Dans les contes slaves, les Babayagas sont d’effrayantes sorcières qui vivent dans une forêt impénétrable et dévorent voyageurs et jeunes enfants. Avec un brin d’ironie, comme pour prendre le contrepied de la vieillesse, c’est le nom que se sont choisies les membres d’une association de retraitées de Montreuil. En plein centre ville, point de méchantes créatures, mais d’accueillantes dames âgées de 60 à 80 ans, installées dans un immeuble sorti de terre il y quelques semaines : la Maison des Babayagas.
Derrière la façade jaune et blanche, 25 logements sociaux destinés aux femmes modestes qui refusent de passer leurs vieux jours toutes seules. Pour le moment, elles sont sept pionnières à avoir posé leurs cartons entre ces murs encore imprégnés de l’odeur de peinture fraîche. Le projet, lui, était en route depuis treize ans. Pas de personnel soignant ni de chambres médicalisées. Ce qui pourrait ressembler à une maison de retraite n’en est pas une. C’est parce que les femmes sont les plus touchées par la précarité et la solitude que la Maison des Babayagas est née.
Cette utopie a germé dans l’esprit de Thérèse Clerc dès 1999. Assistant sa mère en fin de vie tout en gérant le tumulte de la sienne, elle a décidé, l’heure venue, de ne pas imposer cette épreuve à ses enfants. Militante féministe de longue date, Thérèse Clerc a souhaité que cette maison, fondée sur l’autogestion et la solidarité, ne s’adresse qu’aux femmes : « les hommes ne restent pas veufs, ils trouvent généralement une seconde épouse plus jeune pour s’occuper d’eux », lance-t-elle, l’œil malicieux. « Le regard de la société est différent envers les femmes : passé un certain âge nous ne sommes plus considérées », reprend Thérèse, 85 ans. Après une vie à éduquer les enfants et s’occuper de leurs maris, les Babayagas revendiquent le droit à la tranquillité et s’affranchissent des contraintes qui étaient encore les leurs quelques années auparavant.
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