Point presse improvisé #ManifPolice pic.twitter.com/qUnGQ5oft8— Thomas Baïetto (@ThomasBaietto) 20 octobre 2016
"Les politiques, maintenant, ils vont la fermer" : des centaines de policiers crient leur colère près de l’Élysée
Pour une fois, il n'est pas parti en courant. Ses petites tours Eiffel dorées sous le bras, un vendeur à la sauvette se marre, en observant défiler devant lui des centaines de policiers, place du Trocadéro à Paris. "Pas aujourd'hui, pas aujourd'hui", lance-t-il, goguenard. Quelques agents, brassard de police au bras, éclatent de rire. "Les sauvettes, avec nous ! Les sauvettes, avec nous !", chante l'un d'eux.
Ces quelques secondes résument bien l'incongruité de la situation. Bravant leur devoir de réserve, des policiers ont défilé dans les rues de la capitale, jeudi 20 octobre, pour une quatrième soirée de manifestation consécutive. "C'est très étrange de se retrouver là, je ne ne suis pas un manifestant à la base, mes opinions, je les garde pour moi. Mais là, il y a un trop-plein", confesse Samir, 29 ans. Un trop-plein qui a débordé le 8 octobre, avec la violente attaque au cocktail molotov contre quatre policiers à Viry-Châtillon (Essonne).
Pour une fois, il n'est pas parti en courant. Ses petites tours Eiffel dorées sous le bras, un vendeur à la sauvette se marre, en observant défiler devant lui des centaines de policiers, place du Trocadéro à Paris. "Pas aujourd'hui, pas aujourd'hui", lance-t-il, goguenard. Quelques agents, brassard de police au bras, éclatent de rire. "Les sauvettes, avec nous ! Les sauvettes, avec nous !", chante l'un d'eux.
Ces quelques secondes résument bien l'incongruité de la situation. Bravant leur devoir de réserve, des policiers ont défilé dans les rues de la capitale, jeudi 20 octobre, pour une quatrième soirée de manifestation consécutive. "C'est très étrange de se retrouver là, je ne ne suis pas un manifestant à la base, mes opinions, je les garde pour moi. Mais là, il y a un trop-plein", confesse Samir, 29 ans. Un trop-plein qui a débordé le 8 octobre, avec la violente attaque au cocktail molotov contre quatre policiers à Viry-Châtillon (Essonne).
"Ils nous filent des chaussures, tu galères à courir avec"
Pêle-mêle, cet agent de la police aux frontières dénonce un "climat d'insécurité", "des zones de non-droit où notre hiérarchie nous dit de ne pas aller", un manque d'effectif, des problèmes de matériel… Quelques mètres plus loin, deux jeunes collègues développent : "Quand on démarre, pour bien s'équiper, il faut débourser 200 à 300 euros de notre poche", assure le premier. "Ils nous filent des chaussures, tu galères à courir avec alors qu'en face ils sont en basket", embraye le second.
La manière de faire leur travail ne leur convient pas non plus. "Il y a toujours cette politique du chiffre. On nous demande d'éviter certaines zones sensibles, et de verbaliser du tout-venant pour faire du chiffre", reprend le premier. "Ce n'est pas ça qui va aider le citoyen à se sentir en sécurité", appuie le second, avant de s'agacer : non, assurent-ils, la manifestation n'a pas été fomentée par le Front national.
"On est pas des moutons."
"La racaille en prison"
Sur l'esplanade, une cornemuse et une caisse claire accompagnent le spleen des policiers. Fred, 35 ans, évoque l'état d'urgence, qui impose "beaucoup de statiques" (de surveillance de bâtiment). "On ne peut plus faire nos missions de base", regrette-t-il.
Cela fait 12 ans que je suis dans la police, je n'ai jamais vu ça. Le ras-le-bol est général, Fred, 35 ans
à franceinfo
A 22 h 30, le cortège s'ébranle en direction de l'Arc de triomphe, où un "hommage" sera rendu au soldat inconnu. "Cazeneuve, t'es foutu, la police est dans la rue", "policiers en colère, policiers en colère", "la racaille en prison, la racaille en prison", scande la foule, entre deux Marseillaise et un "Ahou". Les fenêtres qui s'ouvrent avenue Kléber et la coupe de champagne levée à la terrasse de l'hôtel Peninsula sont accueillies par de vibrants "Citoyens, avec nous".
Par peur des sanctions après cette manifestation non autorisée, beaucoup de visages sont masqués. En tête de cortège, un agent arbore même un foulard à tête de mort. D'autres acceptent tout de même d'être les visages de ce mouvement "qui vient de la base" face aux caméras.
Crâne rasé, le verbe haut, un agent multiplie les déclarations. "On ne veut plus discuter, on ne veut plus des syndicats, on ne veut plus des politiques, maintenant, ils vont la fermer et nous écouter. C'est nous qui décidons, lâche-t-il, particulièrement déterminé, sous les applaudissements de la foule. Vous les journalistes, vous donnez la parole aux politiques qui vous bernent toute l'année."
Il réclame des têtes, en particulier celle du directeur général de la police nationale, Jean-Marc Falcone, qui a menacé les premiers manifestants de sanctions. "Un patron qui ne soutient pas publiquement ses effectifs, c'est grave", argumente-t-il. Les "syndicats corrompus" viennent juste après. "On veut pas des syndicats, la manifestation du 26, on n'ira pas", assure-t-il. La justice, jugée trop laxiste, et les militants qui luttent contre les violences policières ne sont pas oubliés. "Ces dernières années, toutes les réformes se font contre nous", estime un policier à ses côtés.
Quelques centaines de mètres plus loin, le cortège est rejoint par une dizaine de taxis. La sono montée sur l'une des berlines crache Imagine de John Lennon, puis J'ai embrassé un flic, de Renaud. "Même s'ils ne sont pas toujours top avec nous, on soutient la police. Sans eux, ce serait pire", explique un taxi, fenêtre ouverte.
Arrêt à quelques mètres de l'Elysée
Il est un peu moins de minuit quand la manifestation sauvage s'arrête. Avenue de Marigny, sur le chemin du ministère de l'Intérieur et de l'Elysée, des gendarmes mobiles montent la garde. "Les gendarmes avec nous, les gendarmes avec nous", scandent les manifestants, sans succès. Des tractations s'engagent. "On veut discuter avec le ministre de l'Intérieur, on veut dialoguer, l'heure est grave", argumente le meneur au crâne rasé.
Quelques dizaines de minutes plus tard, la réponse tombe. Ils seront reçus place Beauvau vendredi. "Ils jouent la montre et ils vont encore nous enc...", s'agace un policier dans la foule. "On va pas lâcher le morceau, on reviendra tous les jours s'il le faut", assure le porte-parole des manifestants. Devant les journalistes, il savoure : "On a redistribué les cartes, maintenant, c'est la base qui décide".
A l'Elysée, François Hollande n'est de toute façon pas là. Le chef de l'Etat suit la situation à distance, depuis Bruxelles, où il participe à un sommet européen. Lors d'un point presse au milieu de la nuit, le président de la République tient à annoncer qu'il recevra les syndicats de policiers "en début de semaine" prochaine.
"Je sais qu'il y a ce malaise qui est profond, qui est d'ailleurs depuis longtemps chez nos fonctionnaires de police et les gendarmes. (...) Il est très important que nous puissions donner une perspective et une réponse immédiate, assure François Hollande, et donc que les policiers sachent bien que le gouvernement et le président de la République sont dans une démarche de dialogue." Cela suffira-t-il à calmer durablement la colère des policiers ?
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