18 août 2012

Crise : le cauchemar gagne...



Dans leur maison blanche blottie au bout de l'impasse, José Maria et Paqui comptent les jours avec angoisse : le 11 septembre, ils risquent l'expulsion, le fléau qui menace des milliers de familles andalouses, laminées par le chômage.

"Jamais je ne partirai", assure Paqui Vazquez. Avec son mari, José Maria Munoz, ils ont acheté cette parcelle il y a 14 ans et construit de leurs mains leur petite maison couverte de tuiles rouges à Chiclana de la Frontera, une ville de 76 000 habitants à la pointe sud de l' Espagne. Ils l'ont baptisée "Los 4 niños", les quatre enfants, un clin d’œil à la petite tribu qui s'amuse près de l'enclos de Petra, le cochon promis à être débité en jambons ou en côtelettes au mois d'octobre.

À l'époque, le couple a emprunté 66 000 euros, pour rembourser 450 euros par mois. C'était compter sans la crise, qui, en 2009, prive José Maria de son travail de jardinier. "Les traites, cela fait trois ans que nous ne les payons plus", raconte Paqui. Sans aucune ressource depuis janvier, José Maria, 41 ans, son épouse âgée de 35 ans et leurs quatre enfants, de 6 à 17 ans, ne comptent plus pour se nourrir que sur la famille et les organisations caritatives. "Parfois un petit travail se présente, de maçon ou de jardinier. Mais pour une journée seulement", ajoute José Maria, le visage vieilli avant l'âge. Paqui, elle, vend "des melons en été".
34 % de chômage

L'Andalousie, après les années dorées du boom de la construction ( Paul : dorées pour qui ? Il a fallu de gros capitaux pour créer ce boum), lié à l'essor du tourisme, a payé le prix fort quand la bulle immobilière a éclaté en 2008, entraînant toute l'économie de l'Espagne. Aujourd'hui, cette région de 8,4 millions d'habitants affiche un chômage astronomique de près de 34 %. Et pour des milliers de familles ayant épuisé toutes les aides possibles, il ne reste que l'expulsion à l'horizon. "En Andalousie, cinq familles sont expulsées chaque jour", souligne Juan José Sanchez, responsable local de la Plate-forme contre les expulsions (PAH), une organisation qui se bat pour le droit au logement.

Le 24 mai, ses militants ont bloqué une première tentative d'expulsion de Paqui et José Maria. "Nous avons obtenu un délai, jusqu'au 11 septembre", explique la jeune femme. "Mais si nous devons partir, nous ne savons pas où aller." Car avec 1 737 600 foyers espagnols dont tous les membres sont au chômage, la solidarité familiale est durement mise à l'épreuve. "Ma mère héberge déjà deux de ses enfants séparés et un autre célibataire. Ma belle-mère, c'est pareil, elle a deux enfants sous son toit. Ils n'ont pas de place pour nous", remarque Paqui.
"Aucune porte de sortie"

Pour d'autres, comme Isabel Ruiz Rodriguez, 66 ans et mère de six garçons, tous chômeurs, la descente aux enfers a aussi le visage d'un casse-tête administratif. "Je me suis portée caution pour l'un de mes fils", raconte-t-elle. Mais ce dernier, plombier comme cinq des six garçons de la famille, a perdu son travail. En même temps, il a plongé dans le surendettement : de 500 euros par mois au départ, ses traites sont passées à 1 700 euros. Et c'est aujourd'hui Isabel et son mari, invalide depuis 25 ans, qui risquent l'expulsion de leur propre appartement, payé pourtant depuis longtemps, à Jerez de la Frontera, une grande ville d'Andalousie. "Le 5 novembre, l'appartement va être mis aux enchères", ajoute cette femme au visage déterminé, dont le portrait, en coiffe andalouse, orne un des murs du petit salon.

L'aide entre générations, parfois, s'inverse cruellement, comme chez Rocio Medina, 40 ans, et son mari Eliseo Cisneros, 43 ans, peintre au chômage : c'est leur fille de 20 ans, avec sa bourse d'étudiante, qui aide cette famille de Chiclana, sans revenus, au seuil de l'expulsion elle aussi. Le même cercle vicieux du chômage et de la pauvreté semble se répéter à l'infini dans les rangées d'immeubles blancs, baignés de soleil, des quartiers populaires de Jerez ou de Chiclana.

"L'avenir ? Très noir, nous n'avons aucune porte de sortie", lâche Alfredo Martinez, l'un des fils d'Isabel. "Il faut se débrouiller comme on peut, du moment qu'on ne vole pas. Même le travail au noir, il n'y en a plus."

Paul : Nos 2 frontières sud : Italie et Espagne...
Les frontières ne sont que virtuelles depuis que la finance mène la danse !

5 commentaires:

  1. quitte à tout perdre , si j'étais à la veille d'une expulsion comme c'est le cas pour de nombreuses familles , je ferai en sorte que les banques ne puissent pas récupérer ma maison ; je la transformerai en ruine comme certains le font en amérique ;

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    1. ça ne doit pas être facile de faire cela, anonyme... Je suppose que les gens espèrent toujours pouvoir garder leur maison.
      Et détruire des années de labeur, ça doit faire bien de la peine !

      Mais oui : on n'aurait pas envie que les banquiers s'engraissent encore plus en volant le bien des pauvres gens !
      Parce que ça s'appelle du vol, ça !

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  2. On ne parle guère de la profonde misère de nos deux voisins du Sud, Espagne et Portugal. On se focalise sur la Grèce, qui est "loin d'ici".

    Nous avons en France, un nombre conséquent de nos concitoyens d'origine Espagnole ou Portugaise, mais peu de Grecs.

    L'article nous montre que la situation en Espagne est vraiment dramatique. Un taux de chômage national à 25% (chiffres officiels, quels sont les chiffres vrais ?) et en Andalousie, 34% (c'est l'extrême Sud de l'Espagne).

    On en parle peu pour ne pas affoler les moutons de France, qui se croient à l'abri. Et aussi parce que les Espagnols et les Portugais se sont montrés moins combatifs - et violents - que les Grecs désespérés.

    Que ferons nous quand ce sera notre tour ? car il viendra. Nous ferons les "carpettes" sans doute, convaincus de la "fatalité de la crise, et que seuls les bons remèdes ultra-libéraux (qui ont échoué partout) sont à prendre : privatiser, et précariser ?

    L'ami Pierrot

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    1. N'est-ce pas déjà notre tour (mais encore bien caché), ami Pierrot ? Regardons tout simplement autour de nous, le nombre de gens qui sont au RSA ou qui touchent le chômage (allocations chômages qui, selon moi, devraient d'ailleurs être plafonnées...)
      Si tout à coup, au lieu de faire enfler notre dette nationale, l'état décidait de ne plus payer les retraites, le RSA et le chômage - ou de les diviser par deux -, que pensez-vous qu'il adviendrait ?

      Chaque jour nous apprenons que de nouveaux licenciements ont lieu. Chaque jour qui passe voit les ouvriers avoir de moins en moins d'avantages sociaux(sauf dans les très grandes entreprises, peut-être... et encore !) et chaque jour nous voyons les prix des produits alimentaires et du carburant augmenter.

      La construction de l'Europe a bel et bien été une entreprise de démolition.

      L

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  3. PORTUGAL
    Echange travail contre nourriture :

    http://www.courrierinternational.com/article/2012/07/24/echange-travail-contre-nourriture

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