31 janvier 2017

“Dévolution de couleur”



Il y a maintenant des semaines, voire des mois que l’on parle de la formule si incertaine et complètement surréaliste de “révolution de couleur, Made In USA”. Chaque fois, l’on annonce que c’est très sérieux comme il est de coutume pour les commentateurs mais rien de vraiment sérieux ne semble se concrétiser ; du moins le croit-on... C’est sans compter sur la puissance et la capacité d’influence de la communication : sur la longueur, le sentiment se renforce, les tensions ne cessent de grandir, et rien, absolument rien ne vient arrêter, contrecarrer, contredire la logique qui fait évoquer cette perspective.


Cette fois, il s’agit de l’immense, – essentiellement en termes de communication, mais ce n’est pas rien, – mouvement de protestation qui a suivi la directive de Trump portant sur une interdiction d’émigrants de sept pays, et cela pour trois mois. Cela aurait pu être autre chose, n’importe quoi, tant le Système hait Trump qui est pourtant l’un des siens, ou parce qu’il est l’un des siens, d’une haine inimaginable par sa puissance et son absolutisme quasiment de type-Robespierre/Saint-Just.

(On notera pourtant, pour qu’on n’oublie pas que nous sommes sur le territoire de l’absurde et de l’inversion, que cet “absolutisme quasiment de type Robespierre/Saint-Just” est directement l’aile marchante au pas de l’oie de l’hypercapitalisme que nous connaissons bien... Hypergauche et hypercapitalisme, un couple où il n’y a rien à redire – « Marions-les, marions-les, ils vont si bien ensemble », dit la chanson.)
Les “midinettes-furieuses” et la responsabilité


Inutile d’expliquer que de telles mesures de type similaire disons, sur la limitation d’émigrants de tels pays, donc de telle religion puisque telle religion est dominante dans tel pays, ont déjà été prises et présentées complètement dans cet esprit qu’on reproche à Trump comme une horreur historique, par tous ses prédécesseurs depuis 1993, par Obama, par GW Bush, et même par Clinton (Bill) sous une standing ovation d’un Congrès si parfaitement satisfait, et sans que rien, absolument rien ne vienne troubler de ce qui est l’ordre dans les rues et le rangement dans les consciences. “Inutile d’expliquer” parce que ce qui mène la situation, et essentiellement les réactions de communication de l’opposition anti-Trump, outre les arguments sonnants et trébuchants de Soros pour ses groupes de mercenaires-provocateurs, c’est pour l’essentiel des réactions d’un extraordinaire affectivisme, à la mesure de l’irrationalité du type démentiel, transformant ceux-là qu’on nommait selon Staline les “idiots utiles” de l’ère communiste, en “midinettes furieuses” selon les normes de la pensée réduite à l’incantation de type-Prisunic...

Il s’agit de la fureur vengeresse, qui emporte tout et répand la terreur encore plus dans les esprits de ceux qui la disent que dans ceux qui sont accusés ; cette fureur vengeresse répondant en effet à des conceptions “de midinette”, à une pensée-“fleur-bleue”, à une utopie de bazar et d’Art Contemporain (AC), à une révolution de notaire-poire, comme si nous nous trouvions dans une sorte de Musée de la PostModernité, comme on en trouvera dans quelques siècles, lorsque les extra-terrestres venus de l’Atlantide auront mis bon ordre à tout cela.

(On nous pardonnera le fait que le mot “midinette” soit du genre féminin, car nous croyons très fermement que l’“esprit-midinette” touche encore bien plus de citoyens du genre masculin que de l’autre, notamment dans le monde des directions-politique liées au Système. L’exemple en est donné par les larmes du sénateur démocrate Schumer, lequel annonçait il y a peu, presqu’avec une gourmandise complice et satisfaite, que Trump prenait le risque suprême de l’élimination radicale en s’opposant à la CIA, qui aujourd’hui pleure en rassemblant tous ses réfugiés autour de lui comme Jésus faisait de ses brebis égarées ; ce qui nous donne ceci : « Where was Senator Schumer’s tears when Obama was bombing Libya, Syria, Yemen, Somalia, Afghanistan etc… Now all of a sudden Schumer is emotional about banning “muslim migrants or refugees” from entering the United States. What are these migrants or refugees running from…maybe Obama’s bombing of their country for the last 8 years? The Washington Examiner reports… Senate Minority Leader Chuck Schumer held back tears Sunday while denouncing President Trump‘s executive order on immigration and refugees... » Ainsi passe-t-on, avec la même exaltation, des applaudissements à peine retenus pour les méthodes d’exécution expéditive d’un président des USA par la CIA, aux larmes absolument bouleversantes éclaboussant quelque seconds rôles voilés rassemblés pour l’occasion : ainsi se concrétise l’esprit de la “midinette-furieuse”. )
Obama avait tout prévu, tout fait, etc.

... Car, bien entendu, leur référence, leur grand’prêtre de cette incantation reste Obama, le toujours-président, dont Justin Raimondo leur rappelle, bien vainement à notre sens mais pourquoi ne pas le faire, qu’il fit exactement, il y a quatre ans, ce que Trump fait aujourd’hui, et qu’il signa des deux mains, il y a deux ans, une loi du Congrès proposant la même mesure, tout cela sans que les applaudissements des chœurs des vierges folles ne cessassent un seul instant :

« While the blue-state crowd is protesting President Trump’s order banning travel to the US by citizens of Iran, Iraq, Syria, Sudan, Libya, Yemen, and Somalia, what gets lost in all the shouting is that the legal and political basis of his order was laid down by President Barack Obama. These people don’t care to recall that, in 2013, Obama banned all refugees from Iraq for six months, and his action was hardly noticed: Trump is only proposing a ninety-day pause. What prompted Obama’s action, as ABC News reported at the time, was “the discovery in 2009 of two al Qaeda-Iraq terrorists living as refugees in Bowling Green, Kentucky — who later admitted in court that they’d attacked U.S. soldiers in Iraq.”

» Two years later, Congress passed a law, the Visa Waiver Program Improvement and Terrorist Travel Prevention Act, that restricted travel visas for citizens of “states of concern,” i.e. Syria, Sudan, Iraq, Iran and “any other country or area of concern.” Obama promptly signed it. In early 2016, the Department of Homeland Security unilaterally extended these restrictions to Yemen, Libya, and Somalia. What this meant was that the visa waiver program did not apply to citizens of these countries: travelers had to apply for a visa at US embassies, a highly problematic matter (Syria, for one, has no such facility) and were very unlikely to be successful in their efforts. I don’t recall any protests at the time.

» In short, the legal and political basis of Trump’s executive order – which is being denounced as an unprecedented attack on our allies (Iraq), civil liberties, and decency itself – was laid during the previous regime. Trump has simply dispensed with the fiction that these travelers are welcomed by our government, and issued an ostensibly temporary outright ban. »
Kiev-sur-Potomac ? Hardly...

Le scénario de Kiev est dans toutes les mémoires, avec la chute de Ianoukovitch suivant une “révolution de couleur” violente où l’action des “opérateurs“ habituels de l’américanisme, directs ou indirects, fut considérable. Adam Gurrie de TheDuran.com est un de ceux qui fait ce parallèle, en mettant en évidence les erreurs commises par Ianoukovitch, pour recommander à Trump de ne pas les commettre à son tour : « Trump cannot make this same mistake. The US may yet be too big to fall, but no one would have thought the USSR could fall. America could go the same way. It is a slippery slope. »

Ainsi donc, sérieusement, l’impensable ne l’est plus, car qui aurait jamais osé, ou ait eu la stupidité et l’indignité de penser, il y a vingt ans, dix ans, cinq ans, et même un an malgré tout, à cette possibilité d’une attaque directe, par le moyen de la rue, contre le président des États-Unis dûment mis en place, c’est-à-dire l’élu et commandant-en-chef de cette Nation si exceptionnelle et de cette démocratie si exceptionnaliste ? Il est vrai que l’“opposition”, – ainsi Stephen Bannon, le conseiller stratégique du président, nomme-t-il fort justement la presseSystème, plutôt que “Quatrième pouvoir” qui n’a plus guère de sens, – l’“opposition” donc a déjà dépassé largement l’état d’esprit qui conduit à cette sorte d’aventure puisque le sémillant WaPo, la Pravda D.C. postmoderniste, en est à recommander une consultation immédiate du Corps Médical du Parti pour pouvoir faire interner le président-maboul sur ordre du PolitBuro.

Simplement, Washington D.C. n’est pas Kiev. La “révolution de couleur”, s’il y en a une, est assurée d’être d’un modèle exclusif, on dirait “exceptionnel”, car les USA, cette nation “exceptionnelle”, ne répond en rien aux critères qui, ailleurs, assurèrent le succès des “révolutions de couleur”. Il n’y a pas de Kiev-sur-Potomac.
Il y a des remous dans les rangs

Or, il y a des signes qui commencent à avoir une signification sur ce qui pourrait naître si la course actuelle était poursuivie, si la violence augmentait, si l’affrontement prenait une forme inquiétante et dangereuse : non pas la chute d’un président, ni même l’intervention du Congrès parce que ce pouvoir est lui-même impliqué et déchiré dans tous les sens possibles dans l’affrontement, mais justement une sorte de “guerre civile” qui passerait du stade larvé au stade actif, qui serait plutôt, dans un premier temps, institutionnelle que géographique. Les lignes de fracture se révèlent actuellement dans l’imbroglio considérable des différents niveaux de pouvoir aux USA (“centre” fédéral avec ses divers pouvoirs, États de l’Union, métropoles, etc.), et à l’intérieur même de ces pouvoirs où certaines structures peuvent estimer avoir une “double casquette”, voire une “triple” (celle de la hiérarchie locale, celle du département dont ils dépendent, celle du pouvoir fédéral [du président]).

Nous signalons deux cas, simplement à titre d’exemple dans une situation en évolution constante...

• Le refus de certains membres ou services de l’administration des douanes d’obéir à une injonction d’une juge fédérale de New York (installée par Obama, de tendance progressiste), sur requête de l’ACLU qui est une association qui à la fois protège les droits civiques et reçoit le financement non négligeable (autour de $50 millions/an) de Georges Soros. Ces agents des douanes, signale le New York Post d’après des indications de l’ACLU, ont décidé de passer outre le jugement et d’appliquer les directives du président.

« The ACLU is getting “multiple reports” that federal customs agents are siding with President Trump — and willfully ignoring a Brooklyn federal judge’s demand that travelers from seven Muslim countries not be deported from the nation’s airports. “The court’s order could not be clearer… they need to comply with the order,” Omar Jadwat, director of the ACLU’s Immigrants Rights project, told The Post late Saturday. “It’s enough to be a serious concern,” Jadwat said of the reports. »

• Il y a aussi des prises de position de “Sheriffs” ou de chefs de la police de telle ou telle ville, refusant le statut de “ville-sanctuaire” que certains maires ont choisi pour signifier leur refus des nouvelles législations fédérales (Trump) sur les migrants. Trump a averti que de telles attitudes (les “villes-sanctuaires”) seraient sanctionnées par l’annulation des fonds fédéraux destinés à ces villes ; certaines villes (comme Miami) ont abandonné le statut, d’autres l’affirment hautement (comme celles de Californie et, en général, du bloc occidental et septentrional des USA). Pour autant, certains chefs de la police prennent partie contre leur autorité naturelle (la mairie), pour affirmer leur soutien à la politique nationale de sécurité (Trump). Ainsi, l’exemple du chef de la police de Park City, dans l’Utah :

« The police chief of this city was quick to affirm his department is cooperating with federal immigration officials and is certainly not a sanctuary city. The comments from the Park City chief of police came during the annual Sundance Film Festival. “I can tell you with certainty Park City is not a sanctuary city,” Park City Chief of Police Wade Carpenter told the Park Record. »
L’Hispanique du Colorado contre les “villes-sanctuaires”

Autre exemple intéressant... Personne par ici, autour de dedefensa.org, n’a entendu parler du député de l’État du Colorado, le républicain Dave Williams. Comme son nom ne l’indique absolument pas, Williams est d’origine hispanique (latinos). Il a pris l’initiative de déposer un projet de loi qui autorise des victimes d’agressions commises par des émigrants illégaux dans des “villes-sanctuaires” (villes qui refusent d’appliquer les lois fédérales-Trump sur l’immigration illégale) à attaquer en justice les autorités qui ont établi ce statut de “villes-sanctuaires”. (The DailyCaller.com, le 31 janvier.)

« A Colorado state representative announced a bill Monday that would allow victims of certain crimes committed by illegal immigrants to sue state and local politicians who defy federal immigration authorities seeking to enforce the law, multiple news outlets are reporting. Republican state Rep. Dave Williams, who is Hispanic, said he wants to strip the “immunity” from Democratic politicians who “place Coloradans in danger because of the sanctuary city policies that they created and continue to implement,” the Denver Post reported... »

C’est un bon exemple symbolique, ou un symbole tout court qu’un élu d’origine hispanique, dans une crise où l’origine ethnique compte bien plus que l’étiquette partisane (le républicain qu’est Williams), conduise une attaque si précise au nom du simple citoyen contre ceux qui soutiennent la politique “frontières ouvertes” pour l’immigration illégale qui continue à rester latinos pour l’essentiel. C’est aussi un symbole de l’extension du désordre, de la contestation, et surtout de la fragmentation des interventions où l’on voit que Trump est loin d’être isolé dans sa position avec, dans les rangs, des actes de contestation de la poussée de contestation de l’“opposition”.
Mutinerie à bord ? Virée...

Compte tenu de la personnalité de Trump, de sa position, de sa politique de communication bien exposée lors de son discours d’inauguration, le résultat paradoxal actuel de cette énorme contestation montée de toutes pièces par la puissance de la communication est de constamment renforcer sa détermination. Cela se comprend aussi bien psychologiquement que tactiquement et fait s’interroger sur cette étrange “stratégie de rupture” des inspirateurs de la révolte qui ne sont en rien assurés d’avoir les moyens et la “puissance de feu” d’un tel défi, avec la perspective d’un affrontement sans aucune retenue.

(Mais on comprendra aussitôt, admettant que les “inspirateurs“ se résument à un seul, qui est le Système, l’explication de cette étrange “stratégie”. Le régime de surpuissance et l’absence complète de subtilité dans l’attaque sont les caractères de sa “stratégie” [non-stratégie serait plus approprié]. Le fait que Trump soit issu des rangs du Système alimente encore plus la rage furieuse du Système et installe et renforce de plus en plus Trump dans une position antiSystème : une forme originale d’autodestruction.)

On voit donc la position et la politique de Trump avec les mesures qu’il prend de mettre à pied des hauts fonctionnaires issus de l’administration Obama, qui agissent contre ses instructions du fait du vide du pouvoir entretenu par les manœuvres à la limite de la constitutionnalité des démocrates au Congrès pour retarder la confirmation des ministres nommés par Trump. Il y a eu deux mises à pied dans les dernières vingt-quatre heures, après une épuration massive du département d’État la semaine dernière ; dans certains cas, les plus sensibles, il y a remplacement immédiat par des nominations de personnalités qui lui sont acquises.

De ces deux cas de la journée d’hier, on retient essentiellement celui du ministère de la Justice. Sally Yates, n°2 du ministère, restant de l’administration Obama comme “faisant-fonction” de ministre qui annonce qu’elle n’appliquerait pas la directive du président sur l’émigration et qui est immédiatement mise à pied ; à sa place, nomination immédiate de Dana Boente, procureure du district oriental de Virginie, pour servir comme n°2 du ministère, faisant fonction de ministre de la justice (en attendant la confirmation du ministre désigné (Jeff Sessions). Épisode révélateur, qui permet à Trump d’affirmer à très bon compte son autorité : la déclaration de Yates était pure mutinerie, absolument anticonstitutionnelle, et la mise à pied s’imposait, qui servira par ailleurs d’avertissement pour les candidats à cette sorte d’attitude.

(Pourquoi Yates l’a-t-elle fait, dans un ministère de la Justice US imbibé des valeurs sociétales, un peu comme durant le temps-Taubira en France ? Cas intéressant même si l’on en est pour l’instant réduit aux hypothèses... Mais les hypothèses ne nous font jamais peur et l’on en choisira deux non exclusive de l’autre, et à égale répartition pour respecter le principe postmoderniste de l’égalité en toutes choses et illusions : d’une part l’affectivisme, l’hystérie qui touchent les esprits, y compris les plus hauts placés, y compris et surtout de la précédente administration où nous savons bien qu’une grande ferveur religieuse pour l’ancien président a constitué l’une des marques principales de son intelligence politiques ; d’autre part, pour Yates elle-même, une façon de s’assurer d’une éventuelle carrière politique en se faisant passer pour une héroïne, une sorte de Joane of Arc du Potomac que le Monstre-présidentiel a lâchement châtié comme l’on brûle les braves gens en Place de grève. Quoi qu’il en soit et considéré d’une façon générale, son acte constitue stratégiquement, pour l’ensemble de l’attaque démocrate contre Trump, une faute majeure.)
Modèle exceptionnaliste de la “révolution de couleur”

Revenant aux choses sérieuses, ou disons aux choses apparemment plus tables de la méditation du jugement, nous dirons qu’il nous paraît bien difficile que la “révolution de couleur” Made In USA, modèle-Soros, puisse suivre la même ordonnance et les mêmes prescriptions que le modèle-standard. Rien ne se résoudra rapidement et ne forcera les us & coutumes de l’enchevêtrement législatif et juridique. Les partis opposés, notamment le côté qui soutient Trump, qui est resté sur la réserve ou bien n’a bénéficié d’aucune publicité-Système bien entendu (comparez la couverture presse-Système de la “Marche des Femmes” anti-Trump de 21 janvier et la marche anti-avortement et ouvertement pro-Trump de quelques jours plus tard), ces partis forment des groupes puissants, organisés, et qui n’hésiteront en aucun cas devant la nécessité d’une intervention en marge de la légalité si la situation l’exige et que la légalité tend à se dissoudre.


La “révolution de couleur” est faite pour obtenir, au bout d’une préparation bien montée, un résultat bref, décisif et sans appel, par élimination démocratique du pouvoir en place, à peu près comme la guillotine tranche. En général, elle crée la tension bien plus qu’elle n’en est le produit, et par conséquent elle contrôle cette tension. Aux USA, ce n’est en rien le cas : un mouvement type-“révolution de couleur” n’est qu’un facteur de plus dans une tension qui ne cesse de monter au moins depuis 2008-2009 dans sa phase actuelle et de façon irréfutable, avec en arrière-plan des enjeux bien définis qui ont une dimension historique et une profondeur abyssale, avec des organisations civiques (des deux côtés) formées depuis longtemps.

Dans les circonstances actuelles, Trump agit en fonction des pouvoirs dont il dispose réellement et constitutionnellement malgré les accusations de “dictateur” lancées contre lui. Le fait est que ses prédécesseurs, et particulièrement le sémillant et vertueux Obama, ont si profondément renforcé les pouvoirs du président pour appliquer la politique globaliste voulue par le Système que ces pouvoirs ne nécessitent pour l’instant aucune transgression “dictatoriale” pour permettre une politique qu’on pourrait effectivement juger, d’une façon objective mais superficielle comme on le comprend bien, comme équivalente à celle d’un “dictateur”.
“Couleur” certes, mais de la révolution à la dévolution

Contrairement à ce qui est annoncé depuis longtemps par nombre de commentateurs, y compris et surtout antiSystème (avant la venue de Trump), nous estimons que les USA ne sont en rien un État-policier gros d’une dictature, et cela non par vertu mais par nature. Ils ne sont pas un État d’une part, c’est-à-dire sans la centralisation de la légitimité ni la dimension régalienne qui facilitent la prise de contrôle à partir d’un “centre” ; la police, et les services de sécurité et de respect des lois en général, forment des corps qui ne sont pas des outils aveugles ou soumis, qui dépendent de divers pouvoirs, qui peuvent avoir leur conduite dictée par des jugements de conscience et d’intérêt si la légalité se dissout. Autant ces forces se sont pas un outil adéquat pour une répression policière centralisée, autant elle sont capables de s’organiser hors de la légalité ou en présence d’une légalité en dissolution, et de décider elles-mêmes de leur action.


Cela impliquerait, si le mouvement de contestation de type-“révolution de couleur” s’installe dans la durée, qu’on aurait un effet non pas classique du “coup d’État” contre le pouvoir en place ou à l’inverse de l’établissement d’une dictature de la part du pouvoir en place, mais bien plutôt un effet de “guerre civile” dans le sens centrifuge de la déstructuration et de la dissolution, – soit effectivement une “dévolution de couleur”. C’est ce que nous estimons prévisible depuis longtemps pour les USA et que nous répétons sans cesse : les USA sont sans cesse gros de mouvements centrifuges et de dévolution ; depuis 2001 et surtout 2008-2009, la grossesse semble proche du terme. La situation actuelle le favorise, avec la fracturation inédite de la direction-Système, et un affrontement entre deux force du Système (Trump et son “opposition”), par conséquent une formation très originale de type antiSystème. L'attaque contre le “centre” dans de telles conditions ne conduit nullement à affaiblir l’occupant de ce “centre” pour qu’on puisse prendre sa place, mais à affaiblir la structure centrale elle-même, c’est-à-dire ce qui a constitué jusqu’à aujourd’hui le principal moteur, la courroie de transmission du Système dont la puissance et la maîtrise se sont exercées pendant plus de deux siècles d’exceptionnalisme impliquant une influence tenant à la fascination. C’est cela, que nous avons nommé “la désacralisation de l’Amérique”, qui est en train de se produire. Certes, c’est Trump qui est l’initiateur de l’origine et le meneur pour cette séquence mais la façon dont ses adversaires sont entrés par affrontement dans le jeu antiSystème qui le conforte dans sa démarche de “désacralisateur” ne cesse de stupéfier par le risque formidable de déstructuration-dissolution du pouvoir qui est ainsi pris.

La chute des USA en tant qu’artefact fondamental de l’opérationnalisation du Système est désormais au programme, avec Trump dans le rôle d’une sorte d’hyperGorbatchev. Bien entendu, il est totalement illusoire d’attendre simplement une simple passation de pouvoir, une simple transmission de puissance à puissance, – vers laquelle, d’ailleurs... Un effondrement des USA débouche sur une situation totalement inédite, absolument imprévisible : cette idée est absolument corollaire à tout acte important de politique extérieure, au moins depuis la crise de l’automne 2008 où la politique extérieure US s’est confirmée dans l’empilement des catastrophes. Nous pensons ainsi qu’il y a une certaine immuabilité du destin de l’Amérique, et par conséquent du destin du reste (ROW pour Rest Of the World) et de la contre-civilisation “qui va avec”, parce que la chute de l’Amérique est une occasion immanquable pour cette contre-civilisation de suivre la voie tracée, elle aussi immuable, de l'effondrement par déstructuration-dissolution,... Ainsi exposions-nous notre sentiment le 14 octobre 2009 dans des termes qui ne nous paraissent pas dépassés :

« Nous l'avons déjà écrit et nous le répétons avec force : il ne peut y avoir, aujourd’hui, d’événements plus important pour la situation du monde qu’une dynamique de dislocation des USA. Nous pensons que la crise actuelle est à la fois, et contradictoirement, formidablement amplifiée et formidablement bloquée dans sa compréhension par la puissance de la communication. Ce phénomène ne cesse de dramatiser et d’attiser les conditions de la crise tout en renforçant la pression du conformisme de la pensée dominante pour ne pas mettre en cause les éléments qui sont les fondements de cette crise.

» L’un des fondements est psychologique, avec le phénomène de fascination – à nouveau ce mot – pour l’attraction exercée sur les esprits par le “modèle américaniste”, qui est en fait la représentation à la fois symbolique et onirique de la modernité. C’est cela qui est résumé sous l’expression populaire mais très substantivée de American Dream. Cette représentation donnée comme seule issue possible de notre civilisation (le facteur dit TINA, pour “There Is No Alternative”) infecte la plupart des élites en place; elle représente un verrou d’une puissance inouïe, qui complète d’une façon tragique la “fascination de l’américanisme pour sa propre destinée catastrophique” pour former une situation totalement bloquée empêchant de chercher une autre voie tout en dégringolant vers la catastrophe. La fin de l’American Dream, qui interviendrait avec un processus de parcellisation de l’Amérique, constituerait un facteur décisif pour débloquer notre perception, à la fois des conditions de la crise, de la gravité ontologique de la crise et de la nécessité de tenter de chercher une autre voie pour la civilisation – ou, plus radicalement, une autre civilisation.

» L’alternative n’est pas une évolution des arrangements politiques, économique ou géostratégiques (par exemple, la Chine remplaçant les USA comme n°1, mais toujours dans le même système). En raison du blocage psychologique ainsi décrit et de la prédominance de la communication, parce que nous sommes dans une ère psychopolitique et non plus dans une époque géopolitique, il n’est pas raisonnble d’envisager une évolution “douce” où les USA accepteraient de perdre leur position dirigeante absolue. L’alternative est une poursuite catastrophique de la crise vers des situations inconnues de désordre, avec les USA bloquant toute évolution possible. Mais il y a également de fortes chances que cette alternative renvoie évidemment à la première hypothèse, parce que l’entraînement “vers des situations inconnues de désordre” affecterait justement, en priorité, les USA, vers l’évolution qu’on suggère, prédatrice et liquidatrice de l’American Dream. »

Source

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.