08 janvier 2017

Les députés ont modifié les règles de l'élection présidentielle de 2017



Dans l’indifférence générale, l’Assemblée nationale a modifié les règles de la prochaine élection présidentielle de 2017.


La règle des 500 parrainages d’élus

D’ordinaire, chaque candidat à l’élection présidentielle doit, pour pouvoir se présenter recueillir 500 soutiens d’élus locaux et de parlementaires qui accordent alors leur « parrainage » au candidat. Le Conseil constitutionnel précise que « chaque élu, quelle que soit son affiliation politique, est libre de sa décision de donner ou non un parrainage et de le donner au candidat de son choix. »

Par ailleurs, un élu ne peut parrainer qu’un seul candidat et ne peut lui apporter qu’une seule signature, même s’il cumule différents mandats.

Une règle géographique vient se superposer :

– Les 500 signatures doivent provenir d’au moins 30 départements ou collectivités d’outre-mer différents.
– Le nombre de signatures par département ou collectivité d’outre-mer est limité à 50 signatures maximum.

Ces parrainages sont ensuite transmis au Conseil constitutionnel avant une date butoir précédent le premier tour du scrutin par les candidats ou leurs équipes de campagne pour vérification. Les parrains sont libres de révéler publiquement à quel candidat ils ont apporté leur soutien et pour chaque candidat, le Conseil constitutionnel publie alors une liste de 500 noms de parrains tirée au sort.

Concrètement, parmi une liste d’environ 42 000 élus habilités à délivrer un parrainage, ce sont les candidats et leurs équipes qui vont à la rencontre des élus locaux pendant des mois pour les convaincre.

En 2012, beaucoup promettaient une réforme de ce système de parrainages qui avait pour objectif initial d’éviter les candidatures farfelues. Ainsi M. Hollande déclarait : « Je suis pour, le moment venu, changer ces règles de présentation, (…) pour par exemple que des citoyens puissent eux-mêmes parrainer dans certaines circonstances ».

Désormais, chaque élu sera tenu de faire parvenir directement ou par voie postale son parrainage au Conseil constitutionnel, tandis que l’intégralité de la liste des parrains de chaque candidat sera rendue publique.

Quelles conséquences ?

Si d’un côté, cela permet une certaine transparence dans les soutiens que vont apporter chaque élu aux candidats à l’élection présidentielle, le risque que cela permette aux formations politiques de renforcer leur contrôle sur les élus locaux est grand. En effet, il y a toujours une possibilité pour qu’un élu soit obligé de soutenir tel ou tel candidat s’il souhaite en échange conserver l’investiture de son parti pour la prochaine échéance locale.

En 2013, le professeur de droit constitutionnel Guy Carcassonne déclarait : « Transformer la quête aux signatures en une course de performance, où chaque candidat aura à cœur de montrer qu’il a le plus de soutiens à cette occasion, me paraît profondément malsain. Parce que cela ne correspond ni à l’objet, ni à la règle, ni à la logique même de l’élection présidentielle ».

Car en effet, avec ces nouvelles règles, les candidats les plus connus voudront certainement montrer qu’ils ont le plus de soutiens d’élus locaux. Ainsi au lieu de collecter uniquement 500 parrainages, ils chercheront à en collecter certainement beaucoup plus, 1000 voire jusqu’à 2000 pour les « ténors », ce qui accentuera la pression sur les élus locaux.

La fin de l’égalité du temps de parole entre les candidats


Autre sujet polémique, la réforme remplace le principe de l’égalité de temps de parole entre les candidats à la présidentielle par un principe d’équité pour la période qui précède immédiatement la campagne officielle. En clair : les rédactions audiovisuelles sont libérées de l’obligation d’appliquer une stricte égalité de parole entre « petits » et « gros » candidats.

L’argument avancé est de dire que le principe d’égalité totale aboutit « à une frilosité des médias et à une réduction continue du temps de parole » politique, par peur, justement, de manquer à cette obligation. L’égalité de temps de parole dans les 5 semaines qui précèdent l’élection, critère impartial et incontestable, est remplacée par la fameuse équité. Pourtant l’équité est une notion juridique des plus subjectives, impossible à mesurer sans une part d’arbitraire.

Alors que la France traverse une crise de confiance envers la classe politique traditionnelle et que 2 Français sur 3 pensent que les personnalités politiques n’ont pas les solutions aux problèmes de la France et des Français, est-ce réellement une mesure de bon sens que de réduire le temps de parole des autres mouvements politiques, qui justement permettent de faire entendre des voix différentes ?

Quel risque ? Les candidats des partis dominants qui sont déjà surreprésentés dans les médias, et commentent chaque jour l’actualité en s’invitant dans les émissions télévisées et radios les plus regardées et écoutées par nos concitoyens, monopoliseront davantage la campagne présidentielle, dénaturant la dernière élection, l’élection-reine, à laquelle les Français s’intéressaient.

Ne peut-on vraiment, une fois tous les cinq ans, faire respecter une période de cinq semaines où les dirigeants politiques sont traités à égalité ?

A vouloir malicieusement être «moderne», on risque de ne plus être démocrate. Confrontés à une crise qui ne cesse de s’aggraver, en France et en Europe, nos concitoyens aspirent au renouvellement des hommes et du débat.



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