04 décembre 2016

ça ne finira jamais : encore un nouvel outil de verbalisation


Le dispositif s’appelle LAPI, ce qui signifie lecture automatisée de plaques d’immatriculation. L’adjoint à la sécurité Philippe Mignonet le décrit comme « un système informatique embarqué, qui permet de déterminer le type d’infraction que l’on recherche, de le faire reconnaître par le système, puis de le valider ». Concrètement, il s’agit d’une voiture siglée « police municipale » ou « ASVP » (1) et équipée, sur son toit, d’une rampe composée elle-même de plusieurs caméras. Pendant qu’un agent conduit, son collègue passager utilise l’écran tactile installé à bord : « L’agent paramètre le type d’infractions qu’il veut relever : par exemple, les voitures stationnées sur les trottoirs, sur des places pour handicapés, des passages pour piétons… Ensuite, on passe dans la zone concernée, et le système prend les voitures en photos sous plusieurs angles. Ensuite, une fois de retour dans nos locaux, un agent vérifie les infractions en mémoire et les valide », détaille le chef-adjoint de la police municipale, Laurent Delabye.

 Le dispositif est installé sur le toit de la voiture.

Autre caractéristique du LAPI : il prend en photo la plaque d’immatriculation du véhicule en faute et le géolocalise. En France, la police nationale utilise elle aussi le LAPI, mais surtout pour détecter les véhicules volés.

Pourquoi a-t-il été mis en place ?

Le LAPI a été proposé « à titre gracieux » par « un fabricant français », explique l’adjoint Philippe Mignonet : « Calais fait partie des rares polices municipales qui peuvent le tester. » Selon le fabricant en question, AFS2R (2), une trentaine de polices municipales sont actuellement équipées en France, mais seul Calais le teste gratuitement : « C’est une faveur. En échange, Calais nous autorise à tester, d’ici quelques semaines, notre nouveau radar piéton », indique un responsable.

« Calais fait partie des rares polices municipales qui peuvent le tester. »

Mis en place cet été, le LAPI sera expérimenté « jusqu’à fin janvier » : « Nous déciderons si nous l’achetons, précise Philippe Mignonet. Cela représente un certain budget - 80 000 € – qu’il faudra soumettre au vote du conseil municipal ».

Un regain de contestations ?

Sur ce point, les avis divergent. Le commissaire-adjoint de Calais, qui reçoit les lettres de contestation des automobilistes du Calaisis, estime que le LAPI circule « surtout en ville, dans les petites rues, les plus dangereuses pour les piétons ». Il a noté « un regain de verbalisations, et donc un regain de lettres de contestations », depuis la mise en place du dispositif (3). L’adjoint à la sécurité Philippe Mignonet attribue, pour sa part, le « regain de verbalisations » à une période bien spécifique : celle qui a précédé le démantèlement de la « jungle », et au cours de laquelle de nombreux véhicules étaient mal garés alentour.

Le chef-adjoint de la police municipale confirme que le LAPI est passé « plusieurs fois » dans cette zone. Mais il ajoute qu’aucune rue n’est spécialement ciblée dans Calais : « Les agents décident de verbaliser en fonction des problèmes rencontrés sur le terrain, surtout lorsqu’il y a un stationnement anarchique avéré. » Certaines rues seraient toutefois plus propices aux stationnements gênants, comme l’explique un policier municipal : « Dans le secteur des Cailloux, par exemple, où, certains soirs, les piétons ne peuvent plus passer avec une poussette. Nous intervenons souvent rue des Fleurs, rue Francia, rue Diderot… En fait, il suffit qu’un requérant nous appelle pour qu’on intervienne ».

Comment contester ?

C’est le commissaire-adjoint Étienne Churet qui reçoit les lettres de contestation sur le ressort du tribunal de police de Calais (4) : « J’en reçois quelques-unes par semaine, que j’instruis à charge et à décharge. » La plupart des cas qu’il a eus à traiter jusqu’ici n’étaient pas contestables : « Des gens m’écrivent par exemple qu’aucun panneau ne spécifiait qu’on ne pouvait pas stationner sur le trottoir. Or, il n’y a de panneau ou de marquage au sol que si le stationnement est autorisé. »

« Il n’y a de panneau ou de marquage au sol que si le stationnement est autorisé. »

Il arrive aussi que le LAPI se trompe de numéro de rue : « Mais ce n’est pas une cause de nullité. Et j’ai des photos à l’appui. » Pour Étienne Churet, « il est donc inutile de contester, sauf si ce n’est pas votre véhicule, et qu’il y a eu une erreur dans la lecture de la plaque. Mais encore faut-il pouvoir le prouver… »

Qu’est-ce que ça change ?

Pour la police municipale, c’est un gain de temps important : « En quelques secondes, on relève les infractions de toute une rue, alors qu’avant, il nous fallait deux à trois minutes pour remplir un PV », juge Laurent Delabye. Mais cela entraîne une autre conséquence, que relève un policier municipal : « Les automobilistes ont beaucoup plus de chances qu’avant de se faire verbaliser, et les demandes d’indulgence sont beaucoup plus compliquées à formuler : impossible de mentir, puisqu’on a la photo et le point GPS du véhicule. »

L’élu Philippe Mignonet dément toutefois toute « course à la verbalisation » : « Le véhicule est utilisé avant tout pour les infractions flagrantes et répétées », assure-t-il. Autre changement de taille : avec le LAPI, les agents ne sont plus contraints de circuler à pied : « Ça leur évite de se faire admonester », soutient Philippe Mignonet. Mais cette fois encore, c’est un avantage qui a ses limites, à entendre un policier municipal : « Avec le PV papier ou même le PV électronique, au moins tu descendais de ton véhicule : si le chauffeur n’était pas loin, tu faisais de la prévention. Et tu pouvais faire la différence entre un stationnement et un arrêt. Avec le LAPI, c’est impossible ».

« Machine à fric »

L’association 40 Millions d’automobilistes est partagée au sujet du LAPI. Pour son délégué général Pierre Chasseray, « c’est LA machine à cash sur quatre roues. Une machine d’une efficacité terrible, qui va faire très, très mal ! » Ce n’est d’ailleurs pas un hasard, selon lui, si les villes testent ce dispositif : « Dans les mois à venir, il va y avoir une dépénalisation du stationnement, et ce sont les villes, et non plus l’État, qui percevront désormais la redevance liée au stationnement. » Les Villes s’organiseraient donc « pour ramasser un maximum d’argent »… Mais Pierre Chasseray affiche, dans le même temps, beaucoup d’indulgence à l’égard de Calais, à qui son association a remis en mars 2015 le trophée de la ville autophile (où il fait bon rouler et stationner) : « Calais fait exception, car sa maire Natacha Bouchart a eu la bonne intelligence de mettre 95 % du stationnement gratuit. On ne pourra donc pas lui reprocher de faire de la machine à fric sur le stationnement ».

(1) Agent de surveillance de la voie publique. 
(2) Agence française de sécurisation des réseaux routiers. 
(3) Sauf depuis deux semaines : « C’est rentré dans les mœurs et ça s’est calmé », avance Étienne Churet. 
(4) Une fois le PV établi, elles transitent par un centre de traitement à Rennes avant de lui être transmises.

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