22 décembre 2016

Mission "Immigration, asile et intégration"


Évolution de la demande d'asile dans l'Union européenne en milliers de demandes


ANALYSE GÉNÉRALE DE LA MISSION

I. UNE MISSION SOUS HYPOTHÈQUES

L'examen de la mission « Immigration, asile et intégration » s'inscrit cette année dans un contexte tout particulier. En effet, cette mission, réduite par le montant de ses crédits mais majeure par l'importance politique du sujet, est confrontée tout à la fois à une redéfinition de ses frontières dans le cadre des réformes de l'asile et du droit des étrangers, et à des bouleversements probables de l'utilisation des dispositifs qu'elle finance du fait de la crise des migrants à l'échelle européenne.
 

A. L'HYPOTHÈQUE DE LA CRISE MIGRATOIRE EUROPÉENNE 

1. Une arrivée sans précédent de migrants aux frontières européennes

L'Europe est confrontée, depuis deux ans, à une arrivée massive de demandeurs d'asile en provenance, en particulier, de Syrie, d'Irak, d'Afghanistan, d'Érythrée et du Kosovo.

Ces vagues d'arrivées, qui se sont accélérées depuis l'été 2015, s'expliquent, au-delà des situations sécuritaires des pays d'origine, par trois principales raisons : les conditions de vie dégradées dans les camps turcs, libanais et jordaniens ; l'attitude des pays de transit, en particulier la Grèce, qui ne s'oppose plus guère au passage des migrants ; et les signaux d'accueil perçus par ces réfugiés, en particulier en provenance d'Allemagne.

En 2014, la voie de la Méditerranée centrale, via la Libye puis Lampedusa et l'Italie, a concentré l'essentiel du flux, avec 170 000 arrivées irrégulières sur un total de 280 000. En 2015, le nombre des arrivées irrégulières s'est considérablement accru, en empruntant de nouvelles routes, en particulier la route des Balkans (arrivée en Hongrie depuis la Croatie et la Serbie), avec 150 000 arrivées entre janvier et août 2015, ainsi que la route de Méditerranée orientale (arrivée en Grèce par la Turquie), avec près de 230 000 arrivées entre janvier et août 2015. Au total, l'Agence Frontex estime qu'environ 500 000 personnes ont franchi les frontières de l'espace Schengen de façon irrégulière sur les huit premiers mois de l'année 2015.

Cette dynamique se reflète dans la progression du nombre de demandes d'asile dans l'Union européenne. Ainsi, sur les six premiers mois de l'année 2015, environ 395 000 personnes ont déposé une demande d'asile dans un pays de l'Union européenne, contre environ 220 000 personnes pour la même période en 2014. Alors que la demande d'asile en 2014 constituait déjà un record historique, comme l'illustre le graphique ci-dessous, les années 2015 et 2016 pourraient voir ce nombre encore doubler.

Évolution de la demande d'asile dans l'Union européenne (28) en milliers de demandes

 
Source : commission des finances, d'après les données Eurostat

Dans ce contexte, la France n'est ni un pays de premier accueil pour ces flux massifs, contrairement à l'Italie, à la Grèce ou à la Hongrie, ni un pays de destination souhaitée par les demandeurs d'asile, contrairement à l'Allemagne, au Royaume-Uni ou à la Suède. En particulier, l'Allemagne est, de loin, la première destination des demandeurs d'asile issus des routes des Balkans et de la Méditerranée orientale. Ayant annoncé prévoir un total de 800 000 nouveaux demandeurs d'asile en 2015, l'Allemagne a accueilli, pour le seul mois de septembre, un total de 280 000 demandeurs d'asile ; après le rétablissement du contrôle à ses frontières, elle s'attend à accueillir désormais 10 000 demandeurs d'asile par semaine jusqu'à la fin de l'année 2015.

La France connaît quant à elle, sur la première moitié de l'année 2015, un nombre de demandes d'asile stable par rapport à 2014 avec 32 784 demandes d'asile déposées (+ 0,3 %). Elle n'est pas confrontée, de façon directe, au phénomène migratoire connu par certains de ses voisins. En particulier, la France ne constitue pas - ce dont l'on peut s'étonner - une destination privilégiée pour les demandeurs d'asile Syriens, qui représentent la première nationalité des demandeurs à l'échelle de l'Union, mais seulement la cinquième nationalité pour la France, avec un total de 2 000 premières demandes environ en provenance de Syrie enregistrées par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides (OFPRA) en 2014. 

2. Un système de répartition sur une base volontaire, avant la mise en place éventuelle d'un mécanisme permanent

Cependant, la France subit à deux principaux titres les conséquences de cette vague migratoire.

Tout d'abord, la France est un pays de transit pour une partie de ces demandeurs d'asile, en particulier Soudanais, Erythréens, Afghans et Syriens, qui cherchent à rejoindre le Royaume-Uni. Le Calaisis constitue à cet égard pour ces migrants un « goulot d'étranglement ». Ces migrants, n'ayant pas déposé leur demande d'asile en France, ne sont pas comptabilisé dans les statistiques de l'asile, même si les pouvoirs publics les orientent vers l'OFPRA pour les inciter à déposer en France, sans attendre un départ, hypothétique, pour le Royaume-Uni. Particulièrement visibles à Calais, ces populations de migrants sont également présents en région parisienne - c'est le cas, par exemple, des migrants installés dans le camp de La Chapelle jusqu'à l'évacuation de celui-ci en juin dernier.

Ensuite et surtout, l'ampleur de la crise dans les pays les plus concernés, en particulier la Hongrie, l'Autriche et l'Allemagne, a conduit l'Union européenne à imaginer un mécanisme de répartition des demandeurs d'asile à l'échelle de l'Union.

Cette idée s'est tout d'abord concrétisée sous la forme d'une répartition de demandeurs d'asile dans le cadre d'un mécanisme d'urgence. Décidée par le Conseil de l'Union européenne le 27 mai 2015, une première répartition concernait 40 000 demandeurs d'asile, arrivés en Grèce et en Italie. Sur la base d'une clé de répartition qui tient compte de la population, du produit intérieur brut, du nombre de demandeurs d'asile accueillis sur les dernières années et du taux de chômage1(*), ce nombre a été réparti entre chaque pays, la France devant en accueillir 4 051 en provenance d'Italie et 2 701 en provenance de la Grèce sur les deux prochaines années.

Au mois de septembre, au regard de l'aggravation de la crise des migrants, le Conseil, sur la base d'une initiative commune de la France et de l'Allemagne, a proposé de relocaliser 120 000 migrants supplémentaires présents en Italie, en Grèce et en Hongrie. Selon la même clé de répartition, la France devrait en accueillir 24 031 sur les deux prochaines années.

Ainsi, au total, la France devrait accueillir 30 783 migrants dans le cadre des programmes de relocalisation d'urgence adoptés au niveau européen.

Il convient de souligner que les migrants concernés par cette relocalisation sont, d'après le texte de la décision, des migrants en « besoin manifeste de protection internationale », au regard notamment de leur nationalité (Syriens, Irakiens, Erythréens). Ils devraient être identifiés et pris en charge dans le cadre de « hotspots » aux frontières de l'Union, dont le statut et les missions précises (simple identification des demandeurs ou centre d'hébergement temporaire) n'ont pas encore été définis. 

3. La nécessaire budgétisation de ces arrivées supplémentaires, au-delà de la présente mission

Le programme européen de relocalisation, négocié dans l'urgence pour répondre à une situation conjoncturelle, n'est, d'après les responsables européens, qu'un premier pas avant la mise en place d'un mécanisme permanent de solidarité. Cette idée est notamment poussée par l'Allemagne, dont le système de gestion de l'asile repose, depuis plusieurs décennies déjà, sur un mécanisme de répartition des demandeurs d'asile entre Länder d'après une clé de répartition fédérale.

À cet égard, plusieurs responsables politiques allemands ont souligné que l'effort de la France devrait, selon eux, être plus important concernant l'accueil des migrants. Ainsi, le député du SPD chargé des questions de politique intérieure, Burkhard Lischka, a indiqué que « la France devrait accueillir cette année environ 80 000 ou 90 000 réfugiés. C'est certainement beaucoup moins que l'Allemagne, et il faudra tirer les conséquences de ce constat au niveau européen »2(*). En d'autres termes, votre rapporteur spécial constate qu'il sera difficile, sinon impossible, de se limiter à l'accueil de 30 000 réfugiés supplémentaires sur les deux années 2016-2017, alors que l'Allemagne pourrait en accueillir près d'un million pour la seule année 2015.

Si un mécanisme permanent devait être mis en place, et au regard de la situation constatée aux frontières de l'Union européenne, en Hongrie, en Croatie, en Autriche et en Allemagne, la France devra accueillir en 2016 et 2017 un nombre de demandeurs d'asile significativement plus élevé que les 30 000 d'ores et déjà prévus.

Un tel accueil nécessite des moyens importants, en particulier au titre de :

- l'instruction des demandes d'asile supplémentaires par l'OFPRA ;

- l'hébergement des demandeurs d'asile puis, le cas échéant, des réfugiés ;

- l'allocation aux demandeurs d'asile puis, le cas échéant, le revenu de solidarité active ;

- la couverture maladie universelle ;

- les dépenses d'intégration des étrangers, en particulier la formation linguistique dans le cadre du contrat d'accueil et d'intégration ;

- l'éducation nationale s'agissant des familles de migrants.

D'après les estimations de votre rapporteur spécial, l'accueil de 15 000 réfugiés par an aurait un coût direct annuel, en année pleine, d'environ 185 millions d'euros (90 millions d'euros pour l'hébergement, 79 millions d'euros pour les prestations sociales, et 16 millions d'euros pour l'intégration linguistique), sans compter les coûts indirects, plus difficiles à évaluer, sur les dépenses de personnel de l'OFPRA et de la police, ou encore les dépenses de santé et l'éducation nationale.

À titre de comparaison, l'Allemagne a annoncé qu'un abondement d'environ 6 milliards d'euros serait prévu à compter de 2016 (soit 1 milliard d'euros dès le budget 2016, en particulier en soutien aux Länder et aux communes, et 5 milliards d'euros dans le cadre d'un fonds de réserve).

Or, le financement de l'accueil de ces contingents de demandeurs d'asile en France, tel qu'il est prévu à ce jour, n'est ni précis ni réaliste.

En premier lieu, l'Union européenne s'est engagée, s'agissant du programme de relocalisation d'urgence, à verser un financement de 780 millions d'euros pour l'ensemble des pays participants aux deux programmes de relocalisation. La France prenant part à hauteur de 19,2 % du total des migrants relocalisés, elle pourrait bénéficier d'une enveloppe de 150 millions d'euros. Toutefois, les modalités de ce financement ne sont pas encore prévues. En outre, les actions financées par cette enveloppe (hébergement, renforcement de l'instruction des demandes d'asile, intégration, aides sociales) ne sont pas définies. Enfin et surtout, il est possible, sinon probable, que l'enveloppe par pays soit fonction du niveau de la capacité budgétaire des États participants, ce qui réduirait l'enveloppe française.

En second lieu, le Gouvernement a annoncé plusieurs mesures en faveur de l'accueil des demandeurs d'asile. Tout d'abord, lors du Conseil des ministres du 17 juin dernier, un « plan Migrants » a été présenté par le ministre de l'intérieur Bernard Cazeneuve, dans le contexte du premier programme de relocalisation européen et de la première crise des migrants. Ce plan comprend, notamment, la création de 4 000 nouvelles places de centres d'accueil pour les demandeurs d'asile (CADA), ainsi que de 500 places d'hébergement pour les réfugiés. Ces annonces, faites au mois de juin, sont globalement budgétées dans le présent projet de loi de finances, en particulier s'agissant du financement de l'hébergement des demandeurs d'asile.

Par la suite, dans le contexte de la crise des migrants du mois de septembre dernier, le Premier ministre Manuel Valls a, le 16 septembre, annoncé un plan global de financement de 279 millions d'euros. Toutefois, ce plan, qui comprend à la fois une aide forfaitaire aux communes créant de nouvelles places d'hébergement, mais aussi des financements pour l'OFPRA, l'OFII, ainsi que pour le programme d'hébergement du ministère de la ville, ou encore l'éducation nationale, n'est pas encore précisé. D'après le directeur général des étrangers en France entendu par votre rapporteur spécial, il pourrait représenter un montant de 85 millions d'euros pour les deux programmes 303 et 104 de la présente mission. Cette enveloppe est fondée sur l'hypothèse, non vérifiée et peu réaliste, d'un lissage des arrivées sur les douze mois de l'année 2016, à raison d'environ 1 250 demandeurs par mois. Elle semble, en tout état de cause, insuffisante pour couvrir les besoins en renforcement des équipes de l'OFPRA, en hébergement, en allocations et en actions d'intégration qui résulteront de l'arrivée de 15 000 demandeurs d'asile, dont la plupart seront rapidement réfugiés. Cela est d'autant plus vrai que ces dispositifs sont, dans le présent projet de loi de finances et indépendamment de ces arrivées, déjà sous-dotés (cf. infra).

A ce jour, l'enveloppe annoncée n'a pas été intégrée au présent projet de loi de finances et devrait l'être, d'après les informations recueillies par votre rapporteur spécial, par voie d'amendement dans le cadre du débat budgétaire.

Extrait du discours du Premier Ministre Manuel Valls devant l'Assemblée nationale, 16 septembre 2015

« Il nous faut aujourd'hui aller plus loin, mobiliser très rapidement, dès le mois d'octobre, les moyens nécessaires. Le ministre de l'intérieur l'a indiqué samedi dernier devant les maires : d'ici 2017, une aide de 1 000 euros par place d'hébergement créée sera attribuée aux communes et intercommunalités qui participeront à l'effort de solidarité. Ce soutien exceptionnel vient en complément de la politique d'hébergement, qui relève, elle, de l'État. (...)

« Au total, ce sont 279 millions d'euros qui seront mobilisés d'ici à la fin de 2016 au titre du premier accueil, de l'hébergement d'urgence, de l'aide forfaitaire aux communes. Ils seront mobilisés aussi pour renforcer les effectifs de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides - OFPRA -, que nous n'avons eu de cesse d'augmenter depuis 2012, de l'Office français de l'immigration et de l'intégration - OFII - mais aussi de l'Éducation nationale, qui doit assurer l'accueil des élèves et des parents, l'apprentissage du français et la transmission de nos valeurs républicaines. »

Source : compte-rendus des débats de l'Assemblée nationale, 16 septembre 2015


Au total, au regard à la fois de l'incertitude planant sur le nombre de demandeurs d'asile supplémentaires que la France pourrait devoir accueillir en 2016 et en 2017, et de l'imprécision du financement européen et du financement national, le budget proposé pour 2016 pour la présente mission est, à ce stade, un budget largement sous hypothèque.

Cette dernière ne pèse d'ailleurs pas seulement sur la présente mission, mais également sur les autres missions qui concourent à la politique d'immigration et d'accueil des réfugiés, en particulier le logement, l'éducation nationale, et l'ensemble des systèmes sociaux et de santé (aide médicale d'Etat, couverture maladie universelle, revenu de solidarité active, etc.). 

B. L'HYPOTHÈQUE DE LA RÉFORME DU DROIT DES ÉTRANGERS

L'année 2015 a été marquée par l'adoption de la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme de l'asile. Cette loi modifie les procédures d'asile afin d'accélérer le délai d'instruction des demandes, d'améliorer la gestion du système d'accueil des demandeurs d'asile et de renforcer l'accueil des personnes réfugiées. Au 1er novembre 2015, les principales dispositions de la loi entreront en vigueur, en particulier la mise en place de la nouvelle allocation pour les demandeurs d'asile (ADA), qui remplace et fusionne l'actuelle allocation temporaire d'attente (ATA), versée aux demandeurs d'asile non hébergés en CADA, et l'actuelle allocation mensuelle de subsistance (AMS), versée par les CADA aux demandeurs qui y sont hébergés. Par ailleurs, l'orientation directive des demandeurs d'asile, sur la base du schéma national d'accueil des demandeurs, entrera également en vigueur, permettant de mieux répartir les demandeurs sur l'ensemble du territoire national et, ainsi, de désengorger certaines régions, en particulier l'Île-de-France et Rhône-Alpes, qui accueillent actuellement environ 40 % des demandeurs d'asile.

Le 23 juillet 2015, l'Assemblée nationale a adopté, en première lecture, le projet de loi relatif au droit des étrangers. Ce dernier est discuté en séance publique au Sénat à compter du 6 octobre 2015. Le projet de loi devrait ainsi être adopté avant la fin de l'année 2015 pour une entrée en vigueur en 2016.

Ce texte, dont l'ambition « limitée » a été soulignée par notre collègue François-Noël Buffet, rapporteur au nom de la commission des lois3(*), contient trois principales dispositions :

- la création d'une carte de séjour pluriannuelle, d'une durée de quatre ans, qui serait délivrée aux étrangers en situation régulière à l'expiration de leur titre de séjour d'un an, s'ils justifient de leur assiduité aux cours de langue et de formation civique ;

- la refonte du contrat d'accueil et d'intégration (CAI), qui est recentré sur la formation linguistique, dont le niveau serait relevé, pour atteindre un niveau A1 puis A2, contre A.1.1 aujourd'hui ;

- une réforme des mesures d'éloignement des étrangers en situation irrégulière, en particulier à travers une priorité accordée à l'assignation à résidence plutôt qu'à la rétention.

Même si le projet de loi n'a pas encore été adopté par le Sénat, le texte adopté par notre commission des lois va d'ores et déjà dans le sens d'une meilleure efficacité des mesures d'éloignement, notamment par un encadrement du recours à l'assignation à résidence, en encadrant la possibilité de contestation des obligations de quitter le territoire français (OQTF), et dans le sens d'un resserrement des conditions du bénéfice du titre de séjour pluriannuel.

En tout état de cause, l'adoption du projet de loi aura des conséquences sur le budget de la présente mission à deux principaux titres.

Tout d'abord, les crédits consacrés à la lutte contre l'immigration irrégulière du programme 303, qui sont composés essentiellement des frais d'éloignement et des dépenses de fonctionnement des centres de rétention administratifs, dépendront de la réalité et de l'efficacité de la priorité affichée par le projet de loi pour l'assignation à résidence au détriment du placement en rétention. Moins coûteuse, l'assignation à résidence est également moins efficace, en termes de contrôle des étrangers ayant vocation à retourner dans leur pays d'origine. À cet égard, la récente visite de votre rapporteur spécial dans le centre de rétention administratif du Mesnil-Amelot, d'une capacité totale de 240 places, l'a convaincu de la difficulté qu'il y a, au regard des nombreuses tentatives d'évasion des retenus, à assurer la sécurité et le suivi des étrangers en situation irrégulière concernés dans le cadre d'une simple assignation à résidence.

Ensuite, les crédits consacrés à l'intégration devront être renforcés en fonction de la formule finalement retenue pour le CAI. En particulier, les crédits dévolus à l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), qui organise et finance le CAI pour les étrangers primo-arrivants et les réfugiés, devront notamment dépendre du niveau de langue exigé des étrangers à la fin de leur parcours d'intégration. Votre rapporteur spécial avait, dès 2012, souligné la nécessité de relever le niveau de langue exigé des étrangers, en le passant au niveau A2, puis B1, du cadre européen de référence4(*). Un tel relèvement, souhaitable, engendrerait en effet un coût important pour l'OFII ; votre rapporteur spécial avait d'ailleurs précisé que « l'élévation au niveau A2 puis B1 n'est envisageable, d'un point de vue budgétaire, que combinée à l'instauration d'une participation financière des étrangers aux frais de formation ».

Au total, le budget 2016 de la présente mission est un budget prévisionnel soumis à de fortes incertitudes, en ce qui concerne aussi bien le financement de l'asile que celui de l'intégration. 

II. UN BUDGET TRIENNAL D'ORES ET DÉJÀ LARGEMENT DÉPASSÉ

Le plafond triennal des dépenses a été fixé en 2014, à périmètre constant, à 650 millions d'euros pour 2015, puis 652 millions d'euros en 2016 et 657 millions d'euros en 2017, comme l'illustre le tableau ci-dessous.

Votre rapporteur spécial avait souligné, dans son rapport budgétaire sur le projet de loi de finances pour 2015, l'insuffisance des plafonds pour les années 2016 et 2017. Le présent projet de loi de finances lui donne d'ores et déjà raison, les crédits de la loi de finances pour 2016 au format de la loi de programmation des finances publiques s'établissant à 703 millions d'euros, soit environ 50 millions d'euros de plus que le plafond triennal.

A cet égard, il convient de noter qu'il s'agit à la fois d'un motif de regret, qui traduit la sous-estimation chronique des plafonds triennaux s'agissant de la présente mission, et d'un motif de satisfaction, dans la mesure où ce dépassement témoigne d'un effort, certes insuffisant, de sincérité budgétaire pour la présente mission dans le projet de loi de finances pour 2016.

Plafonds des crédits des programmations pluriannuelles (périmètre constant) en million d'euros

Source : commission des finances

* 1 La clé de répartition est fonction des critères suivants : taille de la population : pondération de 40 % ; PIB : pondération de 40 % ; nombre moyen de demandes d'asile antérieures : pondération de 10 %, et taux de chômage : pondération de 10 %.

* 2 « Nach allem, was ich weiß, wird Frankreich in diesem Jahr etwa 80, 90.000 Flüchtlinge aufnehmen. Das ist sicherlich deutlich weniger als Deutschland, und diese Feststellung wird man sicherlich auch deutlich auf europäischer Ebene artikulieren müssen », Deutschlandfunk, 2 octobre 2015.

* 3 Rapport n° 716 (2015-2016) de M. François-Noël Buffet fait au nom de la commission des lois, déposé le 30 septembre 2015.

* 4 Rapport n° 47 (2012-2013) de M. Roger Karoutchi, fait au nom de la commission des finances, « L'office français de l'immigration et de l'intégration: pour une politique d'intégration réaliste et ambitieuse »

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