout dire qu'il fallait compter sur les organisations internationales. Elle répondait à une critique très forte au sein du Royaume-Uni. Il fallait rappeler les principes et les valeurs sur lesquels le Royaume s'est construit. Il y avait aussi une préoccupation quant aux organisations internationales, en particulier l'OTAN. Theresa May a même laissé entendre qu'elle avait obtenu l'accord de Donald Trump qu'il respecterait l'OTAN et qu'il travaillerait au sein de cette organisation. C'était aussi ce qu'elle était aussi venue chercher : la crédibilité de son partenaire. Elle va pouvoir revenir avec cela à la maison, disant : «Je ne vais pas me marier avec le diable, et notre ancien partenaire a simplement un autre visage mais il travaillera comme d'habitude».

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